La Bretagne, ça vous gagne !
Chez le Breizhilien, la coupe est toujours pleine !
L'année a passé à la vitesse de la lumière, avec ses joies et ses peines, ses grands moments et ses sales quarts d'heures.
Alors que nous espérions embarquer de nouveaux convives dans le caravansérail des Alamis, la vie a décidé de glisser une méchante peau de banane sous le pied de nos amis.
Nous penserons à eux bien fort tout le long de ce formidable séjour en espérant des jours meilleurs et nous promettant de rattraper l'occasion perdue au plus vite.
Après avoir récupéré en gare de banlieue mes globe trotters tout frais débarqués du bout du monde, nous filons vers le Mont St Michel, première étape du voyage.
Le ciel est au beau fixe et la Normandie défile ses paysages verdoyants.
En cette période de pré-vacances scolaires, la campagne n'est pas encore assaillie de hordes de touristes qu'on imagine vite envahissantes au vu du nombre de gîtes, hôtels, campings et chambres d'hôtes qui essaiment leurs panneaux aux bords de chaque route.
Le Mont, comme posé en lévitation sur la baie, étale sa majesté architecturale dans un équilibre parfait, comme si le génie humain était parvenu à intégrer le rythme du ciel et des marées et à sublimer la beauté d'un espace sauvage à la lumière changeante.
Vision apaisante, conciliant le dantesque de l'ouvrage technique de cette dentelle élancée vers le ciel ancrée à la rudesse brute de son socle de granit.
Mais les nécessités du tourisme mondialisé vous imposent rapidement les détestables stéréotypes du parcours à gnous habituels où les marchands du temple et leur circuit Ikéa affichent la vulgarité de leurs stands bariolés comme un miroir de bordel et où s'empilent les si typiques poulbots, bérets et tours Eiffel en plastique !
L’omelette à patronyme vous monte le prix des œufs à celui de la truffe, les vapeurs d'essence des cars qui dégueulent leurs hordes de visiteurs vous marchent un peu sur le plaisir de profiter de ces espaces inouïs.
On se plait à rêver s'approprier ces sites grandioses en vitupérant le mammifère à Quechua, à dégager le crétin à visières, à renvoyer dans ses pénates le piétineur à claquettes...
Mais mince, c'est moi que j'décris ?!
Le touriste de masse, c'est comme le con de base, on est toujours celui de quelqu'un !
Après quelques gymnastiques intellectuelles pour s'isoler en se plongeant dans l'histoire du lieu, imaginer l'exploit de sa construction, constater que l'histoire de France aurait pu avoir raison de lui, l'on parvient finalement à s'immerger dans la beauté de l'abbaye, laissant vagabonder son regard sur l'immensité de la grève et voir la marée montante peu à peu combler les espaces jusque là disponibles aux randonneurs aventureux.
Après cette magnifique journée étape sous un soleil somptueux, il est temps de rejoindre St Malo puis Dinard où un comité d'accueil nous attend à ma plus grande surprise ! Comment ça, je suis pas au courant ?!
Si même Alain se met à me concocter des plans traquenards avec les régionaux de l'étape, à qui puis-je me fier, moi ?
Deux bouteilles sont déjà sorties.
On passe à table !
Domaine Coche Dury, Meursault, Les Luchets, 2005
Robe jaune paille.
Nez brouillon, semblant attaquer du côté obscur de la pomme pour se rafraichir rapidement sur le citron confit et finalement revenir sur des notes de fruits secs un peu bizarres.
Bouche sur un volume intéressant et une acidité sans agressivité mais qui semble quand même un peu alanguie, presque fuyante.
L'aromatique reste toujours indéniablement marquée par une légère oxydation, rarissime au domaine mais perceptible sur cette bouteille, sur une toute petite touche de noix-noisette peu intéressante.
La finale un peu tombante n'a rien d'enthousiasmante.
Honnête vin quand même mais illisible en l'état. Impossible de retrouver le domaine à l'aveugle !
Une phase ? Une bouteille en dedans ? Prémox ?
A revoir.
Domaine Georges Roumier, Chambolle Musigny 1er Cru, Les Cras, 2006
Robe très claire, presque rubis.
Nez absolument somptueux ! Toute la grandeur du pinot fin émane du verre via des senteurs géniales de petits fruits rouges (fraise des bois) matinées d'une touche végétale et épicée d'une complexité remarquable.
La bouche est croquante, délicate, sur une structure tendue et douce à la fois, sur des saveurs fruitées avec toujours ce végétal parfaitement maitrisé qui crée un équilibre assez irrésistible.
Les tanins sont parfaitement intégrés et d'une grande douceur.
Si l'on veut chipoter, on trouvera une toute petite pointe amère sur la finale qui empêche ce vin absolument délicieux de mériter de plus amples superlatifs que "ah nom di djiou, ce que c'est bon la Bourgogne à ce niveau !"
Arnaud,
Un grand merci pour ce beau moment bien trop court et tous nos vœux de réussite pour les défis qui s'annoncent !
Basculer d'un spot bruissant du tourisme mondial à l'authenticité de la Bretagne intime, cette terre de landes et de granit, où les couleurs d'émeraude répondent au bleu marine chamarré est comme une plongée apaisante.
Notre GO a tout prévu et un arrêt est au programme pour embarquer une bourriche d'une centaine d'huîtres qui feront le délice des petits déjeuners d'Alamis.
Ca, c'est juste pour vous situer le niveau du personnage, un épicurien à côté de qui je ne suis qu'un asthénique du coup de fourchette, un riquiqui de la joie de vivre, un tout petit du partage !
Et comme un seul ne suffit pas, le bon Totolouga et son sourire bonhomme aux lèvres nous attendent sur le pas de la porte.
Ce soir, c'est lui qui officie, pour les plats comme pour les vins.
Et va falloir assumer car c'est aveugle intégrale... :)o
Allez, en piste !
***
Gnamas gnamas du Breizhilien
Champagne Roederer, Cristal, 1996
Robe jaune paille peu teintée.
Le nez est précis et élégant, sur l'amande, de fines notes de pain d'épices avec une pointe évoluée, sur la peau d'orange séchée.
La bouche est tendue comme un arc mais sans aucun déséquilibre, totalement sur le fil, salivante et droite et d'une grande maitrise.
La présence d'une bulle délicate participe à donner beaucoup de finesse à ce bel ensemble vineux.
La finale s'ouvre sur des amers fins qui s'étirent longuement.
Très beau vin.
Crabe dormeur (c'est comme ça qu'on le préfère...)
Domaine Marcel Deiss, Grand Cru Mambourg, 2010
Robe sur un léger doré.
Nez ouvert, exubérant, voluptueux, sur un ensemble complexe et indéfinissable de senteurs de mandarine, fleurs d'oranger, de jasmin.
La bouche me plait moins, proposant un volume puissant assez large, avec une sucrosité imposante qui prend un peu le pas en l'état sur la trame.
L'ensemble, massif, très vineux, déroule une matière concentrée à l'aromatique très agréable, précise et généreuse.
La finale manque toutefois d'acidité à mon goût pour lui donner plus de tonus et de rythme.
Beau vin dans un style opulent.
A attendre, je pense.
Domaine Weinbach, Riesling Grand cru Schlossberg, Cuvée Sainte Catherine, 2007
Robe sur un grisé clair.
Nez fin, discret et droit, sur le citron vert, un léger pétrole et une petite pointe réduite, sur la croûte de fromage.
L'aération décomprime les senteurs qui partent alors joliment sur les agrumes.
L'équilibre en bouche est impeccablement réussi entre une matière concentrée et une très belle acidité qui produit un côté salivant et aérien.
La finale droite, savoureuse et longue appelle irrésistiblement à se resservir.
Très bon !
Domaine Morey-Coffinet, Bâtard-Montrachet Grand Cru, 2012
Robe jaune paille.
Nez marqué par de très puissantes et en l'état envahissantes notes fumées et boisées qui enrobent un ensemble plus floral.
Bouche grasse, imposante, un peu statique par son volume large qui masque une acidité pourtant présente.
L'aromatique totalement sur l'élevage prend le pas en l'état sur le vin en lui imposant une domination sans partage.
Il est impératif d'attendre en espérant que ce boisé puissant se fonde.
A suivre.
Langue de boeuf à la Raph', cocos de paimpol et radis noirs confits
Château Gazin, Pomerol, 2005
Robe grenat assez évoluée.
Nez discret, avec peu de fruit et des notes de résine de pin et de mine crayon assez nettes.
Bouche nerveuse, sur un équilibre facile entre une matière sans beaucoup de fond et une acidité qui donne au vin de la fraicheur.
Finale sans défaut mais un peu simplette.
Un bon vin mais sans magie ni même surprise, un peu trop ronronnant.
Château Ausone, Saint Emilion 1er Grand Cru Classé A, 2005
Robe profonde, très jeune, sur un grenat presque bleuté.
Nez généreux, sudiste par un équilibre fruits noirs - épices douces qui m'évoque le Rhône.
L'attaque est d'une densité impressionnante, la matière impactant le palais autant en largeur qu'en sensation de profondeur.
L'ensemble est d'une grande puissance, sur des amers présents et des tanins fermes sans être secs.
Le vin déroule un volume encore comprimé dont on sent qu'il doit se détendre, s'équilibrer avec les années, les décennies peut être.
Son aromatique reste toutefois précise, toujours sur ce côté fruits noirs bien mûrs et épices douces.
La finale est marquée par une charge tannique qui fait considérablement saliver et qui doit impérativement se fondre.
Le fruit du fond de verre vide est à se damner !
Une promesse de grand vin. Pour les petits enfants ou la maison de retraite.
Domaine du Prieuré Saint Christophe, Mondeuse, Tradition, 2005
Robe très claire, sur un tuilé transparent digne d'un Poulsard.
Nez marqué de notes résineuses envahissantes et entêtantes, sur l'encens et le poivre vert, le papier d'Arménie.
La bouche attaque sur une grande acidité qu'une matière légère peine à compenser.
Des goûts de petits fruits rouges apportent une touche gourmande mais la finale est dévorée par des amers secs assez rébarbatifs qui limitent considérablement tout plaisir possible.
A revoir.
JLC, négociants à St Emilion, Sauternes, 1973
Robe vieil or.
Nez sympathique, facile, sur le miel, la confiture d'abricot et des notes plus minérales.
L'attaque en bouche est fluide, presque diluée, offrant de jolis goûts d'orange confite mais aucune matière.
Le vin ne tient pas la distance, sans liqueur ni trame, s'effondrant très rapidement dans une finale flotteuse et amère, comme si l'on croquait une peau de Kumquat.
On me dit dans l'oreillette qu'il y aurait de l'Yquem déclassé dedans.
Z'ont apparemment bien fait !
Pas de miracle, tous les Gunthards vous confirmeront que seuls les sots ternes sont réussis sur ce millésime !
Château Gilette, Sauternes, Crème de Tête, 1983
Robe vieil or.
Nez peu avenant, réduit, sur des notes de salpêtre qui s'épureront lentement pour s'ouvrir sur l'orange confite.
La bouche est légère, agréable mais un peu simple, sur une matière de demi corps, à la liqueur faible, sur une grande acidité mais sans réserve de puissance.
La finale est sympathique car salivante et fraiche mais sa longueur est toute relative.
Honnête, sans plus.
Ça démarre très fort !
1 heure du matin, déjà des grands souvenirs à cette table familiale à la générosité légendaire !
Allez au dodo, parait que demain, y'en a un qui se lève tôt pour partir à la pêche !
Oliv