Bon, le débat s'élève d'un seul coup...
Pour moi aussi, à l'origine, la minéralité était UNIQUEMENT liée à certains arômes que Luc décrit et liste parfaitement : pierre à fusil/silex frotté, craie, mine de crayon/ graphite. Néanmoins, aujourd'hui, le mot minéralité ne se limite plus à cela. En effet, ce type d'arômes ne se retrouvent que dans très peu de vins, bien ciblés (cf. sauvignon : pierre à fusil; syrah et cabernet-franc : graphite) alors que le terme est employé pour tous les cépages, y compris par exemple un grenache blanc à 14° une roussanne de l'Hermitage en surmaturité.
Donc, la minéralité dépasse aujourd'hui l'aspect aromatique. Une belle preuve dans la dernière RVF que je feuillette à l'instant. Match amical Leflaive/Coche-Dury. Emploi du mot minéralité ou référence au minéral : 16 fois ! Et toujours dans les vins les mieux notés. A quels arômes de chardonnay élevés en barriques neuves fait-on allusion ? Pour moi, c'est un mystère. Pourtant, la sensation éprouvée et retranscrite par le journaliste est sincère et profonde. Mais que veut il exprimer ? Surtout dans des vins issus de millésimes très différents dont certains, à l'évidence, très très mûrs. Il parle d'arômes de coquille d'huître. Hors, si l'huître sens fort, sa coquille nettoyée ne sens pas grand chose, même quand on la broît. Qu'a t'il senti ? Qu'à t'il éprouvé ?
Pourquoi Jérôme et Luc (et bien d'autres et non des moindres...) rajoutent-ils les hydrocarbures ou les terpènes à la liste des arômes minéraux, alors que toutes les études sur le muscat, par exemple, montrent bien que ces arômes ne dépendent que de la date de vendange et de la façon de presser ou de vinifier ? Pour moi, ces n'évoquent en rien le minéral. Pourtant, par facilité, pour beaucoup, le vin est n'est plus qualifié d'un arôme précis mais englobé dans un mystérieux "minéral"...
Pas plus de minéralité pour moi dans les arômes animaux, sanguins ou assimilés aux métaux, pourtant souvent décris comme minéraux, comme le souligne Luc à juste titre.
En revanche, Jérôme aborde l'aspect de la fraîcheur, du fruit, de l'acidité. Il est clair que l'amateur de vin d'aujourd'hui a été un peu écÅ“uré des excès de concentrations des années 90 ou un IPT de 100 minimum était le but recherché (avant tout à bordeaux et aux USA pour tenter bêtement de séduire Bob). Une envie de fraîcheur, le désir sincère d'une acidité plus forte pour contrebalancer des concentrations naturelles, quoi de plus naturel alors ? Mais pourquoi ne pas parler simplement de vin plus acide, plus frais ? Pour cela, le travail des sols et de la vigne en vert, une vendange de raisins mûrs et non surmuris et un élevage en milieu juste ce qu'il faut réducteur apporte un réel équilibre aux vins de bonne souche géologique.
Donc, minéralité = bonne acidité ? Pour moi, cela semble correspondre en tout cas aux réflexions que j'entends ou lis. En ce qui me concerne, si je sors (à contre-cÅ“ur...) de l'aspect aromatique, je ressent parfois, surtout pour les vins blanc, une sensation plus "vive", plus "pure", plus "naturelle" qui me donne l'impression que le vin, telle une source ou un torrent, véhicule une sorte d'énergie, rare, qui me plaît. J'ai bu hier soir un champagne "substance" de Selosse qui, je l'avoue, m'a donné envie de parler de "minéralité". Cela fait il le même effet à certains ? Si oui dans quels vins ?
En ce qui concerne le reniement de notre "négritude", je trouve le sujet passionnant et fort habilement imagé. Je me permettrait de le ressortir en te citant, Jérôme. J'aime l'idée que des vignerons suivent des voies différentes et plaisent à des publics différents. Cela pourrait faire l'objet d'un forum à part entière où l'on ne pourra que regretter que plus de vignerons ne s'expriment pas. Je ne vois pas en tout cas pourquoi l'école "bourguignone" qui gagne aujourd'hui du terrain en L.R. sur l'école "méditerranéenne" toujours largement majoritaire aurait le monopole de la "minéralité". Même à plus de 15 ° et élevé en bois neuf (souvent totalement insensible dans les vins bien élevés), un grenache peut, pour moi, avoir cette netteté, cette évidence, cet éclat qui me donne envie de parler de minéralité.