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Au siège de Salon, 1997, 1988, 1976, Latour 90 en MG et Cathelin Chave 98

  • François Audouze
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Au siège de Salon, 1997, 1988, 1976, Latour 90 en MG et Cathelin Chave 98
L'histoire parle de champagne, mais ce Chave Cathelin et cet incroyable magnum de Latour 1990 sont des personnages incontournables d'un très grand moment.

Mon épouse adore le restaurant Laurent. Pour fêter un anniversaire de mariage dont on ne compte plus les années, puisqu’on aime, il est tout naturel d’y aller. Dès notre arrivée, nous nous sentons bien. Toute l’équipe est souriante et aux petits soins pour nous. Connaissant tous les plats, il n’y aura pas de surprise avec les langoustines et les pieds de porc. Je choisis un Ermitage Chave Cuvée Cathelin 1998. Lorsque j’avais ouvert ce vin pour un réveillon dans ma maison du Sud, je savais que je commettais un infanticide, mais j’ai aimé la découverte. Lorsqu’un ami présent au réveillon en partagea un quelques mois plus tard avec moi au restaurant Laurent, ce bambin avait la saveur de l’amitié. Ici, alors que je suis seul à boire, je me rends compte qu’il faut lui appliquer la formule mitterrandienne, « il faut laisser du temps au temps ». Ce vin a tout pour lui, son fruit est immense, sa générosité est hors norme. Mais laissons-lui le temps de se domestiquer. N’ayant consommé qu’une partie de la bouteille, je la conservai pour en faire profiter les amis que je vais retrouver.

Lorsque j’avais vu Didier Depond au siège du champagne Salon il y a quelques jours, c’était avant la campagne de lancement du Salon 1997. Didier m’avait demandé de ne rien dire de mes impressions sur ce champagne goûté avant l’heure. Je n’en ai rien dit. Enfin je peux parler, car à onze heures Didier reçoit un petit groupe d’amis pour découvrir ce champagne. Il y a dans ce petit cercle de dix personnes une sympathique variété d’horizons : une journaliste d’un organe local, un homme qui compte dans le comité professionnel des vins de champagne, un caviste renommé, un grossiste en produits gastronomiques de luxe, un importateur de fruits, un décorateur, un avocat et l’importateur du champagne Salon et de prestigieux vins bourguignons pour le Japon.

Dans la très jolie nouvelle salle de dégustation, nous allons goûter dix vins, mais avant nous visitons les caves de Salon, où l’on dégorge devant nous les deux champagnes que nous allons goûter à table. Didier rappelle l’histoire de ce champagne et cite les années qui ont été produites, qui sont moins de quarante sur un siècle. En l’écoutant les énumérer, je me rends compte que sur plus de quarante ans, j’ai bu tout ce qui a été produit.

La dégustation commence par cinq vins clairs de 2007. Le 2007 Mesnil 1, qui pourrait entrer dans la composition du 2007, si ce millésime est produit, a un nez très pur. La bouche est très acide, le floral est très affirmé. Le 2007 Mesnil 2, qui pourrait aussi entrer dans le Salon 2007 a un nez plus rond, floral. En bouche, l’acidité est différente. Il est plus floral et plus élégant que le 1. Didier nous indique que la décision pour le 2007 n’est pas arrêtée, mais on sent qu’une voie a sa préférence. Elle est très originale et me plait beaucoup. Je ne précéderai pas son annonce.
Les autres vins, sauf peut-être un, n’entreront que dans le Delamotte. L’Avize 2007 a un nez assez curieux, avec une bouche un peu plus simple. Il est plus buvable car il est moins marqué. Le Cramant 2007 est très pétillant. Il évoque les fleurs blanches. Il manque un peu de finale. Le Chouilly 2007 est un peu plus plat, plus animal.

Nous passons ensuite à cinq vins qui ont été dégorgés ce matin à neuf heures et non dosés. Le champagne Delamotte blanc de blancs est fait à base de vins de 2002. La différence avec les vins clairs de 2007 est spectaculaire, car on entre dans le monde des vrais champagnes. Le nez évoque le poivre et le caramel. Il est d’une très belle longueur. Le champagne Delamotte blanc de blancs 1999 a un joli nez floral, assez discret. En bouche il est très équilibré, toasté, fruits jaunes. Il est un peu classique mais très pur et très élégant. C’est un champagne qui mérite vraiment l’intérêt.
Le champagne Delamotte blanc de blancs 1985 a un nez superbe et raffiné. En bouche, il est beau et glorieux. Son attaque est splendide et le corps évoque le carambar et l’amande grillée. Ce beau vin a une forte minéralité.

Le champagne Salon 1997 a un nez discret mais noble, minéral et iodé. L’élégance en bouche est d’une grande évidence, et l’on entre de plain pied dans le monde de Salon. Très pur, très concentré il va évoluer. Sa trame est belle et son final affirmé, il évoque les fleurs blanches, l’iode, la pêche blanche. Il est résolument féminin, ce que Didier traduit ainsi : le 1996 est Cary Grant et le 1997 est Audrey Hepburn.

Le champagne Salon 1988 a le nez du 1988 que je connais par cœur. Le caramel est là. En bouche il est typé, fumé, avec un petit côté animal. Ce n’est pas le plus grand 1988 que j’aie bu, mais il faut rappeler qu’il n’est pas dosé.

Nous nous dirigeons vers la jolie salle à manger du premier étage où abondent les souvenirs d’Eugène Aimé Salon et des dîners prestigieux où Salon fut à l’honneur. Il fait si beau que l’apéritif au Salon 1997 est bu le long des vignes de la parcelle magique qui fait ce vin rare. Et sur des gougères et tuiles au parmesan, le 1997 commence à montrer sa personnalité. Féminin et racé, il l’est sans conteste. Mais sa personnalité va se former encore et il choisira de l’amplifier.

Le jeune chef d’un restaurant local a réalisé un repas d’une grande qualité. Voici le menu : crème brûlée de foie gras, carpaccio de Saint-Jacques, vinaigrette légère, pressé de légumes et rouget / risotto de homard Arborio, émulsion de crustacés / Filet de veau français printanier / cœur de parmesan 36 mois / financier aux amandes effilées, concassé de pistache et coulis d’abricot. Tout est bon délicat et de goûts précis. Il fallait bien cela pour les vins remarquables de ce déjeuner.

A table, le champagne salon 1997 fait sa mue et le gamin devient adolescent. Il affirme une puissance qu’il avait cachée jusque là. Il est absolument superbe sur le rouget, précis sur la coquille crue et en opposition avec le foie gras, car l’accord ne se fait pas. Il revit avec le risotto et le homard, plat remarquable.

Le Château Latour 1990 en magnum me laisse sans voix. Ce vin est d’une perfection absolue. On ne peut pas imaginer que ce vin puisse être meilleur que ce qu’il nous offre ainsi, sans l’ombre de plus infime défaut. Le vin est parfait, combinant une race, une distinction qui le place au plus haut niveau de la hiérarchie bordelaise, mais il y rajoute une joie de vivre simple qui est confondante. Il va sans dire que dans l’échelle parkérienne, c’est un 100 qui doit couronner ce vin. Alors, avec ma bouteille rapportée de la veille du restaurant Laurent, ne vais-je pas faire une erreur en le faisant servir maintenant ? Eh bien, la nuit plus le voyage jusqu’ici lui auront fait du bien. Le vin frappe tout de suite par un fruit incroyable. C’est confondant de générosité. Et ce qui me fait un immense plaisir, c’est que l’on peut passer du Latour au Chave et inversement sans avoir le moindre sentiment qu’ils se repoussent. Ils sont opposés mais s’acceptent. Le Latour est magnifiquement noble, le Cathelin est fruité, généreux et chantant d’une voix d’enfant. Deux splendides expressions du vin rouge. En terre champenoise, c’est du bonheur. Nous revenons au Salon 1997 sur le parmesan délicieux et, signe important, le champagne ne démérite pas après le passage de ces deux rouges de compétition. Il va même jusqu’à creuser son sillon dans nos papilles pour affirmer : j’existe et je suis là.

Pour le dessert, le Champagne Salon 1976 en magnum dégorgé en cave devant nous montre une couleur dorée magnifique. Rien n’est plus beau que cet or. Je le sens alors que la bulle éclate dans le verre et ce sont des milliers de grains de cassis qui se brisent dans cette odeur. Le champagne est grand, car 1976 est grand. Mais la fatigue des papilles commence à jouer, et le plaisir s’émousse.

Les cartes de visite s’échangent, les promesses de se revoir se forment. Sous le soleil qui montre enfin son nez après tant de grisailles printanières, nous avons la sensation d’avoir vécu un grand moment. Le baptême du 1997 est convaincant. Le boire sous le signe de l’amitié est un cadeau de plus.


Cordialement,
François Audouze
16 Avr 2008 22:06 #1

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  • Thierry Debaisieux
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Un très beau texte! Un grand Merci pour ce beau récit ;)

Le Cathelin 1998, comment a-t-il été conservé entre les deux lieux de dégustations dont la date et l'heure ne sont pas précisées...

D'avance, merci pour les informations complémentaires.

Bien cordialement,
Thierry
16 Avr 2008 22:17 #2

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J'ai pris le Cathelin 1998 au restaurant Laurent, ouvert à 20h30 et rebouché à 22h30 hier. Mis debout dans ma voiture, je l'ai transporté ainsi jusqu'à Mesnil sur Oger. Il a été débouché de nouveau à 13h aujourd'hui et bu vers 14h30. Il a bénéficié de 16h d'oxygène de plus, et sans doute d'un petit remue-ménage, même si ma voiture est plutôt confortable.

Ce temps supplémentaire lui a fait du bien.
Ce qui explosait en bouche c'est un fruit gigantesque, un fruit rouge et noir.

Mais il serait raisonnable de le garder en cave encore au moins dix ans. J'en ai encore. Je vais les garder.


Cordialement,
François Audouze
16 Avr 2008 22:42 #3

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François,

Merci pour cette réponse.
Et pour les infos sur l'évolution entre les deux dégustations...

Bien cordialement,
Thierry
16 Avr 2008 22:53 #4

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Dégusté il y a quelques mois (mais pas en magnum ;)) Latour 90 est un vin immense , avec un fruit , un gras et une finesse de grain exceptionnelle ...à mon goût un sommet absolu également .

"Mes goûts sont simples : je me contente de ce qu'il y a de meilleur ". O.Wilde
16 Avr 2008 23:47 #5

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Thierry, un restaurant drômois propose Cathelin 98 et 00 à un prix hallucinatoire. Restaurant 2 macarons au Miche...

La certitude tue, le doute te préserve.
17 Avr 2008 00:05 #6

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Prix dans le bon sens du terme, cela s'entend !

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17 Avr 2008 08:38 #7

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Et c'est quoi ce prix cher ami de ce Cathelin ?

La quintessence de la quintessence... dans mes rêves car je n'ai jamais goûté de vins de Chave, mais Ça, c'est un vin qui me fait réver !

Lui et Rayas 78, ce sont 2 vins pour lesquels je ferais de gros efforts :D
17 Avr 2008 23:02 #8

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Chut!!!!! Sébastien. Ce sont des choses à ne pas trop ébruiter(:P)
18 Avr 2008 09:22 #9

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Gael,

tu peux me contacter par mail privé et je t'exposerai la chose !

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19 Avr 2008 00:04 #10

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