4 mousquetaires et 3 grâces composaient notre petite assemblée ce samedi soir, à deux pas des vignes rougissantes de Haut-Brion.

Quelle belle soirée. Franche rigolade mais néanmoins, une juste attention portée aux mets et aux crus sous la baguette d'un Loup malicieux.
Une fois n'est pas coutume, nous n'avons pas été trop mauvais dans l'identification des vins (tous servis à l'aveugle), et ceci est à lier à la beauté des crus, justement servis (age, température et accords), et représentatifs de leur terroir. Est-ce cela la typicité?

Rillettes de thon, ceviche de dorade aux agrumes

Trimbach, Frederic Emile, 2001. TB
Ce riesling, dont tout le monde a identifié le cépage grâce aux arômes pétrolés, joue une partie d'une grande beauté et en parfait accord avec le plat. Le vin est très sec, et répond tres bien à la rillette.
Le nez est particulièrement complexe, avec un léger grillé, un peu d'iode, des agrumes et notamment de l'orange qui cause parfaitement à la subtile marinade de la dorade.

Domaine des Aurelles, Aurel Blanc 2004 B+
On part là dans le Rhône et meme plus loin avec ses aromes tres expressifs de fruits (poire, peche) et un coté lactique. La bouche grasse demeure fraiche. Je le trouve un peu too much question puissance.

Pavé de cabillaud en croute d'herbes, p'tit brocoli

Beaune Clos des Mouches Blanc 1985, Drouhin TB+
Waouh! Magnifique palette d'aromes sur un fond de beurre et de grillé qui s'est fait discret et laisse place à un tres joli parfum terriblement complexe et seducteur. Tres belle bouche.

Poulet au Sauternes, grenailles pour canailles

Chateau Suiduiraut 1997 TB/TB+
Voila ce que j'adore comme Sauternes. Tres belle sève, élégance, nez formidable et enjoleur, liqueur tres juste. La bouteille a été finie à 7 et c'est mérité, voila un vin qui offre le meilleur de Sauternes et c'est inégalable. L'accord avec le volatile se fait avec beaucoup de naturel, d'ailleurs on se ressert.

Un trou italien (ou Corse) vient à point pour anoncer le seconde mi-temps et disposer les bouches pour les rouges.

Joli plateau de fromage qui fait 5 tour de table, ch'tite pat de coing qui déboule pour un sixième tour

Chateau Lafleur 1985 B+
La robe évoluée, les aromes de moka positionnent ce vin en rive droite mais son austérité incite à monter en Médoc. Ce Lafleur nous la joue costume 3-pièces cravatte serrée et balai dans le beep. Un vin qui en impose mais un poil chiant.

Clos des Papes 2007 B+
Le nez me semble tres avenant, avec une pointe de sauge et un peu d'alcool. La bouche est pleine et un poil simple. C'est une relative déception au vu de sa réputation

Vall Llach 2004 Priorat TB
La robe est réellement noire. Le nez est tres joli, avec des notes d'herbes seches. La bouche massive demande à s'assagir, ce n'est pas vraiment policé! C'est tres tres bon néanmoins dans un style un peu Thierry Mugler.

Clafoutis aux figues

Cave de Rasteau VDN
Pas pris de note mais (énorme coup de bol) je l'ai identifié à l'aveugle, la fierté m'a alors fait perdre toute attention analytique.

Comme j'aime ces soirées si sympathiques lors desquelles il semble qu'on fait honneur à ces bouteilles en les entourant d'attention, de jolis plats et de beaucoup de bonne humeur

Benji

Et bien tu enchaines les degustations benji ...

En effet...

J'espere que les CR (en LIFO) viendront aussi vite

Joli CR Benji

Je partage ton avis général à propos de tous ces vins. Je présenterai un CR prochainement, il me faut juste un peu plus de temps que toi pour l’écrire, n’étant pas aussi performant…

Cordialement,
JU

p.s. Le priorat est un Vall Llach.

Bravo Benjamin pour ce compte-rendu et ces talents de dégustateur. Comme vous, j’ai tout aimé une fois de plus.

Frédéric Emile 01 s’est montré fidèle à sa réputation et doit pouvoir affronter les années à venir sereinement.

Les Aurelles 04 a directement révélé ses arômes de poire et a non moins spontanément fait songer à un vin de Roussanne. Le terroir fut beaucoup plus délicat à identifier.

Le Clos des Mouches 85 fit honneur à la Côte de Beaune sans marquer son âge.

Suduiraut 97 fut un maître-vin de Sauternes comme à chaque fois. J’aimerais le comparer à son alter-égo de 1997, je veux parler là du grand vin de Haut-Grillon. Suivez mon regard…

Avec Lafleur 85 je me serais cru sur l’île de Pâques face à ces antiques statues de granit, si impressionnantes, si spirituelles… et si mystérieuses.

Clos des Papes 07 m’a fait revenir au domaine cet été. Un vin d’équilibre, majeur, frais, pur et distingué. La grâce.

Val Llach 04 est un peu trop puissant mais je m’en suis accommodé avec une folle joie, encore.

Quant au Rasteau 06 rosé vdn, alors chapeau bas, maître Benji. Mais terminer par une telle puissance ???

Quand aux mets j’ai fait quelques râtés que vous me pardonnerez tous je l’espère. Je pense que j’aurais dû glisser quelques copeaux de coing sous la chair du poulet et en faire fondre également dans la sauce au Sauternes. Nul n’a deviné de quel cru il s’agissait ( Cantegril 2007 ).

Merci pour votre gentillesse.

-1- Domaine Trimbach, cuvée Frederic Emile 2001, Alsace (100% Riesling)
- Robe limpide et brillante couleur or.
- Nez d’une intensité aromatique franche mais sans trop d’intensité pour un riesling ; loin d’être discret cependant, le vin exhale des parfums de citron confit et d’iode légère, accompagnés de notes empyreumatiques discrètes, complexifiant le nez de ce vin très apprécié.
- La bouche présente une attaque franche et directe. Le vin est sec, très droit de par une acidité tranchante soutenant le cru tout en longueur. L’équilibre est parfait et le fruité généreux est marié à une certaine salinité fort plaisante. Très joli vin.
Noté 94/100 il est l’image que l’on peut se faire d’un très beau riesling sec.

-2- Domaine des Aurelles, Cuvée « Aurel » Blanc, Coteaux du Languedoc 2004 (100% Roussanne)
- La robe est limpide et laisse percevoir de très légers reflets orangés, cuivrés.
- Le nez s’offre discrètement puis libère des parfums de poire fraîche et mûre, typiques du cépage ainsi que quelques senteurs lactiques.
- La bouche est grasse et puissante. Les fruits à chair blanche sont retrouvés et sont accompagnés par un certain alcool qui les porte jusqu’en fin de bouche.
Noté 91/100 il est un vin puissant un peu alcooleux mais vraiment bien fait.

-3- Domaine Drouhin, Cuvée Clos des Mouches Blanc 1985, Beaune (100% Chardonnay)
- La robe est or sombre
- Le nez est élégant et généreux. Il exhale des fragrances de beurre, de truffe, de tilleul ainsi que des parfums de noisettes grillées très élégants et dignes d’un grand cru.
- La bouche est à la fois grasse et dynamique, d’un équilibre que l’on juge idéal. On apprécie la parfaite cohérence apparente entre le bouquet et les saveurs. Le vin présente beaucoup de volume, une belle densité et une finesse non moindre. Une très belle réussite que ce vin d’une vingtaine d’années pouvant encore promettre un bel avenir. Une référence pour l’appellation Beaune. Bravo.
Noté 95/100

-4- Château Suduiraut 1997, Sauternes (90% Sémillon, 10% Sauvignon)
- La robe est couleur or tirant vers le vieil or.
- Le nez est élégant et généreux ; il dégage des senteurs de figue, d’ananas, d’abricot bien mûr et de pain grillé, le tout avec une précision manifeste.
- La bouche est d’une belle race, elle offre un sucre non encore estompé d’un soupçon et soutenu par une acidité et une salinité parfaitement bien accordées. L’abricot confit domine les autres saveurs qui viennent comme assaisonner, complexifier, le joli fruit. Beau gourmand, magnifique.
Noté 96/100

-5- Château La Fleur, Pomerol 1985 (majorité merlot)
- La robe est marquée par l’évolution tout en conservant une importante profondeur.
- Le nez est très élégant et d’une belle intensité aromatique ; il offre des parfums de pruneau, de cerise cuite, de moka ainsi qu’une très belle fraîcheur.
- En bouche, le vin se montre structuré et droit. L’équilibre est beau, les tannins sont assez nombreux et à peine asséchant en final, ils forment la structure du vin, soutenant un joli fruit bien conservé. Ceci étant, le vin est d’un style très classique, sec, aristocratique. Il manque un peu de charme et de douceur, il manque de sexy pour être grand…
Noté 91/100

-6- Clos des Papes 2007, Châteauneuf-du-Pape (Grenache 65 %, Mourvèdre 20 %, Syrah 10 %, 5 % autres cépages)
- La robe est profonde, le disque juvénil.
- Le nez offre d’intenses parfums de pruneau bien mûr, de fruits rouges et de noyau de cerise.
- La bouche est puissante et douce. Une légère attaque sucrée dérange un peu à ce stade de la dégustation. Le vin met en avant un fruit superbement mûr et croquant mais avec un léger sucre qui demande au cru quelques années de garde avant d’être dégusté.
Un potentiel manifeste, un grand vin en devenir, un vin décevant aujourd’hui.
Noté 92/100

- 7- Vall Llach, Priorat 2004 (65% Cariñena, 20% Merlot, 15% Cabernet Sauvignon)
- La robe est opaque, couronnées par un disque fin et grenat.
- Le nez offre une sensation crémeuse et délivre des parfums de mûre, de cassis et de thym.
- La bouche est concentrée, puissante et crémeuse. Les fruits noirs sont bien mûrs et soutenus par une structure certaine qui devra s’assagir avec le temps.
Un très joli vin déjà fort agréable à déguster et qui saura être apprécié durant de longues années.
Noté 96/100

-8- Cave de Rasteau Vin Doux Naturel (VDN).
- La robe est rosée.
- Le nez est intense, à la fois floral et fruité et délivre des sensations sucrées très nettes.
- En bouche, le caractère sucré du vin est manifeste, le vin est également alcoolisé et fruité. Puissant et gourmand un vin de plaisir sans grande complexité manquant un peu de tension et de fraîcheur.
Noté 88/100

Les vins étaient assez faciles à analyser car ils étaient très lisibles et d’un classicisme avéré. Un exercice ludique que nous avons mené en groupe et avec grand plaisir !! Des vins d’âges mesurés et servis idéalement. Bravo Loup.

J’ai beaucoup aimé le Clos des Mouches, il me (nous) a rappelé quelques grands crus d’ages respectables que nous avions dégustés ensemble il n’y a pas si longtemps. Un très beau vin auquel il ne manque rien !

En deuxième position, le riesling. Un vin d’une grande pureté et au charme manifeste. L’archétype du beau riesling sec pas si évident à dénicher.

Le Suduiraut est très au dessus de ce que la critique (RP) en dit. J’ai été réellement enchanté par ce Sauternes. Un grand vin !

En rouge, le Vall Llach prend selon moi le dessus. Un vin d’une grande profondeur et d’un charme presque insolent. Comme le dit Benji, l’on retrouve dans ce vin la structure tannique du Carignan, mais cette dernière ne m’a pas dérangé tant l’environnement est riche et étonnamment sans opulence réelle… C’est ma deuxième rencontre avec ce millésime de Vall Llach, mon sentiment reste le même. Bravo.

Un grand Merci à nos hôtes pour cette formidable soirée réussie en tout point. Gastronomie, Vin, Amitié et Rigolade au rendez-vous pour ne citer que les grandes lignes. On refait ça ce week-end ??

Cordialement,
JU

Merci pour les compte-rendus instructifs.

Le positionnement de Lafleur 1985 juste derrière Suduiraut 1997 était osé et peut constituer un élément d'explication de son relatif manque de charme en bouche.

C’est une excellente remarque Charles. Notre Patrick avait cependant prévu la chose et nous a servi un breuvage ainsi qu’une gourmandise pour effectuer la transition « Sauternes/Pomerol » en douceur… Il pense à tout ce vieux Loup.

Je suis tout à fait d’accord que l’environnement en vin est important à considérer lorsque l’on goûte. Il en est de même pour l’environnement gastronomique !!
Le Lafleur serait peut être mieux ressorti s’il avait été servi après un autre bordeaux du même millésime… ( ?) En fin de repas, comme nous n’étions pas très nombreux, nous avons pu revenir allègrement sur les vins de nos choix. Le Lafleur conservait son expression stricte… On ne lui fait pas de réel reproche qualitatif, c’est plutôt stylistique et donc très subjectif…

Cordialement,
JU

Toutes ces observations sont fort plaisantes à lire. Comme le remarque justement Charles, déguster un vin rouge après un liquoreux était quand même périlleux. Mais l’expérience était tentante de goûter un Sauternes avec une belle volaille ainsi que le suggèrent nombre d’esthètes.

Pour le passage aux crus rouges suivants, j’ai pensé qu’un trou « Sarde » fait de sorbet au citron vert et d’une légère coulée de limoncello permettrait l’épuration du palais. Bien m’en a t-il pris ? Personne n’a été gêné par la suite.

La remarque de Ju est également très pertinente.

Bien à vous tous.

... une belle volaille...

Loup, Julien,

J'imagine fort bien Suduiraut 1997 sur la belle volaille.

Question existentielle : la volaille a-t-elle véritablement apprécié son compagnon ?

Je suis fou de l'association avec le nec plus ultra de Volnay (Caillerets) ou de Chambolle (Amoureuses).

Le jus de la volaille, quelques pommes de terre fermes juste sautées. Rien d'autre.

Tout le vin et la volaille offerte. Aucun artifice.

Une belle volaille, un beau pinot, les trois grâces alanguies, Lafleur au mousquet...

Superbe accord que cette volaille du sauternais. Je n’aurais pas tenté de moi-même cette expérience et j’ai bien tord ! Les pommes de terre justes cuites avec quelques brins de romarin étaient un réel délice. La régalade!!

Pour la prochaine volaille, on tente un pinot noir. Je suis certain que tous seront enthousiastes!! ( ?) Nous aurons alors une pensée pour toi Charles.

Cordialement,
JU

Je suis fou de l'association avec le nec plus ultra de Volnay (Caillerets) ou de Chambolle (Amoureuses).

Dans son livre de recettes "Le meilleur et le plus simple de Robuchon" il y a une recette de poulet rôti toute simple servi avec son jus réduit. Robuchon suggère un Volnay pour accompagner ce plat. Depuis j'ai rejoint le club des addicts du Volnay avec une volaille rôtie cuite simplement.

Cependant, le Sauternes avec ce volatile est une expérience à tenter en effet. Il faut que la peau soit bien grillée et croustillante. En tous les cas c'est sur cette texture de peau que je trouve qu'un liquoreux s'exprime bien. Sur la chair j'ai plus de mal mais en mangeant la peau joliment rôtie avec la chair, ensemble, l'accord en devient étonnant et très gourmand.

Patrick

Judicieuse réflexion !

Patrick,

J'ai lu dans un premier temps... le Sauternes avec sa volatile !

Sans aller jusqu'au Sauternes, nous pratiquons régulièrement le poulet rôti avec un Jurançon moelleux, de type Ballet d'Octobre de Cauhapé ou Marie Kattalin.
C'est délicieux.
Le coté croustillant, voire légèrement salé de la peau est effectivement déterminant pour la qualité d'accord avec le Jurançon.

La prochaine fois, nous tenterons la version Volnay.

Jean-Paul

Pour la prochaine volaille, on tente un pinot noir. Je suis certain que tous seront enthousiastes!!

D'autant que l'ami Guy vient de réassortir sa collection de Vosne...

Faire un accord met-vin uniquement avec le croustillant ou le mou .. Je comprend toujours pas .....
Si le sauterne ou un liquoreux va bien avec une volaille c'est surtout à cause du gras "caramélisé" du poulet, de sa viande séche qui ne dissipe pas trop de justosité ce qui permet un équilibre avec le sucre et l'alcool du vin sans trancher. Le coté aussi "roti" du poulet rappelle bien le "roti" du raisin botrytisé. Ensuite la chair du poulet accepte très bien les arômes sucrés ce qui permet un accord dans la surenchére mais sans discontinuité. Le sel s'accorde bien avec un liquoreux aussi...