Suite des aventures bourguigonnes d'un petit groupe d'amateurs :
2-Domaine Buisson-Charles :
A Meursault, tout commence par… un tour dans les vignes !
P. Essa prend place à bord et nous amène « à flan de Côte ». Le paysage se remet doucement d'une ou deux journées de brouillard.. Le vent de sud a radouci l'atmosphère. Tout est calme.
Le temps de se glisser entre les maisons du village, et très vite, nous nous retrouvons au milieu des plus beaux climats. Le paysage ressemble un peu à ces cartes postales aux teintes, sépia parfois, recolorées de gris-jaune pour les murets, de rouge-brun pour la vigne sans feuilles ou de bleu-jaune pour le pâle ciel pastel de l'automne.
Parfois, une fumée blanche s'élève d'un brûlot au cÅ“ur d'une vigne dans laquelle deux vignerons s'affairent pour préparer la taille.
Voici les Santenots, puis d'autres parcelles en Village, le Tesson et les Casse-Tête, les Gouttes d'Or, pour partie en Premier Cru et non loin de là , le cÅ“ur de Meursault, ces Premiers Crus qui mériteraient d'être Grands, si toute une génération locale n'avait omis (volontairement ?) de le revendiquer : Genevrières, Perrières, Charmes…
Poussons vers le sud-ouest, voici Puligny-Montrachet, les Combettes, les Demoiselles, le Cailleret et puis le cÅ“ur de la Côte : Montrachet, Chevalier-Montrachet juste au-dessus, Bienvenues-Bâtard-Montrachet, etc… Le temps de se souvenir de cette sorte d'émotion qui vous surprend en dégustant certains de ces nectars.
Le temps également de prendre connaissance et de deviser sur le sujet qui nous interpelle souvent : un petit chemin sépare deux climats, deux vignes, pourtant, d'un côté, la bouteille la plus prestigieuse est vingt fois plus chère que le Premier Cru le plus proche !…
Chacun fait part de son étonnement… ou de son scepticisme ! C'est selon…
Retour au domaine pour une dégustation sans notes très précises, tout simplement, en devisant de choses et d'autres et en compagnie de quelques meursaltais de passage :
- Meursault Village, puis Tessons et Premier Cru Charmes 2002 :
Les vins ont été préparés (déplacés, pas autre chose…) en vue de la mise, prévue la semaine suivante. Ils sont donc un peu sur la réserve, mais sur une dominante faite de finesse et d'une « légèreté » toute relative. Fine constante aromatique sur la poire. Le Charmes montre un plus de structure et d'élégance.
- Bourgogne Pinot noir 2003 :
- Pommard 2003, puis Volnay Santenots 2003 :
Deux vins qui montrent du fruit mûr. Encore en devenir, mais la structure semble au rendez-vous…
- Meursault Village, puis Tessons, Gouttes d'Or et Charmes 2003 :
Découverte crescendo qui souligne bien les nuances, pour des vins dans leur prime jeunesse.
- Meursault Tessons 2001 et 2000, Gouttes d'Or 2001 :
De fines nuances les séparent à ce stade. Point de lourdeurs et un potentiel de garde à ne pas oublier.
- Meursault Village 1999 :
Un vin plus « disponible ».
- Pommard et Volnay Santenots 2001 :
Il me semble avoir entendu Patrick faire discrètement part d'un léger scepticisme à propos de l'évolution des 2001… Difficile à apprécier sans les comparer à des stades différents. S'agirait-il d'une phase de fermeture ?…
La nuit annonce son retour sur Meursault… Nous prenons congé. La deuxième étape de notre périple nous a permis de mesurer tout ce qui sépare un domaine familial (et meursaltais !) d'une grande maison de négoce beaunoise. Pas nécessairement en terme de qualité des vins (les certitudes ne sont pas les mêmes !), mais pour la sensation qu'une famille locale est totalement liée (notamment lorsqu'elle doit faire face à certains évènements…) à sa terre, celle où est plantée sa vigne, mais aussi à l'état des chemins qui y serpentent et jusqu'à la préservation de certaines friches. On comprend mieux aussi l'attachement exprimé parfois, de voir certaines orientations se prendre ensemble, collégialement, par toute une communauté, comme la revendication ou non d'une promotion dans un classement, ou encore la pratique de tarifs un tant soit peu cohérents entre voisins. Attachante, cette Bourgogne !
Nous deviserons encore longuement, tout au long de cette soirée, autour d'une table presque ronde, au Caveau des Arches, à Beaune, où les Å“ufs en meurette, les escargots et autres recettes locales ne nous laissèrent pas sur notre faim !
3-Domaine Bruno Clavelier, à Vosne-Romanée :
Sur la route des Grands Crus, l'imaginaire se laisse porter par le paysage. Chaque « montagne » est un peu comme le sommet d'un crâne gigantesque de moine, tout droit sorti d'un récit façon Pantagruel, ou Gargantua, avec la friche et les arbres au sommet, comme une tonsure ! Toutes ont un profil différent, avec parfois, les coups de tondeuse de la vigne qui grignote vers le haut…
Il est facile de trouver la maison de celui qui est devenu l'un des fers de lance de ce coin de Côte de Nuits. Il est tôt, nous arrivons à l'heure et après les présentations qu'il se doit, nous découvrons le caveau de dégustation, puis, plus bas, les deux chais dont le plus grand est assez récent.
La passion de Bruno Clavelier est affleurante, dès les premiers échanges. Pourtant, si j'en crois le constat fait les jours précédents, lors d'appels téléphoniques pour préparer cette rencontre, il est souvent au caveau, quand la vigne le lui permet, au contact de sa clientèle, venue parfois de très loin. Un ambassadeur de son pays, lui aussi !
Un domaine de 6,5 ha, composé de terroirs qu'il veut avant tout magnifier. Une démarche bio (Ecocert) en attendant la biodynamie, à confirmée par le label Demeter.
Une superbe dégustation nous attend, entrecoupée de moments de pédagogie toute simple, à l'aide, par exemple, d'un schéma tracé à la craie (comme une coupe de la Côte, la même, ou presque, que celle de l'Atlas de Benoît France !) sur la table ovale (tiens donc !) du caveau !
- Vin de table blanc, Les Glapigny :
Jolie mise en bouche pleine de fraîcheur et d'élégance.
- Vosne-Romanée – Les Hauts de Beaux Monts 2001 :
Dans le haut du vignoble, versant adret. Sur un sous-sol de calcaire (oolithes). Mûr ! Joli nez fruité. Tannins assez fermes, présents, un peu monocordes. Bouche nettement minérale.
- Vosne-Romanée – La Combe Brûlée 2001 :
Parcelle en Village, près de la route de Concoeur, sur l'adret également, au plus haut du vignoble, surplombée par les sapins, parfois gélive et qui voit très peu le soleil en hiver ! A noter le retard à la floraison par rapport au reste du vignoble, mais presque entièrement comblé au moment des vendanges. Le prototype d'un « vin de combe » ! Sur calcaire à chailles, sorte de « gros Å“ufs fossiles » répartis dans la roche, qui dégagent une nette odeur de brûlé, façon silex, quand on les casse).
Un style droit, pur, tendu. Trame serrée. Une sorte de rigueur monacale ! On est pieds nus sur la pierre usée du cloître !…(ça vous inspire des trucs, le vin, parfois !…). Très beau !
- Vosne-Romanée – Les Hautes Maizières 2001 :
Sous les Suchots, non loin de la Romanée-St Vivant. Dans ce secteur, on trouve plus d'argiles issues de la décomposition des calcaires, plus bas dans la pente, à hauteur du village. Plus de fruits rouges, tendres. Les tannins confèrent un volume qui laisse une sensation de souplesse. Essentiel pour pouvoir comprendre toute la différence avec les précédents.
- Gevrey-Chambertin 1er Cru – Les Corbeaux 2001 :
Parcelle aux portes du village (200m), près de Mazis et sous les Ruchottes. Le nez révèle très vite une belle complexité, soutenue par une grande finesse. Belle matière souple. Tannins joliment présents. Un autre registre, à ne pas négliger !…
- Chambolle-Musigny 1er Cru – La Combe d'Orveaux 2001 :
Parcelle presque la plus proche de la combe, mais qui, en fait, porte mal son nom !… Elle jouxte les Petits Musigny, en Grand Cru, juste au-dessus du Château des Clos Vougeot. Ce n'est pas un vin de combe !
En fait, le grand-père de B. Clavelier, peu enclin aux formalités, négligea de réclamer le classement en Grand Cru de sa parcelle, lorsque l'INAO transforma les dénominations 1ère Cuvée, 2è Cuvée et Tête de Cuvée en appellations Villages, Premier Cru et Grand Cru. Exposition S-E. Nez très expressif, intense. Matière pure et solide. Les tannins sont assez fins et joliment persistants. Un beau potentiel de garde (15 ans ?!) pour exprimer, plus tard, rondeur et gourmandise. Ne dit-on pas qu'il s'agit là d'un « vin pour les femmes » ?…
- Vosne-Romanée 1er Cru – Aux Brûlées 2001 :
Près d'une des parcelles de Richebourg (Les Varoilles). Retour vers une belle subtilité qui évoque une sorte de fraîcheur. Les tannins sont élégants et nets. Beau vin !
- Vosne-Romanée 1er Cru – Les Beaux Monts 2001 :
Dans le même secteur, au même niveau dans le pente. Superbe nez exprimant, là aussi, finesse et élégance. Beaux tannins persistants, révélant une matière agréable qui doit être assez proche de la définition de l'on donne parfois à Vosne-Romanée : associer finesse et puissance, au risque d'être paradoxal !
- Nuits-Saint-Georges 1er Cru – Aux Cras 2001 :
A mi-pente, dans le prolongement des Grands Crus de Vosne et des Malconsorts.
On parle assez peu des arômes avec B. Clavelier, mais là , le nez exprime de très belles notes de cerise noire, mûre. Les tannins sont assez étoffés, souples, mais le retour démontre toute leur présence et une certaine fermeté. Assez rigoureux. Intéressant néanmoins !
- Corton Grand Cru – Le Rognet 2001 :
La Montagne de Corton est vaste ! Le Rognet est sur la commune de Ladoix-Serrigny, à l'extrémité de la ligne des Grands Crus, au-delà des Renardes et du Clos des Corton-Faiveley.
Nez très mûr ! De la pureté sur un caractère nettement calcaire. Consistant, solide avec une minéralité et une tension soutenues. Peut paraître assez austère à ce stade, mais le potentiel semble assez évident.
- Vosne-Romanée 1er Cru – Aux Brûlées 2002 :
Dégusté sur fût. Arômes très mûrs ! A la fois tendu et complexe, avec un volume d'une belle souplesse. Semble un petit plus « extrait », à moins que l'on distingue là tout le volume des vins du millésime ?!
- Vosne-Romanée 1er Cru – Les Beaux Monts 2002 :
Mûr, sur les fruits noirs. Bouche solide et forte. Les tannins montrent une certaine fermeté, mais avec une densité révélatrice. Solide et droit.
- Vosne-Romanée 1er Cru – Les Beaux Monts 2003 :
Tendance « brûlée », surmurie ! Nettement toasté à ce stade (pain grillé), mais sans extravagance. Une structure souple assez étonnante ! Reste tendre et persistant ! Aurions-nous de grandes surprises devant nous avec 2003 ?…
Après çà , la route est moins longue et vous pouvez la reprendre!... Les souvenirs de plus de cinquante vins dégustés en quarante-huit heures vous ouvrent l'esprit sur un "nouveau monde"!
Non que l'on est persuadé de tout savoir d'une telle région en si peu de temps, mais qu'elle est surtout d'une grande richesse et d'une absloue diversité!
PhR
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