Chers Amis,
Permettez-moi de jouer les avocats du diable dans cette discussion un peu trop.. consensuelle.
Que les 1GCC soient d'un mauvais rapport qualité/prix est une évidence. Cependant, en dehors des vils spéculateurs capitalistes, qu'il convient d'ailleurs de brûler haut et court sur la place publique
et des buveurs d'étiquette (qui ne doivent en réalité représenter qu'un faible % du volume des ventes), de nombreux autres amateurs font parfois des sacrifices financiers importants afin de pouvoir accéder à une certaine idée de l'excellence. Car, sur la durée, les meilleurs 1GCC restent des vins de rapport qualité/qualité incomparables. En effet, quels sont les "seconds couteaux" qui, aujourd'hui et à millésimes équivalents, peuvent régater qualitativement avec des Mouton 1945, Cheval-Blanc 1947, Latour 1961, Mouton 1986 ou autre Petrus 1989? Plus les années passent, plus l'épreuve du temps se révèle généralement impitoyable pour ceux qui, dans leur jeunesse, se voyaient tout en haut de l'affiche!
Si tu as eu l'occasion de participer à des dégustation horizontales à l'aveugle mélangeant des 1GCC et les autres, tu devras reconnaitre que, dans la plupart des cas (il y a bien entendu des exceptions), il se dégage quelque chose d'indisciblement différent de certains verres. Or après avoir enlevé les chemises des bouteilles, il s'avère très souvent, que les verres en question cachaient quelque nom prestigieux faisant partie du TOP 5 et assimilé. En outre, lorsque la qualité des 1GCC n'est clairement pas à la hauteur de leur réputation (Mouton 1990, Château Margaux avant 1978), le marché n'est pas idiot et fixe des prix très clairement en deça de la moyenne historique du cru. Donc ta théorie de prestige de l'étiquette ne fonctionne pas pour ces cas précis.
A mon avis, ton exemple entre Yquem et Rieussec n'est pas représentatif. Je me gratte le crâne pour trouver un exemple concrèt de millésime dans les 30 dernières années, où un autre liquoreux aurait été supérieur en qualité à château d'Yquem. Lorsque la qualité était jugée insuffisante, la famille de Lur-Saluces procédait à un déclassement entier de la récolte (l'avenir nous dira si les nouveaux propriétaires feront de même dans le futur.. mais ceci est un autre débat).
Il faut également relever que la valeur d'investissement des 1GCC s'avère être un excellent investissement dans le temps. Ainsi, je connais de nombreuses personnes qui financent leurs achats actuels en revendant au fur et à mesure, la moitié de leurs stocks de Grand Crus des grandes années. Est-ce vraiment une stratégie si idiote que ça? Celui qui a acheté 12 Mouton 86 à 350 FF il y a 18 ans peut aujourd'hui en revendre six à 350 EUR aujourd'hui, ce qui lui permettra d'acheter "gratuitement" dix à douze 1GCC de n'importe quel millésime récent ou entre six et huit 1GCC des années 2000 et 2003.
Enfin, il faut tenir compte du marché des vins plus anciens. Tous ceux qui fréquentent les sites de ventes au enchères en ligne ou les salles de ventes, constatent quotidiennement les prix atteints par certaines grandes bouteilles dans les grandes années. Ces cotations sont librement fixés au gré de la loi de l'offre et la demande. Donc pas question d'accuser quiconque de pratiquer une quelconque inflation sur les prix. Ainsi, il est normal que les prix des 1GCC et assimilés de la récolte 2004 s'ajustent plus ou moins au niveau de leurs pairs de niveau équivalent des millésimes plus anciens. Donc, si la qualité des 2004 est comparable par exemple à celle des 1995 (exemple théorique restant encore à démontrer..), il est normal que les prix des 2004 se situe au même niveau, déduit peut-être de la valeur du calcul des taux d'intérêts composés sur la période de 9 ans séparant les deux millésimes.
Pour illustrer ce propos d'un exemple chiffré, si Latour 1995 vaut aujourd'hui 120 EUR sur le marché, la valeur de sortie de Latour 2004 devrait en théorie valoir 98 EUR en tenant compte d'un taux d'intérêt composé constant de 2.5% sur la période de 9 ans entre 1995 et 2004. Pour affiner le calcul, il faudrait bien entendu appliquer les taux d'intérêt réels durant ces années, mais ça donne déjà une première idée.
Etiquettement vôtre,
Alain