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Le goût de bouchon

  • Yves Zermatten
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Le goût de bouchon a été créé par Yves Zermatten

voici le copier-coller d'un article trouvé surle web (je ne sais plus où)

C'est la fin de la partie de ping-pong entre bouchonniers et vignerons, chacun accusant l'autre d'être à  l'origine du goût de bouchon. Car il existe aujourd'hui une technologie (française) permettant de retrouver l'origine de ce défaut vieux comme le liège. Si l'on ne sait pas guérir un vin atteint, on peut donc désormais identifier le coupable (charpentes, liège, chlore...) et prévenir d'autres contaminations.

Enquête : Florence Kennel

La faute au chlore
Tous les goûts de bouchon se ressemblent au nez : c'est une vague odeur de moisi ou de liège humide, plus ou moins intense, qui ne s'estompe pas à  l'aération du vin. Les chimistes, eux, définissent le goût de bouchon par la présence de molécules spécifiques, les trichloroanisoles (TCA). Et ils désignent un seul coupable : le chlore. Le mécanisme est simple. Une molécule de chlore rencontre une moisissure et des phénols, des composés aromatiques. Trois ingrédients qu'on trouve facilement à  l'état naturel : le chlore est partout. Dans les produits désinfectants, sur l'écorce du liège (en raison de la pollution), dans les insecticides passés sur le bois des palettes... Quant aux phénols, on les trouve aussi partout (ils sont à  la base des arômes, des tanins, des couleurs...). Mis en présence de moisissures, le chlore les attaque et se dégrade avec les phénols par réactions chimiques en chaîne jusqu'à  aboutir à  des composés aromatiques extrêmement désagréables : les trichloroanisoles ou TCA. Le plus terrible, c'est qu'il suffit d'une dose microscopique de TCA pour que le vin (ou la pomme, ou la boîte de sardines... Les TCA sont partout) sente le bouchon. Le seuil de détection par le nez humain des TCA est en effet de 5 nanogrammes par litre, soit 5 milliardièmes de gramme par litre. " C'est une molécule très puissante. La seule à  avoir un seuil de détection encore inférieur, c'est l'arôme de poivron vert ", commente Gérard Michel, directeur scientifique de C-Traces, un labo d'analyses spécialisé dans la recherche de TCA.

Eliminer une "bombe en puissance"
En fait, à  ces doses-là , on est aussi à  la limite de détection des appareils de mesure... Alors il n'est pas évident, compte tenu des nécessaires marges d'erreur, de dire à  partir de quel moment un bouchon est réellement contaminé. " Quand un bouchon affiche zéro TCA, c'est parfait ", explique Antoine Gasser, président d'Embag, bouchonnier beaunois. " Au-delà  de 10 nanogrammes, c'est une bombe en puissance. Mais entre 2 et 10 nannogrammes, qui peut dire s'il faut éliminer le lot ? " Alors les bouchonniers décident d'un seuil (variable selon le degré d'exigence des clients). Chez Embag, par exemple, un bouchon possédant plus de 4 nanogrammes de TCA est refusé et renvoyé au fabricant. Mais les seuils varient selon les entreprises, ce qui explique que les uns se plaignent de recevoir 10 % de balles bouchonnées, et les autres 5 %. Toutes les études réalisées sur le sujet (les premières remontent à  1973, date de la découverte des TCA) indiquent un taux moyen de bouchons contaminés de 5 %. Avec tout de même de fortes disparités, car les estimations de vins bouchonnés ou de bouchons contaminés par les TCA sont de :
* moins de 2 % selon l'industrie du liège
* 3,3 % selon le CIVB (interprofession des vins de Bordeaux)
* 5 à  6 % selon le BIVB (interprofession des vins de Bourgogne)
* 8 à  9 % selon une coopérative champenoise

Haro sur l'aggloméré
En fait, tout le monde s'accorde à  dire que les bouchons défectueux sont plus fréquemment des agglomérés (et le taux de bouchonnés peut monter alors à  20 % !). Le coupable, c'est la colle (elle se dégrade en TCA). Mais le mal ne vient pas que des bouchonniers. Les vignerons, eux aussi, ont leur part de responsabilité, et de nouvelles techniques d'analyse permettent aujourd'hui de montrer les coupables du doigt. Les TCA (trichloroanisoles) sont extrêmement difficiles à  sourcer, car il n'y a pas plus volatil et envahissant qu'eux. Par exemple, vous ne verrez jamais un bouchonnier déboucher dans une grande pièce une fiole de TCA synthétisé. Il aurait trop peur que des molécules s'échappent du flacon et se collent partout. De même, un vin en tonneau peut contenir des TCA, mais le vrai coupable sera la charpente du chai : c'est pourquoi en 1996, château Canon a employé les grands moyens pour décontaminer ses chais. La toiture a été abattue, et, pendant deux mois, les cuves ont vécu au grand air, le temps qu'une vieille charpente de chêne soit achetée auprès des Chartrons à  Bordeaux et montée en remplacement. Les nouvelles techniques d'analyse permettent aujourd'hui de différencier clairement le type de chloroanisole trouvé dans les vins à  problème : si c'est du 2,4,6 trichloroanisole, on peut accuser le bouchonnier, car cette molécule est typique du liège. Mais si le labo trouve du 2,3,4,6 tétrachloroanisole, c'est l'atmosphère qui est en cause, car cette molécule est familière du bois, et le vigneron devra inspecter sa cuverie avant de crier au scandale.

Fini la dégustation d'eau bouchonnée !

Les nouvelles méthodes d'analyses sont à  la fois simples et extrêmement sophistiquées. Pour tester un lot d'un bouchonnier, on prend 20 bouchons qu'on fait macérer dans de l'eau pendant 24 heures (quand c'est un vin, on le dilue à  1/3.) Dans tous les cas, on place le liquide obtenu sous l'extrémité d'une fibre extrêmement sensible, qui capte toutes les molécules émises par le produit. On relie ce piège à  molécules à  un chromatographe en phase gazeuse, qui identifie chaque molécule en donnant sa proportion, et le tour est joué. C'est autrement plus précis que la méthode à  l'ancienne : on prend 100 bouchons répartis en lots, on fait macérer les lots, on goûte l'eau, si l'eau sent mauvais le lot est contaminé... Un dernier mot sur une méthode d'élimination du goût de bouchon qui avait été annoncée à  grands frais l'an dernier par un bouchonnier : les micro-ondes. L'idée était simple : en chauffant les bouchons, on volatilisait les TCA, qu'il suffisait ensuite d'aspirer et de filtrer. " C'est un bon moyen d'extraire les principes volatils ", reconnaît Gérard Michel. " Mais est-ce que les TCA ne vont pas aller se redéposer ailleurs ? Effectivement, quand on sait combien les TCA voyagent bien et vite, on peut s'inquiéter. En résumé : on ne peut rien faire quand ils sont installés, mais au moins on sait aujourd'hui d'où vient le mal.

Yves Zermatten
29 Sep 2002 17:34 #1

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