Ouhhh mais le débat est bien relancé !!! Chouette !!!
Pour être constructif, je pense qu’il faut distinguer quatre niveaux de questionnements :
- le SOUS-sol (pas le sol ni la roche mère) a –t-il une influence quelconque sur les caractéristiques (goût, texture…) du vin ?
- si oui, le sous-sol apporte-t-il des caractères organoleptiques au vin ? Bref, est-ce possible à la dégustation, pour un humain, d’apprécier ces caractéristiques ?
- si oui, est-ce possible pour ce même humain de pouvoir dire que le sous-sol est à l’origine de celles-ci ?
- et enfin si oui, est-ce possible de pouvoir poussez l’analyse jusqu’à définir le profil du sous-sol du vin dégusté ?
Pour la première question, il me semble que le niveau de connaissance scientifique actuel nous permet d’être dans l’affirmatif. J’apporterai juste deux nuances :
1-je ne dirais pas « a » une influence, mais « peut avoir » une influence.
2-je ne dirai pas « sur le vin », mais « sur le raisin ».
A mon sens, plus que la nature du sous sol, c’est la présence ou l’absence d’un STRESS qui est le plus important. Je m’explique. Tout dépend où la vigne va développer son système racinaire et va puiser ses éléments nutritifs et hydriques, notamment ses minéraux nécessaires à sa croissance. Si on propose à la vigne un sol (couche superficielle) à la fois « épais », « enrichi artificiellement » et « dénaturé », on obtient un raisin neutre, standardisé, une « matière végétale de base » (à l’image des végétaux produits sous serre sur solution nutritive artificielle). Par contre, la vigne sur un sol pauvre va devoir développer son système racinaire non pas à l’horizontal, mais à la verticale pour aller puiser dans le sous-sol le nécessaire à sa survie. Selon la nature du sous-sol, les apports ne seront pas les mêmes, et on sait que le goût tire parti de la diversité acquise par le végétal. De plus, selon la porosité du sous-sol, un stress hydrique peur s’ajouter, et on connait bien l’influence de ce stress sur la qualité du raisin. C’est donc le Stress qui permet cet « échange » (à noter que la qualité du porte greffe dans la qualité des échanges a aussi son importance). Il y a donc ici un petit avantage pour l’agriculture bio, voir en biodynamie. Ayant discuté il y a peu de temps avec Marc KREYDENWEISS, vigneron alsacien investi dans la biodynamie depuis 1989, il m’a parlé d’une étude réalisée sur son AOC sur le système racinaire entre une parcelle « classique », une en bio et une en biodynamie (même cépage), les différences étaient flagrantes !! Donc, à mon sens, le goût de terroir oui, mais pas toujours
Cette diversité est-elle perceptible d’un point de vue sensoriel ? Il y a ici effectivement débat. Beaucoup de professionnels affirme que la nature du sous sol influence certaines caractéristiques organoleptiques (c’est-à-dire perceptible par l’homme) du vin, structure et couleur : silice (finesse et légèreté), calcaire (couleur, rondeur, corps, puissance, souplesse), argile (fermeté, structure, couleur soutenue). Les arômes quant à eux seraient plus influencés par les états de surface du sol : finesse de la terre, présence d’éléments grossiers minéraux et de débris organiques, végétation... Sans compter bien sûr l’influence du pédoclimat (exemple de la présence de galets sur l’accumulation de la chaleur favorisant la concentratrion en sucres et donc la puissance des vins) et de l’hydrologie (rôle drainant des graviers). Bon, jusque là, je suis prêt à suivre
Sur les deux dernières questions, j’ai de forts doutes. Tout simplement par ce qu’avec le vin, nous ne parlons pas d’un végétal brut, mais d’un produit issu d’une transformation. Le processus de vinification apporte alors de nombreuses autres caractéristiques au produit fini. Est-il alors possible de distinguer les caractéristiques issues du fruit (et encore plus en dehors de ses propres caractéristiques) de celles issues du processus de vinification et d’élevage (et je passe les autres facteurs : climat, relief, exposition, altitude…) ?
Mais, au fait, est-ce si important de vouloir distinguer ? A-t-on besoin de tant sophistiquer les analyses au risque de nuire à la spontanéité des sensations perçues ?