Ma maigre expérience a été enrichie cette semaine par deux dégustations. Un chambolle 1er cru les amoureuses de Roumier 1989 et un chambertin de Trapet 1999.
Pour le chambolle, sorte de ragout de ris de veau aux carottes, jus truffe et très finement relevé de réglisse et gingembre. Ensuite, fine lamelle de bœuf cru, purée d'artichaut et lamelles de truffe. Pour finir, côtelette de chevreuil, accompagnée d'une manière de ratatouille aux lardons. Le vin est extraordinaire, assurément un de mes plus grands bourgognes (avec un clos de la roche 1997 de Dujac). Le bouquet est précis, net, la bouche ronde, suave, mais sans mollesse. Dans le palais retentissent milles saveurs, d'une complexité folle, qui défient toute analyse. En fait le vin est un, entier, harmonieux, mais il change sans cesse, il est complexe, il surprend à chaque gorgée. La finale est quelque chose que je ne suis pas près d'oublier : le vin "monte", s’envole presque, ouvre ses ailes, et une symphonie de champignons, d'épices, fruits rouges et noirs, feuilles, humus, cuir, cacao/café et que sais-je d'autre retentit et n'en finit plus. Je ne sais pas ce qu'est la queue de paon, mais je veux bien croire que j'en ai fait l’expérience ce soir là. Autre miracle, c'est le chant d'amour entre le vin et les plats, chacun mettant en valeur un de ses innombrables aspects : les épices avec la réglisse et le gingembre du premier plat, la truffe avec le carpaccio, et la ratatouille du chevreuil lui donne des ailes.
Hier soir, le chambertin de Trapet, dans un restaurant de poissons. Les accords avec les plats, bien que parfaitement passables, n’auront pas le niveau du premier soir. Le vin est carafé une heure avant le plat principal. Le nez est très intense, beaucoup plus avenant que le chambolle, mais il n'en a pas la finesse. La note dominante est un café/fumé très insistant, que l'on retrouve en bouche, elle aussi très intense. Le vin est imposant, viril, et ne manque pas de charpente. Les tannins sont agréables, et la finale "monte" aussi (je n'ai jamais eu cette impression avec les bordeaux), mais elle est moins "ouverte" que le chambolle, moins chatoyante. En fin de repas, quelques notes plus fruitées ressortent, mais le café/fumé reste dominant. Le vin me plait beaucoup, mais je ne ressens de loin pas la magie du chambolle : je le trouve en fin de compte assez monocorde, monotone et simple. C'est le premier chambertin que je bois, et je m’attendais à plus de complexité pour un grand cru aussi mythique, venant d'un vigneron somme toute assez réputé.
Ma question est donc la suivante: cette différence entre ces deux vins provient-elle du l'âge, du millésime, du terroir, de l'élevage ou d'une combinaison de ces facteurs. Je soupçonne que le côté torréfié provient de l'usage de barriques neuves et fortement toastées, bien que le sommelier m'assure que c'est la marque d'un grand pinot issu d'un grand terroir, mais j'ai de la peine à le croire. Est-ce que dans dix ans le chambertin aura assimilé son élevage, qui se sera intégré au fruit pour aboutir à un vin harmonieux comme le chambolle?
Merci pour vos commentaires.
Philippe Petalas

Philippe,

Pour t'apporter un début de réponse ...

A mon sens, tu as déjà dégusté deux vins diamétralement opposés : d'un côté la finesse et la féminité du Chambolle et de l'autre, la virilité et la structure du Chambertin.

D'un côté, un vin à sa maturité (1989) : parlant, ouvert, développé aromatiquement, fondu dans sa structure.
De l'autre un vin qui en est très loin (1999) : peu diversifié aromatiquement, à l'élevage semble-t-il encore présent (notes de café), moins complexe.
Le Chambertin peut encore attendre et montera sans aucun doute vers sa maturité mais pas dans le même caractère.

Bienvenue dans la diversité bourguignonne.

Olivier

Philippe ,

Il se trouve que j'ai bu une Amoureuses 1988 de chez Christophe Roumier cette semaine . Pour être honnête , j'ai été un peu déçu par une bouteille moyenne , un peu terne . J'en parle d'autant plus facilement que c'est un de mes domaines et un de mes climats préférés ! De plus Christophe a très bien réussi ses 1988 : les 3 bouteilles de Bonnes Mares Vieilles Vignes 1988 que j'ai bues sont au panthéon de mes grandes bouteilles .
Certains 1999 sont fermés depuis 2 ans , rien d'inquiétant .

Olivier Mottard a écrit:
.
> Le Chambertin peut encore attendre et montera sans
> aucun doute vers sa maturité mais pas dans le même
> caractère.
>
> Je préfèrerais " doit impérativement ...les Grands 90 ne sont pas encore au mieux , donc pour ces 99 ...il faudra être patient !

bu il y a peu un chambertin 1988 vieilles vignes TRAPET(étiquettes rondes) qui s'est avéré absolument époustoufflant sur un sanglier:puissance,complexité des arômes et longueur +++/LE TOP de la soirée qui dépassait grandement l'hermitage 1988 de CHAVE et même le HAUT BRION 1990.
à encaver longuement!!!
amitiés
bertrand