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Viticulture
Débanaliser la taille d'hiver
Au moment de la taille d'hiver se décide le potentiel de récolte de l'année à venir et se profile la qualité du prochain millésime. Chaque parcelle, et plus encore chaque souche, est à considérer.
La taille d'entretien ou de maintien de la vigne se déroule en hiver, lorsqu'il ne reste plus que les bois aoûtés. Elle est terminée avant débourrement. Sinon, au printemps, les pleurs de la vigne (la sève) s'écoulent des plaies de taille. Les principes de base de la taille ont peu changé depuis l'Antiquité. Aujourd'hui deux grands types de taille sont pratiqués : la courte, à coursons (en gobelets ou à cordon de Royat) et la longue, dite en Guyot.
La viticulture en Languedoc-Roussillon a beaucoup évolué depuis plus de vingt ans. La taille de la vigne a suivi le mouvement. Pour une meilleure maîtrise du rendement et la production d'un raisin de qualité, les vignes en Guyot ont été largement transformées en cordon de Royat. Ce changement a entraîné, dans bien des situations, un gain en degré alcoolique potentiel, une avance de la maturité de quelques jours, une homogénéité de maturation (et donc des contrôles de maturité plus précis), une teneur plus élevée en matière colorante pour les cépages rouges et, au final, des vins plus gras, plus charpentés et dotés d'une plus grande complexité aromatique. L'arrivée dans la région de nouveaux cépages, comme le cabernet-sauvignon, le merlot, la syrah, le chardonnay, etc., et l'arrachage « d'anciens » comme le carignan, a rendu nécessaire la sensibilisation et la formation des viticulteurs aux techniques de la taille en cordon de Royat.
« Pourtant, la pratique d'une taille courte ne suffit pas à elle seule au réglage qualitatif d'une production », prévient Jean-Pierre Argillier, responsable de la filière viticole à la chambre d'agriculture de l'Hérault et qui a beaucoup Å“uvré à l'amélioration de la conduite du vignoble languedocien. En effet, aujourd'hui, avec un peu de recul, les connaissances s'affinent et les préconisations se nuancent. « On s'aperçoit qu'un Guyot double dans certaines situations conduit à plus de qualité qu'une taille courte », constate Jean-François Vrinat, Å“nologue conseil à Saint-Clément-de-Rivière, au nord de Montpellier. La région offre une diversité étonnante de combinaisons, entre les sols, les micro-climats et les cépages mis en jeu. C'est pourquoi, il faut vraiment raisonner au cas par cas.
La taille responsable de la qualité
De chaque millésime, on tire des leçons. Les cuvées 2000, que l'on souhaitait exceptionnelles et de longue garde, ne seront pas toutes à la hauteur. Dans certaines zones du moins, un manque de maîtrise de la taille en est sans doute responsable. « On constate une dérive de la taille vers de plus gros rendements », s'inquiète Patrice Poupelin, jeune vigneron coopérateur et vice-président de la cave de Puisserguier, près de Béziers. La cave, qui vinifie 160 000 hl en coteaux-du-languedoc, saint-chinian et vins de cépages, a mis en place une politique de qualité pour les vins destinés aux marchés export et grande distribution. Des vins issus de parcelles sélectionnées et contrôlées chaque année, respectant un cahier des charges précis. « Il est à nouveau nécessaire de rappeler les bases ! », constate Patrice Poupelin. à€ la veille de débuter la taille, les 500 adhérents de la cave ont donc écouté Jean-Pierre Argillier, venu rappeler les avantages d'une taille courte.
Quelques erreurs sont souvent faites lors d'une taille en cordon de Royat. L'une des plus répandues est la disposition de coursons trop longs (deux à trois bourgeons francs) sur des bras trop courts. Cette erreur répétée entraîne au fil du temps la déformation progressive du cordon en « chandeliers » aux branches inégales. Ce qui rend, entre autres choses, le palissage des sarments difficile. Une coupe systématiquement trop rase entraîne aussi des problèmes.
Enfin et surtout, le choix du type de taille est un autre écueil. Il doit être fait en fonction de l'ensemble des données du terroir. Le cordon de Royat ne convienten effet pas à toutes les situations. Lorsque la fertilité des yeux de la base est insuffisante, dans des parcelles dégénérées par des viroses du court-noué ou situées en zone froide (altitude supérieure à 350 mètres) ou encore s'il s'agit de clones peu fertiles.
« Avant de s'engager dans un autre type de taille, il convient de le tester sur une ou deux rangées », prévient Jean-Pierre Argillier. Les vignes dont le peuplement à l'hectare est faible, dont la végétation est mal maîtrisée et capte trop peu de soleil, celles qui sont rongées par des maladies tenaces (comme l'esca, l'eutypa…), qui sont souvent victimes du gel ou bien celles irrégulièrement entretenues, ne devraient pas non plus faire l'objet d'une taille courte.
Les principes de la taille évoluent
« Plus que le rendement, c'est la vigueur de la souche qui détermine en priorité la qualité de la récolte », estime Jean-François Vrinat. Il convient de déterminer en priorité le nombre de bourgeons, associé à la vigueur de la souche. Ces paramètres fixent aussi le niveau de maturité et le degré potentiel de la récolte à venir. La taille consiste à régler la charge en bourgeons par souche. Mais aujourd'hui, pour un cordon de Royat, on conseille de raisonner différemment. Non plus par souche, mais entre deux pieds de vigne. Le nombre de bourgeons est donc calculé sur deux demi-bras. Le tailleur se représente les futurs sarments et décide de conserver 8 à 9 bourgeons. Il choisit ceux qui sont bien placés, qui laisseront la charpente de la souche dans l'alignement du rang, qui permettront au soleil de pénétrer, ainsi qu'aux produits phytosanitaires pulvérisés, et enfin, qui faciliteront l'accès aux grappes pour les vendangeurs. Une bonne taille engendrera aussi une réduction des temps de travaux à la vigne (en particulier, grâce à une mécanisation facilitée, pour des opérations comme le relevage ou la récolte), et abaissera donc les coûts de production.
La taille est une des rares tâches pénibles pas encore mécanisées. La vigne peut toutefois être prétaillée mécaniquement. De plus, certains utilisent un sécateur pneumatique, plus dangereux mais qui permet d'éviter les tendinites. Le tailleur doit être expérimenté et avoir l'esprit vif, car il lui incombe de prendre plusieurs décisions qui conditionnent l'avenir du cep en un minimum de temps. On considère que dans une parcelle prétaillée, 700 à 800 souches peuvent être taillées en une journée de huit heures.
Cécile Savin
ou alors sur
2 -Â La taille de la vigne
   La vigne est une plante pérenne, capable de vivre plus de cent ans, mais lorsqu'elle est abandonnée à elle-même, elle retourne rapidement à un état quasi sauvage. Cet état est celui d'une liane, dont les longs pampres grimpent en s'accrochant avec leurs vrilles sur n'importe quel support. Afin de contenir cette exubérante végétation, le viticulteur soumet tous les hivers les pieds de vigne à une taille sévère.
   Cette taille va conditionner la quantité de végétation et de fruits que le pied de vigne portera à la belle saison. Il s'agit donc là d'une étape essentielle.
   En Bourgogne, il se pratique plusieurs modes de taille différents : une taille longue, le Guyot, la plus pratiquée, et des tailles courtes, comme le cordon de Royat, simple ou double, voire l'éventail, rarissime.
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Résultats de 4 années d'expérimentation sur un clone de pinot noir, au Domaine du Mont Battois : Â
Mode de taille Rendement en Kg/cep Degré alcoolique Acidité Totale (g/l )
Guyot 1.53 9.0 % vol. 8.0 g/l (en H2SO4)
Cordon de Royat double 1.28 10.0 % vol. 7.6 g/l (en H2SO4)
Cordon de Royat simple 1.42 10.0 % vol. 7.3 g/l (en H2SO4)
à‰ventail 1.43 9.4 % vol. 7.5 g/l (en H2SO4)
   On constate que les tailles courtes permettent l'obtention de rendements plus faibles, avec une meilleure maturité du raisin. De plus, lorsque le cep est bien formé, la taille en cordon de Royat permet d'étaler la végétation dans tout l'espace disponible. Cela permet de bénéficier de tout l'ensoleillement et d'éviter un entassement du feuillage favorable aux maladies cryptogamiques.
   Les tailles courtes présentent un avantage supplémentaire : c'est celui de ne causer que de petites plaies. Guérissant plus vite, ces plaies perdent plus rapidement leur sensibilité à l'infection des maladies du bois que sont l'Esca et l'Eutypiose. Leur plus faible section diminue de surcroît la probabilité de contact avec les spores de ces champignons