CR:J'ai de la chance. Beaucoup de chance. J'ai déjà eu l'occasion, ici, de célébrer l'amitié qui nous unit à LPV Haute-Normandie. Une amitié franche, sincère et de laquelle est banni tout ego démesuré.
Nous nous retrouvons pour célébrer notre amour du vin. Ou plutôt non. Nous nous retrouvons pour le plaisir de nous retrouver et, désormais, le vin cimente nos rencontres. C'est à ça qu'on voit qu'une famille est née.
Parfois, je me dis que nous devons agacer et faire peur. Enerver par nos CR un peu trop démonstratifs, par notre façon d'aborder les dégustations. Faire peur aux LPViens qui nous lisent en nous voyant finir en slip dans le jardin, peur à nos femmes, agacer les lecteurs du coin qui aimeraient bien rejoindre notre groupe mais qui doivent se dire que
« non, définitivement, ce n'est pas pour moi ».
Je dis ça en toute honnêteté, parce que quand Gildas et Pierre m'ont proposé de « re-fonder » LPV Haute-Normandie, j'ai eu peur de la course à la bouteille, des dégustations m'as-tu vu où, sous couvert de générosité, on amène de belles bouteilles comme on filerait un os à ronger au chien. Très loin de l'idée que je me fais des rapports humains.
Il y a presque trois ans, donc, nous sommes convenus que l'humilité devait nous guider, que nous avions droit au plaisir à la condition qu'il ne nous écrase pas et que seul le plaisir de la découverte devait nous motiver. Le projet s'est concrétisé et, désormais, ces principes nous guident comme un texte sacré.
D'autres nous ont très vite rejoint : FGSuperfred fut immédiatement de l'aventure, Benoît - fantastique Benoît - que je rencontre trop peu souvent, Olivier qui partage avec Benoît une lecture assidue du forum sans vouloir intervenir, Didier et, pour finir, Franck.
Bien que Franck et sa compagne, Marie, aient été les derniers à rejoindre dans le groupe, ils en forment désormais de solides piliers. J'ai l'impression qu'ils ont toujours été avec nous. Cela fait plus de deux ans maintenant et les côtoyer est un plaisir rare. Ensemble, ils forment un couple discret, à l'écoute des autres et curieux d'apprendre ; lui fondu de vin, elle intarissable sur une autre passion pas si éloignée de la nôtre : le parfum et ses flaconnages.
Dimanche, nous étions donc invités à pendre la crémaillère chez eux. Le moment passé en leur compagnie a été mémorable sur bien des aspects. Comme une belle bouteille, ils se livrent par petites touches, se dévoilant subtilement à chaque rencontre.
Dans ces conditions, une invitation proposée par le maître du Sancerre ne se refuse pas. Surtout quand, comme moi, on est pratiquement novice en la matière. J'avoue avoir eu quelques sueurs froides lorsque Franck, m'annonça il y a quelques jours qu'il n'envisageait pas de servir de sancerre lors de cette rencontre. Comment le Grand Manitou de cette appellation pouvait-il nous réserver ce traitement de défaveur alors que nous attendions tous un voyage dans l'autre pays du pinot et du sauvignon ?
Fort heureusement il n'en fut rien et il nous offrit une des dégustations les plus cohérentes que nous ayions connue. Chapeau l'artiste. Non seulement tu sais te mettre en slip, mais en plus, tes choix sont indiscutables. Du moins en matière de vin !
Je souhaite vraiment souligner l'extraordinaire justesse de la sélection proposée, de la très grosse qualité des bouteilles servies. Une fois de plus, tous les vins ont été présentés à l'aveugle. Pas de mauvaise surprise, mais de bonnes baffes qui permettent de relativiser et, surtout, d'éviter de se prendre pour ce que nous ne sommes pas : des dégustateurs hors pair. A l'exception de deux ou trois déceptions, sur lesquelles je reviendrai, les vins mis sur la table ont été au minimum bons, souvent très bons et touchant au sublime pour une bouteille.
Place aux blancs :
0 - Pouilly-Fumé 1999, « la Demoiselle de Bourgeois » Henri Bourgeois :
Excellent mise en bouche ! Couleur bien dorée, brillante, nez champignonné, humus, bouche vive, acide, minérale, citronnée et légèrement truffée. Très joli vin, jouant sur un registre évolué. J'ai beaucoup aimé.
1 – Sancerre 2007, « Cuvée Maxime », Vieilles Vignes, Vincent et Jean-Yves Delaporte :
Couleur dorée pâle, très beau nez bien mur, très fin, fumé, citronné, minéral. Très belle attaque portée par une belle acidité et une jolie saveur de coing. Belle finale un peu fumée, j'aime vraiment beaucoup, un de mes Top 3 en blanc.
2 – Sancerre 2006, Les Monts Damnés, Gérard Boulay :
Vin d'abord plus simple, moins démonstratif, jouant beaucoup plus sur la minéralité que sur l'aspect variétal du sauvignon. Légère note d'amande douce. On n'est pas du tout sur un vin variétal. Il ne se livre que très peu en l'état, mais le 2e verre et une oxygénation plus longue dévoilent son potentiel.
3 – Sancerre 2007, « Chêne Marchand », Vincent Pinard :
Les cloches de l'enfer annoncent une opposition de terroir que j'aurais aimé plus tranchante. Livrée jaune paille, , nez un tantinet végétal avec des notes fugaces de petit pois, d'amande, de vanille. La bouche est assez grasse. Joli vin, mais pas mon préféré.
4 – Sancerre 2007, François Cotat :
La plus belle couleur de tous les blancs dégustés. Servi légèrement trop froid, la condensation donnait presque l'impression d'avoir de l'opale dans le verre ! Joli nez, un peu végétal, mais d'une grande finesse. Bouche citronnée, mais à la finale encore un peu simple. Je l'ai moins bien dégusté que le vin précédent, bien que cette bouteille soit de très belle qualité. A Attendre une dizaine d'années à mon avis.
5 – Sancerre 2000, « La Bourgeoise », Henri Bourgeois :
Belle couleur jaune d'or, nez très mûr, sauvignon classique. Bouche vive, citronnée, iodée. Vin bâti sur une très belle trame minérale, très équilibré, avec une belle finale saline. Très agréable, beau vin de gastronomie.
6 – Sancerre 2003, « Etienne Henri » , Henri Bourgeois :
Nez très fin très classe. Bouche beaucoup plus grasse que les vins précédemment dégustés. Très beau vin également.
Gildas et moi profitons d'une petite pause. Franck nous explique sa passion pour les araignées qu'il estime être
« la prédation à l'état brut. Quand ces animaux-là lancent une attaque, ils ne se trompent jamais » explique-t-il, fasciné.
Fasciné également, mais par un autre "sujet", Gildas ne peut s'empêcher un parallèle osé, mais vraiment rigolo, avec un des piliers de la petite équipe qui, je le cite
« est lui aussi la prédation à l'état brut ». :DEn l'observant discrètement, je ne peux m'empêcher d'être mort de rire.
7 – Sancerre 2007, « la Grande Côte » , Pascal Cotat :
Couleur jaune paille. Nez exotique, inhabituel dans le cadre de cette dégustation, porté par l'ananas.La bouche est vibrante d'énergie, à la fois grasse, vive, tranchante, ciselée. Un très bel ouvrage ! Dans le Top 3 également.
8 – Pouilly-Fumé 2007 « Pur Sang », Didier Dagueneau :
Le premier nez est vraiment surprenant tant l'analogie avec un riesling est criante. Mais bien vite, l'aération nous ramène vers des contrées plus méridionales.
Nez très citronné, vif, minéral, floral, affûté. Bouche d'une fraîcheur superlative, présentant encore un peu de perlant. L'équilibre est extraordinaire. Cette bouteille est dégustation seule est superbe et, comble du comble joue admirablement bien son rôle de révélateur de saveurs. Number ONE, sans aucun doute.
La sono déverse une avalanche de watts. C'est le razor's edge d'AC/DC, ouverture de la tournée éponyme. Le parallèle est frappant : on est vraiment sur le fil du rasoir.
Les rouges :
9 – Fixin 2006, « les Hervelets » , Jérome Galeyrand :
2e rencontre avec ce viticulteur dont nous avions déjà apprécié une première bouteille chez Amadeusmaldoror.
Magnifique, équilibré, fruité, bien élevé, pivoine, rose, cassis fin, torréfaction. Belle finale quoiqu'un poil courte. J'ai beaucoup aimé ce Fixin et j'ai vraiment envie de m'intéresser à ce viticulteur.
10 – Chambolle-Musigny 1er cru 2006, « les Charmes » , Domaine Amiot-Servelle :
Un peu plus « dur » en l'état que le Galleyrand, mais il ira à coup sûr plus loin. Ce sera probablement un coureur de fond, mais en l'état je ne suis pas sous le « charmes » ha ha ha.
11 – Sancerre 2006, « la Bourgeoise » , Henri Bourgeois :
Nez plutôt agréable, acidulé, sur la groseille. La bouche, un peu acide, manque légèrement de chair. Un soupçon de matière en plus lui aurait été bénéfique. Finale plutôt courte. Bien, sans plus, par rapport à ce que nous venons de déguster.
12 – Sancerre 2006, « Belle Dame » , Domaine Vacheron :
Très beau nez, très fin, complexe, agréable, avec un beau fruit. La bouche est également très fine, présentant un beau fruit. Léger manque de chair également. Mais cette bouteille me convainc plus que
les Charmes et
La Bourgeoise. Très bien.
13 – Clos de Vougeot 2000, Domaine Tortochot :
Nez et robe évolués. Un peu de ronce, de terre, de cerise noire et d'odeurs giboyeuses. La bouche est plutôt simple, sur le pruneau, les fruits noirs cuits. Les tannins restent abrupts. Fin de verre sur le tabac blond, le foin, avec un peu d'amertume.
Grosse déception avec ce Clos qui, clairement n'est pas au niveau. Dégusté en juin, le Château de la Tour 96, était d'un autre niveau. Encore abrupt, mais avec un véritable potentiel. Celui-ci semble bien moins armé. Franck ayant eu la gentillesse de m'offrir la fin de bouteille, j'ai pu juger de son évolution. Le lendemain soir, il n'était guère plus avenant, mais n'était pas tombé. Je veux bien que les Clos de Vougeot soient des vins de Cisterciens, mais il ne faut pas tant d'austérité ! Déçu.
14 – Chambertin 2000, Domaine Tortochot :
Nez et robe évolués. Plus de matière et de complexité. Jolies notes de torréfaction (moka), bouche un peu poivrée avec des notes de prune, de mûre, d'humus et, surtout, de terre. Pour paraphraser Jean-Marc Brocard, ce vin a « puisé arôme en terre » et c'est ce qui fait son charme. Bon vin, mais légère déception tout de même à la vue de l'étiquette.
14 bis – Bordeaux Supérieur 2007, Grand vin de Château Reignac :
Couleur d'encre. Nez très mûre et très mûr. Bouche avec de la matière, mais aux tanins très présents.
« C'est bizarre, on a l'impression que les tanins entourent tellement la langue qu'ils la serrent » lance Pierre. Ce n'est pas faux ! Finale un peu courte, marquée par des notes de café.
Le débat s'anime. Je propose un Languedoc. Gildas nous demande combien nous serions prêts à mettre dans cette bouteille. Pour moi, c'est un bon rapport Q/P à 6 euros et j'achète jusqu'à 7,50 €. Vous connaissez la suite.
15 – St Julien 2001, Château Beychevelle :
Nez très élégant, belle bouche proposant un fruit respecté. Belles effluves truffées et cacaotées. En bouche, c'est serré, avec une jolie trame minérale. Ce vin est tout en puissance retenue. Finale sur le café, avec des notes grillées. Son joli style me fait aimer ce vin.
16 – St Emilion Gd Cru Classé 2001, Château Canon la Gaffellière :
Plus dense, plus rond, plus suave, plus velouté...
Grosse matière, grosse densité, grande longueur...
Festival de fruit, foire aux saveurs, finale incroyable sur le caramel au beurre.
ENORME, ENORME, ENORME !
Connaissant l'intérêt de Franck pour Mouton, je lance Mouton 99. Ce n'en n'est pas un, ça valait à l'époque trois fois moins cher et c'est magnifique. Très beau vin. Franck de son côté décide d'ouvrir autre chose !
« I s'énerve, i's'énerve et i'part ! » constate Gildas, interloqué...:
17 – Pomerol 2001, Château la Conseillante :
Nez un peu évolué, sur la réduction et le pruneau, un peu alcooleux. En bouche, de belles notes de bois précieux, d'amande, de massepain. De la truffe également et, surtout, une curieuse mais sympathique touche de térébenthine. En l'état, ce vin ne convainc pas l'assemblée qui tombe des nues en constatant le « calibre ».
18 – Pessac-Léognan 2001, la Mission Haut-Brion :
C'est assurément le vin le plus droit, le plus minéral, le plus tendu des quatre. Austère, strict, carré, donnant la sensation de « bouffer de la terre », ses tanins sont en voie de civilisation. La bouche est dense, commençant à être suave. Le fruit accompagne et sert le terroir. Equilibre magistral, finale classieuse. Je place cette grande bouteille largement devant Canon la Gaffelière et Beychevelle.
"Bon ! Allez ! On va torcher ces daubes !" lance, rageur et dans un élan de désamour incontrôlé, Franck.
18 bis – Pauillac 1999, Château Mouton Rothschild :
Servi au débotté, servi un peu froid, nous devons lui laisser le temps de se faire. Au nez, les notes de torréfaction apparaissent, principalement du moka. En bouche, les tanins très fins, veloutés, annoncent un très beau vin. C'est d'une grande finesse, d'une grande longueur, avec de délicates notes de fumé, de grillé. Quelques minutes plus tard, le vin est encore plus beau, s'étoffant pour devenir plus puissant. Il devient à chaque seconde superlatif.
Le papier aluminium retiré, nous prenons la mesure de l'étiquette. Quelle joie de pouvoir boire de telles bouteilles ! Une petite fille de 10 ans et demi devait en recevoir trois pour sa majorité. Je pense que son père les conservera en cave et qu'il les boira lui-même avec l'intéressée !
19 - St Emilion 1er Gd Cru Classé A 1990, Château Ausone :
A peine remis de ce plaisir collectif aussi rare qu'inattendu, nous entrons dans un monde encore inconnu. Nous pénétrons dans la sublime finesse, caressons un voile léger, effleurons une soie précieuse.
A peine évoluée, la couleur n'est pas très dense, mais d'une superbe couleur sang de pigeon. Au nez, c'est un festival, une symphonie automnale. Un de ces paysages canadiens qui signent l'été indien, où chaque couleur témoigne d'une essence différente. Ici, c'est une palette d'odeurs automnales. Du végétal, oui, mais du beau !
Tabac, herbes sèches, ronce, blé frais, cacao noble, cèdre... Longueur infinie, équilibre superlatif, puissance contenue. Quel vin ! Quel vin ! Une des bouteilles les plus fabuleuses qui m'ait été donné de déguster.
Ausone 90 est un chef d'oeuvre : intemporel et mémorable.
20 – Sancerre 2005, « Grande Cuvée » , Comte Lafond :
Retour des blancs pour accompagner les fromages. Une nouvelle fois, nos hôtes nous gâtent en nous proposant un tour de France gustatif sur quelques dizaines de centimètres carrés. L'époisse est d'un fondant et d'une force rares ; le bleu des causses - magnifique de pourriture noble - est un véritable concentré de pénicilium. Pour accompagner cette symphonie de saveurs, un vin très bien élevé, équilibré est proposé. Il distille de fines notes citronnées, un grillé de fort bon aloi, bien que souffrant d'un léger déficit de puissance.
21 – Vougeot 1er Cru 2004, « le Clos Blanc de Vougeot » , Domaine de la Vougeraie :
Bien élevé et bien construit. Je n'ai pas pris beaucoup de notes, mais j'ai bien aimé ce vin qui, malheureusement a souffert de son antépénultième place et de la présence d'Ausone...
22 – Pouilly-Fumé 2007, « Silex » de Didier Dagueneau :
Quel plaisir de faire cette nouvelle rencontre ! Comme toute la tablée, j'ai adoré de vin magnifique, présentant un fruit totalement mûr sans être surmûri et d'un équilibre époustouflant. Bien que buvable en l'état, nous lui donnons tous la vie devant lui. Et une fois découverte, l'étiquette ne nous a pas trompé. Quelle chance de pouvoir confronter deux Dagueneau dans un même repas !
23 – Sauternes, 1er Gd cru classé Château la Tour Blanche 1970 :
Très belle couleur jaune doré mais avec des nuances encore juvéniles, bouche un peu simple et marquée par l'alcool. Belles notes d'humus.
En fait, j'avoue ne pas avoir accordé à ce beau vin toute la place qu'il aurait dû avoir. Marqué par la fatigue, obnubilé par la magie d'Ausone, j'ai été un peu vache, voire dédaigneux, avec cette bouteille qui, je le reconnais, était quand même sacrément intéressante. Un sauternes de 38 ans ne se boit pas souvent et j'aurais dû m'y attarder plus longuement... J'ai honte.
Alors que penser de cette dégustation ? Qu'en conclure ?
Tout d'abord, j'ai été frappé par la pertinence de la sélection, qui témoigne de goûts affirmés et cohérents. Nous avons fait un beau voyage en Sancerrois et les Bordeaux proposés furent de très haute volée. Très honnêtement et en dehors de toute discussion annexe, le « pirate » amené par Gildas dénotait un peu. On ne peut pas dire que Reignac 2007 soit mauvais, loin de là. Il faudrait d'ailleurs le comparer avec des GCC du même millésime. Nul doute que nous serions surpris. Mais les autres vins, proposés à maturité, étaient vraiment un cran au dessus.
Deuxièmement, les bourgognes rouges n'ont pas été à leur avantage. J'ai été passablement déçu par le clos de Vougeot du domaine Tortochot qui n'était pas au niveau d'un grand cru. Peut-être même pas d'un premier. Et la bouteille ne m'a pas semblé avoir de défaut. A contrario, le Chambertin était un cran au dessus, mais ces deux vins manquent cruellement de magie, du petit plus qui dilate nos pupilles. D'émotion en fait.
Troisièmement, nous en revenons toujours au vieux débat
« Pour ou Contre la dégustation à l'aveugle ? ».
J'avoue que je ne sais pas encore faire abstraction de l'étiquette et que la vue de quelques noms magiques est toujours de nature à influencer mon jugement. Pour l'instant, je n'ai rien trouvé de plus confortable que la dégustation à l'aveugle, qui permet de se concentrer sur l'essentiel : ce qu'il y a dans le verre, à l'exception de toute autre considération. Mais l'exercice est difficile. Sur une sélection à l'aveugle, je goûte tout, de peur de "louper un truc". Sur une sélection étiquette découverte, la tentation est grande de faire l'impasse sur des domaines moins prestigieux pour se concentrer sur les calibres.
Alors oui, effectivement... D'aucuns pourraient penser que servir Ausone 90 à l'aveugle est un manque d'humilité. Que servir ce vin en fin de dégustation, étiquette cachée, c'est servir de la confiture à des cochons. Que ce coup d'éclat est avant tout un coup de flambe.
De mon côté, j'y vois la balance de la justice, la pesée des âmes avant le voyage vers l'au-delà. L'humilité face au vin. Et sur ce dernier point, nous n'avons pas été déçus.
Nous avons tous été subjugué par cet Ausone. J'ai eu la chance d'avoir eu un verre un tout petit peu plus rempli que les autres et ai pu le déguster pendant de très longues minutes. Longtemps après que l'étiquette eut été découverte et pressé de questions, Franck nous avoua timidement qu'on lui avait proposé une somme fabuleuse contre cette bouteille.
« Et tu as refusé ? » l'avons-nous questionné, éberlués...
« Bah oui les amis... Je voulais simplement la boire avec vous ».
Tout était dit.
Vincent