Julien, que les LPViens belges connaissent bien pour avoir organisé le premier DBA, m'a convié ce jeudi soir, en compagnie de quelques amis à lui et de DidierD, à peine remis des vendanges chez Robert, à une dégustation exceptionnelle de grands vins de Bordeaux dans le millésime 1999.
Le programme était alléchant, avec six vins présentés, à savoir Mouton Rothschild, Latour, Margaux, Léoville Las Cases, Cheval Blanc et un pirate dont nous avons vite compris qu'il s'agirait de Sociando-Mallet. Les vins étaient bien sûrs beaucoup trop jeunes, mais 1999 étant considéré comme un millésime relativement accessible, je me voyais mal refuser une telle opportunité de faire connaissance avec quelques-unes des légendes du Bordelais.
Les vins ont été servis en semi-aveugle (on connaissait la liste des vins, mais pas l'ordre de service), et ont été carafés pendant plus de trois heures avant la dégustation. Les commentaires suivants respectent l'ordre du service, qui était aléatoire, et tiennent compte des réflexions émises par l'ensemble des 8 participants. La note sur 10 correspond à ma note personnelle. Les prix indiqués sont ceux pratiqués actuellement au Colruyt où Julien s'est procuré les vins.
Château Léoville Las Cases 1999
La robe est brillante, soutenue, aux reflets violets à rubis. Le nez est très beau, puissant, sur la myrtille, les arômes de torréfaction, le caramel, la réglisse, une légère note de poivron mûr ainsi qu'une touche florale (lys) et minérale. En bouche, l'équilibre est superbe, avec des tannins pas trop imposants, en partie déjà fondus, et une des finales les plus longues de la soirée. Excellent vin. (8,9/10 - 99 €)
Château Margaux 1999
La robe est similaire au précédent, un peu plus intense néanmoins. Le nez est un peu décevant, sur des arômes fermentaires, levures, évoquant nettement la gueuze pour quelques dégustateurs (dont moi). Si on ajoute à cela un boisé très torréfié, on comprendra que le reste des arômes soit à ce stade plutôt masqué. Fruits noirs et réglisse se retrouvent néanmoins à l'arrière plan. Quelques années de garde permettront sans aucun doute à ce nez de s'affiner. En bouche, les tannins sont plus imposants que ceux de Léoville Las Cases et délivrent une amertume nettement perceptible en fin de bouche. La finale est de bonne longueur. Déception pour ce vin duquel j'attendais beaucoup plus, mais qui se révèlera sous un meilleur jour dans quelques années, à n'en pas douter. (7,3/10 - 175 €)
Château Cheval Blanc 1999
La robe est brillante, soutenue, avec un très léger début d'évolution. Le nez se montre à ce stade peu expressif, mais est assurément le plus fin de la soirée, également celui qui est le moins marqué par son élevage. Fruité mûr, quelques notes de poivron, minéralité naissante et quelques notes empyreumatiques. C'est en bouche qu'on a la certitude d'être en face d'un grand vin, tant l'équilibre semble parfait, axé sur une grande finesse plutôt que sur la puissance, sans aucune aspérité, avec un volume, un soyeux de texture et une fraîcheur exemplaires. La longueur est impressionnante, et sur ce point également, il domine les autres vins présentés. Grand Vin, le meilleur de la soirée pour moi, mais également le plus cher, et de loin… (9,2/10 - 225 €)
Château Latour 1999
Il présente la robe la plus profonde de la soirée. Le nez est également sur la réserve, mettant son élevage en avant à ce stade, avec néanmoins de belles notes fruitées, du poivron mûr, du tabac et du clou de girofle. La bouche se montre stricte, tannique mais bien équilibrée et longue. Un vin qui ne se livre pas du tout et qui mettra du temps à révéler son potentiel. (8,4/10 - 175 €)
Château Sociando Mallet 1999
La robe est similaire à celle des précédents. Le nez est fin, marqué par le poivron rouge très mûr, voire le piment d'Espelette. On note également des notes de fruits rouges et noirs, un boisé épicé et une belle minéralité. La bouche se montre également superbe et très fine, avec un équilibre et une longueur qui la classe parmi les meilleures de la soirée. Très beau vin, que certains n'ont pas hésité à placer en tête à l'aveugle, ce qui n'est pas mon cas, sauf en ce qui concerne le rapport qualité-prix, qui est exemplaire. (8,7/10 - 25 €)
Château Mouton Rothschild 1999
Belle robe, similaire aux précédentes. Le nez est déjà bien expressif, dominé par les notes grillées dues à l'élevage, mais avec la présence de belles notes de fruits noirs, d'épices et une minéralité naissante. Certains y ont vu le plus beau nez de la soirée. En bouche, belle fraîcheur, bel équilibre malgré des tannins encore très présents, mais le vin pêche par un léger manque de longueur par rapport à ses condisciples, raison principale qui explique ma note un peu sévère par rapport aux autres. (8,1/10 - 175 €)
Il faut noter que 6 des 8 dégustateurs ont placé Cheval Blanc en tête à l'aveugle, les deux autres le plaçant en deuxième position. Le classement final, tenant compte de l'avis de tous s'établit donc comme suit :
1. Cheval Blanc
2. Sociando Mallet
3. Mouton Rothschild
4. Léoville Las Cases
5. Latour
6. Margaux
Inutile de vous faire un dessin en ce qui concerne la palme du meilleur rapport qualité-prix de la soirée...
Aucun des 8 participants n'était un habitué de la dégustation de vins de ce calibre à un âge aussi peu avancé. Il faut donc plus que relativiser ce classement, qui sera sans doute très différent dans 10 ou 20 ans. Il y avait tout de même unanimité sur quelques points, à savoir la grandeur de Chaval Blanc, la déception au sujet de Margaux, et la bonne tenue de Sociando au milieu de tous ces grands.
Luc