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Le vin suisse sort de sa réserve
Face à la baisse de consommation indigène, les vignerons veulent exporter leur production. Un premier Swiss Wine Bar vient d'ouvrir en Belgique pour faire connaître les crus helvétiques.
Le gérant Xavier Faber devant le Swiss Wine Bar de Bruxelles qui propose 500 crus du pays. D'autres établissements de ce style devraient suivre en Europe, à commencer par l'Allemagne./ Benoît Doppagne/Belga
LES FAITS
Depuis plusieurs années, les Suisses boivent moins et surtout moins de vin du pays. A force de perdre des parts de marchés à chaque vendange, les vignerons trop longtemps réfractaires à l'exportation doivent donc changer de cap et franchir enfin les frontières avec leurs crus. Une mission difficile, que le nouvel organe de promotion de l'Interprofession doit pourtant réussir rapidement, vu la baisse impressionnante de la consommation.
Aujourd'hui encore, dans l'esprit de bien des vignerons, exporter son vin signifie qu'on le trouve en... Suisse alémanique! Un tel constat pouvait d'ailleurs se défendre il n'y a pas si longtemps, à une époque où cette présence permettait d'écouler le solde des millésimes que la clientèle locale s'arrachait presque entièrement. Mais à l'heure où la consommation affiche un recul impressionnant (moins 7,3millions de litres en 2003!), il est temps de dépoussiérer l'image d'une profession qui n'a jamais éprouvé le besoin de partager ses crus avec ses voisins étrangers lorsque tout roulait.
Désormais réunies sous une même entité, les régions ont donc créé Swiss Wine Communication (SWC) pour redresser la barre, la dotant de moyens importants 11millions fournis par la Confédération et l'Interprofession censés limiter la casse sur le plan national et faire exister ses produits hors des frontières. "Il faut bien récupérer ailleurs ce que l'on ne cesse de perdre en Suisse", explique son directeur Jà¼rg Bussmann, qui s'est adressé lundi aux Vaudois. "Actuellement, nous n'exportons qu'un centième de notre production, ce qui représente un million de litres par an. C'est très faible, mais cela veut dire aussi que nous avons un énorme potentiel à exploiter."
Notoriété inexistante
Cette discrétion présente cependant un sérieux problème, celui de la notoriété, dont le niveau est proche de zéro hors du pays. "Nos spécialités remportent les plus hautes distinctions dans les concours internationaux, mais nous ne l'avons jamais fait savoir. Cela demande de l'argent, et il n'y a qu'en cumulant nos forces qu'il est possible de se faire un nom."
L'Allemagne (pays exploré traditionnellement par la Suisse) et la Belgique (grand consommateur sans être producteur) seront les premiers visés, la pointe de l'iceberg étant déjà visible en plein cÅ“ur de Bruxelles sous la forme d'un bar à vins créé sur le modèle des "Verre à Pied" de Lausanne et de Genève. "C'est le meilleur moyen de se faire connaître très vite, se réjouit Jà¼rg Bussmann. Nous sommes en contact avec les propriétaires de ces deux enseignes lémaniques pour reprendre le concept et le multiplier à l'étranger sous le nom de Swiss Wine Bar, avec plus de 500références helvétiques à chaque fois. Des plates-formes composées des vignerons motivés permettront aussi de participer à des foires internationales ou d'organiser des événements et des manifestations pour obtenir une meilleure visibilité sur place. Ce qui nous permettrait de négocier avec des distributeurs."
Une révolution dans les si paisibles vignes suisses, l'objectif étant d'écouler à terme dix millions de litres chaque année. "C'est désormais chose possible car des freins se sont levés, insiste le patron de SWC. Les régions ont enfin compris qu'il fallait travailler ensemble après des années d'individualisme, alors que la logistique mise en place permettra d'assurer des commandes qui n'arrivaient que trop rarement dans le passé."
Cà‰DRIC JOTTERAND
'Des vins chers et peu connus'
VU DE L'à‰TRANGER: Les réponses obtenues dans quelques bonnes adresses gourmandes européennes confirment qu'il y a du pain sur la planche.
Pays du vin par excellence, la France semble ne pas accorder grand crédit aux crus helvétiques. Chez la star des cuisiniers Paul Bocuse, près de Lyon, on explique que Dézaley et arvine ont été retirés de la carte, "pour proposer autre chose à notre clientèle suisse". A Paris, L'Å’nothèque de la rue Saint-Lazare n'en dispose pas, alors que chez Taillevent, trois étoiles au Michelin, il n'est pas dans les habitudes de servir un vin suisse. En face de l'Olympia, l'enseigne spécialisée Lavinia et ses 6500références sur trois étages n'est pas plus enthousiaste. "Nous avons environ vingt crus genevois et valaisans, le plus connu étant le Grain Noble de Marie-Thérèse Chappaz. Mais je ne me souviens pas en avoir vendu, notamment à cause de son prix. D'ailleurs le moins cher des vins suisses est à 17euros la bouteille (environ 26francs), ce qui est élevé pour un produit très peu connu."
L'espoir belge
Si les quelques contacts pris en Allemagne n'ont pas été plus concluants, l'espoir vient tout de même de Belgique. A la table bruxelloise de Comme chez soi, également trois étoiles au guide rouge, le chef sommelier William Woutters n'hésite pas à jouer la carte valaisanne en accompagnement, par exemple, de l'émincé de turbotin à l'embeurrée de poireaux à la truffe de la Saint-Jean. "Outre quelques syrahs, nous servons régulièrement un fendant de Marie-Thérèse Chappaz encore elle! ou une amigne de Germanier. On sent la Suisse plus présente, notamment depuis l'ouverture de son bar à vin à Bruxelles. C'est un endroit qui marche bien, en raison des nombreuses spécialités."
RAOUL CRUCHON: 'Un nouveau départ'
L'Å“nologue morgien estime qu'il est impossible de partir seul en guerre.
Vigneron important à La Côte, le Morgien Raoul Cruchon est un fonceur qui n'hésite pas à critiquer les instances dirigeantes lorsqu'il le faut. "Là , il faut y croire et voir cette action comme un nouveau départ. Personnellement, je n'ai jamais cherché à exporter car j'estime qu'on ne peut pas partir en guerre seul. Il faut s'y mettre tous ensemble et c'est le chemin que nos responsables sont en train de prendre avec raison car les investissements seront très lourds. Il restera à positionner des produits haut de gamme en préservant leurs particularités et si possible choisir des cépages connus dans les pays concernés, car les gens ont besoin de repères. En revanche, je pense qu'il serait faux de grouper les producteurs sous une seule étiquette et un même vin, car notre diversité fait justement notre force."
JEAN-LUC KURSNER: 'Multiplier les démarches individuelles'
Le vigneron de Féchy n'est pas certain que l'union fasse la force.
Avec son frère Pierre-Yves, Jean-Luc Kursner exporte déjà les 5% de la production qui sort des cuves de Féchy. "Ecrivez seulement, car on aimerait tous développer ce secteur. Malheureusement, dans le monde, un Suisse se trouve dans la peau d'un Italien qui voudrait nous vendre son fromage à fondue. C'est très difficile et il nous a fallu beaucoup démarcher pour obtenir de petites ouvertures dans le nord de l'Europe, en Colombie et au Japon. Si chacun multiplie ce genre de démarches, les négociants vont mettre les premières lettres à la poubelle, mais peut-être lire et s'intéresser aux suivantes. Avec nos différences, je ne suis pas certain que nous pouvons réussir en nous groupant. Il vaudrait déjà mieux arrêter de vendre du chasselas romand à 5francs ici avant de songer à conquérir le monde."
La consommation en 2003 (en millions de litres)
Consommation totale: 285,7.
Vin suisse: 114, 9.
Vins étrangers: 170,8.
Baisses:
3,8 en 2003.
5,6 en 2002.
Importations:
principalement Italie, France, Espagne.
Production suisse:
Blanc: 57,2 (5,3).
Rouge: 57,7 (2,0).
Baisse totale: 7,3.
Exportation:
1% de la production, principalement vers l'Allemagne, ainsi que de très faibles quantités dans divers pays.
Budget de Swiss Wine Communication: 11 millions.
Projet:
reprise des enseignes du Verre à Pied de Lausanne et Genève, puis ouverture de tels bars à Berne (prochainement), Bâle et Zurich, ainsi qu'en Allemagne.
Ouverture du 1er Swiss Wine Bar à Bruxelles.
salutations,
Laurent