Je copie ici une réponse que j'ai faite à  Thierry dans une autre rubrique. J'aimerais avoir votre avis car cette question m'intéresse.

"J'ai souvent l'impression que les dégustations en série mènent les vins directement au casse-pipe. Quand les dégustations ne sont pas silencieuses et que les "spécialistes" parlent, c'est encore pire. Chacun se croit obligé de trouver un petit quelque chose au vin et à  la fin, presque aucun vin n'en sort indemne.

Si les dégustations en série sont très intéressantes d'un point de vue pédagogique, elles ne peuvent cependant satisfaire les hédonistes et ceux qui veulent vraiment apprécier un vin."

Yves Zermatten

par dégustation en "série", je n'entends pas le fait l'aligner quelques - voire même pas mal de bouteilles au cours d'un long repas. Je parle de ces dégustations d'amateurs où l'on ouvre à  tour de bras et où l'on juge rapidement - trop rapidement souvent - ou des dégustations de style professionnel où les vins sont très nombreux et goûtés rapidement, les uns aprés les autres et sans que l'on ait le temps de s'attarder vraiment sur un vin.

Du style verticale Las Cases ou Cos d'Estournel (aaa)

100% d'accord avec toi. J'aime participer a ces exercices de style car au niveau de l'amelioration des ses connaissances techniques et analytiques, c'est un plus.

Mais pour reellement apprecier les vins ce n'est pas l'environnement ideal.

Toutefois, que serait LPV si nous buvions toutes nos bouteilles comme des paillards, sans prendre de notes et sans vouloir tant soit peu donner dans l'analyse subjective que ce qui passe par notre gosier ??

J'apprecie ces temps de boire, siroter et analyser une bouteille sur plusieurs jours. On passe par plusieurs phases de vie et c'est diablement enrichissant !

Yves,

Si on peut grossièrement caricaturer ta question à  la qualité (de la dégustation) versus la quantité (de vins dégustés), j'imagine que tous le monde sera bien d'accord avec toi !
Mais je ne suis pas certain que c'est bien celà  que tu vises!
Personnellement, en tous cas, j'ai toujours préféré les dégustations calmes et tranquilles, où l'on prend le temps de faire connaissance avec le vin que l'on déguste. J'essaie de toujours procéder de la sorte, quitte à  déguster moins que d'autres...

Laurent

Les deux approches ne servent, à  mon avis, pas du tout les mêmes objectifs.
Si on cherche à  comprendre les caractéristiques d'un millésime (dégustation horizontale) ou d'un domaine (verticale), la dégustation hédoniste n'est pas satisfaisante car ce n'est pas en dégustant un ou deux échantillons d'une année / domaine, qu'on pourra s'en faire une idée objective. Cette évaluation ne pourra se faire qu'à  partir de larges panels de dégustation. La démarche se fait alors plus rationnelle et moins émotionnelle.

Je comprend parfaitement qu'un hédoniste comme toi ne se sente pas à  l'aise dans les marathons comparatifs des dégustations en série. Cependant, il faut bien que certains s'y collent... (aaa)

Personnellement, j'aime bien les deux types de dégustation. La dégust. hédoniste permet d'accumuler des sensations, des plaisirs purs (et pas forcément rationnels), de pratiquer le partage et l'amitié, et surtout.. de prendre le temps de l'évolution du vin.
La dégustation en série permet par contre d'acquérir des données plus cartésiennes sur certaines caractéristiques, de prendre de la hauteur ainsi que de mesurer des repères qui vont nous permettre, peut-être, de mieux profiter de nos dégustations hédonistes ultérieures.

Enfin, par rapport à  la remarque sur la verticale de Léoville las Cases, je ne suis pas du tout d'accord avec le sous-entendu d'Anthony. Outre le caractère exceptionnel d'avoir réuni un tel plateau (32 millésimes pour ceux au fond de la classe qui ne suivaient pas!), elle a été formidablement instructive. D'une part, elle nous a permis de cerner avec grande précision le style de las Cases - chose que je n'avais personnellement pas totalement intégré. L'exemple de Barton v.s. las Cases 2000 était la démonstration parfaite qu'on avait, à  la longue, parfaitement appréhendé le style las Cases puisque, à  l'aveugle, les participants ont immédiatement reconnu le vin du Marquis. Ensuite, le voyage temporel sur 70 ans était proprement fascinant. Les différences au niveau des techniques de vinification, par exemple, ont émaillé les discussions pendant et après la dégust. Ces données sont intégrées dans ma mémoire et je m'en servirai longtemps encore lors de prochaines dégustations.. hédonistes.

Alain

Alain,

tu penses bien que j'aurais donne gros pour pouvoir participer a cette verticale de LLC et je n'ai aucun doute que j'aurais appris beaucoup.

Mais a la lecture detachee de vos CR (et je ne suis pas le seul, je crois), il m'a manque cette etincelle qui aurait dit "voila un des plus beaux moments de ma vie d'amateur de vin". Trop de vins ? Banalisation ? Saturation ? Etat d'esprit trop critique et pas assez "amateur" ?

Je n'en sais trop rien. Mais je sais par contre que j'ai eprouve le meme sentiment lors de notre verticale Cos d'Estournel. Et dieu sait que j'aimerais bien retrouver ces bouteilles sur ma table pour un excellent repas !

Une certaine saturation, c'est certain. Le nombre de bouteilles était probablement un peu ambitieux pour nos capacités d'amateurs.
Mais avec le recul, quelle expérience! Probablement que les commentaires à  chaud ne reflètent pas bien ceci. Il nous fallait "digérer" la masse d'informations qui s'entrechoquait encore dans nos têtes.

Alain

Si les dégustations en série sont très intéressantes d'un point de vue pédagogique, elles ne peuvent cependant satisfaire les hédonistes et ceux qui veulent vraiment apprécier un vin."

Yves Zermatten

Tout à  fait d'accord: on est souvent déçu par une "dégustation en série" et on apprécie fréquemment davantage un vin bu isolément. Mais "les dégustations en série", à  l'aveugle, en groupe mais sans discussion (avant d'avoir rendu ses notes) et hors repas sont un instrument indispensable pour se faire une opinion sur la hiérarchie des vins.

Un autre facteur concernant " Les dégustations en série": l'instant de cette dégustation. Certains jours tous les vins paraissent bons à  tous (la météo, en particulier la pression atmosphérique, y est pour beaucoup à  mon avis) un autre jour, même proche, la même série sera décevante pour tous.

La taille de la série aussi est significative, personnellement j'ai besoin au moins dix vins pour être au mieux de mes perceptions, d'autres saturent passé vingt échantillons.

D'autre part, il est stupide de servir un vin de grande notoriété à  l'aveugle, les convives seront souvent déçus. Un Pétrus (par exemple, mais il y en a bien d'autres....) exige d'être annoncé, espéré, du moins à  ceux qui ne savent pas encore que son coût n'a aucun rapport avec sa qualité....

Merci Bertrand pour ces éclairages très intéressants. Il est à  mon avis important, comme tu le soulignes, que les dégustations en série à  l'aveugle sa fassent en silence, sinon la personnalité de l'un ou l'autre dégustateur risque d'orienter l'ensemble des appréciations (phénomène de conformisme).

Je pense aussi que nos dipositions subjectives du moment ont un rôle non-négligeable.

Cordialement

Yves Zermatten

Yves,

Tout dépend du niveau du dégustateur (non, je déconne ... quoique !).

Plus sérieusement, ne pas opposer hédonisme et dégustation plus systématique.

Bertrand,

La prochaine fois, j'annoncerai Petrus. Je ne pense pas qu'il vous aurait paru meilleur, car aucun des convives n'était né de la dernière pluie.

Aurais-je aussi du annoncer l'Echezeaux de Engel 1997 ?

Laurent

Laurent,

Du niveau, oui, mais aussi de la personnalité et de la force de caractère des dégustateurs. le phénomène de conformisme ne doit pas être sous-estimé, même chez les meilleurs (aaa)

les grands noms, il faut toujours les annoncer. C'est pour ça qu'on paie un tel prix, non ? (aaa) Servir Petrus à  l'aveugle, c'est presque toujours du suicide...

cordialement

Yves

Je ne puis qu'être d'acoord face à  ces zigouigouis souriants ... et qui trinquent en plus !

Dès fois, on exhibe un gros flacon avant de le servir, histoire de mettre un peu la pression !

Laurent

Ah ! Les dégustations en série !

Moi, j'aime ça. Je ne dis pas que je maîtrise parfaitement l'art de les pratiquer mais j'aime ça.

J'aime parce que je suis boulimique et que mon apprentissage et ma soif de connaissance passe obligatoirement par là .

Je ne dis pas non plus que c'est la meilleure solution, je dis que c'est celle que j'ai choisi.

Maintenant, d'accord que si l'on veut apprécier un vin, c'est peut être pas le meilleur moyen. Moi, c'est pas un vin que je veux apprécier, c'est le plus possible (bbb).

Alors, je vais continuer à  enchainer les visites aux domaines, les dégust primeurs dès que je peux, les balades à  Vinexpo avec près de 300 vins dégustés en 4 jours....et puis dès qu'une porte va s'ouvrir, vous pouvez compter sur moi pour l'enfoncer !!!
Pour moi, c'est le pied ! En tout cas c'est MON pied.

Jean-Claude, à  J-7 de ses vacances et qui commence déjà  à  repérer les domaines qu'il va s'enquiller pendant ses quelques jours de détente

A tous,

Avez-vous un "truc" pour que la bouche ne fatigue pas ou moins vite ?

@+

Yanoo,

J'essaye de ne pas trop manger avant la dégustation. Pas trop épicé non plus et des plats pas trop lourds.

J'essaye tous les 15-20 vins de manger un morceaux de pain sec et/ou de boire un verre d'eau fraîche.

Cordialement,

Olivier

Il est plus ingrat de déguster en série des rouges que des blancs. En effet, l'effet d'astringence des tanins est dû à  la réaction de ces derniers avec des protéines de la muqueuse buccale (ces protéines qui donnent la sensation de lubrification de la bouche... et qui sont "attaquées" par les tanins, d'où l'effet). Ces protéines mettent un certain temps pour être resynthétisées par l'organisme. Donc, après plusieurs verres de rouge, on n'est plus aussi réceptif (et ce, même si on recrache).

salut Fabio

content de te lire sur LPV.

et merci pour les éclairages du scientifique ! (hhh)

amicalement

Yves

Merci Fabio pour ta remarque concernant les rouges. Je me disais aussi qu'il y avait un problème.
Je m'explique :
Dégustation ce samedi 22/01 avec 5 copains, repas commençant à  16 h et se terminant à  02 h le lendemain... J'en suis toutefois sorti vivant, quoi que passablement entamé. Ceux qui ont oublié qu'il fallait recracher de temps à  autres s'en souviendront...
Environ 40 vins à  déguster à  l'aveugle, les régions sont servies par ordre
Thème :Champagne (2) blanc sec de Loire 1996 ( 6), rouge Loire 1996 (15) , Bordeaux 1996 ( 7) pirates (, Clos Dauvissat 1996, Cabernet Wasse Felix 97, Lafite 94, Autan Plageoles 1999, Clairette Beudelle 96 de Julien ( 4), moelleux 1996 (4).
Cave "froide" avec cheminée .
Je fais court :
Tous les blancs secs passent bien, bonne température ( 12 ° env), certains nous régaleront " Clos " Dauvissat 1996, le plus grand blanc fut à  l'unanimité le Saumur "Brézé" de Foucault, nous sommes terrassés devant la platitude des Fouchardes d'Angeli... Bref, on réagit les perceptions aromatiques sont nettes, le plaisir est là  ( et la lucidité aussi).

Série des 15 Chinon / Saumur / Bourgueil : malgré la qualité des vins ( Aliet, Breton, Druet, Foucault, Baudry, Villeneuve, Vatan, Germain ) et ce uniquement sur les grandes cuvées, la sensation des tannins commence à  provoquer quelques dégâts gustatifs. La fraîcheur de service accentuera cet effet de nivellement, on discerne déjà  moins les meilleurs. Les tannins ressortent "féroces" et la perception aromatique est amoindrie. Mais ce n'est rien si l'on voit la suite...

Série Bordeaux 1996 + 2 " pirates " .
Sur le papier : Pichon Baron, Sociando, Pape Clément, Lagrange, Pontet-Canet, Margaux " Le Côteau, pirates Vasse Felix Cabernet Australien, Bourg de Foucault, Lafite 1994...
Précision, mon état physiologique et mental était encore correcte ( je me souvenais de mon nom, de mon adresse etc), j'avais calculé mon coup ! Ne point trop avaler avant sauf l'extraordinaire.
Résultat ( à  l'aveugle) : Wasse Felix l'emporte , puis le Margaux " Le Coteau " ( ne rigolez-pas ). Les chaussettes retirées , c'est l'effroi !
Un petit Margaux de rien du tout et un Australien font la nique aux grands.
MAIS : ce sont les seuls vins à  maturité, les moins tanniques, ils agissent comme des "adoucissants" des muqueuses buccales, parce qu'ils sont moins rudes que les autres, nos pauvres gueules n'en pouvant plus.
Ajoutter à  cela un service aux alentours de 14°, la catastrophe était là . A ce point de dégustation, je n'avais plus que les saveurs de base ( sucré, amertume, acidité....), et voilà  le résultat !

Moelleux à  la fin : si ce n'est les équilibres ( sucre, acidité), je ne vois vraiment pas plus d'ondenc dans le Plageoles ( que je connais bien) que de beurre en broche !

Maintenant, vous avez à  quoi vous en tenir !

PS : depuis 2 jours, même pas un coup de rouge, sauf ce soir un gamay Viniféra 2003 de Marionnet pour soigner le traumatisme.

Les protéines dont parle Fabio sont présentes dans la salive, et il est exact que les tannins donnent la bouche sèche par ce mécanisme. Par contre, la salive se reforme très rapidement, il suffit de prendre la précaution de boire de l'eau régulièrement entre chaque verre de vin rouge (avec éventuellement un petit morceau de pain) et le tour est joué. Je ne suis personnellement pas dérangé par les séries (pas trop longues tout de même) de rouges en prenant ces quelques précautions d'usage.

Luc

Je dois avouer que je ne connais pas personnellement les temps de reformation de ces protéines. Toutefois, je tiens l'information d'un cours que j'ai suivi récemment, "chimie et oenologie", donné à  l'école d'oenologie de Changins (les Suisses reconnaîtront... même s'il y a de plus en plus d'étudiants français qui s'y forment)... et le professeur laissait entendre que les temps de resynthétisation de ces protéines n'était pas si rapide que ça ! Je n'en sais pas plus (las!).... On peut voir le résultat de cette réaction en recrachant dans un verre la première bouchée de rouge, qu'on aura préalablemnent bien fait circuler dans la bouche : on y verra des amas filamenteux rose-rouge, formé par les tanins fixés sur ces protéines. Si on refait l'expérience quelques verres plus tard, ces amas seront nettement moins nombreux, voire auront disparu.

Salut Yves ! J'espère toujours te croiser en Valais... si tu me dis quand tu y passes. Amitiés. F.