L'Ossau Irati est un fromage basque d'affinage au lait cru entier de brebis.
J'ai dégusté ce fromage délicieux à  deux reprises, la première fois chez Lab lors d'un DBA et la seconde lors de la dégustation (cours) de février 2004.

Ce dernier avait 5 mois d'affinage. Le fromage est goûteux sans excès, à  la fois doux et gras, avec de l'acidité.

Cinq vins ont été présentés à  l'aveugle, deux blancs et trois rouges, dégustés d'abord seul, l'un après l'autre, puis regoûtés, groupés, avec le fromage.

Vin n° 1

robe d'or clair, nez complexe : agrumes confits, amande, fruits blancs (pêche), fruits exotiques (ananas, banane, mangue), notes boisées, menthol.
En bouche, ressortent d'abord l'acidité et la verdeur (agrumes), la fraîcheur du vin, les autres arômes apparaissent ensuite, faisant la queue de paon. Gras et notes boisées. Finale portée par les agrumes. Belle persistance. Un beau vin intéressant.

Accord : Parfait : vin et fromage s'épaulent, complémentarité entre leurs acidités, flattant les arômes des deux, faisant ressortir leur douceur. Le fromage et le vin semblent tous deux plus goûteux.

Jurançon sec : Cuvée Marie 2002

Vin n°2

robe d'or clair mais un peu plus soutenue que le vin précédent.
nez plutôt exotique : fruits de la passion/mangue, fruits blancs : pêche/poire, une pointe d'acidité, minéral aussi.
En bouche, ce vin est moins persistant que le précédent, plutôt déséquilibré par un manque d'acidité, relativement gras, notes lactiles, amertume en finale. La finale en peu plus nerveuse sauve le vin dont le milieu de bouche nous semble un peu plat.

Accord : ne se fait pas; le fromage n'apporte rien au vin, le contraire est aussi évident. Le fromage ne modifie pas le vin qui reste bien campé sur ses arômes de fruits blancs, dont la poire.

Saumur (chenin) : Château du Hureau 2001

Vin n°3

Robe rubis violine opaque. Nez : notes animales, viandées, fourrure (réduction ?); fruits noirs, tannicité, oignons, poivrons, poivre blanc.
En bouche, le vin d'abord un peu froid, est peu dissert, fermé, le fruité ne se dévoile pas; la charge tannique est par contre importante, quasi acerbe en milieu de bouche. Marqué par l'acidité, la réglisse, légèrement toasté.
Vin équilibré mais actuellement austère. A attendre.

Accord : pas de massacre, plutôt bon même, pour un vin rouge : les acidités se marrient, le fromage polit le vin, ne fait pas ressortir les tannins.

Côtes du Marmandais, Vignoble d'Elian Daros 2001

Vin n° 4

Robe rubis pourpre présentant de légères traces d'évolution, nez d'une grande complexité aromatique : au premier calme, avant agitation, notes quasiment d'écurie !!!, puis la frangrance s'élargit : sanguin, notes métalliques, goudrons, foxé, iodé, giboyeux, cacao torréfié, épices, humus, poivre et tabac. A l'agitation, le côté faisandé ressort.
Bouche ample, fraîche, matière équilibrée entre acidité et gras, belle rondeur. Cerises, figues confites, fruits noirs et pruneaux: un vin fondu, racé, équilibré, de belle longueur (un Graves ?(jjj)).

Pas d'accord, chacun campe sur ses positions, le vin n'est pas influencé par le fromage et inversément.

Pessac-Léognan, Château de Fieuzal 1988

Vin n° 5

Robe rubis pourpre très soutenue, brillante.
Nez ample, grillé, toasté, épices, caramel, banane, fruits noirs compotés très mûrs, violette et réglisse, beaucoup de suavité, un peu pommadé quand même pour moi (bois neuf), en un mot : enjôleur.
Bouche à  l'identique : fraîcheur et acidité contrebalancent gras et côté pommadé. Belle charge tannique cependant; vin persistant.

Accord : le fromage assagit le vin, gomme le côté un peu outrancier apporté par les arômes du bois neuf; seul ou accompagné, la dégustation dénote deux plaisirs différents.

Les Laquets 2001, Domaine Cosse (Maisonneuve)

Le fromage est une gourmandise, à  lui tout seul. Dans la recherche d'accord, même si ce dernier ne se réalise pas, l'ossau irati ne "détruit" pas le vin qui lui est associé : au pire chacun campe sur ses positions aromatiques sans faire aucune concession à  l'autre.

Je pense que le temps d'affinage du fromage est aussi important : minimum légal trois mois. Celui dégusté était à  5 mois, chez Lab, je crois qu'il avait six mois d'affinage. Plus le temps d'affinage s'allonge, plus le goût du fromage doit se corser et plus l'accord doit-il devenir difficile à  obtenir.

Michel.

Vraiment sympa ce genre de thématique Michel. Merci pour les infos. Ici, sur Bordeaux, l'Ossau Irati est un fromage incontournable et c'est très appréciable d'en savoir un peu plus sur les divers accords. Etonnant toutefois que vous n'ayez pas choisi de déguster un Irouléguy (eee).

C'est ce fromage sec qui se déguste parfois avec un coulis de fruits rouges ?

Si oui, j'en garde un souvenir ému d'un dîner chez Argi-Eder à  Ainhoa l'été dernier ...

très intéressant en effet. bravo à  Michel !

Yves

Michel D,

Juste parce que çà  peut vous intéresser, nullement de la pub.

Sophie.

Jean-Claude,

Comme je l'ai noté au début, il s'agit de cours de dégustations en aveugle... je suis un simple participant et c'est l'animateur - passionné aussi il est vrai - qui décide du choix des vins.

Quant au fait de découvrir les vins, c'est un exercice périlleux : pour le jurançon, j'étais sur la bonne voie, due seulement au fait que la dégustation du dernier DBA n'était pas très éloignée dans le temps et ma mémoire, rappellant des impressions ressenties ou vécues (les affirmations d'EricD) lors de ce dîner.

Pour le Pessac-Léognan, de prime abord, on aurait pu partir sur une vieille syrah.... ce n'est que l'affinage des perceptions et sensations et la mise en mot qui ont orienté les "recherches" vers le Bordelais et la région des Graves en particulier.

Ce genre de thématique, la deuxième cette année (la première était consacrée aux accords avec un curry de poulet) est très intéressante et porteuse, alliant tous les plaisirs de la dégustation.

Cordialement,
Michel.

L'ossau-iraty (avec un Y), issu de l'alliance du Béarn et du Pays Basque, se sert classiquement avec de la confiture de cerises noires, idéalement celle d'Itxassou pour rester chez les Basques. Lorsque le fromage est bien affiné, c'est un peu dommage parce que cela gomme son goût, mais il faut reconnaître que c'est quand même bon (le sucré vient contrebalancer et équilibrer l'acidité du fromage).

Ce fromage de brebis fabriqué de la mi-mai jusqu'à  la fin août se révèle à  son meilleur après 5 à  6 mois d'affinage.

Accords préconisés: vins rouges charpentés ou blancs corsés de la région.

Source: Fromages des terroirs de France, de Catherine Vialard, editions Solar. Photographies de Philippe Barret: le nôtre?(eee)

Il est intéressant de constater que les accords se sont faits, en blanc comme en rouge, avec les vins de la région. C'est quand même souvent l'idéal! A mon avis, le chenin aurait quand même dû s'en sortir aussi bien que le Jurançon, son acidité et sa minéralité n'ayant rien à  envier au vin d'Henri IV, mais d'après la description faite par Michel, le Saumur choisi était un vin trop "travaillé".

J'ai justement remonté de la cave un Fieuzal rouge 88 que j'avais envie de regoûter depuis un moment. A priori, il est dans sa phase mature! Nous allons voir ça!

Merci de cette expérience fort instructive, Michel.

Olif

Michel,

Je confirme tout a fait tes dires, le fromage deguste chez moi avait un peu plus de 6 mois d'affinage.
Comme ce fromage pesait plus de 2,2 kilogrammes a l'achat, j'ai mis, malgre l'aide de differents amis, un certain temps a "l'achever" (aaa)(aaa)(aaa) et il devenait de plus en plus fort, donc plus difficile a marier.

Amicalement,

Laurent

Je ne connaissais pas ce fromage et je l'ai gouté pour la 1ere fois avec un saint chinian du domaine des Jouglas "cuvée en hommage au grand père" (je n'ai pas le nom exact sous la main) et j'ai trouvé cet accord PARFAIT.

Le fromage se melant bien au vin en bouche.

Voilà  et bon app

un "truc" pour le garder plus doux : "LE" torchon de cuisine !

Et oui, c'est pas plus compliqué mais c'est un secret, faut pas le répéter...

Une fois le fromage entamé, on l'enveloppe dans un linge, que l'on place dans un sac plastique (ou une boite) pour les odeurs. On met le tout dans le bac à  légumes (ou une zone pas trop froide du frigo).

Bon, à  cause de la condensation, il faut enlever le linge et le faire sécher (une fois par semaine ou en l'étalant à  chaque sortie du fromage). En procédant ainsi, trois mois plus tard, le goût reste "acceptable".

François.

NB: il faut bien laver le linge ensuite