Nous avons 939 invités et 13 inscrits en ligne

Pour ne pas oublier

  • macflo76
  • Portrait de macflo76 Auteur du sujet
  • Hors Ligne
  • Utilisateur
  • Enregistré
  • Messages : 294
  • Remerciements reçus 1

Pour ne pas oublier a été créé par macflo76

Cela fait des semaines que cette dégustation est prévue, et je sais que Lolive à cherché dans la France entière des bouteilles rares auxquelles il croit. Un programme "gargantuesque" pour terminer l'année en beauté !
Je ne le sais pas encore, mais nous allons remonter jusqu' à la 1ère guerre mondiale. Une époque incertaine, dominée par la peur et la souffrance. Une période où le public devait s'armer de patience et s'adapter aux vins, où la critique ne dictait pas la pluie et le beau temps, et enfin une période où l'argent et l'hyper consommation ne faisait pas tourner le monde. Le vigneron , semble t'il, n'était animé que par l'envie de bien faire selon ses propres convictions. Pour reprendre la célèbre formule d'un administrateur du site, les vignerons de ces temps meurtriers ne souhaitaient que "faire du beau, voire du grand vin !".
Il paraît que c'est à nouveau le cas de nos jours... Je ne souhaite que ça !

CHÂTEAU PAPE CLEMENT Blanc 1985
Lolive ne veut pas le servir, car à l'ouverture quelques heures avant, la bouche n'était pas concluante. L'aération aura été bénéfique puisque finalement il se défend plutôt bien. Le nez d'amande, de miel et d'épices est assez timide. La bouche est puissante, sèche comme certains digestifs. On pense naturellement au Rhône ; Dommage ! En tous les cas, on est loin des somptueux Pape Clément blanc du début des années 90. 87/100

GEWURZTRAMINER CLOS ZISSER 1959 Klipfel
C'était le vin de secours... Il atteint un tel niveau ce soir, que je me permets un jeu de mot : Il vient en effet au secours du Pape Clément ! Le nez démentiel est un feu d'artifices d'odeurs. On ne sait plus où donner de la tête entre le litchi, la mangue confite, les épices indiennes, le caramel beurre salé, et le pain grillé. En bouche, l'attaque est dantesque, pesante sur la langue comme du plomb fondu parfumé d'agrumes confits et de fruits de la passion. Puis tout à coup le vin devient sec et léger sur la réglisse et l'anis et enfin à nouveau subtilement liquoreux en finale. Un monument que je retrouve comme je l'avais découvert il y a quelques années au Buerehiesel... Je trouvais qu'il déclinait ces derniers temps, mais ce soir il est au firmament, et écrase comme une mouche le SGN 1976 de Hugel bu quelques jours plus tard... 99/100

CHAMPAGNE LEON LECONTE 1955
Il est mort malheureusement... NN

MONTRACHET 1973 Fleurot
Il est bien sûr bu à l'aveugle comme d'habitude. Le nez somptueux, rassemble un bouquet de parfums constitués de safran, de silex, de chouchou, de curcuma, et de noyau. Une odeur puissante me rappelle même un célèbre parfum Chanel. La bouche est jeune, subtile, mais d'une incroyable complexité. On note de l'infusion de tilleul, de la verveine, de l'écorce d'orange, et une touche de Zeste. La finale minérale caresse la langue plus de 40 secondes. Inutile de préciser à nouveau la valeur de ce millésime inconnu, qui s'affirme de plus en plus comme un postulant au titre d'année du siècle. Je devrais apprendre à me taire car à force, c'est un secret de Polichinelle ! 97/100

CHARLES HEIDSIECK " La Royale" 1971
Le nez très fin de noisette, de fougère et d'agrumes piquants est élégant à souhait. La bouche est une dentelle avec une bulle fine et bien présente. les arômes de craie et de citron vert dominent nettement l'ensemble. Trop fin pour moi. 92/100

CHARLES HEIDSIECK 1961
J'avais déjà bu ce vin, il y a de nombreuses années, et il trône depuis dans le haut de mon top 30. Je m'étais toujours demandé si je n'avais pas un peu surestimé ce magnifique vin, étant à cette période encore débutant en matière de Champagnes anciens. Vous me croirez si vous le voulez, mais je suis surpris de la justesse de mon jugement de l'époque. J'ai depuis dégusté certains des plus grands Champagnes de l'histoire, et la place de ce 1961 ne changera pas dans mon palmarès. Cela démontre encore une fois l'extrême qualité des cuvées de base, qui n'ont rien à envier aux cuvées prestiges actuelles.
Dès le premier coup de nez, on sent que ce Champagne est vineux, et puissant. L'amande, la colle Cléopâtre, le pain grillé et les fruits pochés envahissent les narines. La bouche offre une attaque de légende où la figue, la tourbe et le miel de sapin écrasent les papilles. Le cordon est d'une jeunesse incroyable, tandis que la finale tout en finesse évoque la guimauve et les minéraux. L'équilibre est magistral grâce à un acidulé impeccablement dosé. Un monument ! 98/100

BLAGNY " Pièce sous le bois" 1983 Matrot
J'avais déjà entendu parlé des grandes qualités de cette cuvée et de sa capacité à vieillir admirablement, mais je n'avais jamais eu l'occasion de la goûter... Le nez superbe de rose, de terre et de bois humide est impeccable et nous fait complètement oublier la pourriture grise de l'année. En bouche, c'est un alcool fort de prune, de pruneau, et de kirsch, avec une touche géniale de fourrure et de terre humide à nouveau. Une révélation ! 93/100

GEVREY CHAMBERTIN Clos Prieur 1983 Roy Petit
Cette fois, tous les défauts analytiques de l'année sont bien là ! Vernis à ongle, vieux fût... En bouche le tanin est lourd, mais l'ensemble est très monolithique. 79/100

CHAMBERTIN 1982 Trapet
Le nez pur et précis rappelle le rosé des Riceys, la framboise, et les épices. En bouche on a une belle déclinaison de fruits rouges acidulés, avec une intéressante minéralité en finale. Il ne lui manque qu'un peu d'ampleur pour me faire chavirer. 91/100

ALOXE CORTON Clos Des Maréchaudes 1982 Fabien et Louis Saier
Un cru assez rare vinifié par les anciens propriétaires du Clos Des Lambrays. Le nez exhale des parfums d'herbes humides, de roche et de petits fruits rouges. En bouche on ressent le soleil grâce aux épices et aux framboises mures qui piquent la langue. Impeccable. 91/100

CHÂTEAU DE POMMARD 1964
Un vin que je n'avais pas du tout aimé, il y a 3 ans... Cette fois le côté sucraïon est très subtile et ce Pommard ne s'en porte donc que mieux. Le nez de tabac, de fleurs et de pétrole est plutôt agréable. En bouches, les fruits rouges confits sont agrémentés d'une pointe de quinquina, et d'écorce. Rien d'inoubliable quand même. 87/100

CHÂTEAU MOUTON ROTHSCHILD 1916
J'avoue que le nez me désarçonne totalement dans les premières minutes, tant il est marqué par le viandox, le bouillon et l'acidité volatile. Avec l'aération, il s'affine et se paye même le luxe d'offrir des nuances de cèdre, de poivron, de café et d'épicéas. En bouche, l'after eight est là, ainsi que la torréfaction, et le jus de viande. Je me demande bien pourquoi diable, nous n'avons pas trouvé le Château à l'aveugle. Il était Mouton jusqu'au bout des oreilles. L'acidité est subtile et le vin reste stable, même après une heure dans le verre. Il n'égale pas le fameux Malartic 1916, mais il démontre toute l'application et la connaissance innée des hommes et surtout des femmes de cette époque. Merci. 95/100

PERRIER JOUET Belle Epoque Rosé 1979
C'est la deuxième fois que je le bois, et mon avis restera le même : Bon mais pas exceptionnel... Le nez de fruits rouges, de ronce, et de bois humide est agréable, tandis que la bouche rappelle la groseille à maquereau, le citron et l'orange sanguine. Le cordon est encore impeccable. Il est loin du légendaire 1982. 92/100

BARSAC 1914 Cuvelier & Fils
Le nez encore frais et puissant est une belle suprise. On note des odeurs de Bounty, de noisettes, de bougie et de sous-bois. La bouche reprend le même thème sans une seule fausse note. Un régal de coco, et d'orange amère, avec une sucrosité délicate. Au delà des guerres, de la haine et de la douleur, on est ici face au miracle du genre humain... 92/100

Quelques heures plus tard, Sardou chante, tandis qu'une dernière bouteille arrive miraculeusement sur la table. Ma note ne sera qu' indicative, car je sais que mon palais n' a plus toutes ses capacités ...

TAITTINGER Imaï 1988
L'emballage est une merveille comme toujours. Le nez d'une jeunesse sidérante s'ouvre sur le bois vert, la peau de noix, puis l'anis et les agrumes frais. En bouche, le cordon est encore trop fougueux, mais les herbes humides, le jus de citron, et la craie délivrent un message clair : Le vin sera grand. Rendez vous dans 30 ans. 91+/100

C'est avec un pincement au coeur que je quitte cette formidable année, mais ma nature profondément optimiste me permet bien vite de passer à la suite. 2010 sera un bon cru, j'en suis sûr...
13 Jan 2010 13:55 #1

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Messages : 4199
  • Remerciements reçus 7

Réponse de cmch sur le sujet Re: Pour ne pas oublier

Une fois de plus de trés beaux CR et toujours étonné par la qualité des millésimes dit faibles comme 73...(tu)
Salutations vineuses,

Christophe
13 Jan 2010 14:17 #2

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Messages : 20738
  • Remerciements reçus 8223

Réponse de Eric B sur le sujet Re: Pour ne pas oublier

Une époque incertaine, dominée par la peur et la souffrance. Une période où le public devait s'armer de patience et s'adapter aux vins, où la critique ne dictait pas la pluie et le beau temps, et enfin une période où l'argent et l'hyper consommation ne faisait pas tourner le monde. Le vigneron , semble t'il, n'était animé que par l'envie de bien faire selon ses propres convictions. Pour reprendre la célèbre formule d'un administrateur du site, les vignerons de ces temps meurtriers ne souhaitaient que "faire du beau, voire du grand vin !".

Une belle vision romantique, mais totalement contredite par la réalité historique : il y avait un manque de personnel (soit à la guerre, soit payés plus cher dans les usines d'armement) si bien que l'on embauchait les femmes et les vieillards ; il y avait des difficultés à s'approvisionner en produits phytosanitaires, si bien que beaucoup de vignes étaient touchées par le mildiou et l'oïdium. Le vin se vendait mal, à des cours modestes (le tonneau de Lafite ou de Margaux se vendait à 1650 F alors que le vin paysan était à 1000F). Beaucoup de propriétaires ne s'en sortaient pas, si bien que nombre de propriétés ont été rachetées à la fin de la guerre par des négociants souvent étrangers à la région et qui s'étaient enrichis durant la guerre (comme Cordier, Cuvelier ou Ginestet).

Alors penser qu'ils ne songeaient qu'à faire du beau et grand vin :S Ils pensaient surtout à survivre...

C'est vrai par ailleurs que la critique ne dictait pas la pluie et le beau temps. C'était les négociants qui avaient ce rôle. Les châteaux subissaient complètement leur loi, content d'accepter de vendre leur vin par abonnement pour les 5 prochaines années (s'il y avait parmi elles une ou deux années exceptionnelles, tant pis pour eux, ils ne touchaient pas un franc de plus).

Vraiment une époque extraordinaire !...

Eric
Mon blog
13 Jan 2010 14:44 #3

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • macflo76
  • Portrait de macflo76 Auteur du sujet
  • Hors Ligne
  • Utilisateur
  • Enregistré
  • Messages : 294
  • Remerciements reçus 1

Réponse de macflo76 sur le sujet Re: Pour ne pas oublier

Eric
soit tu interprètes mes propos d'une façon assez hallucinante, soit tu as lu mon texte en diagonale !
Où as tu vu exactement que je mettais en doute la réalité que tu décris ???
Quiconque se passionne comme moi pour l'histoire et les vins anciens connait parfaitement la situation de cette époque que tu décris d'ailleurs avec beaucoup de détails et de passion.
Tu as certainement vu dans ma description de Mouton 1916 l'allusion que je fais aux femmes de cette époque ; Ca n'est pas par hasard ...
Franchement, comment peux tu penser qu'on ne puisse avoir en tête que la survie ????
Certes c'est une réalité indéniable, mais est ce que le fait de ne pas s'en sortir, de vendre difficilement son vin, de ne pas avoir de main d'oeuvre, interdit le fait de bien travailler?
Tu t'appuies sur des connaissances historiques, qui ne prouvent rien quant aux exigences des vignerons de cette époque. Moi, ainsi que d'autres, nous nous appuyons sur des faits vérifiables : La dégustation des vins de cette époque.
Je peux donc t'assurer que la plupart des petites appellations et petits propriétaires ont fait, pendant les années de guerre, des vins qu'ils ne referont peut être plus jamais.
Imagines Pomerol ou St Emilion à cette époque, il y avait de nombreux domaines exactement dans la situation décrite, et pourtant leurs vins étaient prodigieux et le sont encore des dizaines d'années plus tard. Certains étaient même meilleurs que les crus classés, alors que question survie, ils s'y connaissaient !
Et je ne parle pas des petits crus Rhodaniens, ligériens, ou Bourguignon d'un niveau inimaginable aujourd'hui.
Alors oui tu as parfaitement raison au sujet des difficultés de cette époque, et pour rien au monde je n'aurais souhaité vivre à ce moment là, mais pour le reste je persiste et signe : Les vignerons avaient en tête de faire du grand vin et en plus ils savaient le faire !
On peut en baver et chercher à survivre à tous prix, tout en travaillant bien, crois moi...
A méditer.
Florent
13 Jan 2010 18:26 #4

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Messages : 824
  • Remerciements reçus 99

Réponse de Ephemerophyte sur le sujet Re: Pour ne pas oublier

Joli CR et jolies bouteilles comme d'habitude (tu)
Cependant, j'ai eu à la lecture de ta phrase une impression proche de celle d'Eric. Je ne suis pas certain que l'unique soucis de faire grand ai habité nos anciens (même si je ne leur conteste en aucun cas l'amour du travail bien fait). Il faut aussi voir qu'à l'époque les méthode étaient beaucoup plus artisanales, les vignes produisaient moins, et les pressoirs étaient de très bonne qualité (pressoir à vis).
Je te rejoins en revanche totalement sur le fait que ces années ont donnés des vins prodigieux, mais je ne me lancerai pas en conjecture sur l'esprit de nos aïeux (paix à leurs âmes).

Gautier
13 Jan 2010 18:58 #5

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Messages : 20738
  • Remerciements reçus 8223

Réponse de Eric B sur le sujet Re: Pour ne pas oublier

Pour expliquer (en partie) la qualité que l'on ne retrouvera plus

- les rendements pendant la guerre était entre 10 et 20hl /ha dans une propriété comme Latour qui avait sûrement les meilleurs moyens de la région. Les rendements sont remontés à plus de 30hl après la guerre.

- les grands domaines médocains ont conservé autant que possible leurs vieilles vignes préphylloxériques en continuant à les traiter au sulfure de carbone y compris pendant la guerre. Cela peut permettre de comprendre pourquoi ils ne ressemblent à aucun vin actuel. Ces vignes ont été arrachées au début des années 20 quand les cours sont remontés et leur ont permis d'entreprendre ce travail.

- il suffit de déguster les vins (d'une intensité et d'une profondeur exceptionnelle) issus des vignes plantées en 1901 au château Beauséjour (Montagne Saint Emilion) pour comprendre que la matière végétale a profondément changé en un siècle, et pas vraiment en bien. Beaucoup de vins actuels sont issus de clones productifs créés dans les années 60. Depuis 10-15 ans, des clones plus qualitatifs sont conçus et il y a un retour à la sélection massale (Ausone travaille justement avec le château Beauséjour pour faire des jeunes plants issus des vignes de 1901).

Sinon, je ne pense pas qu'il y ait eu de profonds changements au niveau des méthodes employées entre 1850 et 1950, que ce soit à la vigne ou au chai (si ce n'est l'évolution du matériel végétal). C'est la mécanisation et les découvertes oenologiques de Ribereau-Gayon et Peynaud qui ont changé la donne dans les années 60-70.

Eric
Mon blog
13 Jan 2010 19:22 #6

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Messages : 9196
  • Remerciements reçus 1037

Réponse de RaymondM sur le sujet Re: Pour ne pas oublier

Très beau compte rendu .

Florent, as tu d'aussi bonnes expériences avec les Bourgogne rouges de 1973 ?
13 Jan 2010 20:06 #7

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • macflo76
  • Portrait de macflo76 Auteur du sujet
  • Hors Ligne
  • Utilisateur
  • Enregistré
  • Messages : 294
  • Remerciements reçus 1

Réponse de macflo76 sur le sujet Re: Pour ne pas oublier

Eric, c'est pour ça que je parle surtout des domaines plus modestes dans la réponse que je te fais.... Les grands domaines médocains dont tu parles ne sont pas les plus représentatifs de la volonté des anciens à bien travailler. Les domaines modestes de Pomerol, par exemple sont plus intéressants, puisqu'eux n'avaient aucun moyen, vendaient mal leurs vins, et pourtant faisaient grand, très grand même.
Je pense justement que les rendements et les sols encore vierges ne suffisent pas à expliquer la qualité impressionnante des vins de cette époque...
Ce fameux Barsac 1914 est très proche en qualité d'un Climens. Imagines tu de nos jours un Barsac négoce vendu en Grande distribution au même niveau qu'un Climens ?? Seuls les rendements et le terroir expliqueraient la différence entre 1914 et 2000?...franchement je n'y crois pas une seconde. Mais bon, c'est mon avis, et tes explications sont quand même très pertinentes !

Raymond, j'ai pas mal d'expérience avec 1973 sur différentes régions Françaises. Dans l'ensemble, sa mauvaise réputation est justifiée...
Tout le monde sait que la Champagne est l'exception, puisque 73 est très réussi là bas. En revanche pour les Bourgogne Blancs, je pense que les producteurs eux même n'ont pas idées de ce que leurs vins sont devenus. Ils allient la complexité des 1978, à la précision des 79.
Pour les Bourgognes rouges, tout ce que j'ai goûté n'avait malheureusement pas la même qualité !!! Un peu comme 1992 donc.
Le meilleur rouge que j'ai testé fut un Richebourg J Gros 73...

Merci Gautier. Tu auras remarqué que j'aime me lancer dans les conjectures et bousculer un peu les choses de temps en temps;)
Florent
13 Jan 2010 23:25 #8

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Messages : 504
  • Remerciements reçus 14

Réponse de ChristopheD sur le sujet Re: Pour ne pas oublier

Bonjour,

Pour expliquer la réussite des plus modestes crus, on peut aussi rappeler:

l'absence de fertilisation chimique et la faiblesses des apports organiques
la faible mécanisation et l'absence de motorisation qui implique des tâches manuelles et des densités de plantation fortes
l'absence de désherbants chimiques qui oblige au travail du sol
un matériel végétal moins vigoureux qui entraîne des rendements plus faible

Bref, toutes sortes de choses qui rapprochaient les méthodes de production des plus modestes de celles des plus fameux. C'est la conjonction d'une demande de vins à prix bas et de l'expansion de la mécanisation et de la motorisation qui ont conduit à produire des vins de moindres qualités à moindre coûts sur ces terroirs "modestes". Les vignerons, assujettis à un négoce tout puissant (inexistence de la vente directe), ont répondu à sa demande et à celle du public en adoptant des méthodes de production moins coûteuses, non par abandon de l'envie de bien faire mais pour faire en sorte que leur exploitation survive.
Aujourd'hui, les relations sont plus directes, les vignerons qui le désirent moins assujettis au négoce et la demande de qualité en expansion. Néanmoins, les coûts de changement de mode de production et une nécessaire modification de voir les choses, expliquent selon moi, pourquoi dans de nombreux vignobles les producteurs qui ont fait le choix de la qualité et des circuits de distributions afférents sont si souvent des néo-vignerons ou la jeune génération.

Cordialement

Christophe
14 Jan 2010 06:18 #9

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Messages : 20738
  • Remerciements reçus 8223

Réponse de Eric B sur le sujet Re: Pour ne pas oublier

Seuls les rendements et le terroir expliqueraient la différence entre 1914 et 2000?...franchement je n'y crois pas une seconde

Je ne t'ai pas dit que cela : je t'ai aussi parlé du "matériel végétal" incomparable (voir 1901 de Beauséjour).

Le manque de maîtrise des températures peut aussi provoquer des "catastrophes oenologiques" aboutissant à des vins ne ressemblant en rien à ceux d'aujourd'hui (cf le célèbre Cheval blanc 1947 qui n'aurait pas le droit d'être commercialisé de nos jours).

Il y a tout de même des millésimes qui étaient totalement ratés et qui n'étaient carrément pas commercialisés. Entre 1900 et 1920, 3 millésimes ont eu la note 0/20 par Tastet et Lawton * (1902, 1910 et 1915), 3 ont eu 2/20 (1903,1912, 1913), 6 entre 8 et 10/20 inclus (1908, 1909, 1914, 1917, 1918, 1919). Alors c'est vrai qu'au milieu il y a des réussites, et c'est celles que l'on retient aujourd'hui : 1900 (20/20), 1904 (16/20), 1906 (16/20), 1916 (15/20), 1920 (16/20) et allez ... je t'inclue 1921 (18/20).

En gros, 2/3 de "déchets" pour 1/3 de belles réussites. On est tout de même loin du génie de l'ancêtre...

* Le pouvoir de Tastet et Lawton n'avait rien à envier à celui de Parker aujourd'hui

Eric
Mon blog
14 Jan 2010 08:54 #10

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • macflo76
  • Portrait de macflo76 Auteur du sujet
  • Hors Ligne
  • Utilisateur
  • Enregistré
  • Messages : 294
  • Remerciements reçus 1

Réponse de macflo76 sur le sujet Re: Pour ne pas oublier

Intéressant et enrichissant point de vue de ChristopheD, merci....

Eric, je ne veux pas insister plus, parce que tes propos sont pertinents et je te rejoins parfaitement.Finalement, il y a juste une nuance qui nous sépare, et elle ne justifie pas un débat interminable. Juste ce petit mot, alors, pour te dire que c'est ce qui m'interpelle le plus ! Les petits millésimes cités entre 8 et 10/20 sont encore très bons de nos jours, même sur des appellations plus modestes, et c'est cela qui me pousse à réfléchir... J'ai bien entendu que le "matériel végétal " était de grande qualité, et ajouté à cela ce que tu as dis avant, mais est-ce qu'une application particulière, une compréhension innée de la nature ne pourraient pas aussi permettre à de si modestes bouteilles de tenir 80 ans ? ... C'est une question qui mérite d'être soulevée, car on voit bien que des choses ont changés ces dernières années, et pas seulement dans le domaine des sols et du matériel végétal. On sent un intérêt des vignerons pour le passé, un regard en arrière... Et je me demande parfois s'ils ne cherchent qu'à assainir les sols...
Florent
14 Jan 2010 10:08 #11

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Messages : 14159
  • Remerciements reçus 11

Réponse de François Audouze sur le sujet Re: Pour ne pas oublier

Je prends connaissance de cette discussion.
Je ne parlerai que de ce que je connais, qui est le fruit de mon expérience :
Les vins de la période de guerre 14-18 sont nettement meilleurs quand on les goûte maintenant que les notes données par Tastet et Lawton.
J'ai bu des vins émouvants, brillants, sublimes, qui ne montrent en aucun cas que la période de guerre serait inférieure aux dix ans avant et aux dix ans après.
Pour les dix ans après, il faut être prudent, car la décennie 20 est la plus extraordinaire de l'histoire. Donc, il y a forcément des vins meilleurs dans les grandes années de la décennie 20 que les vins de la guerre.
Et pendant la guerre, ceux qui faisaient du vin le faisaient avec le même amour du travail bien fait que lorsqu'il n'y avait pas la guerre.
On pouvait pleurer sur l'atrocité de l'époque mais faire bien son travail.
Ce qui pousse le plus à l'interrogation, c'est pourquoi des vins de plus de 90 ans peuvent être aussi bons.
Je laisse aux spécialistes le soin de répondre, mais comme Florent, je constate, et ça impose le respect.

Sur le plan du compte-rendu, encore de beaux vins, avec un rare éclectisme. Bravo Florent, car on salive quand on te lit.

Comme Florent cite Malartic 1916, une réussite rare, voici ce que j'avais écrit : "Sur un "homard en coque rôti, fumé aux châtaignes de Corrèze", nous avons eu un magnifique Gruaud Larose 1921 qui créait un accord parfait avec les châtaignes, et nous avons découvert le vin le plus surprenant du dîner : Malartic Lagravière 1916 qui dansait avec la chair du homard. Ce Malartic a la couleur d'un vin des années 80. En bouche, il a la jeunesse d'un vin des années 70, comme si le temps avait décidé de s'arrêter pendant plus d'un demi-siècle. Un vin de fruit et de générosité que beaucoup de convives ont placé en numéro un."


Cordialement,
François Audouze
28 Jan 2010 21:54 #12

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

Modérateurs: GildasPBAESMartinezCédric42120Vougeotjean-luc javauxstarbuck