A l’occasion d’un diner-degustation il y a un mois, j’avais selectionne 9 vins blancs a servir a l’aveugle a quelques convives oenophiles ravis de se preter au jeu. La degustation devait se faire sur un theme a definir et comme la cuisine chinoise appelle plus souvent les vins blancs que les rouges, j’ai choisi de servir 9 vins blancs en par series de 3.
Il me semblait interessant de comparer l’expression d’un meme cepage sur differents terroir, j’ai donc privilegie la variete des origines dans le choix des crus qui provenaient de producteurs et de millesimes dictes par mes gouts et envies de decouvertes ainsi que les limites de ma cave et des circuits d’approvisionnement a Hong Kong (petite pensee ici pour le Kastelberg de Kreydenweiss que j’aurai bien souhaite decouvrir lors de cette degustation). Pour ne pas trop compliquer les choses j’ai choisi une variete principale ; parce que c’est l’un des cepages les plus revelateurs de terroirs et parce que j’adore ca, j’ai opte pour des Rieslings pur ou tres majoritaires dans l’assemblage.
Tous les vins ont été carafés au frais 1h30 avant le service
Serie A – Vins 1, 2 et 3
Vin n°1
Robe de couleur paille pale. Nez delicat mais tres expressif de fleurs blanches, poire, tilleul melees a une note fumee presque un peu animale. Le palais est sec, tendu, d’une tres belle longueur et d’une finale un peu saline. Une entree en matiere delicieuse et un vin au potentiel certain
Vin n°2
Dore. Nez penetrant de notes fumees, d’ecorce de pin et de fruits secs. En bouche, le vin est riche et vineux mais revele une acidite nette et une mineralite prononcee, beaucoup de longueur. C’est beau et austere comme un monastere cistercien, tres apprecie des degustateurs pour son caractere unique
Vin n°3
Dore profond. Dans le verre, le premier nez se montre d’abord assez timide sur des touches de petites fleurs blanches, de mirabelle et une touche de botrytis me semble-t-il. Le vin est droit et aiguise, la tension est superbe, tres longue finale sur des notes minerales. Deja tres beau et plein de caractere, un vin qui sera grand dans quelques annees.
Belle entree en matiere avec 2 tres beaux Rieslings et le seul pirate de la soiree, un Furmint sec de Hongrie. Pichler confirme a mes yeux la qualite et la constance de ses cuvees et j’ai decouvert avec un grand plaisir le Muenchberg d’Ostertag et sa forte personnalite. Le Furmint de Szepsy reste le meilleur sec que j’ai goute a Tokaj, certains degustateurs sont partis sur un chardonnay bourguignon.
1 –
FX Pichler, Wachau Smaragd Loibner Berg 2007 (Loibner Berg, gneiss)
2 –
Szepsy, Tokaji Furmint Szent Tamas 2005 (Szent Tamas 1st Class, volcanique)
3 –
Ostertag, Muenchberg Grand Cru 2005 (Muenchberg GC, gres et depots volcaniques)
Serie B – Vins 4, 5 et 6
Vin n°4
Pale. Nez curieux sur des notes d’encaustique et de fromage de brebis pas tres frais. Ca ne fait pas tres envie et pourtant le palais se presente avec de la richesse et de la longueur meme si ces aromes deplaisants apparaissent en fin de bouche. Probleme de bouteille ? Pas convaincant en l’etat, je lui accorderai le benefice du doute mais tout le monde n’est pas cet avis
Vin n°5
Du bouchon et pas grand-chose d’autre….
Vin n°6
Jaune pale. Le nez s’ouvre doucement sur une mineralite fine et de legeres notes d’agrumes mais ne se livre pas vraiment pour le moment. Si le nez se montre assez ferme, le palais revele toute la classe de la bouteille. Beaucoup de tension et une acidité fine mais tranchante, beaucoup de raffinement et une finale exceptionnellement longue. A ce stade, le vin est nettement domine par le cote mineral et ne revele qu’a regret quelques bribes de son potentiel. Tous les ingredients pour une grande bouteille sont la mais n’etant pas tres familier avec le cru je me demande dans quelle direction il va evoluer : plus de mineralite ou plus de complexite aromatique. Superbe accord avec un merou a la vapeur et sauce soja
Serie qui laisse un petit arriere-gout amer : le 4 etait vraiment etrange et n’a pas convaincu les degustateurs, certains le trouvant meme franchement mauvais. : le 5 montrait un leger cote liegeux a l’ouverture qui n’a fait que s’accentuer au cours du diner, dommage car j’aurai bien aime le compare avec le 6 qui sans se livrer pleinement a montre tout son standing.
4 –
Hugel, Jubilee Riesling 2002 (Schoenenbourg GC, marne et gypse)
5 –
Kientzler, Geisberg Grand Cru 2001 (Geisbegr GC, marne et gres)
6 –
Trimbach, Clos Ste Hune 2002 (Rosacker GC, calcaire)
Serie C – Vin 7, 8 et 9
Vin n°7
Robe tres pale, reflets verts. Des aromes delicats et penetrants de peche blanche, poire meles de touches minerales mais un peu comme le precedent, il semble ne se livrer qu’a regret. En bouche, le vin est riche et suave, du SR est present mais completement fondu dans un ensemble elegant et cisele par une belle acidite. Un tres beau vin au toucher de soie qui devrait s’affiner avec les ans
Vin n°8
Dore tres pale. Le nez petrole beaucoup et revele des touches citronnees. Tres mineral en bouche, beaucoup de vivacite et une acidite tranchante, le SR present sans la bouteille est quasiment impreceptible. Finale longue et intense avec une note iodee. Belle bouteille, assez differente de ce a quoi je m’attendais.
Vin n°9
Dore, reflets d’ambre. Nez riche et ample sur des aromes bortrytises de pate de fruits, de mirabelle et une touche fumee. Le palais est riche, dote d’une belle epaisseur et d’une sucrosite nette mais raffinee, beaucoup de longueur et une finale languissante sur de notes epicees (muscade). Tres beau vin plein de classe dans un style a peine vendanges tardives qui fonctionne tres bien sur un saute de porc epice.
J’avais choisi pour cette derniere serie 3 vins presentant du sucre residuel : le 7 que je connaissais bien s’est montre fidele a lui-meme avec un « toucher de bouche » unique, certains reconnaitront d’ailleurs la signature du producteur. Je n’avais pas de reference sur le 8 que j’imaginais un peu plus marque par la surmaturite alors que le vin est apparu tres sec. Le 9 a montre toute sa classe et termine vin de la soiree, a note que c’etait le seul vin non issu du seul cepage Riesling (tres largement majoritaire cependant)
7 –
Egon Muller, Scharzhofberger Spatlese 2004 (Scharzhofberg, ardoise)
8 –
Trimbach, Cuvee Frederic Emile 375eme Anniversaire 2001 (Osterberg, marne argileuse)
9 –
Deiss, Schoenenbourg Grand Cru 1999 (Schoenenbourg, marne et gypse)
Le palmares de la degustation:
1 - Deiss, Schoenenbourg Grand Cru 1999
2 - Egon Muller, Scharzhofberger Spatlese 2004
3 - Szepsy, Tokaji Furmint Szent Tamas 2005
Mon top 3:
1 - Deiss, Schoenenbourg Grand Cru 1999
2 - Ostertag, Muenchberg Grand Cru 2005
3 - Trimbach, Clos Ste Hune 2002
En conclusion, une belle degustation ou il s’est revele parfois tres difficile d’identifier le cepage dans certains tant le Riesling semble polymorphe. Il se montre tres sensible au terroir mais aussi a la patte du vigneron et les signatures de Muller et Deiss ont ete devinees par certains. Le Furmint a prouve s’il en etait besoin le tres bon niveau des vins secs a Tokaj. Grosse deception sur le Kientzler et je reste dubitatif sur le Jubilee : ce n’est pas la premier fois que je goute cette cuvee et, si cette bouteille semblait deviante, je n’ai jamais vraiment ete convaincu par ce vin. J’ai re-ouvert un 2002 depuis et sans avoir les mêmes aromes deplaisants, il s’est montre peu expressif et manquant de profondeur, pas au niveau des autres crus degustes ce soir la.
Etienne
NB : Desole pour les accents, clavier chinois oblige…