Par comparaison, voici les notes d'un ami sommelier, qui participait à cette séance. On verra nettement la différence d'approche.
Je sais qu'à sa table ils ont apprécié Mission 55 et Latour 55 au même niveau.
J'ai ressenti Latour très largement plus haut.
Voici ses notes :
Cette séance a été historique, un événement magique très bien organisé.
Elle fait suite à celle du 4 octobre dernier qui m’avait impressionné,
la dégustation à l’hôtel de Crillon est un bon choix, le service et la mise en place sans défauts, choix des verres, nombre de vins dégustés et surtout,
qualité des vins présentés « EXCEPTIONNEL »
L’ordre des vins et l’ouverture des vins 4 heures avant,
méthode à breveter « Audouze » font partie également du succès.
NB :La table n°4 était très sympa, des amateurs passionnés, un bon esprit et une soif de connaissances autour de chacun des vins dégustés. Certains vins ont atteint leur apogée,
vins de références proche de la perfection, d’autres un peu fatigués, d’autres « softs »,
mais tous ont eu des choses à raconter : étonnant !
Notes de dégustations du 26 janvier 2006
Champagne Léon Camuzet:
Beau vin d’apéritif aux notes toastées, nez discret d’agrumes et de fleurs blanches.
Bouche fraîche et complexe où se mêlent douceur du fruité et rondeur de sa structure.
Vin nature de champagne 1950:
Robe jaune doré dense, le nez est un vrai poème en perpétuelle évolution,
le miel, le pain d’épices, la noix , l’agrume confite.
En bouche fruits mûrs, poiré, dattes et figues, également la brioche.
Finale fumée très agréable, arrivé à maturité
Chablis Montée de Tonnerre Jean Quénard 1950:
Une analogie intéressante entre vins de la même année, le chardonnay de Bourgogne
et celui du champagne 1950 Saran, dégusté juste avant, la mémoire du cépage est encore présente dans ces 2 vins, notes beurrées et brioches. Ce vin un peu fatigué, révèle au nez des
fruits blettes:coings et fruits secs confits. En bouche, des notes toastés, mais finale très courte.
Criots Bâtard Montrachet Jaboulet Vercherre 1988:
Robe sombre, orange à reflets topaze, nez subtil de crème brulée, caramel et vanille, en bouche une saveur concentrée compôsée de mélasse, miel, figue et chêne vieux. Finale un peu courte, car il manque à ce vin la minéralité et la fraîcheur digne des grands Montrachet.
Tokay pinot gris Hugel 1928:
Avec plus de 350 ans d’existence la maison a une influence décisive sur le vignoble alsacien,
Jean Hugel nous a présenté un très grand vin sans doute des Grands Crus Sporen, d’où sont issus des vendanges tardives et sélection de grains nobles qui sont des cas d’école !
Ce 1928 est extraordinairement visqueux, qui confirme une belle onctuosité au palais,
nez complexe de fruits à surmaturité et de fruits secs : pêche blanche, abricots, raisins de Corinthe. Bouche extraordinaire, puissante avec un équilibre proche de la perfection.
Magnum Château Olivier 1990:
Robe grenat , légèrement tuilée, nez dévoilant une palette aromatique évoluée,
marqué par le sous-bois humide d’automne, le compost et des notes animales giboyeuses.
Bouche évoquant le truffe, pleine, dotée de beaux tannins doux et fondus.
Vin déjà agréable à boire que je recommande sur des viandes grillées et pas sur un fromage !
Finale courte pour un millésime qui présente sur le papier un grand potentiel de garde.
Cos d’Estournel 1973:
Vin tannique, mais juste ce qu’il faut, avec un bouquet terreux, d’épices et de chocolat,
En bouche, des notes de vanille et de cannelle. Un petit millésime, en déclin, dommage.
Il manque les fruits noirs et la puissance d’un Cos d’Estournel.
Château Phélan-Ségur 1964:
Un Saint-Estèphe typé, un grand millésime, que du bonheur!
Robe orangée, nez de cuir, de tabac blond et de gibier.
Bouche ample, tanins soyeux et fondus, caractérisée par son élégance et son volume.
Du caractère, très agréable.
Château Chasse-Pleen 1961:
Quel vin.. Depuis le début de cette dégustation, se confirme une vérité,
nous ne comparons pas seulement des terroirs et des vinifications, mais surtout
les millésimes qui apportent pour certains la magie, d’autres la normalité, et d’autres encore, la déception.. Ce Chasse-Spleen 61 est étonnant, pour un Moulis, dont le caractère soyeux et la souplesse sont proches des Margaux, tout en dentelle, quelle finesse et élégance, un vin d’émotion. J’adore ce 1961, ou domine la puissance et la fraîcheur mentholée(iodée dira mon voisin de gauche) combinée à la complexité d’un vin mature très long en bouche, fruits noirs, compotés, tabac blond, boîte à cigare et touches de café. Magnifique vin de référence de cette appellation, le meilleur que j’ai dégusté en Moulis, un grand Bordeaux.
Château Mission-Haut-Brion 1955:
A l’aveugle, j’aurai dit Haut-Brion : ce vin est parfait, extraordinairement dense, riche en sève, puissant, le bouquet est concentré, son ampleur aromatique immense, son moelleux est harmonieux, ce 1955 à la manière de Dali, j’ose dire est« Mo-nu-men-tal »
Ce vin de la Mission est sans doute plus « masculin » que Haut-Brion, mais quelle classe.
Château Latour 1955:
Un vin réellement monumental. Noir, puissant, opaque, massif,
il possède une noblesse de saveur unique et somptueuse,
une intensité et un fruité d’une extrême opulence. Très Latour..
Ce vin tout comme Le Mission-Haut-Brion de 1955 sont les plus réguliers en excellence,
faits pour résister à l’épreuve des années. Idéal pour une séance de l’Académie des vins anciens. Nb: J’ai pu goûter à Londres en 1999, les Latour 45, 55, 61 et 70 à l’aveugle.
Ma meilleure note était déjà pour Latour 55 pour lequel j’avais mis 98/100, confirmée
ce 26 janvier à égalité avec Mission-Haut-Brion 55, que je note également 98/100.
Domaine de Chevalier 1924:
Robe pâle orangée, reflets topaze. Premier nez de tabacs blonds et de fruits rôtis,
notes de torréfaction et de chocolat se dégagent, bouche épicée, girofle et gibier.
Vin élégant, finale courte sur des tannins secs, devait être à son apogée dans les années 1990.
Volnay 1er Cru Bouchard 1957:
Robe rose pâle, reflets orangés. Nez subtil de fruits mûrs, notes de griottes et d’épices,
purée de cassis, soulignée par des touches boisées. Bouche encore gourmande pour un vin
de mon année de naissance, mais finale courte, dommage.
Le potentiel de garde d’un Volnay étant de 15-20 ans,
sur des terroirs comme Les Champans ou Les Caillerets.
Chambolle Musigny Les Amoureuse Domaine Ropiteau 1964:
« Le Musigny est aux rouges ce que le Montrachet est aux blancs, un pur coups d’Archet » disait Jean-François Bazin. Ce Chambolle Les Amoureuses est gourmand, sublime, opulent, encore plein de fruits rouges, notes réglissée. Finale grandiose, un grand Bourgogne
qui tient sa place malgrè les « monuments » dégustés auparavent, superbe !
Gewurztraminer 1976 Sélection de grains Nobles Hugel:
Un grand Cru Sporen de chez Jean Hugel, et bien sûr, un cas d’école..
Grande complexité d’arômes fruités: litchi, abricots, mangue ,fruits exotiques et épices confites, délicieux. Quelle fraîcheur ! véritablement impressionnant, un moelleux qui
frôle le sublime. très minéral, ce vin qui a la richesse d’un nectar va traverser le temps
comme ce Tokay 28 dégusté auparavent.
Château Suduiraut 1945:
Tellement Sauternes, fruité d’une grande complexité aromatique,
miel d’accacia, cire d’abeille, abricots cuits, ananas et fruits confits, tout y est !
Avec en plus les épices et les notes de caramel, et de torréfaction apportée par ce millésime très concentré, étonnamment Jeune. A Suduiraut, l’aura de qualité est liée a une faible production, ainsi qu’à un terroir complémentaire: « Argile, silice et calcaire pour la chair,
le corps et la distinction » résume Nicolas De Rabaudy.
Un vin émouvant, pour terminer en fanfare cette dégustation historique.
Mes Favoris:
1 et 2 Mission Haut-Brion 55 a égalité avec Latour 55
3 Suduiraut 45
4 et 5 Chasse-Spleen 61 a égalité avec Chambolle Les Amoureuses 64 Ropiteau
Coups de Cœur: Tokay 28 et Gewurztraminer 76 Hugel