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un Bichot centenaire et un Yquem 1959

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un Bichot centenaire et un Yquem 1959 a été créé par François Audouze

Le dîner se tient au restaurant de Patrick Pignol. J’étais allé dîner quelques jours auparavant après le spectacle de Laurent Gerra pour évoquer diverses hypothèses d’accords. Le chef est à Rungis avant l’aurore et fait son menu en fonction des produits qu’il trouve, mais bien sûr avec quelques idées en tête que mes vins lui suggèrent. C’est cela que j’étais venu scruter, car Patrick aime créer des recettes nouvelles avec des clins d’œil joyeux.
J’arrive pour l’ouverture des bouteilles. Deux journalistes et un photographe vont assister à cette cérémonie devenue un rite. Comme je réponds à des questions tout en ouvrant, je suis peut-être moins attentif à certains détails, et la statistique quasi irréelle de bonne tenue de mes bouteilles va se faire plomber ce soir. Le vin qui m’inquiète, c’est l’Arbois. Il a un nez plat de vin fatigué. Je suis prêt à le déclarer mort, car il me chiffonne trop. Je vais lui laisser une chance, mais il est exclu qu’il accompagne les oursins. On va donc lui substituer le Vouvray au nez rassurant, en demandant au chef de faire ressortir le coté sucré des oursins. Le message lui parvient.
Tout en répondant aux questions des deux journalistes, je fais mon inspection des odeurs, et voilà que le Corton-Charlemagne est bouchonné. A peine perceptible en bouche, mais le nez rebute trop. Je décide de prendre sur la carte de Patrick Pignol un Chevalier-Montrachet. Pas question de décevoir mes hôtes malgré un volume de vins très nettement supérieur à la moyenne habituelle pour les neuf que nous serons. Le bouchon du Bichot confirme qu’il a plus de cent ans. Cette bouteille sans étiquette fait du vin une énigme. Son odeur est redoutablement belle.
Mes hôtes arrivent avec une ponctualité remarquable et nous faisons un tour de table pour nous présenter sur un Champagne Ayala Brut ancien vers 1980. En fait, en bouche, je dirais volontiers 1975. Les participants comprennent dès ce premier vin que nous entrons dans le monde des vins anciens. Belle rondeur en bouche et trace longue, équilibre chaleureux. C’est une belle mise en bouche.
Voici le menu composé par Patrick Pignol, menu de retour de marché :
Damier de Saint-Jacques et truffes noires /
Langoustines croustillantes infusées au citron et parfum de marjolaine /
Oursins en coque, mousseline de persil tubéreux /
Animelles dorées au beurre de cardamome /
Cochon de lait en cocotte, légèrement pimenté au gingembre, salsifis lardés /
Mimolette «vieille » dans sa simplicité /
Clémentines caramélisées et petites madeleines au miel de bruyère.

Il y aura dans ce voyage gastronomique de belles émotions. Et les clins d’œil subliminaux ne manqueront pas.
Nous avons autour de la table deux couples qui sont venus à la suite de l’interview de France Info de l’année dernière, qui a manifestement été entendue en Suisse et dans le limousin, les deux journalistes, une amie d’enfance qui, au lieu d’avoir le pieux recueillement que suggèrent mes doctes propos, ne cessait de me plaisanter comme quand nous avions vingt ans, et l’ami cuisinier de génie à ses heures que je voulais remercier de ses prouesses racontées dans de précédents bulletins. Pour la première fois depuis bien longtemps c’était un dépucelage pour tous les convives. Il y a d’habitude toujours un « ancien » qui joue les vétérans. Là, point. Le dîner commence.
Le Champagne Salon « S » 1983 aura du mal à exprimer son nez car nous sommes sous un nuage de parfum de truffe. Le plat est éblouissant et le Salon affiche des personnalités différentes que révèlent le sucré de la coquille ou l’insistance de la truffe. Ce champagne a la couleur d’une pêche déjà rosie, une belle bulle active et une profondeur en bouche qui est rare. Et l’accord met nos sens en éveil tant il faut être attentif pour déceler tout ce qui se passe dans notre palais. Nos papilles sont heureuses.
Devant la profusion des vins, je n’ai même pas cherché à savoir si le Corton Charlemagne Eugène Ellia 1993 revenait à la vie. On ne le saura jamais. Le Chevalier-Montrachet Domaine Leflaive 1993 est tellement éblouissant que la question n’a plus d’intérêt. C’est un vin jeune puissant, chaleureux, qui joue sur du velours avec une langoustine goûteuse à souhait. Ici, on ne se pose aucune question car tout est naturel et parfait.
Cela n’allait pas être le cas avec l’oursin et le Vouvray le Haut Lieu Demi Sec Huet 1971. Je dis un peu trop vite que je trouve la mousseline trop salée. Le chef informé vient rectifier notre appréhension sur le plat. Et effectivement mon impression change après deux ou trois cuillérées. L’oursin a des accents de châtaignes, avec cette légère douceur qui convient au Vouvray. Notre table se divise en deux camps, ceux qui pensent que l’oursin rétrécit le vin, qui s’épanouit dès que le plat est fini, et ceux qui comme moi pensent que l’accord est d’un immense intérêt. On pourrait sans doute rapprocher les points de vue en admettant que le plat n’élargit pas le vin mais que l’accord est judicieux. Malgré les remarques de quelques convives, je pense que cet essai se devait d’être tenté, parce qu’il sollicite les papilles comme en un manège, où l’on est pris dans un tourbillon de saveurs variées. Ce Vouvray est éblouissant de charme et de sérénité.
Les animelles devraient sans doute s’appeler animâles, car il s’agit des parties sexuelles mâles qui généralement vont par deux. Faisons le calcul. Nous sommes neuf, et nous avons chacun dans notre assiette trois moitiés de testicules de veau. Où est le chaînon manquant ? Est-ce la masse manquante de l’univers ? Plat délicieux qui a montré que je ne devrai plus essayer le Château Coustolle Côtes de Canon-Fronsac 1966, car cette bouteille bouchonnée (je ne l’avais pas remarqué à l’ouverture) fait suite à un autre malheureux essai. Heureusement, il suffisait d’avoir le Château Margaux en magnum 1970, qui après avoir installé un suspense sur la première gorgée non encore ouverte, fit montre de l’éclat rayonnant d’un beau bordeaux chaleureux. Ce n’est pas le meilleur Margaux qui soit, mais quand il a trouvé son épanouissement, il communique un plaisir sans mélange.
Je tenais absolument à voir en situation de repas ce « SEG » F. Sénéclauze (13°) Saint Eugène (Oran) récolte 1952. Il n’a pas manqué son rendez-vous. Epanoui, chaud en bouche, au message simple mais convaincant, j’ai adoré, alors qu’un bourguignon présent à table allait évidemment lui préférer le vin très ancien de la cave de M. Bichot père, probable avant 1920 (voire avant 1900). Ce vin m’avait été offert dans la cave de M. Bichot, vin sans étiquette, sans dénomination, que l’on aurait pu identifier en se référant aux numéros des cases. Mais cela a-t-il de l’importance ? La couleur évoque un Beaune, et le goût aussi. Le bouchon m’avait indiqué la fin du 19ème siècle. Le goût me suggère 1899 car j’en ai le souvenir. Je ne garantis évidemment pas cela, mais comme il n’est plus possible de vérifier, disons : Beaune Bichot 1899. Ce vin est splendide. Il sera définitivement sacré dans les votes. Sa jeunesse étonne, et la plénitude de l’assemblage de toutes ses composantes. Magnifique sur le cochon de lait, il ne doit pas faire oublier le vin d’Oran que j’ai beaucoup apprécié, dans des atmosphères de Rhône.
La mimolette à pleine maturité allait accompagner un revenant, l’Arbois Jaune Louis Carlier 1949. C’est vraiment un ressuscité car le vin que j’aurais volontiers déclaré mort tenait son rôle à ce stade du repas. Légèrement fatigué, sans doute, mais redevenu de sa région.
Le Château d’Yquem 1959 a une couleur qui ferait pâlir d’envie les publicitaires qui veulent vanter une crème solaire. Ce vin a la couleur des délicieuses gelées de coing dont ma femme règle l’alchimie. Le nez est exact. C’est l’Yquem dans sa plénitude totale. La longueur est infinie, et bien malin qui pourrait trouver le moindre défaut à ce sauternes idéal. Plus beau, plus chaleureux que le 1937 de l’académie. Là-dessus, la clémentine caramélisée a capté avec une précision absolue l’organigramme de cet Yquem. Et l’accord est impressionnant. On est en présence d’une perfection culinaire totale. Inutile de dire que la joie est à son comble.
Nous ne serons que huit à voter car une jolie chypriote férue d’art s’en sent bien incapable. Le Beaune de Bichot rafle quatre places de premier et trois places de second. Le vin d’Yquem reçoit trois votes de premier et le Salon un vote de premier. Le palmarès résultant de tous les votes serait : Beaune Bichot vers 1899, Château d’Yquem 1959, Château Margaux 1970, Vouvray le Haut Lieu Huet 1971 et champagne Salon 1983. Mon vote : Château d’Yquem 1959, Beaune Bichot vers 1899, Vouvray Huet 1971, champagne Salon 1983.
L’ambiance était à la joie, aux rires, aux petites taquineries amusantes, avec un Patrick Pignol souriant et épanoui, sa cuisine au diapason de son humeur, un service attentif. Une soirée qui illuminera le ciel des souvenirs de chacun des participants.


Cordialement,
François Audouze
18 Fév 2006 09:57 #1

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Réponse de charlesv sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

J'imagine la perfection de l'accord entre l'Yquem 1959 et les clémentines caramélisées , petites madeleines au miel de bruyère .
Serait-il possible d'avoir un développement plus détaillé sur cet accord ?
Yquem possède un large spectre d'associations plus simples: Gariguettes et Chantilly , Barragnaudes et mesclun vinaigrette (et oui) .

" Je n'écris pas pour une petite élite dont je n'ai cure, ni pour une entité platonique adulée qu'on surnomme la Masse. Je ne crois pas à ces deux abstractions, chères au démagogue. J'écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps. " Jorge Luis Borges
18 Fév 2006 14:07 #2

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Réponse de François Audouze sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

votre idée des gariguettes mériterait d'être essayée, car jusqu'ici, je pense qu'il y a deux interdits pour les sauternes : fruits rouges et chocolat.

Mais une fois, Alain Dutournier a traité les fruits rouges d'une façon passionnante qui a brisé le tabou.

Je pense que l'accord se voit facilement : la clémentine fait apparaître tout le côté agrumes et le caramel tout le côté fumé, thé. Tout le succès tient du dosage. Trop de sucre, on limite Yquem. Patrick Pignol a dosé de façon parfaite.
Jean Philippe Durand, que j'avais invité pour le remercier de ses prouesses lors du dîner du 31 janvier a apprécié en connaisseur.
Un grand moment.
Nota : parfois, quand un accord est parfait, comme le homard au Meurice avec un Duhart-Milon 1962, on est saisi par la perfection, mais on ne sait pas vraiment d'où ça vient. C'est juste une harmonie parfaite, insaisissable.


Cordialement,
François Audouze
18 Fév 2006 18:10 #3

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Réponse de charlesv sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

On est saisi par la perfection, mais on ne sait pas vraiment d'où ça vient .

Je suis parfaitement d'accord , l'explication plus ou moins juste peut d'ailleurs casser la magie d'un tel moment . En l'espèce seul un professionnel , me semble-t-il , peut parvenir à un tel degré de perfection dans le dosage d'un plat complexe . Jean-Philippe est l'exception à la règle .

Votre idée des gariguettes mériterait d'être essayée .

Ce n'est pas une idée , j'ai seulement emprunté cet accord , qui m'avait immensément séduit , au regretté Michel Delon . L'avantage est que la mise en oeuvre est toute simple : des Gariguettes parfumées , une bonne crème et ... Yquem .

" Je n'écris pas pour une petite élite dont je n'ai cure, ni pour une entité platonique adulée qu'on surnomme la Masse. Je ne crois pas à ces deux abstractions, chères au démagogue. J'écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps. " Jorge Luis Borges
18 Fév 2006 20:37 #4

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Réponse de Guest sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

Charles,

Barragnaudes et mesclun vinaigrette (et oui) ... et Yquem 1988 !
20 Fév 2006 16:18 #5

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Réponse de Guest sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

Charles,

Barragnaudes et mesclun vinaigrette ... et Yquem 1988 !
20 Fév 2006 16:18 #6

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Réponse de Guest sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

Charles,

Barragnaudes et mesclun vinaigrette ... et Yquem 1988 !
20 Fév 2006 16:18 #7

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Réponse de charlesv sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

Laurent ,

Malheureusement il n'y avait qu'une bouteille d'Yquem 1988 !

" Je n'écris pas pour une petite élite dont je n'ai cure, ni pour une entité platonique adulée qu'on surnomme la Masse. Je ne crois pas à ces deux abstractions, chères au démagogue. J'écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps. " Jorge Luis Borges
20 Fév 2006 16:40 #8

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Réponse de François Audouze sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

Laurent en est tellement baba (sans rhum) qu'il en bégaie.

Pour moi, un roquefort s'il est crémeux peut aller, mais je préfère de loin un Stilton ou une fourme.
Et vinaigrette : no future.
Un goût pur d'une pâte bleue, sans chemin de traverse, c'est cela qu'il faut.
C'est pour cela qu'il ne faut jamais de pain quand un fromage est prévu pour un vin.
Si le fromage est prévu pour être du fromage, alors ça va avec du pain.
Si le fromage est prévu pour être le compagnon d'un vin, alors, ni pain ni salade si vinaigrette.


Cordialement,
François Audouze
20 Fév 2006 16:47 #9

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Réponse de Guest sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

samedi dernier :

Stilton de chez Xavier (Toulouse) et Porto Burmester Colheta 82 : pas mal du tout !

Le porto marche bien aussi avec le gâteau de la maison Pillon : chocolat au lait, caramel, basilic !
20 Fév 2006 17:14 #10

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Réponse de RaymondM sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

François, Charlesv, Laurent,

Pardonnez moi d'aller à contre courant ,mais je trouve que si le liquoreux est très grand c'est vraiment domage de l'accompagner de quoi que ce soit.

Je peux le concevoir pour des vins moyens ou simplement bons mais pas pour les très grands .C'est presque un crime:) ! C'est mon opinion !
20 Fév 2006 17:49 #11

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Réponse de Guest sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

Raymond,

J'aime associer chocolat et porto (ce n'est pas un scoop).

J'ai des souvenirs émus de grands liquoreux seuls, en entrée de repas (ex Yquem 83).

Les grands liquoreux, en fin de repas, souffrent, tout comme les deserts, de la diminution d'appétit.

Je pense que dans le domaine des accords, la recherche est infinie et qu'elle ne peut se solder par un avis définitif, encore moins universel.
20 Fév 2006 17:58 #12

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Réponse de Guest sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

Raymond,

J'aime associer chocolat et porto (ce n'est pas un scoop).

J'ai des souvenirs émus de grands liquoreux seuls, en entrée de repas (ex Yquem 83).

Les grands liquoreux, en fin de repas, souffrent, tout comme les desserts, de la diminution d'appétit.

Je pense que dans le domaine des accords, la recherche est infinie et qu'elle ne peut se solder par un avis définitif, encore moins universel.
20 Fév 2006 18:00 #13

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Réponse de charlesv sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

Vous êtes bien péremptoire François .

Le Stilton , je le préfère avec un grand Porto Vintage (même si ce n'est pas très original) .
Une fourme bien sûr .
Un Roquefort crémeux et surtout pas pointu , encore d'accord .

Pour le reste , j'ai plusieurs fois expérimenté les accords que je propose avec un certain succès : je pense que laurent ne me démentira pas . Cela dit , je ne suis pas présomptueux , je ne prétends donc pas à l'accord parfait .

Enfin je me permets de vous conseiller un Saint-Nectaire (avec ou sans pain , avec en ce qui me concerne) et un Pauillac à maturité .

Les associations vins/fromages sont une vieille source de débats entre amateurs .

" Je n'écris pas pour une petite élite dont je n'ai cure, ni pour une entité platonique adulée qu'on surnomme la Masse. Je ne crois pas à ces deux abstractions, chères au démagogue. J'écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps. " Jorge Luis Borges
20 Fév 2006 18:13 #14

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Réponse de François Audouze sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

Je ne suis pas péremptoire, mais en matière culinaire, quand je m'adresse à des chefs qui sont de vrais artistes, et dont je souhaite mettre en valeur le talent, je suis obligé de parler en termes de "blanc / noir", pour qu'on évite des mauvaises pistes.
Je m'efface derrière leur talent, mon rôle consistant plus à éviter une erreur.
d'où la volonté de simplifier.
Un vin ancien nécessite des goûts simples.
Pas des plats compliqués.
C'est ce qui justifie que j'essaie d'éviter les traces difficiles à explorer.
Le sujet est passionnant et je l'aborde avec l'esprit ouvert.
Mais il est évident que lorsqu'on a choisi fromage (ce que je ne fais jamais avec les très vieux rouges) l'accord doit être fromage / vin, sans rien d'autre;
C'est juste cela.
Sinon, j'ai horreur d'exclure.


Cordialement,
François Audouze
20 Fév 2006 21:15 #15

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Réponse de bouhi sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

En tout cas, le stilton et un vieux liquoreux, c'est assez génial... Certes, il y a peut être encore mieux : les goûts et les couleurs, toujours eux.

Au niveau du chocolat, je suis d'accord avec Ganesh : chocolat = porto (et autres banyuls, très vieux Rivesaltes et Maury). Un simple moelleux au chocolat, éventuellement nappé d'un sirop d'agrumes, servi avec un porto vintage, un (bon) tawny ou un LBV et c'est le bonheur.

François
20 Fév 2006 21:43 #16

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Réponse de charlesv sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

Une reflexion qui m'intéresse beaucoup car les vins anciens nécessitent et méritent effectivement des associations prudentes .
Mon expérience est bien plus limitée que la votre mais pas négligeable .
Pour aller dans votre sens , j'ai longtemps été étonné par la simplicité des plats servis dans les grands Châteaux bordelais : saumon grillé , gigot de 7 heures . Certes je force le trait et les choses évoluent . La raison invoquée était que les plats devaient être au service du vin .
Je suis à ce point déformé par mon amour du vin que j'ai des difficultés à évaluer un repas en dehors des mariages plats/vins .
J'ai eu une expérience fabuleuse sur le plan gustatif et intellectuel à El Bulli . Je regrette toutefois l'incompatibilité de la cuisine de Feran Adria avec la plupart des grands vins fins et complexes . C'est ainsi .

" Je n'écris pas pour une petite élite dont je n'ai cure, ni pour une entité platonique adulée qu'on surnomme la Masse. Je ne crois pas à ces deux abstractions, chères au démagogue. J'écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps. " Jorge Luis Borges
20 Fév 2006 21:57 #17

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Réponse de François Audouze sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

Pour un vin ancien, rien ne vaut la simplicité, voire même la simplification.
Et je constate même que le vin va tantôt avec la chair, tantôt avec la sauce, et plus rarement avec les deux (nota : c'est une constatation très importante).

Si "chocolat = Porto", je suis obligé de dire que "chocolat = Maury" est bien meilleur.
Mais, là encore, question de goût.
Et ni Adrian, ni Gagnaire, ni Veyrat ne seront des metteurs en scène des vins anciens. Des chefs ultra brillants, mais qui ne savent pas se mettre dans la perspective du vin ancien.
Alors qu'un Gérard Besson le sera dix fois plus, car il a compris l'essence d'un vin ancien.
Les maîtres sont pour moi Guy Savoy et Alain Senderens, sur ce sujet.
Mais Dutournier, Fréchon, Anton, Pignol, Alléno y sont évidemment sensibles.
Et, si ce ne sont pas les chefs, des Jean Claude Vrinat ou Philippe Bourguignon ont cette sensibilité aussi.


Cordialement,
François Audouze
21 Fév 2006 01:13 #18

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Réponse de Fred Louvet sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

> Et ni Adrian, ni Gagnaire, ni Veyrat ne seront des
> metteurs en scène des vins anciens. Des chefs
> ultra brillants, mais qui ne savent pas se mettre
> dans la perspective du vin ancien.

Ne savent-ils pas le faire? Ou refusent-ils de le faire?
21 Fév 2006 09:01 #19

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Réponse de charlesv sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

Il ne faut pas oublier que Mondrian fut , avant de se lancer dans l'abstraction , un peintre académique merveilleux technicien . Je serais enclin à penser qu'Adrià , fort de sa science du goût , est capable de marier vins anciens et plats nouveaux . Je pense aussi qu'il a d'autres préoccupations .
J'ai mangé le meilleur jarret de veau de mon existence à l'Arpège en accompagnement d'un Château Margaux 1990 , ainsi qu'un divin feuilleté à la vanille . C'était juste avant la période légumes de Passard ... par ailleurs sûrement intéressante .

" Je n'écris pas pour une petite élite dont je n'ai cure, ni pour une entité platonique adulée qu'on surnomme la Masse. Je ne crois pas à ces deux abstractions, chères au démagogue. J'écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps. " Jorge Luis Borges
21 Fév 2006 11:50 #20

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Réponse de François Audouze sur le sujet Re: un Bichot centenaire et un Yquem 1959

Ma phrase ne se voulait pas critique pour des chefs que je considère comme des grands.
Ils font ce qu'ils veulent car leur talent le leur permet.
Mais si je sens qu'ils ne vont pas se mettre "au service" du vin pour que l'accord sublime le vin, je respecte leur approche et je ne vais pas leur imposer la mienne.

Je réagis plus facilement quand un chef vibre aux vins que je lui suggère de mettre en valeur.


Cordialement,
François Audouze
22 Fév 2006 18:25 #21

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