Quand LPV Versailles a décidé de confier à Vivien l’organisation du thème « Loire », nous savions tous que ce serait super ! A commencer par le titre de ce CR qu’il a déposé à l’INPI…mais je lui ai payé des royalties…
Il est vrai que nous avons affaire à un spécialiste et qui de plus n’a eu que l’embarras du choix parmi les nombreuses propositions de qualité qui lui ont été faites.
Nous nous retrouvons donc à onze au lieu habituel, prêts à affronter trois triplettes de blancs secs, quatre paires de rouges et une paire de liquoreux.
Seule cette dernière sera hétéroclite mais Vivien avait décidé pour les blancs et les rouges de présenter le même millésime pour chaque série. J’ai remarqué que les robes étaient pourtant souvent différentes, surtout pour les rouges, et je vais finir par croire que ce n’est pas un indice important pour trouver le millésime !
Allez, c’est parti, à l’aveugle, bien entendu, sauf pour Maître Vivien…
Première triplette de blancs
Des vignerons assez emblématiques d’Anjou, sur le très beau millésime 2010.
VDF – Domaine Benoît Courault – Gilbourg – 2010
Robe d’un or assez dense.
Nez intense, très marqué par les fruits blancs, oscillant de la pomme à la poire, avec quelques notes dérangeantes, de solvant voire d’oxydation.
La bouche est plus avenante, toute en fraîcheur et en finesse, sur une longueur honnête et une finale salivante. Cela manque cependant de chair, surtout comparé au vin suivant.
Bien ++
VDF – Domaine Stéphane Bernaudeau – Les Nourrissons – 2010
Robe d’un or assez dense également.
Nez très intense, sur des arômes de brioche très prégnants, confinant à la pâtisserie par ses notes miellées et de caramel. Le fruité sous-jacent laisse cependant augurer une belle matière.
Effectivement large et concentrée, la bouche très sapide, sur une aromatique similaire, impressionne par sa chair généreuse. Elle ne manque cependant pas d’acidité pour l’équilibrer suffisamment.
Un chenin dans un style un peu hors normes mais que j’ai beaucoup apprécié.
Très Bien ++
Anjou – Domaine Pithon-Paillé – Coteau des Treilles – 2010
Robe toujours d’un or assez dense.
Nez très ouvert sur des fruits jaunes, apparaissant d’abord légèrement réduit, puis faisant preuve d’une belle complexité : menthe, foin, touches empyreumatiques et mêmes pétrolées.
La bouche est étoffée, avec une tenue de corps sans faiblesse, une certaine tension, mais encore ces notes de fine réduction sur le grillé – fumé.
Très Bien (+)
Deuxième triplette de blancs
Des domaines phares sur un beau millésime mais chaud : 2009.
Montlouis – Domaine Le Rocher des Violettes – La Négrette – 2009
Robe légèrement dorée.
Nez d’une intensité moyenne mais d’une élégance rare. C’est fin et précis sur une aromatique de fruits blancs, agrémentée d’une touche de tilleul et de notes truffées du plus bel effet.
La bouche n’est pas en reste : la très belle acidité est enrobée par une matière au fruité très pur, la persistance est remarquable jusqu’à une finale ciselée. Du grand art pour un tel équilibre sur 2009 !
Excellent
Vouvray – Domaine La taille aux Loups – Clos de Venise – 2009
Robe d’un or clair.
Nez baroque renforçant l’impression de puissance, sur des fruits jaunes bien mûrs poussant jusqu’à l’exotique.
La matière mûre et noble s’affirme en bouche sans pesanteur et tout en préservant la vivacité, la sapidité se maintient encore dans la finale.
Très Bien +
Saumur – Château Yvonne – 2009
Robe d’un or moyen.
Le nez très intense exhale des arômes de pomme et de coing, et laisse apparaître une pointe d’oxydation ainsi qu’une touche grillée.
D’un beau volume, la bouche est ronde et dotée d’une chair généreuse. Son acidité est masquée mais sans doute sous-jacente, la finale de bonne facture.
Très Bien
Troisième triplette de blancs
Des vins représentant les trois sous-régions, en théorie plus « hors normes » avec retour sur le très beau millésime 2010.
Chinon – Domaine Bernard Baudry – La Croix Boissée – 2010
Robe d’un or dense.
Nez très intense mêlant, après réchauffement dans le verre, beau grillé, fruits blancs et tilleul.
La bouche se révèle également en retrouvant une température plus appropriée : c’est droit, fin et tendu, sur un beau fruité se fondant à des notes minérales, le tout sur une longueur honnête.
Très Bien +
Savennières – Domaine Eric Morgat – L’Enclos – 2010
Robe d’un or moyen.
Nez très intense, presque puissant, qui développe une complexité olfactive étonnante avec du coing, du pain d’épices et des arômes tourbés !
La bouche est énorme, quel que soit le paramètre ou presque : largeur, longueur, densité… L’acidité est heureusement là mais l’équilibre de l’ensemble est un peu trop too much d’après moi pour en faire un grand vin.
Très Bien +
Saumur – Domaine du Collier – La Charpentrie – 2010
Robe entre paille et or.
Nez intense et d’une superbe élégance, associant des fruits bien mûrs, des notes florales et une pointe anisée.
La bouche impressionne par son équilibre abouti entre un fruit de grande maturité, une étoffe racée, une belle énergie et une chouette persistance !
Excellent
Les plats de viande arrivent : place aux rouges !
Première paire de rouges
On démarre très fort avec deux Clos Rougeard 2004, et pas n’importe lesquels !
Ces bouteilles ont été placées en premier car le millésime frais faisait craindre à Vivien une accentuation des arômes végétaux après d’autres vins plus riches.
Saumur Champigny – Clos Rougeard – Les Poyeux – 2004
Robe sombre, jeune et assez trouble.
Nez très ouvert et classieux associant fruits noirs, arômes empyreumatiques et de poivron rouge mûr.
La bouche présente un grand classicisme, d’une austérité aristocratique. La chair assez dense s’affine sur la longueur, la finale étant malheureusement marquée par une légère amertume.
Très Bien (+)
Saumur Champigny – Clos Rougeard – Le Bourg – 2004
Robe pas très sombre et encore jeune, limpide.
Nez sur un fruit très pur, intense et d’une élégance classieuse.
La bouche est à l’avenant, pas d’un volume impressionnant, mais d’une finesse extraordinaire. Son fruité prégnant, sa précision et sa longueur sont remarquables et je les garde encore en mémoire quatre jours après.
Bien au-dessus des Poyeux, qui lui-même a peut-être souffert un peu de la comparaison.
Excellent
Deuxième paire de rouges
Les deux stars de Chinon sur le très beau millésime 2005.
Chinon – Domaine Philippe Alliet – L’Huisserie – 2005
Robe sombre et aux reflets sinon violés tout au moins encore jeunes.
Nez très expressif, aux arômes de fruits noirs bien mûrs, avec presque un côté sudiste (cacao) et une pointe de violette complexifiante.
Le contraste est net avec la bouche : le fruit est toujours très présent, mais le profil longiligne, le soutien acide et les tanins souples témoignent d’une grande finesse et d’une superbe buvabilité.
J’ai beaucoup aimé !
Très Bien ++
Chinon – Domaine Bernard Baudry – La Croix Boissée – 2005
Robe sombre aux reflets bien tuilés.
Nez intense, très médocain car des notes empyreumatiques et d’autres balsamiques s’associent à des fruits noirs tels que la mûre et le cassis.
La matière de la bouche est très dense et bien née, mais une légère rusticité est due auxpetits tanins qui accrochent encore un peu. L’ensemble est fort appréciable, surtout à table, mais n’a pas l’élégance de l’Huisserie : à attendre encore un peu ?
Très Bien (+)
Troisième paire de rouges
Deux cuvées du terroir des Poyeux sur le superbe millésime 2009.
Saumur Champigny – Clos Rougeard – Les Poyeux – 2009
Bouteille ouverte la veille.
Robe grenat sombre aux beaux reflets tuilés (étonnamment, plus évoluée que le 2004 !).
Nez somptueux, très expressif, déroulant une aromatique suave et racée de fruits compotés.
La bouche est tout simplement magnifique par son équilibre. L’ensemble est serein et épanoui, et allie avec brio densité et dentelle, volume et longueur, puissance et fraîcheur…
Un grand vin, au moins au niveau du Bourg 1989 qui m’avait énormément marqué en 2014.
Excellent +
Saumur Champigny – Domaine Antoine Sanzay – Les Poyeux – 2009
Robe entre sombre et très sombre, aux reflets de jeunesse.
Nez intense qui dévoile une aromatique au fruité plus classique, moins compoté, aromatique paraissant légèrement comprimée mais délicate.
La bouche est d’une austérité cistercienne, toute en droiture et élancée, se ponctuant par de petits tanins fins avant la finale réglissée. Comme le nez elle est prometteuse mais semble encore engoncée pour bien s’exprimer.
Très Bien +(+) déjà en l’état. L’effet séquence a dû aussi le desservir.
Quatrième paire de rouges
Deux Saumur-Champigny sur le très beau millésime 2005.
Saumur Champigny – Clos Rougeard – Les Poyeux – 2005
Robe sombre qui dévoile un début d’évolution.
Nez bien ouvert et d’une complexité très appréciable : au-delà des classiques fruits noirs, de belles épices et des olives noires, et pas la moindre trace de sous-maturité (mais le contraire aurait été étonnant !).
La bouche est pleine et savoureuse, d’un équilibre puissance – finesse très réussi. Le toucher est soyeux, rien ne dépasse, la persistance est remarquable.
Excellent (+)
Saumur Champigny – Domaine René-Noël Legrand – Les Rogelins – 2005
Robe très sombre et jeune !
Nez très intense sur de beaux fruits noirs, mais donnant une impression d’un côté lactique peu avenant.
La bouche de grande envergure s’impose par son étoffe et sa concentration : c’est un peu « too much » pour moi, surtout avec un tel calibre en face !
Bien ++ quand même pour la très belle matière.
Et pour finir une paire de liquoreux, sans autre point commun que d’être à base de chenin et de la région.
Vouvray doux – Vieilles vignes – Domaine du Bas Rocher – 2003
Servie en 50 cl.
Robe paille, étonnamment claire !
Nez peu causant assez fin, sur des fruits blancs et jaunes.
La fraîcheur l’emporte sur l’onctuosité en bouche, la longueur est satisfaisante sans plus.
Bien +
Jasnières – Domaine de la Charrière – Sélection de raisins nobles - 1997
Robe d’un or bien marqué.
Nez très intense mais sur du carton mouillé et du grillé.
Densité et grande fraîcheur sont des atouts pour la bouche mais on retrouve malheureusement les arômes dérangeants du nez …
ED ?
En conclusion, si on excepte les deux liquoreux, le niveau moyen était, comme l’ont souligné mes compagnons, extrêmement élevé ! Merci Vivien !
Pour la prochaine fois, encore du cabernet franc mais en très très faible quantité : on recherchera les quelques % dans les trois Léoville de Saint Julien !
Jean-Loup