Nous avons 3834 invités et 50 inscrits en ligne

Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

  • François Audouze
  • Portrait de François Audouze Auteur du sujet
  • Hors Ligne
  • Utilisateur
  • Enregistré
  • Messages : 14159
  • Remerciements reçus 11

Un dîner avec un Grand Chambertin 1929 a été créé par François Audouze

David van Laer a été le chef d'un restaurant une étoile, le Maxence.
Le Maxence n'esiste plus, et David van Laer officie aujourd'hui comme conseiller culinaire de plusieurs organisations.
J'ai organisé chez lui plusieurs des premiers dîners de wine-dinners, et comme je l'ai revu hier après une longue période de silence, je vous transmets ici le compte-rendu d'un des tout premiers dîners.

Le dîner est né de l'annonce de la venue de Bipin Desai en France, cet américain qui organise les dîners les plus extraordinaires de la planète. C’est lui que j’avais suivi lors de la dégustation des trente plus grands millésimes d’Yquem depuis 1893. La démarche qu’il a choisie est très différente de celle de wine-dinners, aussi il n'y a pas concurrence mais complémentarité. Bipin est l'ami de beaucoup de grands collectionneurs, et le dîner qu'il m'a finalement demandé d'organiser devait regrouper quelques uns de ses amis. J'ai appelé à se joindre à nous un anglais vivant au Japon avec qui j'ai, sur un forum, de passionnants échanges sur le vin. Deux amis ont apporté trois bouteilles, j'ai apporté six flacons, et nous voilà chez David van Laer au Maxence, entre amateurs et collectionneurs de vins anciens.

La table, joliment préparée dans un salon intime étant composée d'amateurs exigeants qui n'hésitent pas à condamner un vin qu'ils n'aiment pas, ce qui valorise d’autant plus l'approbation de tous quand elle fut, comme ce soir, majoritaire.
Pour commencer champagne Salon "S" 1985 sur des cèpes rôtis au foie gras et aux figues, et d'aériennes gougères. Le Salon est si fort, envahissant, puissamment structuré. Mon ami anglais le trouve le plus plaisant de tous les champagnes qu'il a déjà adorés.
Le Laville Haut-Brion 1964 avait été choisi pour l'un des hôtes qui est un collectionneur amoureux de Laville. Hélas, il ne le trouva pas à son goût. D'autres furent ennuyés par ces relents de glycol, mais Bipin et moi le trouvions fort à notre goût. Une tempura de langoustines au caramel de soja fut sans doute trop puissante pour le vin. David van Laer, on le verra, fit des prodiges par la suite. La couleur du Laville 64 était merveilleusement belle, de cuivre jaune, et si le coté "pharmaceutique" de l'attaque en bouche est déplaisant, le goût suivant, quand le vin est installé sur la langue paraissait très typé et authentique. La critique est acceptable et fait partie de l'exercice, moindre plaisir pour les uns, satisfaction pour les autres.

L'unanimité de la surprise et du plaisir se fit sur le Vouvray sec 1921 de Clovis Lefèvre. Très fumé, astringent comme un vin du Jura, et une profondeur et une longueur en bouche presque indélébiles. Il accompagnait une création de David faite pour la première fois pour nous. Un filet de Saint Pierre à l'étuvée de poireaux et thé fumé, chips de céleri et huile d'argane. L'association parfaite fut applaudie, notamment par Bipin. Il fut décidé de garder la moitié du Vouvray pour le fromage.

Sur un pied de cochon exceptionnel, façon Apicius, aux cèpes, deux vins allaient merveilleusement s'exprimer : Mission Haut-Brion 1975 et Haut-Brion 1928. Des nez très proches, la couleur du 28 paraissant plus jeune, et nul ne pourrait dire que 47 ans séparent ces deux vins. Nous fumes unanimes à les trouver éblouissants. Le Mission 75 en pleine réussite, mais paraissant plus mûr que son age (je fus le plus sensible à cet aspect), et le 28 étonnant d'équilibre. Un vin majestueux. Et une association idéale. Deux vieillissements différents ont rapproché deux vins éblouissants, riches de saveurs de Bordeaux puissants, forts, lourds et surtout capiteux.

Le contraste allait être fort avec un Grand Chambertin 1929 Domaine de Sosthène de Gravigny de Jules Régnier. Une couleur de beau rubis, très claire comparée à celles des profonds Bordeaux, qui étaient plus sang de pigeon. Un nez expressif tout en évocation subtile, et ensuite une bouche éblouissante, qui s'est trouvée magnifiée par un fantastique lièvre en compote, aux saveurs viriles. Un grand jour de David van Laer, unanimement reconnu par ceux qui ignoraient encore le Maxence. Le Chambertin 29, que j'avais déjà servi à un dîner de jeunes amateurs fut considéré comme l'événement majeur de cette soirée, ce qui est flatteur quand les juges sont de tels palais, Bipin Desai ayant bu tout ce qui se fait de bon en Bourgogne. Mais ils ont aussi tenu à saluer un vin qu'aucun ne connaissait.
Retour sur le Vouvray 21 qui fut merveilleux avec les chèvres. Pas le moindre signe d'évolution depuis l'ouverture et une solidité à toute épreuve confirmée.

C'est sur un Stilton que nous bûmes le château de Fargues 1967. Je n'imaginais pas qu'un Fargues puisse être aussi puissant. Tous les convives ont été surpris. Il est vrai que 1967 est une grande année, mais nous avions tous présent à l'esprit Yquem, tant la ressemblance est grande entre les deux vins, ce qui est un compliment pour Fargues. Il lui manque sans doute l'émotion que procure Yquem, mais il fut apprécié comme un grand Sauternes.

Sur le premier dessert, figues confites au caramel et vin rouge, la transition se fit vers un Maury Doré du Domaine de la Courme du Roy 1925 qui se prêtait ensuite comme il convenait au moelleux au chocolat, si délicieux et fondant. Mais après Fargues, le coté monolithique du goût rétrécissait ce Maury. Titrant 17°, il s'imposait en force, et c'était un peu trop. Il faudrait une autre circonstance pour l'apprécier comme il convient.
Nous avons ouvert un Kummel de Courvoisier d'une bouteille très vieille difficile à dater. Sans doute plus de 50 ans. Ce Kummel, liqueur de 40° à base de cumin était un rite au siècle dernier. Sucré, à l'épice discrète, cet alcool, loin de déclencher la passion d'une Chartreuse, fut une agréable curiosité.

Nous avons abondamment parlé de vins, et il est agréable d'être sur un terrain de culture commune : des années comme 1911 ou 1915, si brillantes, parlent pour chacun de nous.
Bipin Desai partait ensuite organiser un de ses voyages fous de vins rares. Il a aimé cette étape où quatre vins des années « vingt », un 21, un 25, un 28 et un 29 ont permis un voyage dans le temps avec des bouteilles dont aucune n’avait vieilli.


Cordialement,
François Audouze
11 Nov 2005 15:07 #1

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Guest
  • Portrait de Guest
  • Visiteur
  • Invité

Réponse de Guest sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

François,

1. Salon 85 bu en été 2005 fut comme d'habitude formidable !

2. Votre commentaire sur LHB 64 me rappelle ceci (les participants furent partagés) :

Pessac-Léognan - Château de Fieuzal 1962 :
Pas d’unanimité pour ce vin, méjugé par certains (acétone ?) et encensé par d’autres. Ces derniers y décèlent un vieillissement harmonieux qualifié par des exhalaisons de paille, d’encaustique et de menthol précédant une matière fine, goûteuse et tonique (certains évoquent un Sauternes sec), ayant parfaitement résisté aux outrages du temps.

Je fais partie de ceux qui ont apprécié son caractère baroque.

3. Ruchottes-Chambertin Clos des Ruchottes - Thomas-Bassot 192? :
PP16,5 – LG16
- Millésime indéchiffrable, mais vu la qualité du vin, on penche pour 21, 28 ou 29 (sans formellement exclure 1915 ou 1934).
- Les vignes appartiennent à Armand Rousseau à l’heure actuelle.
- Couleur encore fringante.
- Le nez moissonne ici de sensationnelles et durables odeurs : pain grillé, fruits, fleurs, végétalité de vendange entière (ronce). Un déploiement aromatique harmonieux est signe de belle santé pour ce vin vieux, qui interpelle par sa présence.
- Bouche sapide (et même charnelle), encore nettement fruitée, cohérente, longue. Chapeau pour cette classe et cette longévité hors du commun.

Je ne sais toujours pas dire l'année effective de naissance de ce vin !
14 Nov 2005 17:47 #2

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Guest
  • Portrait de Guest
  • Visiteur
  • Invité

Réponse de Guest sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

"- Le nez moissonne ici de sensationnelles et durables odeurs : pain grillé, fruits, fleurs, végétalité de vendange entière (ronce). Un déploiement aromatique harmonieux est signe de belle santé pour ce vin vieux, qui interpelle par sa présence.
- Bouche sapide (et même charnelle), encore nettement fruitée, cohérente, longue. Chapeau pour cette classe et cette longévité hors du commun.

Je ne sais toujours pas dire l'année effective de naissance de ce vin ! "

Excusez mon impertinence et mon ignorance mais de quoi parlez-vous quand vous dites: un déploiement aromatique harmonieux....interpelle par sa présence?

Vous évoquez une "végétalité de vendange entière (ronce). Qu'est-ce à dire?
Je crains que toutes ces formulations ne sèment le trouble chez les amateurs peu épris d'une telle poésie. Comment expliquez-vous ces remarques? Vous évoquez des vendanges entières, comment + de 70 ans plus tard en être sûr, cela m'échappe?
Merci de m'éclairer, je suis un peu perdu.

Quand on lit ces commentaires et qu'on enlève le terme de "vin vieux", il est impossible de savoir si on est en présence d'un vin blanc ou d'un vin rouge, d'un Bourgogne, d'un vallée du Rhône, d'un Bordeaux ou d'une appellation quelconque et d'avoir une idée de son âge....mais me direz-vous tout était sur l'étiquette ou presque tout....Alors à quoi servent les commentaires?

Andréas
14 Nov 2005 22:30 #3

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Messages : 2876
  • Remerciements reçus 0

Réponse de bouhi sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

Andréas,

Comme tu le soulignes, tout est sur l'étiquette : la région d'origine, l'appellation, le climat, la couleur du vin (il n'y a pas de blanc dans le climat).

Au niveau de la couleur, est ce important pour un vin d'un tel âge ? Les blancs "foncent" en général tandis que les rouges ont tendance à "tuiler" (quand la couleur ne tombe pas). Cela ne les empêche pas d'avoir encore un nez très caractérisé et une saveur en bouche. Les deux pouvant être sur des registres différents. Le nez pouvant être vaillant et la bouche restée muette.

Elle est peu parlante. De plus, pour ne pas la faire intervenir dans le jugement du vin, les grandes marques de verriers ont sorti des verres noirs (Riedel le premier) totalement opaques, empêchant de distinguer la couleur du vin bu.

François
14 Nov 2005 23:11 #4

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Guest
  • Portrait de Guest
  • Visiteur
  • Invité

Réponse de Guest sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

François,

Je pense que tu n'as pas vraiment saisi le sens de mon intervention...Si tout est sur l'étiquette, pourquoi le goûter?
Crois-tu vraiment que les verriers ont mis au point des verres noirs (sur demande) pour gôuter un Ruchottes-Chambertin d'âge vénérable?
Il est dommage d'occulter la couleur, elle a tant à nous dire!!!
Je ne sais pas si vous faisiez parti du comité de dégustation mais il aurait été intéressant de lire les notes de chacun. En tout état de cause les commentaires auxquels je faisais référence sont bien, malheureusement, un cas d'école.
Toutes mes excuses pour ce post que d'aucuns prendront très mal puisqu'il n'est pas LPV correct.
Andréas
15 Nov 2005 07:57 #5

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Guest
  • Portrait de Guest
  • Visiteur
  • Invité

Réponse de Guest sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

Andréas,

Je vais essayer de répondre au mieux à vos questions.

Nous sommes sur un repas gastronomique et hédoniste.
Les vins sont dégustés à l'aveugle mais on sait déjà un peu les surprises que peut nous réserver notre hôte.
Le commentaire établi a posteriori (sur la base de notes prises à chaud) inclut forcément une part "poétique".

"Un déploiement aromatique harmonieux est signe de belle santé pour ce vin vieux, qui interpelle par sa présence." -->

beaucoup d'odeurs, intenses, agréables et on est interloqué car on devine un très vieux vin.
Désolé pour ma part, mais je n'ai guère l'habitude, par incompétence, de décrire les robes (cela dit, les indices liés à ces robes sont aussi parfois très trompeurs, non ?)

"vendange entière" -->
il me semble que cette végétalité signe cette caractéristique (est-ce renforcé par l'âge du vin, un peu comme pour Bordeaux avant 1978 ?)
Je suis oenophile, pas oenologue, donc mon analyse ne résiste peut-être pas pas à un examen technique (vous me le direz peut-être de manière plus complète, y compris en osant me parlez de vous, en fonction de vos connaissances sur ce sujet).

Est-ce plus clair ?

Tout n'est pas sur l'étiquette, de fait (vous l'avez peut-être noté).

Nous avons certes affaire à un vin très vieux, intéreressant de par son origine (on pourrait être à Bordeaux), qui surprend par sa longévite.

Je suis d'accord que l'on peut penser aussi à un commentaire de vin blanc (au "trait de vert" près).

"Si tout est sur l'étiquette, pourquoi le goûter ?" -->
jugement un peu provoc, en effet.
je vous ai dit que la dégustation est hédoniste donc je ne m'étends pas sur une réponse plus complète
je ne sais pas quel est votre rapport personnel aux enjeux épicuriens du vin, au passage, pour répondre de manière plus ciblée.
Tout le monde est ravi d'avoir la chance de goûter ce "faux vieillard" (j'aurais aimé avoir l'avis de Bertrand le Guern - pour l'âge, je pense à l'âge du vin, pas à celui de Bertrand, hein ! :)).

Il est probable que ce commentaire ne vous serve à rien mais je vous laisse seul juge.
Je ne sais par ailleurs pas de quel comité de dégustation vous parlez !?

PS : j'ai fait un jour le test chez Robert Plageoles à Gaillac, en présence du chocolatier Michel Belin, de goûter des liquoreux dans des verres "classiques" et dans des verres noire opaques : une chatte n'y retrouverait pas ses petits !
15 Nov 2005 10:38 #6

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Guest
  • Portrait de Guest
  • Visiteur
  • Invité

Réponse de Guest sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

Laurent,

Merci d'avoir bien voulu répondre à mon post, qui, il est vrai peut paraître un brin provocateur (davantage pour susciter des réactions que par goût de la polémique, celle-ci ne m'intéressant absolument pas!)
Rassurez-vous, je suis avant tout épicurien, mais ma formation me pousse, peut-être à tort à rechercher la concision et l'exactitude. Je ne suis pas insensible à la poésie à condition qu'elle réponde à nos attentes.
Pour moi, vous allez sans doute me traiter de prétentieux et présomptueux, un commentaire de dégustation doit nous mettre le vin à la bouche, sinon il est inutile; il est très difficile de communiquer si derrière les mots, nous n'y mettons pas le même sens, c'est sans doute là un défaut majeur de la dégustation.
Il est un exercice assez simple à réaliser et qui est plein d'enseignements, c'est celui de relever une dizaine de commentaires (par exemple parus sur LPV) et de demander de retrouver l'appellation correspondante parmi le choix proposé.
Vous verrez c'est étonnant (à condition évidemment de respecter les règles du jeu).

PS: Qu'entendez-vous par végétalité? Je ne connais pas ce mot.

Andréas
15 Nov 2005 12:25 #7

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Guest
  • Portrait de Guest
  • Visiteur
  • Invité

Réponse de Guest sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

Andréas,

Je peux comprendre que le commentaire concerné ne vous mette pas l'eau à la bouche.
L'effet est peut-être différent pour d'autres lecteurs.

Reste qu'il est difficile de témoigner concrètement de la qualité hédoniste de rencontres oenophiles ou gastronomiques.
La rencontre directe amène aussi beaucoup (et plus si affinités), les regards qui brillent, les amitiés qui se forgent, les langues qui se délient, ...

Je comprends le côté ludique de votre jeu.

Végétalité est un néologisme pour évoquer des odeurs ou des goûts de végétal : je concède qu'il y a là une certaine permissivité !

Pour ce vin : vendange entière, rafle, ronce ...
15 Nov 2005 12:45 #8

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • François Audouze
  • Portrait de François Audouze Auteur du sujet
  • Hors Ligne
  • Utilisateur
  • Enregistré
  • Messages : 14159
  • Remerciements reçus 11

Réponse de François Audouze sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

La question d'Andréas couvre deux sujets :
A - comment l'on goûte
B - comment l'on décrit

A1 Certaines personnes analysent quand elles goûtent :
A11 - certains veulent absolument retrouver les cépages
A12 - certains veulent absolument isoler la cardamome, le clou de girofle, le cuir de cordoue, la bergamotte et l'amarante
A13 - certains veulent absolument donner une note à la Parker ou à tout autre système (ce jeu de rôle de censeur devant un vin me paraît symptomatique d'un réflexe de défense)

A2 Certaines personnes, quand elles goûtent, profitent du vin, analysent la qualité de leur plaisir, regardent si les saveurs du plat se marient - et quelles saveurs du plat se marient le meux - et réfléchissent à l'intensité du parcours en bouche et de l'émotion

B1 certaines personnes ont une description précise du vin :
- ses cépages et comment ils se comportent
- les caractéristiques du nez rapportées à des arômes essentiels, le benjoin, le musc, le cytise printanier, le museau de ragondin
- les caractéristiques de goût en choisissant au sein d'une centaine de goûts essentiels
Cette description a l'avantage que si on se pose la question d'acheter un vin, on a des informations.
Et tous les sites vous racontent le cassis, le sous-bois, la note mentholée, etc.

B2 certaines personnes se contentent de décrire par des mots leurs émotions, en faisant des images qui correspondent à leur humeur et à ce qu'ils ont ressenti.

Dans le monde des vins anciens, il n'y a pas un besoin de décrire pour un futur achat d'un lecteur, car le même vin de la même année, n'aura pas les mêmes caractéristiques (stockage, chaleur, vieillissement accéléré du bouchon).

Alors, comme l'approche des vins anciens est plus une approche hédoniste qu'une approche de connaissance, on préfère, "naturellement", décrire ses sensations, par des images fleuries, que décrire le vin lui-même.
Le monde des vins anciens, c'est A2 B2, comme dans une bataille navale.

Si certains veulent sur LPV uniquement une approche "utile" A1 B1, alors il ne faut pas raconter des souvenirs émouvants. si au contraire certains sont heureux de lire qu'un vin qu'ils aiment, dans sa version de 1933, a été sublime, alors il faut continuer à écrire, avec cette imprécision de description, mais cette authenticité de l'émotion.

Barbara chantait : "étonnez moi Benoit". Il y a la place pour une approche hyper précise, et pour un vaganbondage poétique qui raconte une autre vérité. Celle du ressenti du dégustateur.


Cordialement,
François Audouze
15 Nov 2005 13:34 #9

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Guest
  • Portrait de Guest
  • Visiteur
  • Invité

Réponse de Guest sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

Donc, François, je répète mon intérêt pour la complexité de la dégustation (ainsi que pour les récits plus ou moins analytiques).

Croiser les points de vue, éventuellement contraires (ex mon dernier post sur Moulinier Terrasses grillées 2001), en tenant compte des contextes (point de vue, niveau de réalité).
15 Nov 2005 15:05 #10

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Guest
  • Portrait de Guest
  • Visiteur
  • Invité

Réponse de Guest sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

"Reste qu'il est difficile de témoigner concrètement de la qualité hédoniste de rencontres oenophiles ou gastronomiques.
La rencontre directe amène aussi beaucoup (et plus si affinités), les regards qui brillent, les amitiés qui se forgent, les langues qui se délient, ..."

Laurent, vous avez mis là l'accent sur un point essentiel: comment transmettre ses émotions à quelqu'un qui ne les a pas vécues?
Je suis d'accord avec vous et crois sincèrement qu'il est très difficile de créer l'environnement convivial nécessaire à l'esprit de la dégustation (et non de l'analyse) par courrier interposé, fut-il électronique.
C'est pour cette raison qu'à l'écrit les mots ont leur importance et qu'il est beaucoup plus facile de faire un compte-rendu de dégustation oralement.
François, votre vision des vins vous est propre, vous êtes certainement un grand émotif et prenez beaucoup de plaisir à la dégustation, votre expérience est rare, mais vous savez certainement qu'il est très difficile de la faire partager.
Je ne crois pas qu'il soit absolument nécessaire de catégoriser les amateurs de vin, pourquoi ne pourrait-on pas être à la fois poête et utiliser un vocabulaire précis sans pour autant être classé de technicien ou de pisse-froid...
Enfin ces propos n'engagent que moi et ont donc finalement peu d'importance....
Mais il est vrai quand on écrit, on peut s'attendre à être lu et là, malheusement, tout est possible n'est-ce pas?

Andréas
15 Nov 2005 16:18 #11

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Guest
  • Portrait de Guest
  • Visiteur
  • Invité

Réponse de Guest sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

"Laurent, vous avez mis là l'accent sur un point essentiel: comment transmettre ses émotions à quelqu'un qui ne les a pas vécues?"

L'expérience, Andréas, l'expérience !
Ainsi, sans le connaître, je perçois la sensibilité (je préfère ce mot pour ma part à "émotif", trop péjoratif) du texte de François Audouze (par exemple).

La traditon orale fait aussi partie des modes de transmission de la connaissance (pour les vieux vins ou les expertises du monde spatial).

Le récit transcrit sur un forum nécessite il est vrai bien des garde-fous !
15 Nov 2005 16:24 #12

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Guest
  • Portrait de Guest
  • Visiteur
  • Invité

Réponse de Guest sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

"L'expérience, Andréas, l'expérience ! "
Où va-t-on?
Appeler utilisation inappropriée d'un vocabulaire spécifique, expérience, il faut oser.
L'expérience appellerait peut-être à plus d'humilité....Mais puisque tout, ou presque est permis....
Je crois que le tour de la question est fait!
Merci quand même pour cet échange.

Andréas
15 Nov 2005 16:55 #13

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Guest
  • Portrait de Guest
  • Visiteur
  • Invité

Réponse de Guest sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

Andréas,

Je crois que vous interprétez mal mon propos : je parle d'expérience de ces moments hédonistes de dégustations (pas de cours de dégustation).

La passion aidant, il me plait de lire par exemple les crs de François Audouze (même si je n'ai pas (encore) goûté tous ces grands vins, souvent d'âge vénérable :)).

Je ne suis pas dans la compétition mais dans la coopération.
Dans les mots plus que dans les chiffres.
Dans la qualification plus que dans la quantification.

Désolé par ailleurs que mon (notre) langage ne vous convienne pas.
Je fais mon maximum mais c'est complexe (et la rencontre en contexte est parfois indispensable pour se connaître et se comprendre, encore plus quand elle implique la générosité réciproque).

Qu'aimeriez-vous voir apparaître par exemple (pour un riesling allemand jeune ? pour un très vieux Bordeaux ?, pour une syrah australienne très suave ?)
Comment vous y prenez-vous de votre côté pour définir des langages de description appropriés ?
En avez-vous l'habitude (je manque de référence sur ce site) ?
Restez-vous ici sur une impasse ?
Est-ce humble de penser que le tour de la question a été fait ?
Ai-je changé un tant soit peu votre analyse (en tout cas sur le post incriminé) ?
15 Nov 2005 17:13 #14

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • François Audouze
  • Portrait de François Audouze Auteur du sujet
  • Hors Ligne
  • Utilisateur
  • Enregistré
  • Messages : 14159
  • Remerciements reçus 11

Réponse de François Audouze sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

Sur l'expérience, j'aimerais dire quelque chose à Andréas.
Ce soir, je suis allé à un cocktail organisé par 1855.com où l'on pouvait goûter de bons champagnes. Dont Dom Pérignon 1998, très raffiné. Je n'en dis pas plus, car je vais étaler l'incompétence de mon vocabulaire.

Et je suis tombé par hasard sur un grand collectionneur avec lequel je mes suis souvent battu pour acheter des bouteilles rares.
Nous nous connaissons, mais nos terrains de vie ne se rencontrent que peu. Ainsi nous n'avons jamais trinqué ensemble.

Alors que je pense avoir une solide culture des vins anciens, il s'est mis à me parler de Lafite 1787 qu'il a bu, de deux autres années du 18è siécle qu'il a bues, et il m'a dit avoir bu 40 millésimes de Lafite du 19ème siècle, Lafite ne constituant pas le seul vin qu'il ait bu sur cette période.

Et il me paralait d'un 1853 magistral, d'un 1868, année ignorée, grandiose, de Yquem 1869 qu'il considère comme monumental etc...

Croyez vous que j'ai eu la moindre jalousie ? Au contraire, savoir qu'il a bu ces trésors inestimables, et l'entendre dire que leur goût est magique, mais ça me motive à continuer dans cette voie.

A aucun moment il n'a employé un langage précis, il l'a peut-être utilisé de façon inappropriée, puisque c'est vous qui connaissez ce langage et pas nous, mais je comprenais tout ce que chaque description voulait dire.

Nous nous sommes promis d'ouvrir ensemble des flacons fous, et je suis reparti de cet entretien heureux d'avoir connu quelqu'un qui a bu ce que je n'ai pas bu.
Comme quand j'ai dîner près de Michael Broadbent, l'homme qui a tout bu. C'est enthousiasmant de l'écouter.

Il y a un point qui nous rapproche, ce collectioneur et moi, et c'est la deuxième fois qu'il me le dit : nous trouvons tous les deux que le plus grand Haut-Brion qui ait jamais été fait, c'est 1926. Cette complicité ne me déplait pas.

Alors, vous pouvez être choqué qu'on n'utilise que très mal votre langage. Mais on a le langage qu'on peut. Le mien est limité, je le sais. Mais le vin, j'en jouis avec mes tripes, et j'aimerais amener d'autres que moi à aimer ces vins splendides qui me donnent tant de bonheur.


Cordialement,
François Audouze
15 Nov 2005 23:57 #15

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • François Audouze
  • Portrait de François Audouze Auteur du sujet
  • Hors Ligne
  • Utilisateur
  • Enregistré
  • Messages : 14159
  • Remerciements reçus 11

Réponse de François Audouze sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

désolé de l'horrible faute d'orthographe. Il est tard, je n'avais pas relu.


Cordialement,
François Audouze
15 Nov 2005 23:59 #16

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Messages : 4339
  • Remerciements reçus 1

Réponse de teddyteddy sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

Je partage cette approche de la dégustation de François Audouze.
Je n'ai jamais eu l'esprit très scientifique...
Je pense que ce comportement A2/B2 existe également pour les vins jeunes.
Dans un CR, j'ai toujours plus de plaisir à lire l'émotion ressentie par le dégustateur, plutôt que les 7 arômes décelés au nez...
C'est une question de sensibilité.
A chacun son truc!

Laurent
16 Nov 2005 09:40 #17

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Guest
  • Portrait de Guest
  • Visiteur
  • Invité

Réponse de Guest sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

Teddyteddy,

Si j'ai bien lu, A2/B2 pour moi sur Côte Brune Jamet 99, jeune, époustouflant, à tomber par terre en raison d'une force sensuelle (est-ce un oxymore ?) incroyable (ce qui ne m'a pas empêché de tenter quelques mots pour qualifier le vin)

Bonne journée gourmande !
16 Nov 2005 10:06 #18

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Guest
  • Portrait de Guest
  • Visiteur
  • Invité

Réponse de Guest sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

François, ne vous méprenez pas, je ne vous ai rien reproché et certainement pas de ne pas utiliser un langage approprié. Avec beaucoup de sincérité, vous nous avez dit que vous recherchiez"l'authenticité de l'émotion". Je n'ai pas à juger de votre style qui est bien meilleur que le mien, je n'ai d'ailleurs jamais considéré vos propos comme des commentaires de dégustation mais plutôt comme un exercice de style.
Soyez rassuré, je ne cherche pas à imposer un langage qui n'est pas le mien et ne jouez pas les modestes, vous savez bien que votre langage est tout sauf limité...Nous ne parlons pas de la même façon mais je peux vous dire que je le vis très bien, avec émotion aussi.
Mon intervention concernait plutôt les commentaires de dégustation qui eux demandent à être plus rigoureux.

Ganesh,

Quand je parle d'un riesling allemand, d'une syrah australienne ou d'un malbec argentin, je n'utilise pas un vocabulaire différent. Pourquoi véhiculer des images toutes faites?
Il existe un vocabulaire de dégustation suffisamment précis pour qu'on puisse tous mettre le même sens derrière le même mot, merci à ces précurseurs comme Max Léglise, Emile Peynaud et tant d'autres qui nous ont permis de l'acquérir. Certes ce vocabulaire s'apprend et ne s'improvise pas mais il nous permet de communiquer.
Est-ce que je reste sur une impasse? Je ne dirais pas exactement cela, mais il est vrai que je regrette un peu ce manque de rigueur (je parle bien de commentaires de dégustation et non d'exercice littéraire qui a son utilité par ailleurs)
Est-ce humble de penser que le tour de la question a été fait ? Si le fait d'être en désaccord vous attire les foudres, alors oui!
Je ne sais pas si ces réponses vous satisferont mais ce qui paraît évident c'est que manifestement, elles ne plairont pas à tout le monde.

Andréas, qui n'est ni John, ni Magnum n'en déplaise à Luc Lavaux.
16 Nov 2005 22:50 #19

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Messages : 1048
  • Remerciements reçus 0

Réponse de ericevreux sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

J avaux, Andréas. Tu veux veux vraiment être fâché avec lui???

Si je comprend, vous êtes une bande d'oenologues qui vivez en collocation, et qui tour à tour laissez vos commentaires sur LPV. Ca doit être marrant, l'ambiance à la maison :)

Eric

mon blog
17 Nov 2005 07:22 #20

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Guest
  • Portrait de Guest
  • Visiteur
  • Invité

Réponse de Guest sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

Comme Eric l'a deviné, ce n'est pas triste à la maison...On se marre bien (pas sur le dos des autres) et surtout on boit bien....
Toutes mes excuses à Luc que j'avais déjà baptisé (involontairement) Sain-Jacques et canonisé avant l'heure. Je ne recommencerai pas, je vais aller brûler un cierge.
Bonne journée et bonnes dégustations!!

Andréas
17 Nov 2005 07:50 #21

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

  • Guest
  • Portrait de Guest
  • Visiteur
  • Invité

Réponse de Guest sur le sujet Re: Un dîner avec un Grand Chambertin 1929

Andréas,

J'attends impatiemment de vous lire pour encore mieux cerner vos propos (votre origine, les vins que vous appréciez, la manière dont vous les décrivez, plus ou moins analytique, plus ou moins poétique).

Le désaccord ne me gêne nullement, et mon ancienne signature pointait plutôt l'impérieux besoin de reliance entre points de vues différents.

L'actuelle convient aussi !
17 Nov 2005 10:12 #22

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

Modérateurs: GildasPBAESMartinezVougeotjean-luc javauxCédric42120starbuck