Hello!
Pour faire écho aux excellent comptes-rendus qui précèdent, je me lance à mon tour.
Rendrai-je autant justice à la spontanéité qui a conduit notre cordée pour cette soirée montagnarde en Val de Marne?
Une telle spontanéité que mon attention m'a fait défaut, relégant le pinot noir d'Antoine en fin de dégustation...
Vin qui s'est trouvé handicapé par sa défavorable position.
Celle la voix surpuissante du donateur à mon oreille gauche ne fut pas moins.
..
Je suis taquin, surtout vu les circonstances, et chapeau bas à Antoine d'avoir gentiment passé l'éponge sur mon inattention.
Comme signalé précédemment, cette dégustation s'est faite à l'aveugle.
Aucun de nous n'étant vraiment expert de la région, l'exercice est idéal pour progresser,
se concentrer sur le ressenti.
Les Blancs:
1- Domaine Gilles Berlioz, Roussette de Savoie "El Hem" 2010
Mon apport ouvre la dégustation.
Une robe jaune clair pleine de lumière au reflets verts très clairs.
Un nez très aromatique, avec des notes d'agrûmes sur la bergamote, de la fleur blanche.
Dès le nez on sent le vin de cailloux, j'ai du mal à définir la minéralité ressentie sur le vin mais la salinité signalée par
François n'y est certainement pas étrangère.
ça ne manque pas de se confirmer en bouche, qui présente une belle vivacité, un côté aérien.
L'angle d'attaque permet au vin, qui ne tient pas en place de "filer" directement vers le fond de bouche.
Cette sensation m'a évoqué Claude Papin parlant de la maturité phénolique et d'une roche mère solide pour illustrer une sensation
identique sur l'un de ses coteaux du layon.
En tous cas ça circule vite et bien, avec la vivacité de l'eau du ruisseau.
Pourtant la finale est longue et pleine de sève, elle crépite presque en fin de bouche.
Le vin servi un peu chaud et déjà intéressant a beaucoup gagné à être refroidi.
C'est le genre de vin blanc qui me font craquer. J'aime beaucoup même si c'est bien jeune.
=> Très Bien
2 - Domaine Gilles Berlioz, Chignin-Bergeron "les Filles" 2010
La robe jaune un peu plus soutenue que le précédent est tout aussi lumineuse.
Nez sucré, ce sont des notes d'orange et d'abricot qui m'ont interpelé.
Beaucoup de gras dans ce vin de gastronomie, mais bien équilibré par l'acidité qui retend le vin.
Les 6,2 g de SR sont imperceptibles à ce jeune âge.
La finale réglissée et sur les épices chaudes (canelle), reste droite et tendue, mais bien charpentée.
L'alcool est plus présent que sur le précédent, mais le vin file droit malgré ce côté plus costaud.
probablement la patte de ce vigneron qui sait trouver la fraîcheur dans ses vins, peut-être aussi
une caractéristique du millésime?
Car la finale a aussi le mêmle genre de rémanence acidulée que sur le vin précédent.
Je verrai bien sur une cuisine du Sud (Liban ou Grèce). Et si je préfère l'Altesse qui précède,
j'apprécie beaucoup ce vin, moins strict, aux rondeurs plus féminines. Il porte bien son nom.
=> Bien +
3 - Domaine Dupasquier, Marestel 2008
D'une robe plus dorée, bien soutenue, aux reflets gris, un look de vendanges tardives.
Le disque pourtant semble plus fin que sur les deux vins précédents.
Quant à la complexité du nez, elle est simplement édifiante. On a encore la bergamote,
signe distinctif de l'altesse? Et s'ajoute des saveurs de miel, de fleurs blanches, c'est fin, ciselé, très élégant.
La bouche, souveraine, et élégante avec un côté réglissé et un peu de sucres parfaitement équilibrés
par une belle fraicheur.
Beaucoup de volupté dans cette bouche qui délivre un caléiloscope de saveurs complexes.
La finale grasse, longue, sur la canelle et la noix de muscade laisse transparaître une minéralité que la garde
mettra plus encore à jour.
Il faut sans doute attendre encore, mais c'est tellement bon maintenant...
François, je te souhaite bien du courage !
=> Très bien +
Les rouges:
4 - Domaine Girard-Madoux, Mondeuse 2010
Un autre de mes apports pour ouvrir la série des rouges.
Ce vin a eu beau être carafé 4 heures avant, il aurait du l'être la veille.
Sa robe est violette, sombre,
Son nez est assez fin, floral, avec quelques notes de cuir et de fruit noir diffus. Mais encore peu expressif.
Même si la bouche est rugueuse, c'est bien fait: mâche et croquant laissent deviner un possible équilibre ultérieur.
Mais la finale resserre vraiment trop et l'aromatique est en retrait.
A revoir dans quelques années.
=> Assez Bien
5 - Les Fils de Charles Trosset, Mondeuse d'Arbin 2009.
Robe grenat sombre et lumineuse.
Le nez est sur la violette et les fruits noirs sauvages.
En bouche c'est un côté massif, solide et profond est balancé par un océan d'arômes fuités avec une rétro florale
excellente.
Ce vin me rappelle franchement les Peyrouses de Guillaume Gilles par son style, avec plus d'acidité.
La proximité avec une belle Syrah est flagrante sur ce vin.
L'excellent arbre transmis par Oliv illustre une parenté que l'on peut retrouver dans le verre.
Je suis parti avec le fond de bouteille, qui m'a paru plus "corsé" le lendemain,
avec des notes de torréfaction en plus.
C'est le genre de vin avec une tenue à l'air exceptionnelle, éclatant de santé et de pulpe.
Sa jeunesse sauvage, tout en puissance, régale mon bec sudiste. Bien sûr ce sera meilleur dans quelques années.
=> Très bien
6 - Domaine Louis Magnin, Mondeuse "la Brova" 2007
La robe est sombre, violine.
Au nez, de beaux arômes de cerise bien précis, bien fins.
Une touche de modernité est apportée par l'élevage. Ses notes finement vanillées complètent de tableau agréablement.
Un côté compoté ressort.
En bouche, comme Julien, j'ai trouvé des similitudes entre la structure de cette Mondeuse,
et celles de Sangiovese dans la version Brunello di Montalcino.
Puissance maîtrisée dans des contours très définis, avec une acidité de bon aloi.
Les tannins sont soyeux, rendant le vin facile d'accès. La rétro sur le bonbon est gourmande à souhait.
Au fur et à mesure de la dégustation, les notes d'élevage, certes très fines, ressortent quand même un peu.
Ils pourront se fondre avec le temps dans cette belle matière.
Alain, dont c'est l'apport, annonce d'ailleurs qu'il attendra les suivantes 2 ans.
Ce vin plutôt consensuel est Vraiment complet.
=> Très Bien -
7- Domaine Thévenot-Le Brun, Hautes Côtes de Nuits 2001
Robe plutôt sombre mais très transparente, évoluée.
Nez superbe de complexité. Du sous-bois, de la truffe, du cuir.
Tout le monde s'extasie et s'accorde sur un pinot noir.
S'agit t'il d'un Chambolle? D'un Nuit Saint Georges?
Bouche acide et tendue, qui a commencé à se défaire. Je n'y retrouve pas l'intensité aromatique incroyable du nez,
même si ça reste plutôt bon. S'agit t'il d'une période de fermeture du vin?
Peut-être car si le fruit se réveillait derrière cette acidité, ce serait très beau.
La finale étant courte, il semble plutôt que le vin soit, peut-être, sur la pente descendante.
Qu'importe, car le nez extraordinaire semble avoir transporté toute l'assemblée.
Le pirate de qualité de la soirée.
=> Bien +
8- Domaine René Fernandez, Côte Rotie "le Montmain" 1999
Robe sombre, très brillante, portant les stigmates d'une évolution de ses jolis reflets bruns.
Nez sur les fleurs, la rose séchée en particulier.
Bouche très structurée, encore jeune, avec une bonne salinité.
La fraîcheur est aussi au rendez-vous de ce vin qui ne fait pas son âge.
On sent qu'il s'apprivoise doucement mais en a encore largement sous la pédale.
La finale est dynamique, bien droite, un peu astringeante, toute en structure.
Beau vin solide, équilibré, encore jeune.
=> Bien ++
9- Domaine Jacques Maillet, Chautagne, pinot noir 2010.
Quant au pinot noir, sa proximité avec ceux du Valais est confondante. Rien à voir avec un pinot de Bourgogne.
C'est bien plus rond et dense, plus pommadé, ça tient au corps tout en conservant une bonne fraîcheur.
Une pointe d'alcool en finale nuit un peu à l'équilibre et ce vin, à l'instar du Girard-Madoux, est clairement trop jeune.
En tous cas, c'est très intéressant et à revoir dans des circonstances qui le mettront plus à l'honneur, car il n'était pas à la place prévue. La saturation de nos papilles en fin de dégustation l'a forcément désservi.
=> Assez Bien
Conclusion:
Je m'attendais presque à plus de finesse sur les rouges de façon globale. ce sont des vins puissants, juteux et bien charpentés, pleins de mâche et d'arômes sauvages.
On est bien dans le Sud: l'altitude ne dilue pas ces vins, les rapprochant plutôt du soleil!
La rudesse des éléments semble se retrouver dans ces grands vins de savoie.
Des vins de terroirs qui vivent beaucoup dans le verre et en bouche.
Est-ce le vent soufflant entre les baies qui procure ce côté souvent aérien?
Les phases d'appaisement permettent d'attendre la prochaine vaque de sensations fortes.
Ces vins à forte personnalité ont de quoi surprendre.
Vivement le mois prochain!
Bonnes fêtes à tous
Cordialement
William