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académie des vins anciens du 8 juin et 22 novembre

  • François Audouze
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académie des vins anciens du 8 juin et 22 novembre a été créé par François Audouze

Devant préparer l’ouverture des vins de l’académie des vins anciens, j’ai le temps de faire un détour à la maison du Japon où plusieurs vignerons des Beaumes de Venise présentent leurs vins. La jolie organisatrice de cet événement m’accueille avec un large sourire plus parisien que nippon. Je goûte quelques rouges intéressants et prometteurs, présentés avec d’originaux mets japonais d’une belle réussite. Je ne prétends pas devenir un prescripteur de ces vins, mais la simplicité des rouges m’a plu.
L’académie des vins anciens tient sa troisième séance officielle à la Résidence Maxim’s. L’idée était de boire les vins des académiciens sur un vrai repas, au lieu de fromages qui, même délicieux, ont du mal à captiver l’ensemble de l’assistance sur la durée totale d’une longue soirée. La préparation donna lieu à des échanges agréables avec une équipe motivée et un chef attentif et intelligent. L’envie de réussir se sentait avec force.
A partir de quinze heures, j’ouvre les bouteilles, recevant le renfort d’académiciens désireux d’apprendre de petits trucs qu’ils ne connaîtraient pas. Dans cette ambiance bon enfant, peuplée d’histoires qu’on se raconte, pas une seule bouteille bouchonnée n’est à signaler. Deux bouteilles ont des niveaux au-delà de la vidange. Une me paraît définitivement morte. Les autres vont profiter d’un oxygène qui va gommer toutes les petites imperfections que le premier examen olfactif révèle.
Malgré une grève de la RATP et d’immenses encombrements qui eux seuls ont un goût de bouchon, les académiciens sont d’une exactitude exemplaire (quand on aime, on ne compte pas les quelques retards). J’avais prévu de faire face à des arrivées non synchrones en offrant au bar de la résidence le champagne que buvait ma famille depuis trois générations, déjà goûté à la précédente réunion de l’académie : le champagne Léon Camuzet non millésimé de Vertus, que je situe à environ 15 ans d’âge. Son petit goût évolué charmant m’a permis de jauger l’acceptation de plusieurs académiciens au goût des vins anciens. Quelques uns l’ont adoré, car cette évolution lui donne un charme subtil fait de fruits blancs. D’autres ne comprennent pas. Ils auront compris ce soir.
Nous sommes environ 50 pour 50 vins. Les vins sont répartis en trois groupes dont je donne ici le détail, dans l’ordre de service :

Groupe 1 : Champagne Léon Camuzet environ 15 ans - Champagne Gonet 1973 - vin nature de champagne Saran, blanc de blancs Moët 1950 - Bâtard Montrachet Chanson 1959 - Montrachet domaine Bichot 1943 - Château Saint Georges, St Georges St Emilion 1961 - Château Taillefer Puisseguin Saint-Emilion 1966 - Château La Louvière rouge 1967 - Chateau La Gaffelière 1949 - Château Montrose 1934 - Château Gruaud Larose Faure Bethmann 1928 - Fleurie Beaujolais 1943 - Richebourg Charles Noëllat 1974 - Vosne Romanée Réserve Reine Pédauque 1945 - Cave Jean Bourdy, Blanc vieux d'Arlay 1907 - Domaine du Pin 1ères Côtes de Bordeaux 1937

Groupe 2 : Champagne Léon Camuzet environ 15 ans - vin nature de champagne Saran, blanc de blancs Moët 1950 - Bourgogne Aligoté Barozzi 1950 - Montagny Barozzi 1949 - Meursault (?) 1953 - Tokay de Riquewihr 1966 (Dopff et Irion) - Riesling Kaefferkopf 1983 Jean-Baptiste Adam - Riesling Sélection de Grains Nobles Hugel 1976 - Clos Joliette 1974 Jurançon - Vin Jaune d'Arbois 1966 domaine de la Pinte - Cos d'Estournel 1966 - Château Pontet Canet 1964 - Château d'Arsac Margaux 1925 - Gevrey Chambertin J. Faiveley probable 1947 - Château Chalon Jean Bourdy 1928 - Coulée de Serrant Nicolas Joly 1983 - Barsac (?) 1937 - Rivesaltes ambré 1955 - Maury 1928

Groupe 3 : Champagne Léon Camuzet environ 15 ans - Champagne Deutz 1978 - Pouilly-Vinzelles 1956 de Cabet-Frères - Montrachet Bouchard 1988 - Château Bellefont Belcier (Saint Emilion) 1964 - Mouton Baron Philippe (d'Armaillac) 1959 - Château Haut-Brion 1925 - Bourgueil Sélection Vieilles Vignes 1989 du Domaine des Ouches - Cave Jean Bourdy, Côtes du Jura rouge 1945 - Hautes Côtes de Nuits J. et M. Gauthet 1969 - Volnay 1957 de De Moucheron - Beaune Champimonts 1er Cru Joseph Drouhin 1948 - Gevrey Chambertin Marius Meulien 1933 - Corton Clos du Roy L.A. Montoy 1929 - Montlouis Demi-sec 1983 de Fradin-Georges - Banyuls hors d'âge, Dom du Mas Blanc, Parcé, sostera - Rivesaltes ambré 1955 - Cognac trois quarts de siècle Tiffont # 1874.

Chaque groupe a pu profiter de vins de grande qualité avec un profil différent selon les tables, celles du groupe 2 bénéficiant d’un plus grand nombre de blancs, et celles du groupe 3 d’un plus grand nombre de bourgognes. Il faut rappeler, afin que nul ne l’oublie que la qualité de l’événement dépend de la qualité des apports de chacun. Quand on est généreux, on partage de grands vins. Ce fut le cas ce soir.
Le repas fut fort intelligent, le chef ayant eu le courage de simplifier sa cuisine pour se mettre au service des vins. Voici le menu : grosses gambas de la Méditerranée à la plancha / volaille fermière des Landes rôtie, écrasé de pommes Charlotte à l’huile d’olive / sélections de fromages de Bernard Antony / les abricots Bergeron en tarte feuilletée à l’amande de Provence, éclats de pistache.
Tous ont remarqué comme ce fut adapté et fort bon. Le service des vins était difficile pour une première fois, car respecter l’ordre des vins quand des changements dans les vins apportés ont eu lieu jusqu’à la dernière minute, ce n’est pas facile. Ce qui fait que les membres du groupe 1, dont je faisais partie, qui devaient boire le Riesling Sélection de Grains Nobles Hugel 1976 que m’avait offert Jean Hugel pour la circonstance, empêché qu’il était de venir, virent que ce délicieux nectar, d’une année phénoménale, fut apprécié par le Groupe 2. Réagissant avec célérité, je pus capter quelques gouttes de ce merveilleux Riesling doré et d’une persistance aromatique extrême, que je partageai avec l’une des plus fidèles et jolies académiciennes assise à mes côtés.
Quelques commentaires sur les vins de notre groupe. Le champagne Gonet 1973 est manifestement avancé. La bulle existe, mais fragile, la couleur est ambrée. On est dans un autre monde. Mais si l’on accepte la logique de ce vin, on lui découvre de belles subtilités. Un champagne expressif que je verrais bien avec une truffe ou du foie gras. Le vin nature de champagne Saran, blanc de blancs Moët 1950 est un peu de la même veine. Il n’a pratiquement plus de bulle, il est aussi fort foncé. Des convives vont le trouver d’une subtilité rare. Il y avait à ma table de solides palais, acquis à la cause des vins anciens. J’ai moins aimé le Saran que le Gonet, à cause d’une petite amertume juste après le milieu de bouche qui m’a un peu gêné.
Le Bâtard Montrachet Chanson 1959 est un vin délicieux. D’un jaune citron signe de pure jeunesse, d’un nez franc et direct, il occupe la bouche avec gentillesse. C’est un merveilleux blanc bien arrondi au plaisir sans complication. Je l’aime bien sûr, parce que c’est le mien, réflexe naturel qu’auront beaucoup d’académiciens, fiers de leur vin. Le Montrachet Bichot 1943 a un beau niveau, une couleur foncée. Il rebute un peu car il montre son âge. Mais quand on veut le comprendre, on sent toutes les qualités qu’il a, légèrement voilées par son vieillissement. Un bras amical me tend un verre de Montrachet Bouchard 1988. J’en reconnais le pedigree instantanément, car les Montrachets de ce domaine, je les connais sur le bout des lèvres. Quel grand vin et quel cadeau pour l’académie !
Le Château Saint Georges, St Georges St Emilion 1961, encore un de mes enfants, est fort civil et plaisant. Une belle couleur d’un beau rubis de jeunesse et un niveau parfait. Un goût solide de 1961. Vin sans histoire, très rassurant. Mon ami hollandais qui a apporté le Montrose 1934, qui aime assez peu les vins anciens, est tombé en admiration totale pour ce Château Saint-Georges qu’il a trouvé d’un épanouissement idéal. Les deux bordeaux qui suivent sont un peu plus difficiles à suivre. Car le Château Taillefer Puisseguin Saint-Emilion 1966 et le Château La Louvière rouge 1967 n’ont pas des trames très solides. L’âge les a ‘dentellisés’, et leur goût éphémère laisse peu d’empreinte. Le Chateau La Gaffelière 1949, ça c’est du sérieux. Ça cause, comme dirait Zazie. C’est un beau vin auquel 1949 donne une élégance raffinée. On se complairait à ne boire que de tels vins.
Je suis très admiratif du Montrose 1934 au message subtil, dans la lignée historique de Montrose, et meilleur que d’autres Montrose 1934 que j’ai bus, dont celui avec Bipin Desai, dans cette verticale de légende. Très pur, strict, archétypal, il récite le terroir de Montrose à la perfection.
J’ai l’expérience de Gruaud Larose 1928, aussi bien Faure-Bethmann que Sarget. Celui-ci, un Faure-Bethmann, est souple comme un 1928. Décidément, les vins de ce soir se calent dans le moule de leur année. Grand bordeaux au discours clair, sans surprise, généreux exemple de l’intérêt de l’académie.
Soudain mon cœur s’enflamme quand on me fait goûter le vin qui vient. Je me trémousse, je glousse, je l’agite sur ma chaise, car c’est beau comme une midinette en robe vichy. Le Fleurie 1943 a un nez à se pâmer, d’une séduction coquine. Et en bouche c’est un bourgogne plein de talent, défroqué de sa soutane beaujolais.
J’ai dû passer mon tour pour le Richebourg Charles Noëllat 1974, car je n’en ai pas le souvenir. Je boirai son aîné d’un an demain avec des amis de tous pays. Passant de table en table, j’ai peut-être été oublié, de ce vin que j’avais apporté, par notre efficace serveur Thibaud. Mais le Vosne Romanée Réserve Reine Pédauque 1945 compte double. Ça c’est bourguignon. Un nez éblouissant, et toute la chaleur humaine d’un vin qui vit. J’avais demandé qu’on me fasse goûter l’un de mes enfants, le Gevrey Chambertin Marius Meulien 1933 dont j’étais si fier à l’ouverture : un nez magistral. Là, en bouche, il est immense de jeunesse de robe, de nez chaleureux, et de puissance de feu dans mon palais conquis. Je suis tellement fier quand un vin démontre la vanité de toutes les idées surfaites sur les millésimes. Car 1933 ne passionne pas les foules depuis fort longtemps. Ce Gevrey est immense, comme l’est le Vosne Romanée 1945.
A propos d’année classée dans les médiocres, on m’apporte quelques gouttes de Château d'Arsac Margaux 1925. Vin très subtil, aux évocations de fraises des bois, de fruits rouges. Adorable témoignage d’un vin policé.
Hélas, le doyen de cette soirée, le Blanc vieux d'Arlay Cave Jean Bourdy 1907 est fort désagréable. Un côté glycériné, animal, gêne d’en saisir toute la complexité qu’on devine sans en jouir. Une gorgée du Château Chalon Jean Bourdy 1928 raccroche mon palais au wagon du Jura. Très beau vin jaune au goût naturel, qui donne une réplique théâtrale aux fromages de Bernard Antony appréciés de tous.
Encore un de mes bébés, le Domaine du Pin 1ères Côtes de Bordeaux 1937, va surprendre les deux tables de notre groupe. L’élégance d’un sauternes, une trace en bouche d’une belle consistance qu’on n’attendrait pas de cette appellation. J’ai senti que chacun en profitait.
Je n’ai pas goûté mes autres bébés, le Gevrey-Chambertin Faiveley # 1947 et le Corton Clos du Roy 1929. J’ai pu en revanche constater combien le Côtes du Jura rouge Cave Jean Bourdy 1945 est un vin d’une subtilité extrême, tellement plus à l’aise en dîner que dans la verticale analytique que nous avons faite à Besançon. Le Volnay Moucheron 1957 au niveau plus qu’extrêmement bas avait bien survécu, comme son auteur vint me le prouver fièrement.
Un académicien nous fit goûter un alcool assez exceptionnel, un Cognac trois quarts de siècle Tiffont # 1874, cognac fait avec deux fûts dont un de 1854 et l’autre de 1904, qui, du fait de l’évaporation, n’ont produit que 120 flacons, lors de leur mise en bouteille en 1979, quand M. Tiffont eut 100 ans. Une pureté, une précision, une légèreté de bois assez remarquable. Ce fut un joli point final à une dégustation rare.

Difficle de faire un classement des vins que j’ai bus. Je m’y risque, avec l’impartialité qui me fait aimer mes bébés aux deux premières places. En un, Gevrey Chambertin Marius Meulien 1933. En deux, Bâtard Montrachet Chanson 1959, en trois, Montrachet Bouchard 1988. En quatre, le Fleurie 1943. Et mention spéciale pour le cognac, le Vosne Romanée 1945 et le Montrose 1934.

La générosité des académiciens a permis de rassembler des bouteilles spectaculaires. Comment pourrait-on autrement accéder à des témoignages historiques de la plus haute valeur sans devoir sacrifier des budgets considérables ? Chacun ressentait que l’on trouvait en cette troisième édition un rythme de croisière prometteur. Car la clef de la réussite de l’académie, c’est la générosité des membres. Et ce soir, elle fut grande. Vivement la prochaine.


Cordialement,
François Audouze
10 Jui 2006 14:47 #1

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Etonnant Fleurie 1943 tout de même !
10 Jui 2006 16:41 #2

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Réponse de François Audouze sur le sujet Re: académie des vins anciens du 22 novembre

Voici le compte-rendu de la dernière séance du 22 novembre.
Je rappelle que ceci est fait de façon bénévole, sous une struture d'association loi de 1901 à but non lucratif. Les vins sont l'apport des membres.

L’académie des vins anciens tient sa quatrième session au Pavillon Elysée. La grande salle du premier étage, que je pratiquais dans un passé professionnel lointain, quand ce lieu faisait partie des grandes tables parisiennes, est exactement adaptée à notre groupe de 48 membres répartis en six tables de huit. L’efficacité de l’équipe présente est à signaler. Je commence la cérémonie d’ouverture d’une cinquantaine de vins sous l’œil d’une caméra maniée avec l’intention de faire connaître au monde américain les petites astuces et les principes que j’ai adoptés après avoir ouvert des milliers de bouteilles en observant les effets des initiatives que je prends. Un petit groupe d’amis grossit autour de moi car certains veulent m’aider et d’autres veulent apprendre. Certains vins ont des odeurs merveilleuses, comme l’Yquem 1950 et le Volnay 1949. D’autres vins sont franchement au-delà de tout espoir de survie. Certaines odeurs sont épouvantables. Il manque à l’académie un comité d’admission des bouteilles. La diversité des apports n’a jamais été aussi marquée que ce soir. Il faudra travailler ce sujet. J’ai eu l’occasion de le rappeler dans mon discours introductif : « c’est la qualité des apports qui fait la qualité de nos réunions. Chacun est solidairement responsable. N’attaquez pas telle ou telle bouteille, puisque son propriétaire est sans doute à votre table ». Fort heureusement de merveilleuses bouteilles ont permis à chacun de trouver des sujets de grand bonheur.
Un académicien fort généreux ayant apporté pour les travailleurs du tirebouchon un champagne Duval-Leroy vers 1969, nous avons pu goûter un délicieux champagne à la bulle devenue discrète dont l’expression typée est joyeuse.
Comme à chaque réunion, nous trinquons sur des demi-bouteilles de champagne Léon Camuzet d’une quinzaine d’années, dont l’évolution sympathique est une mise en bouche pour s’acclimater au monde des vins anciens. Didier Depond fit la moue sur ce champagne que d’autres amis ont adoré. Il était visiblement fort marri que ses champagnes Delamotte et Salon expédiés depuis plusieurs jours aient manqué à notre soirée. On les retrouvera un jour, mais comme Grouchy.

Le menu a été composé avant qu’on ne connaisse les vins. Il n’avait donc aucune vocation à être strictement adapté aux vins. Il fut fort honorable mais sans corrélation possible avec ce que nous avons bu : Tempura de gambas avocat pomme / Déclinaison de saumon cuit fumé et mariné, chips de pomme de terre et asperge fine / Foie gras de canard aux épices en déclinaison glacé / Suprême de Pintade rôtie aux asperges vertes et mitonnée de morilles / Fromages de Bernard Antony / Macaronade nuts caramel d’agrumes et pain d’épices.

Les académiciens sont répartis en trois groupes, et voici leurs vins, dans l’ordre de service :
Groupe 1 : Pol Roger rosé 1979 - Probable Chassagne blanc vers année 30, capsule porte : JJ & B - Domaine de Chevalier 1952 - Château Talbot 1955 - Château les grands Rosiers Pauillac 1926 - Château Rausan Ségla 1924 - Pommard Grands Epenots Michel Gaunoux 1962 - Chateauneuf du Pape Sélection de la réserve des Chartes 1947 - Hermitage Paul Etienne 1959 - Vega Sicilia Unico 1941 - Bouzy Barancourt 1974 - Château Chalon Jean Bourdy 1953 - Montrachet du Domaine de la Romanée Conti 1969 - Domaine du Pin, Beguey, 1ères Côtes de Bordeaux 1937 - Château d'Yquem 1950 - Cognac de Tiffont, cuvée du centenaire vers 1880.

Groupe 2 : champagne "Femme" Duval Leroy 1996 - Graves blanc LE CARDINAL 195? - G de Château Gilette 1958 - Chassagne-Montrachet – Namont de Marcy 1962 - Clos de l'Oratoire 1961 - Château Le Bon Pasteur 1955 - Château Larcis Ducasse 1945 - Château Carbonnieux 1928 - Clos Saint Jean – Bouchard aîné & fils 1962 - Bonnes Mares Lionel Bluck 1966 - Volnay Clos des chênes 1949 - Côteaux du Layon Cousin-Leduc 1961 - Lacrimae Santa Odiliae Pierre Weissenburger à Obernai 1928 - Château Rayne Vigneau 1975 - Château Coutet 1947 - Cognac de Tiffont, cuvée du centenaire vers 1880.

Groupe 3 : Pol Roger rosé 1979 - champagne Dom Pérignon Oenothèque 1976 - PULIGNY-MONTRACHET Gauthier frères 1953 - Bâtard Chevalier blanc Pessac Léognan 1988 - Château Talbot 1978 - Château Le Prieuré Saint-émilion 1971 - Château Haut-Brion 1970 - Château La Cabanne Pomerol 1953 - Bouchard Ainé Fils, Grand Manoir, Côtes de Nuits 1929 - Moulin à Vent Bichot 1947 - Chateauneuf du Pape Domaine de Nalys 1985 - Anjou Rosé Moelleux domaine de Bablut 1959 - LOUPIAC château Dauphiné-Rondillon 1952 - Château Camperos Haut-Barsac 1941 - Château Chalon Jean Bourdy 1969 - Cognac de Tiffont, cuvée du centenaire vers 1880 (commun à toutes les tables).

Les académiciens étant de plus en plus disciplinés, les échanges de vins entre groupes furent discrets. Aussi n’ai-je pu profiter de quelques vins des autres tables qui m’excitaient au moment où je les ai ouverts avec la fine équipe de « tirebouchonniers ». Le Coutet 1947 a été grandiose selon les échos que j’en ai eu, comme le Volnay 1949, le Dom Pérignon 1976 et le Larcis Ducasse 1945. Le Haut-Brion 1970 que j’avais affecté à cette expérience avant de savoir ce qu’il donnerait chez Robuchon fut applaudi. C’est heureux qu’il ait choisi ce soir là pour être bon.
Voici quelques commentaires succincts des vins de mon groupe. Soucieux de l’organisation, je n’avais pas l’attention qu’il faudrait pour saisir toutes les subtilités. Le champagne Pol Roger rosé 1979 est joyeusement fruité. Il est précis. Son attaque est belle, mais il est très court en bouche. Un champagne très agréable, plus plaisant que le récent Pol Roger rosé 1999 que j’ai goûté lors d’un dîner littéraire.
Le probable Chassagne blanc des années 30, JJ&B est une énigme pour tous, mais il est extrêmement plaisant. Certains se demandent si c’est bourguignon. On me parle de chenin. On évoque le chardonnay. Je le crois volontiers. C’est un vin charmant, qui ne renie pas son âge avancé, qui ne ressemble à rien d’actuel, mais qui imprime en bouche une trace forte et plaisante. Son association avec l’agrume du plat le rend absolument excitant.
Les trois vignerons qui sont à ma table sont surpris que le Domaine de Chevalier rouge 1952 puisse avoir cette jeunesse. Ce vin est extrêmement bon. Sa robe et son nez sont jeunes. Il est précis en bouche. Un grand vin. Il ouvre des horizons nouveaux sur la pertinence des périodes de maturité annoncées par les gourous du vin. Ce bordeaux a 54 ans. Il est ingambe et séduisant.
Cette leçon va être confirmée par le Château Talbot 1955 qui est brillant, comme tous les vins de 1955 en ce moment. La structure est un peu plus précise et l’année un peu plus chaleureuse que celle du Domaine de Chavalier.
Le Château les grands Rosiers Pauillac 1926 est une inconnue pour tous. Est-ce Haut Bages comme il est inscrit sur l’étiquette récente. La capsule est assez neuve, le bouchon me semble avoir largement plus de quarante ans. Lorsque je dis que j’aime ce vin, Aubert de Villaine, attentif à nos approches de ces vins anciens, se refuse à suivre mon optimisme. Il n’aime pas ce vin du fait de défauts évidents. Il est possible que l’insistance aromatique du saumon fumé, très éloigné des désirs des vins rouges, ait conduit à cet écart d’analyses. Ce vin est plaisant, vivant, très certainement de 1926. Je l’ai aimé.
En revanche, contrairement au blanc des années 30 et au 1952 de ma cave, le Château Rausan Ségla 1924 que j’avais ajouté malgré un niveau bas montre dès l’abord une odeur animale décourageante. Mais ce vin allait apporter à mes théories une indéniable confirmation. Je demande toujours que l’on ne juge pas trop vite. Nous avons constaté avec mon célèbre voisin une transformation olfactive spectaculaire du Rausan-Ségla. Nous aurions attendu quelques heures de plus, il n’est pas interdit de penser que la majeure partie des imperfections eussent été gommées. Au moment de son passage en scène il ne savait pas son texte. Paix à son âme.
Le Pommard Grands Epenots Michel Gaunoux 1962 est le petit fils d’un de mes plus grands bourgognes, le Grands Epenots Michel Gaunoux 1926. On sent au nez tout le charme bourguignon. Hélas en bouche, ce n’est pas très bien assemblé. Du charme certes, mais de l’imprécision. Le Chateauneuf du Pape Sélection de la réserve des Chartes 1947 dont j’avais fait aussi la pioche dans ma cave me plait énormément. C’est indéniablement un vin simple, sans aucune complication, mais c’est un vin de plaisir qui chante comme sa région.
L’Hermitage Paul Etienne 1959 a une magnifique étiquette, comme celle de très vieux cognacs. Me déplaçant, car j’étais appelé par d’autres tables, je n’ai pas gardé le souvenir de ce beau vin.
Le Vega Sicilia Unico 1941 m’avait fait très peur à l’ouverture. Sous la capsule, le haut du bouchon, descendu de huit millimètres, laissait suinter du liquide sur un disque moisi. Il n’y avait heureusement aucune contagion. Ce témoignage antique du plus grand vin espagnol me plait énormément, fort, alcoolique, presque caramélisé.
Après ce monstre sacré, le joli Bouzy Barancourt 1974 a moins de structure. On l’aime surtout car c’est un témoignage de valeur de sa région. Le Montrachet du Domaine de la Romanée Conti 1969, cadeau spectaculaire pour l’académie, est un vin qui se boit religieusement. Il est bien sûr de grande race, mais je ne lui ai pas trouvé le caractère flamboyant qu’il a dans ses versions plus récentes. Il est à noter que même plus discret, ce vin reste spectaculaire. Mon attirance pour le Château Chalon Jean Bourdy 1953 est connue. Je l’avais goûté récemment. Celui-ci est vif, limpide, conforme à l’empreinte qu’il doit avoir. J’ai un faible pour le Domaine du Pin, Beguey, 1ères Côtes de Bordeaux 1937 que j’ai déjà fait figurer dans plusieurs de mes dîners. Il ne faut pas lui demander une puissance qu’il serait incapable d’avoir. C’est sur la séduction tranquille avec des notes d’agrumes qu’il faut le déguster. Le Château d'Yquem 1950, cadeau de Pierre Lurton, qui ne pouvait être des nôtres, est généreux, sûr de son charme. Il est très Yquem, sans chercher à dérouter. Très classique, il joue sa partition sans la moindre fausse note. Cette bouteille reconditionnée en 1992 est de l’or le plus pur. Le Cognac de Tiffont, cuvée du centenaire vers 1880 est objectivement un grand cognac. Je l’ai trouvé un peu aqueux et manquant de pep. Là aussi, un certain manque de sex-appeal. Par comparaison, le Bourbon 1900 que je fis goûter à certains est un diablotin remuant.
Notre groupe de vins était particulièrement brillant. Les rires fusaient aux autres tables montrant que les académiciens ne se chagrinaient pas trop des quelques bouteilles réellement mortes. Je serais bien en peine de faire un classement des vins que j’ai bus. Je mettrais en tête Yquem 1950, car il est toujours au rendez-vous, avec une pureté de ton remarquable. C’est le Montrachet DRC 1969 qui doit venir en second pour sa noblesse. Mais je le ferais volontiers précéder par le Domaine de Chevalier 1952 qui sera second ou troisième selon que l’on privilégie tel ou tel critère de jugement. Le Chateauneuf du Pape 1947 vient ensuite et le Vega Sicilia Unico 1941.

L’académie des vins anciens est sans doute un des seuls cercles qui permet à des amateurs d’avoir accès à des vins impossibles à rassembler : Dom Pérignon Oenothèque 1976, Montrachet DRC 1969, Yquem 1950, Coutet 1947, Vega Sicilia Unico 1941, Larcis Ducasse 1945, Carbonnieux 1928, et d’autres, où peut-on les rassembler ?

Belle salle, bon service, repas structuré, intelligents fromages, grands vins. L’académie s’installe sur un bon rythme. Et le groupe de fidèles est très sympathique. Vivement la prochaine séance.


Cordialement,
François Audouze
26 Nov 2006 15:01 #3

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Réponse de Guest sur le sujet Re: académie des vins anciens du 22 novembre

Encore une liste de grands vins impressionnantes ...
27 Nov 2006 17:02 #4

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Réponse de François Audouze sur le sujet Re: académie des vins anciens du 8 juin et 22 novembre

C'est tout l'intérêt de ce qui commence à prendre un rythme de croisière : rassembler des vins anciens et les goûter ensemble. Quand en plus des grands vignerons adhèrent, ça ne peut que se développer.


Cordialement,
François Audouze
28 Nov 2006 01:24 #5

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