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Week-end Arômes : 2e repas

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Week-end Arômes : 2e repas a été créé par J Ph Durand

La discussion que j'avais amorcée fin août, suite à un petit repas de fête, a conduit à ma migration vers Vannes afin de cuisiner pour Nidal et ses invités. C'est tout à fait le sens de ma démarche : cuisiner pour les autres, tenter de leur offrir le meilleur de moi-même, partager avec eux ma passion afin de nourrir une approche du quotidien, ici et maintenant, qui dépasse l'unique plaisir de la dégustation.

Le menu du dîner de ce samedi 18 novembre fut le suivant :

Foie gras poêlé, lamelles de céleri-rave aux zestes de citron
Dom Pérignon, 1996

Noix de St Jacques poêlées, mousseline de potimarron à l'amande douce, expression de l'amer
Meursault "Narvaux", Jean-François Coche-Dury, 2001

Terre et mer de Bretagne en automne : poêlée de coings, moules et palourdes ; grosse langoustine juste saisie ; réduction de bouillon de légumes du pays Vannetais aux arômes de truffe blanche

Filet de bar à l'unilatéral, coulis acidulé à la poire
Bâtard-Montrachet, Domaine Leflaive, 1999

Pomme de ris de veau, endive confite au cassis
Bonnes-Mares, Domaine Georges Roumier, 2001

Filet de chevreuil en rôti, soupçon de vanille, sauce à la cerise douce ; panais et chanterelles poêlés à ma façon
Château Margaux, 2000

Damier de mangues, coulis d'agrumes, compotée de clémentines au miel d'accacia
Château Climens, 1989

Le travail des accords mets-vins, pour ce repas, s'articula autour de mon exploration actuelle, en cuisine, de l'amertume. Si je maintiens toujours dans les sauces une certaine tension par l'acidité, je cherche à développer les notes amères qui me semble entrer dans une belle résonnance avec celle des vins.

Jean-Philippe Durand

"La cuisine n'est que passion et partage" - Marc Meneau
21 Nov 2006 15:41 #1

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Réponse de charlesv sur le sujet Re: Week-end Arômes : 2e repas

Dans ce repas du samedi soir, je voudrais souligner l'engagement total de Jean-Philippe, corps et âme, tant dans la conception des plats que dans leur réalisation.

Dégustation préalable des vins pour un ajustement fin des plats. Réalisation culinaire délocalisée. Labeur incessant de 17h00 à 1h00, avec quelques passages furtifs à table : à la fois compositeur et interprète, inventeur et cheville ouvrière.

Je lui dis merci du fond du coeur.

... Petit oubli : c'était très très bon !

" Je n'écris pas pour une petite élite dont je n'ai cure, ni pour une entité platonique adulée qu'on surnomme la Masse. Je ne crois pas à ces deux abstractions, chères au démagogue. J'écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps. " Jorge Luis Borges
21 Nov 2006 16:19 #2

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Week-end Arômes : 2e repas

Un grand moment en effet (la cuisine mosaïque que je décrivais il y a peu ?).
Une cuisine émotive aussi ...

Jean-Philippe a humé les vins vers 15h30 ... Cela lui a a inspiré des recettes (en fonction des produits disponibles et de quelques réserves bien senties sous formes d'huiles, épices, condiments et autres préparations) avec un sens de la précision assez étonnant !

A noter (entre autres) une viande de chevreuil fantastique ...
Et une mangue qui ne peut rivaliser avec un fruit frais consommé dans le pays d'origine.

La série de vins est de haut vol, comme celle du dimanche midi.
De quoi ne jamais se lasser des grands vins bus dans une ambiance pacifique (et atlantique aussi le lendemain).
21 Nov 2006 16:43 #3

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Réponse de charlesv sur le sujet Re: Week-end Arômes : 2e repas

Jean-Philippe a humé les vins vers 15h30... et trempé ses lèvres... comme nous autres... altérés ! :)o

" Je n'écris pas pour une petite élite dont je n'ai cure, ni pour une entité platonique adulée qu'on surnomme la Masse. Je ne crois pas à ces deux abstractions, chères au démagogue. J'écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps. " Jorge Luis Borges
21 Nov 2006 17:56 #4

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Réponse de Eric B sur le sujet Week-end Arômes : 2e repas

CR: Dès le premier vin versé dans nos verres, l'on sent que la soirée sera passionnante. Nous commençons donc par Dom Pérignon 96. Certains le pensaient dans une période de fermeture: ce n'est pas le cas; le nez est d'une complexité folle: brioche toastée, bois précieux, fruits exotiques, amande grillée, fenouil. On peut aussi déceler une pointe de coquille d'huitre. La proximité de la mer? Dès l'attaque en bouche, le vin est tendu tel un arc qui finira par décocher sa flêche dans une finale impressionnante. Paradoxalement, je n'ai jamais eu en bouche une bulle aussi subtile: quasi irréelle, la coquine vous caresse la langue et le palais avec une délicatesse incroyable. En dégustant parallèlement le foie gras poêlé, lamelles de céleri aux zestes de citron, le vin gagne encore en matière et vinosité tout en s'adaptant au plat avec fair play en prenant des arômes de foie gras et de celéri. Un gentlemen, je vous dis! Vous l'aurez compris, ce champagne fut l'espace de 16 heures le plus beau champagne jamais bu de ma vie (hélas pour lui, j'ai bu le lendemain un magnifique Krug 90).

De fait, passer après ce vin imposant n'est pas chose facile. Le challenge est relevé avec panache par le Meursault Narvaux 2001 de JF Coche-Dury. Paré d'une robe d'un bel or, son nez sensuel est marqué par des notes de fruits secs grillés, de beurre noisette et d'ambre. La bouche allie douceur et violence: il y a de la rondeur dans ce vin, mais sa densité et son intensité aromatique sont telles qu'elles peuvent déranger. On le sent pris encore dans la gangue sévère de l'élevage, et il est clair qu'il faudra encore attendre au moins une décennie pour qu'il s'exprime pleinement. L'accord avec les noix de St Jacques, mousseline de potimarron aux amandes douces, expression de l'amertume fonctionne parfaitement. J'oserais dire forcément avec les Saint-Jacques, mais l'accord avec le potimarron est plus inattendu et très réussi (l'huile d'amandes douces n'y est pas étrangère). L'amertume, quant à elle, apporte du nerf à un ensemble qui pourrait tomber dans le trop doux. Une réussite!

Il était difficile d'imaginer que l'on puisse monter indéfiniment en puissance. Aussi le Batard-Montrachet 1999 du domaine Leflaive qui lui succède paraît au début presque timide, frêle... Lorsqu'arrive le plat suivant, Terre et mer de Bretagne en automne : poêlée de coings, palourdes et moules ; grosse langoustine juste saisie ; bouillon réduit de légumes du pays Vannetais aux arômes de truffe blanche, il commence à se réveiller et s'affirmer. Déjà, plonger le nez dans le verre est un régal avec des notes de poire, noisette, coing et miel de bruyère. La bouche, finement miellée, démarre toute en douceur puis s'élargit, s'amplifie et finit par s'imposer à vous avec maestria. Rien de démonstratif dans ce vin. Juste une sorte de vague qui s'empare de votre palais et vous laisse coi. Sur le plat suivant, un filet de bar à l'unilatéral, coulis à la poire, la personnalité du vin s'affirme encore plus. Il gagne en densité tout en restant d'une finesse et d'une fraîcheur cristalline. La grande classe!

Après un vin pareil, inutile de chercher un blanc qui le surpasse. Nous passons donc aux rouges. Charles a tenu à ce que le vin soit bu à l'aveugle. Rien qu'en le sentant, Laurent nous donne le nom de l'appellation: Bonnes Mares. Moins d'une minute plus tard, le producteur est cité: Roumier. C'est effectivement un Bonnes Mares 2001 du Domaine G.Roumier. Le nez de ce vin est somptueux, à la fois sur des notes terriennes (betterave, réglisse), fruitées (cerise, prune) et florales (violette). Comme le vin précédent, rien d'explosif ou de démonstratif dans ce vin. La trame de ce vin est d'une grande douceur avec des tannins d'un velouté délicat, ce qui n'exclut pas une densité et une profondeur de haut niveau. La finale n'est ici que la prolongation naturelle de ce vin: pas d'explosion ni de durcissement des tannins; toute en douceur et longue. Très longue. Magistral. Le choix de la pomme de ris de veau, endive confite au cassis en accompagnement est une bonne idée. Le soyeux de la chair du ris ne contrarie pas la texture soyeuse du vin et le côté amer/fruité de l'endive au cassis lui donne encore plus de profondeur.

On connaît par contre l'identité du vin suivant: Margaux 2000. On change totalement de registre, beaucoup plus en force. L'élevage est encore bien présent à travers des notes de café, de vanille et de toasté, mais d'autres arômes viennent nous chatouiller les narines: cassis, réglisse, cèdre et santal. La bouche est d'une belle ampleur et d'une fraîcheur remarquable. Les tannins sont véloutés mais se durcissent légèrement en fin de bouche sans s'assécher toutefois. La matière puissante est soulignée par une acidité sans faille de l'entrée de bouche jusqu'à la longue finale. La dégustation de ce vin frôle évidemment l'infanticide: ce vin sera tellement meilleur dans 15-20 ans! mais c'est déjà fort bon avec un filet de chevreuil en rôti, panais et chanterelles poêlés, sauce à la cerise douce. Le chevreuil à peine rosé en est d'une tendreté et d'une délicatesse à se damner, et le panais apporte des notes terriennes que l'on finit par retrouver dans le Margaux. L'ensemble est fort réussi (et il y a du rab de chevreuil ;o)).

Il ne reste plus qu'un vin. Climens 1989. La robe entre l'or et l'ambre est engageante. Le nez rôti sur l'abricot confit, la mangue et la gentiane aussi. L'attaque en bouche est ample et fraîche, avec du gras, et puis soudain... le vin disparaît presque en milieu de bouche pour ne revenir que sur une finale un peu alcooleuse et à la structure un peu bancale. Déception. Difficile de savoir si le problème est lié à la bouteille ou non. Il n'y a pas de signe d'oxydation ou de problème de bouchon. Simplement un manque de tenue inexplicable. Et le très bon damier de mangue, coulis d'agrumes, compotée de clémentines au miel d'acacia n'arrive pas vraiment à sauver le vin, d'autant que les mangues ramenée du marché de Vannes ne sont pas aussi parfumées que Jean Philippe l'escomptait. Cela dit, l'alliance mangue / clémentine et miel est réussie et cette fraîcheur en fin de repas est appréciable!

Aussi exhaustif que soit le compte-rendu de cette soirée, il ne peut montrer l'essentiel: une ambiance chaleureuse, complice et des discussions passionnées (et passionnantes) autour du vin, de la cuisine, et de plein d'autres choses encore. Inoubliable!

Merci à Nidal et à sa femme pour leur accueil et à Jean-Philippe pour sa cuisine d'orfèvre.

Eric

Photos des vins et des plats ICI

Eric
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22 Nov 2006 15:35 #5

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Réponse de chevalier2 sur le sujet Re: Week-end Arômes : 2e repas

Quel beau repas !
Que des vins de première catégorie !

JPH, je suis admiratif devant tant de talents aussi bien qu'à la conception qu'à la realisation au vu des cr des participants.
La composition du repas en fct des vins me pose bien sur qq questions, vu que je n'ai pas eu la preuve par le gout et que je cherche aussi à mon petit niveau à confectionner des plats qui s'harmonisent au mieux avec les vins.

Pourrais tu STP me donner + d'infos sur les accords suivants qui me posent encore question :

Noix de St Jacques poêlées, mousseline de potimarron à l'amande douce, expression de l'amer
Meursault "Narvaux", Jean-François Coche-Dury, 2001

L'amertume releve le plat et fait contraste je pense avec le coté legerement sucré des noix. Comment s'articule-t-elle en revanche vis à vis du Meursault ?

Terre et mer de Bretagne en automne : poêlée de coings, moules et palourdes ; grosse langoustine juste saisie ; réduction de bouillon de légumes du pays Vannetais aux arômes de truffe blanche

Quelle note apportait le coing ici ? De l'acidité ou autre chose ?

Filet de bar à l'unilatéral, coulis acidulé à la poire
Bâtard-Montrachet, Domaine Leflaive, 1999

Belle idée que la poire avec le bar et le batard. Le coulis etait-il un coulis de poire ? Comment l'as tu acidulé en ce cas ?

Pomme de ris de veau, endive confite au cassis
Bonnes-Mares, Domaine Georges Roumier, 2001

Tu avais bien sur reperé d'avance le cassis dans le Bonnes Mares. Je me demande comment tu incorpores le cassis : un coulis ? des baies ? Et le cassis : sur l'endive ou bien à coté pour ne pas tacher l'endive ?

Filet de chevreuil en rôti, soupçon de vanille, sauce à la cerise douce ; panais et chanterelles poêlés à ma façon
Château Margaux, 2000

+ de détails stp !
Le soupson de vanille, tu l'incorpore comment et ou ? A la sauce ou à la viande ? sous quelle forme (les grains directement ??)
Et le poele "à ta façon" : eh ben c'est comment ? juste du beurre ?

Merci d'avance pour tes eclaircissement à un cuisinier en herbe qui cherche à progresser.

Chevalier
22 Nov 2006 16:35 #6

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Week-end Arômes : 2e repas

Chevalier,

Belle curiosité ... mais je ne suis pas sûr que tu auras des réponses précises ...:);)

Pour cette raison entre autres, je me contenterai de narrer ces immense vins (sauf Climens, pb de bouteille).
Les plats étaient remarquables, l'ambiance pacifique, l'implication de Jean-Philippe totale.
22 Nov 2006 18:02 #7

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Réponse de charlesv sur le sujet Re: Week-end Arômes : 2e repas

Merci Eric pour ce "grand CR". Grand dans la même acception que "grand vin"... ce n'est pas peu dire !

Une chance d'avoir eu cette bouteille si loquace de DP 96. Ce n'est pas toujours le cas.

Les vins de JFCD gagnent à vieillir, on ne le redira jamais assez.

Les deux B-M sont des vins de rêve par leur équilibre et leur race évidente. Le Bâtard me fait l'effet d'un mascaret en bouche.

Margaux 2000, à l'heure actuelle, est plus un vin de dégustation qu'un vin de table. Sachons l'attendre.

Climens 1989 était une bouteille défectueuse.

Si je devais conserver un seul plat dans la superbe suite proposée par l'artiste cuisinier, je choisirais l'incomparable filet de chevreuil.

" Je n'écris pas pour une petite élite dont je n'ai cure, ni pour une entité platonique adulée qu'on surnomme la Masse. Je ne crois pas à ces deux abstractions, chères au démagogue. J'écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps. " Jorge Luis Borges
22 Nov 2006 18:14 #8

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Réponse de Eric B sur le sujet Re: Week-end Arômes : 2e repas

Idem pour le filet de chevreuil (tu)

Je me posais d'ailleurs une question à son sujet. Les arômes de celui-ci étaient tellement délicats que je me demandais si c'était une bête sauvage? Ou est-ce la façon de le cuisiner qui le civilise?

Eric

Eric
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22 Nov 2006 18:28 #9

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Week-end Arômes : 2e repas

Eric,

C'est peut-être aussi lieu au type de pièce choisi ?

J'ai adoré la sensualité du ris de veau.
22 Nov 2006 18:47 #10

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Réponse de Nidal H sur le sujet Re: Week-end Arômes : 2e repas

Un Immense Bravo à Jean-Philippe DURAND pour ce beau et très sincère éloge au partage.

J’ai eu la chance (comme certainement, maintenant, quelques dizaines de privilégiés parmi vous et ailleurs…) de côtoyer Jean-Philippe dans sa démarche vers, entre autres belles destinées, l’« Ici-maintenant »…

Je livre ci-après mon petit témoignage :

Jean-Philippe est quelqu’un qui cumule les mandats (dans le bon sens du terme). Doté d’une gentillesse et d’une humanité innées et instantanément communicatives, il vous met à l’aise en partageant avec vous son immense culture pluridisciplinaire.
Cette même culture pluridisciplinaire qui lui permet d’aborder la cuisine, en même temps et tout à la fois et à la manière de… :d’un physicien, d’un chimiste, d’un musicien, d’un oenophile, d’un gourmet, d’un esthète, d’un grand spécialiste de son art…, d’un homme de lettres, d’un inventeur, d’un ami, …

Il le fait bien, car c’est un perfectionniste.

Dans sa cuisine, on retrouve l’homme d’abord, sa culture, sa sensibilité, sa fugue et la grande curiosité qu’il cultive autour de l’Humain, curiosité et amour que la brillance de ses yeux n’arrivera jamais à voiler.

Viendront ensuite les choix, les prises de positions et les décisions : les ingrédients, les parfums, les couleurs, les alchimies, les solutions (en état liquide ou volatile…), les mélanges, les juxtapositions, les sensations imposées ou suggérées, les perceptions basées sur la volonté ou sur le mécanisme….

L’autre soir il était dans une phase de recherche sur l’amer dans le vin et dans la cuisine !.(Il n’y a pas de sous métiers !).

Ses choix des vins en découlaient. Ses choix des plats en découlaient.

Le pire, ce que je dis tout cela, sans avoir la moindre certitude sur sa méthode ni sur ses intentions.

Jean-Philippe ne fait pas de discours autour de sa cuisine. Il ne viendra pas briefer la table sur ses recettes et sur ses tours de main…au grand désarroi de la table en question…:X

Il laisse, tout simplement, à l’intelligence de chacun d’œuvrer dans ce sens et d’aller sur ses pistes à lui, tracées, dessinées ou tout simplement posées dans l’assiette.

Et le vin dans tout ça, me direz-vous ?…

Le vin est choisi ((par lui), long temps avant la date du repas.
Le vin est goûté en début d’après-midi par lui (et par quelques piques-assiettes…;)). C’est là que certains petits ajustements ou changements mineurs peuvent s’opérer dans le grand voyage culinaire qui doit commencer vers 16 heures pour un repas qui débutera vers les 9 heures. Pour Jean-Philippe, le travail continue pendant tout le repas…jusqu’à 2 heures du matin (je crois !!!:)).

Le vin (à mon sens et d’après ce que j’ai vu et vécu) constitue l’ultime ingrédient et le fil d’Ariane qui aidera le gourmet à prospecter harmonieusement le parcours gustatif suggéré par Jean-Philippe.

Le moment le plus étonnant et le plus intense de sa démarche est celui quand il arrive à table,...à la suite de ses plats « envoyés » par les assistants, et qu’il s’écroule (je suis désolé, je ne trouve pas d’autres mots !) sur sa chaise, portant tout de suite le verre du vin a ses lèvres après un passage devant le nez….il goutte le plat et le vin…et là, on sent une onde, un choc…inaudible (ou presque… !). C’est, peut être la rencontre, entre le cuisinier et le vigneron ?

La cuisine de Jean-Philippe est un univers d’expériences, dans le sens propre et figuré du terme, expériences qui s’entremêlent, s’entrelacent, se croisent, s’entrechoquent, s’étalent, se diffusent, se propagent, se démultiplient, se métamorphosent……

La vie encore et toujours. La vie en gestation perpétuelle et nous, ballottés entre notre "volonté" et notre "destinée"…. Entre l« Ici-maintenant » et l’au delà à venir…

Nidal

P.S. : Un double Merci à Jean-Philippe pour le très grand champagne offert à mon épouse.
P.S. 2 : Merci à tous les participants à ce week-end. Tous, très grands connaisseurs et très grands esthètes, maniant la langue et la pensée française avec MAESTRIAT.
Messieurs, avec votre culture et avec votre classe vous faites honneur à la grande civilisation gastronomique et œnologique française. Je le dis du fond de mon cœur.
P.S. 3 : Je tiens à préciser, comme vous pouvez aisément l’imaginer, que la réussite de ce week-end est l’œuvre de tous, y compris pour les frais et les bouteilles apportées. (Je pense notamment aux grandes bouteilles aristocratiques apportées par les grands connaisseurs. Bouteilles que nous avons eu le bonheur de boire et que ma jeune cave n’aurait jamais eu la prétention de contenir ni d’offrir !)
22 Nov 2006 21:15 #11

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  • J Ph Durand
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Réponse de J Ph Durand sur le sujet Re: Week-end Arômes : 2e repas

Eric,
Comment peux-tu douter un seul instant que ce chevreuil ne soit pas sauvage... Chez Piètrement Lambret, le gibier est de chasse française, de Sologne ! Pour obtenir le résultat du plat de samedi soir : pas de marinade, choix d'une pièce de filet, cuisson courte à 160°C.

Dominique,
Je n'aime pas raconter les techniques que j'emploie en cuisine car peu importe le nombre d'étapes et la nature des procédés. Seul le résultat dans l'assiette compte, que je juge selon trois critères : évidence (on ne doit pas percevoir la technique), cohérence (l'accord des saveurs doit s'imposer naturellement), pertinence (le choix des saveurs doit être juste par elles-mêmes et par rapport au vin).

Quelques éléments qui m'ont semblé intéressants dans le dîner de samedi :
- la mousseline de potimarron : élément central, d'ailleurs placé au centre de l'assiette, qui apporte douceur et rondeur en contre-point avec la tension du vin mais aussi en accord avec les discrètes notes grillées de celui-ci (importance de l'amande douce)
- l'expression de l'amer : pas de saveur propre, juste de l'amertume. Techniquement, c'est une pâte de manioc réalisée avec une infusion poussée de reine des prés (disparition de l'arôme d'amande et apparition de la seule amertume très marquée), dissoute dans un jus de cresson (passage au chinois d'un mixage de feuilles de cresson dans un bouillon de légumes). L'objectif est de faire écho à la belle amertume de ce vin jeune, pour donner de la tension au plat et faire contraste avec la délicate sucrosité fondante de la noix de St Jacques.
- le filet de chevreuil, soupçon de vanille : la vanille pour un vin rouge ? Là intervient ma modeste connaissance du vin : vin jeune, élevage encore présent, noblesse du bois, rondeur et gras de l'attaque. Donc arôme de vanille, élégante, discrète, suave. Dans le même registre, liaison de la sauce au foie gras. Le choix de la cerise douce ? Le pari de ma dégustation initiale, en début d'après-midi. J'ai déjà expliqué, sur LPV, quelle était ma technique pour le choix de l'arôme dominant d'une sauce.

Jean-Philippe Durand

"La cuisine n'est que passion et partage" - Marc Meneau
23 Nov 2006 10:52 #12

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Week-end Arômes : 2e repas

Jean-Philippe,

Au delà de ta réponse, sais-tu s'il y a de fait plusieurs niveaux de qualité de viande en fonction du standing de l'élevage (et dans ce cas uniquement) ?

Je pense aux thons de Méditerranée, élevés en ferme marine en Andalousie avant de se retrouver à prix d'or au marché de Tokyo.
23 Nov 2006 11:13 #13

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Réponse de charlesv sur le sujet Re: Week-end Arômes : 2e repas

Jean-Philippe,

Ce chevreuil là m'accompagne désormais dans ma quête de la perfection.

Ce samedi soir ta cuisine, par son engagement et sa pertinence, méritait le chant de Hawk dans Body and Soul.

" Je n'écris pas pour une petite élite dont je n'ai cure, ni pour une entité platonique adulée qu'on surnomme la Masse. Je ne crois pas à ces deux abstractions, chères au démagogue. J'écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps. " Jorge Luis Borges
23 Nov 2006 14:29 #14

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Réponse de J Ph Durand sur le sujet Re: Week-end Arômes : 2e repas

Sur le registre technique : à la lecture du menu, les saveurs doivent être imaginées dans un registre de l'évocation plus que de la démonstration. Amande douce, truffe blanche, cassis, vanille, cerise douce étaient bien présentes mais discrètes, subtiles, réminiscentes.

Nidal dit ici, avec beaucoup de gentillesse et d'intelligence, ce qui m'anime (et le choix du verbe n'est pas anodin).

Ma rencontre avec Marc Veyrat a transformé ma cuisine, en libérant ma créativité mais surtout en lui donnant une nouvelle dimension. Je cite toujours cette phrase d'un critique du Gault & Millau à propos de la cuisine de Marc : "En donnant le meilleur d'elle-même, elle touche le meilleur de vous-même." Dans cette phrase, tout est dit. Cette cuisine est touchante par cette humanité qui la traverse ; je revendique cette même tentative de la transcendance.

Jean-Philippe Durand

"La cuisine n'est que passion et partage" - Marc Meneau
23 Nov 2006 15:52 #15

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Week-end Arômes : 2e repas

Jean-Philippe,

C'est pourquoi je parle de ta cuisine émotive ...
23 Nov 2006 17:31 #16

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