[size=large]Dégustation thématique et comparative : Montcalmès et Mas Jullien 2005[/size]
Voici la compilation des CR reçus à ce jour.
Les dégustateurs
JPE: Jérôme Perez
EdA: Enzo d’Aviolo
JPI: Jean-Pierre
JCR : Jean-Christophe
JMM : Martinez
AWI : Alain Winemega
ANT : Anthony
Les vins
Montcalmès
AOC Côteaux-du-Languedoc
60% Syrah, 20% Grenache, 20% Mourvèdre
Vignes d'environ 25 ans d'âge
Mas Jullien
AOC Côteaux-du-Languedoc
20% Grenache, 30% Mourvèdre, 30% Syrah, 20% Carignan
Vignes d'environ 30 ans d'âge
Les commentaires
Montcalmès 2005
JPE
Robe légère, peu extraite. Médium si on veut rester poli. Etonnante en tout cas pour un vin languedocien.
Nez frais de fruits rouges et d'épices, le poivre domine largement, élevage bien intégré, mais peu de complexité. Ce nez prend de l'ampleur à l'aération sans gagner en complexité ni en raffinement.
La bouche est fraîche, sur une matière un peu grêle. La texture manque à mon goût de soyeux et d'étoffe. Finale étriquée et dominée par des notes poivrées un peu encombrantes. Bu sur plus de 24 heures, mon avis ne change pas. Je n'apprécie pas ce style, si c'en est un.
48 heures : déclin, oxydation, sècheresse.
EdA
A l’ouverure
La robe est rubis profond à contours rosés, légèrement violacés.
Le nez est profond, floral, un peu lacté, sur les fruits noirs, les épices. A l’aération, il évolue sur la résine, la confiture de fraise. Joli nez.
L’attaque en bouche est relativement souple, c’est friand, on sent néanmoins l’alcool qui nous rappelle qu’on est bien au sud. C’est néanmoins mûr, sans amertume finale avec une belle longueur immédiate.
30 min plus tard
Montcalmès est toujours aussi flatteur au nez, une sensation compotée se développe en bouche. Le fond de verre sent la rose, pinote quelque peu et la fraise à la cardamome se fait ressentir. Très agréable.
2e soir
Le nez est sur la confiture de fraise, les épices, un côté floral marqué. Grand nez très complexe qui me fait penser à grange des pères en moins intense.
Le bouche est gourmande, toujours légèrement chaleureuse comparée à Mas Jullien, mais sans que ce soit un défaut. La finale est longue et fraîche.
3e soir
Le nez est toujours aussi exubérant, la bouche toujours aussi agréable, friande, les tannins sont moins serrés que Mas Jullien mais au bout de 3 jours, le vin n’a pas bougé, aucun signe de dégradation bien au contraire.
JPI
Robe peu profonde. Au nez, des arômes de pivoine, de ronce (limite sous-bois), de cerise, de pruneau, de poivre et d'olive associés à un boisé élégant.
En bouche, le vin montre beaucoup de souplesse. Il est fin, plutôt demi-corps avec une pointe alcooleuse en finale qui aura disparu le lendemain. Petite acidité en milieu de bouche mais au sein d'un très bel équilibre. La finale est élégante, les tannins sont fins et structurés. Belle longueur (sans être phénoménale) sur le chocolat et le bois avant le retour de notes de ronces et de cerise.
Pour moi, j'aime beaucoup ce vin. Il a quelques côtés sudistes même s'il est assez éloigné des vins du Roussillon que je connais. C'est un Languedoc rhodanien avec des notes bourguignonnes.
Je sais c'est complexe mais le vin l'est tout autant.
JCR
La robe est rouge rubis avec reflets fuchsias; elle est limpide, brillante, et d'intensité colorante moyenne. Le premier soir, le vin est assez peu expressif, et un peu creux et court. J'apprécie toutefois la finesse et l'élégance des arômes de fruit, la présence de notes d'agrume (orange). Le nez, et surtout la bouche en rétro-olfaction, présentent effectivement des notes de caramel. Le vin est nettement meilleur les deux soirs suivants: le fruit est brillant de pureté, le boisé s'exprime plutôt par de fines notes de café, la bouche est ronde, suave, soyeuse, il y a du gras en milieu et fin de bouche, l'acidité est moyenne et apporte la fraîcheur nécessaire; je note cependant une sensation de sucre en fin de bouche, et une sensation d'excès d'alcool; en outre je trouve que le vin manque un peu de structure tannique. A noter que plus le temps passe, plus je trouve le vin "sudiste": des notes d'épices et d'olive étaient plus marquées le 3e soir. Dans l'ensemble une belle bouteille, qui offre beaucoup de plaisir dès maintenant.
JMM
Robe rubis d'intensité moyenne.
Un nez intense et fruité où la fraise compotée domine de manière spectaculaire. Arômes de caramel, de pêche, de garigue. Le boisé se fait sentir mais il est fin et intégré.
L'attaque est métallique sur le fruit. Les tanins sont fins, tapissent finement le palais malgré ce volume le vin a plutôt une dynamique longiligne. En milieu de bouche le vin s'efface voire s'effondre pour rebondir sur une finale acceptable mais de longueur très moyenne sur la fraise, la groseille avec une pointe d'amertume due à des notes herbacées.
En résumé : un vin qui manque d'harmonie, de cohérence. Le nez apparaît un peu brouillon, voire vulgaire tellement cet arôme de fraise compoté sur le caramel est dominant. Le milieu de bouche marque une rupture et n'est pas au niveau d'un grand vin. La finale est plus élégante que le nez mais manque de longueur.
Le vin est mis quelque temps au frais pour faire baisser sa température puis redégusté: Il a changé :
Le nez n'est plus le même. Il est devenu très beau, profond, très élégant, beaucoup plus frais. Des notes florales et d'épices apparaissent, la fraise n'envahit pas tout. Un nez fin ! C'est superbe. On se rapproche de la bourgogne et on prend plaisir.
De même, à l'attaque, le vin en bouche s'est mis en place, il s'est harmonisé et conduit de manière élégante les arômes perçus au nez. Par contre, la rupture en milieu de bouche est toujours aussi présente, les arômes tombent, le vin finit court.
Le dernier point met en cause la qualité de la structure du vin. Y a-t-il assez de matière ? Personnellement, je ne parierais pas grand chose sur le futur de ce vin. Mais devant sa transformation, je reste hésitant et serai bien content qu'il devienne un grand vin dans 7/8 ans.
AWI
Arômes plutôt délicats de cerise mûre et de poivre noir. Un peu de réglisse au second nez.
L'entrée de bouche est fine, de densité médiane. Milieu bien fruité, s'appuyant sur des tannins un peu lisses. La finale est de profondeur moyenne, manquant quelque peu de relief malgré une bonne vivacité du fruit.
Une bouteille correcte, plutôt élégante mais sans grande surprise non plus.
ANT
Bouteille carafée dans un magnum pendant 11 heures.
Le nez est de prime abord fermé, puis s’ouvre sur des notes de fruits rouges mûrs, surtout la framboise. Après 15-20 minutes dans le verre, il prend de l’étoffe, mais reste assez monocorde.
La bouche est cordiale, très arrondie, avec une belle matière, de la fraîcheur, mais peu de tannins et une finale honnête, sans plus. Un vin qui ressemble à un petit garçon poli et bien élevé, mais qui peine à se faire remarquer. Il lui manque de la complexité et du caractère à ce stade de son évolution.
Mas Jullien 2005
JPE
Robe très sombre, presque noire, reflets violines.
A l'ouverture, la réduction rend ce vin insupportable (viscères). La bouche est dure, stricte pauvre en saveur et les tannins se montrent d'une dureté peu commune en finale.
Après plus de 24 heures, la réduction est partie, mais le vin est peu causant, fermé, verrouillé à double tour. La texture n'en demeure pas moins satisfaisante, équilibre très beau, mais c'est peu causant au niveau des saveurs. Les tannins se font plus doux et la finale est bien fraîche. Je reste sur ma faim en pensant qu'il faut impérativement attendre.
48 heures : enfin, des notes fumées, de pain d'épices et de fruits rouges et de tapenade. Des saveurs distinguées en bouche, du tabac et un équilibre propre à ce cru. L'élevage n'est jamais perceptible.
EdA
A l’ouverture
La robe est rubis très foncé et semble très jeune à reflets violacés très intenses.
Le nez est assez réduit, un peu de volatile, très fermé et peu agréable à ce stade. Au second nez quelques notes animales apparaissent.
En bouche apparaît jeune, avec une charge tannique bien présente mais pas excessive, d’ailleurs l’équilibre est superbe, aucune sensation alcooleuse. C’est très séveux, on sent une matière bien mûre qui rend le vin facile à boire malgré sa jeunesse. Ma femme me dit même que ce vin est féminin en bouche !
Le vin qui s’étire en finale bien qu’on sente beaucoup de réserve à ce stade.
30 min plus tard
Mas Jullien développe toujours un nez assez monolithique duquel émergent quelques effluves de fruits noirs, sans sensation d’élevage. La trame du vin en bouche est très classique du sud de la France. Le fond de verre sent le musc, sensation de basse cour (mourvèdre) assez masculine.
2e soir
Le nez s’est enfin quelque peu ouvert sur le cassis, la fourrure, les épices.
En bouche, quel équilibre toujours, ce vin est harmonieux, un vrai plaisir gustatif grâce à de jolis tannins malgré une fougue indéniable et légèrement poivrée et beaucoup de ressort.
3e soir
Le nez est sur le cassis, le graphite, mais toujours en retrait comparé à Montcalmès.
La bouche est pleine, le vin se livre désormais pleinement, la finale est longue, étirée, c’est toujours aussi beau.
JCR
Robe plus intensément colorée, rouge tirant sur le noir avec le disque franchement violacé. Un nez assez austère au départ, avec des notes de réduction, un côté animal, épicé et cuir. Bouche très puissante, grosse matière, "grôôsse struktur" tannique, mais de belle qualité, superbe longueur et acidité haute qui empêche le vin de paraître lourd. Un vin qui me semble superbement équilibré. Cela dit le vin n'offre pas énormément de plaisir en l'état: le fruit est un peu effacé, et le vin a besoin de temps pour se fondre. Le 3e soir le vin s'apprécie mieux, la structure tannique s'est un peu fondue dans l'ensemble, les fruits noirs (myrtille) ressortent plus, la longueur et la fraîcheur sont toujours au rendez-vous. Un vin très impressionnant, mais toujours un peu réservé. Une très belle bouteille donc, mais à attendre impérativement quelques années.
JMM
Robe dense, jeune aux reflets violets.
Un nez pur sur le pain grillé, la violette, un fruité présent mais discret ( mure ), des notes animales apparaissent petit à petit sans déranger l'ensemble. a l'aération un fruité pur et précis sur les fruits rouge apparaît. Le tout reste harmonieux.
En bouche, les tanins tapissent superbement le palais. Un vin d'un joli volume, harmonieux, cohérent mais aromatiquement discret où l'on retrouve le même cocktail qu'au nez. L'équilibre est souverain. L'acidité est présente au service d'une harmonie parfaite. La finale ajoute des arômes de thym, d'olive verte et garde les notes animales.
Il s'agit d'un vin, contrairement au Montcalmès, régulier de bout en bout et plus précis. Tout est déjà en place. Les tanins sont ici moins fins.
Au final, on peut dire que Mas Julien est un grand vin du Languedoc et qu'il évoluera sans soucis.
AWI
Bouquet complexe et représentatif des vins sudistes: pruneau, garrigue, fourrure, résine et bois de cèdre ainsi qu'une légère note de cacao.
La sensation sur le palais est bien pleine, sapide avec un fruit charnu. La sensation tannique en milieu de bouche est un peu trop ferme malgré un grain plutôt fin. Finale ronde et mieux équilibrée, laissant penser que la matière devrait correctement s'intégrer dans quelques années.
Un vin bien construit, au caractère plutôt masculin à défaut d'être très savoureux à ce stade d'évolution.
ANT
Le 1er nez (après 11h de carafe !) est renfermé, animal, avec une légère touché végétale (fougère) qui amène une certaine fraicheur. Après 15-20 dans le verre, il prend un côté plus puissant et sudiste.
La bouche me plait beaucoup. Compacte, aux tannins affirmés, elle a un petit côté paysan de par une matière encore un peu brute de coffre. Belle complexité pour un vin qui se déploie en couches et qui présente une finale extrêmement longue. Le seul bémol est le fruit, trop en retrait à ce stade et qui n’arrive pas (encore) à compenser la masse tannique pour donner une certaine harmonie. L’élevage est excellemment bien intégré.
Les conclusions
EdA
Deux expressions sudistes bien différentes, mais clairement sudistes.
Il est certain que là où Montcalmès se boit dans l’immédiateté, Mas Jullien nécessite une préparation. Il faut impérativement le carafer plusieurs heures avant de la consommer à défaut de passer à côté.
Pour son plaisir immédiat et « facile », Montcalmès est sans égal à ce jour, clairement prêt à boire avec beaucoup de plaisir, même si une garde de plusieurs années ne lui fera pas peur.
Je ne suis pas convaincu qu’il sera meilleur à l’avenir qu’aujourd’hui. En outre, sur le 05, je n’ai pas ressenti l’amertume finale qui m’avait dérangé sur le 04. Contrairement à ce qu’on laisse souvent entendre, Montcalmès possède bien un équilibre sudiste, certes plus fin et élégant que la moyenne, mais bien sudiste c'est-à-dire avec un alcool et une glycérine présente.
Mais pour son potentiel, sa personnalité forte, Mas Jullien est un représentant du Languedoc remarquable et je serai curieux de goûter ce vin dans 10 ans tant je crois à son potentiel pour devenir grand entre 5 et 10 ans. Les deux vins m’ont plu.
JCR
En l'état, Montcalmès offre plus de plaisir selon moi. Mais je suis plus impressionné par le Mas. En outre ce dernier correspond mieux à mes goûts. En terme de typicité languedocienne, j'ai trouvé Montcalmès finalement assez sudiste sur la fin (rond, soyeux, notes d'orange et d'olive, alcool, sucre), alors que la rigueur, structure et fraîcheur du Mas me faisaient penser à quelque chose de plus nordique. Dans mes dégustations récentes, j'ai trouvé le Carrément Rouge du domaine de l'Edre, et le Clos du Gravillas "lo vielh", beaucoup proches de ce que je considère comme typique du Languedoc-Roussillon. Pour l'avenir: je pense que le Mas sera toujours très bien dans 7-10 ans, voire plus; j'en suis moins sûr pour Montcalmès.
ANT
Sur cet instantané, également arbitré par Grange des Pères 2005, Mas Jullien a ma claire préférence de part sa plus grande complexité et sa matière énorme, mais bien intégrée dans un tout auquel il manque le temps pour s’affiner. Montcalmès était un joli vin …. trop joli, poli est discipliné pour, il me semble, pouvoir se complexifier avec le temps. Je me réjouis de les revoir dans 5 ans.