Très belle visite hier au Domaine à l'occasion des portes ouvertes, voici le recueil de mes notes bien plus impressionistes que descriptives:
En préambule l'atelier des accords tous très bien vus, pensés en fusion plutôt qu'en contraste:
Rotenberg 2011/ effilochée de cabillaud en gelé, pomelos et gingembre.
Burg 2011/ maquereau frais mariné au citron vert, lentilles et chorizo;
Gruenspiehl 2010/filet de boeuf façon Grawlac, tomates confites et sésame.
Les crus:
SCHOFFWEG 12: 13,5° Calcaire de l'Alenien. Robe pâle, nez fumé sur la réserve, le bouche tendue demi sec en attaque, acidité mûre et ciselée ,long et presque tannique en finale. Beau.
ROTENBERG 12: 12,5° Calcaire de la grande Oolithe. Robe pâle, le nez délicat fruité blanc-jaune avec une petite touche muscatée, l'attaque est tendre et aérée, la bouche d'un profil mosellan, belle tenue avec une terminale en dentelle saline. Gourmand et à la fois très élégant.
ENGELGARTEN 13: 12,5° Graves. Robe légèrement dorée. Nez fruité floral dont le fondu appelle l'analyse en retro olfaction, le type même de présentation d'un vin avant tout tactile, l'acidité sur les graves est bien plus un liant que sur les calcaires. La bouche est droite, sans doute encore un peu ramassée. Dans le verre évolution sur le fumé de la roche. Finale nerveuse plus en structure aujourd'hui que sur la perception aromatique intense, sialogogue. Attendre le relâchement.
LANGENBERG 13: 12,5° granit . La robe pâle, le nez poivré avec une petite pointe acétique, la bouche carrée, frontale clairement sur le sel avec la magie d'un retour de fruit. Il convient de franchir le premier rideau en accommodant, puis tout se dévoile. Le profil est tendu et sialogogue, là également joue avant tout le travail tactile (au sens de St Augustin qui dans une de ses lettres fait allusion au travail de l'écoute), la composante olfactive se présentant en retro comme une récompense.
GRASBERG 11: 14°. Calcaire pauvre de la grande Oolithe. Robe légèrement dorée. Nez d'agrumes en compotée, attaque en demi sec vite fondue par la charge en extraits secs, la bouche en fête presque dionysiaque, les pampres étendues au pied du verre ( et à nos oreilles). À boire et à boire là et maintenant.
BURG 11: 14°. Marnes sombres. Doré, le nez fumé des sarments, attaque en demi sec qui se cogne très vite sur la fausse rusticité des peaux, large d'épaule, hiératique, dominateur, de haute civilité. Sans nul doute de haute gastronomie à la recherche d'accords en empathie, la recherche du contraste s'avérant téméraire tant la personnalité du vin est ici affirmée. Très beau.
GRUENSPIEL 10: 14°. Mosaïque marno gréseuse et granit. Doré limite vieil or, sur cette bouteille juste ouverte le nez est sur la réserve, la bouche incroyable à la fois de précision et de fondant avec la nette sensation de n'effleurer que la surface du vin, il y a quelque chose de délicieusement entêtant dans ce rondo qui nous promène dans tous les registres du goût et du toucher. Très, très beau.
HUEBUHL 09: 14° Argiles lacustres. Doré. Le contraste entre l'arbitrage rigoureux et froid plus en lumière en 2010 et l'accent solaire et débordant de 2009, pisse froid passez votre chemin, ici c'est la régalade, celle qui nous ramène aux fruits et leurs sucs, un beau cadeau.
MAMBOURG 12: 13°. Conglomérat de marnes et calcaires du tertiaire. La robe légèrement dorée, le nez sur la réserve qui nous confirme que le grand vin intemporel est d'abord tactile, la bouche coordonnée avec un retrait intriguant, un jus à mettre sur la table de Talleyrand, une boite à questionnement avec la gourmandise pour juge de paix. Malheureux ceux qui n'auront jamais recueilli cette caresse en bouche! Les jeunes diraient "trop bon".
ALTENBERG 11: 12°. argilo-calcaire pauvre et ferrugineux. Légèrement doré. Le nez exprime d'emblée la délicatesse des équilibres, la spontanéité des jouvenceaux de Bergheim trouvant ici leur écho. L'évidence coupe ici l'herbe sous le pied de la critique.
ALTENBERG 10: 11,5°.Argilo-calcaire pauvre et ferrugineux. Doré, demi sec en attaque, la dentelle Rhénane. Deux millésimes se suivant sur le même méso- climat, l'intelligence et le travail de l'homme non pas contre mais en fusion avec les éléments. Parmi eux, un peuple de levures bénéficiant d'une écoute bienfaitrice. Nous glissons ici sur l'échelle vertigineuse qui nous mène de la grandeur des paysages au labeur micrométrique..
ALTENBERG 09:12°. Légèrement doré. Pour le fond, voir 11, 10 avec ici le baroque du roi soleil, à goûter à la cour, dans les jardins au coucher dans de beaux verres lourds et facettés. L'amer des peaux.
SCHOENENBOURG 11°: 12,5. Marnes irisées du Keuper. Robe légèrement dorée, nez réduit sur cette bouteille juste ouverte, Brut de décoffrage demi sec dans une dimension sphérique en première approche, le déroulement en bouche annonçant sans ambiguïté le chemin vers la verticalité. Ce qui subjugue aujourd'hui est le sérieux qui le dispute au déboutonné du fruit.
La promesse est grande.
Enfin l'atelier pratique géo sensoriel porté par l' enthousiasme de Jean Michel qui, par le verbe et s'appuyant sur la dégustation en verres opaques, relaie merveilleusement sur le terrain la pensée impulsée par Jacky Rigaux.
Un grand merci à tout l'équipe en attendant le rendez vous de l'année prochaine.
Bien à vous tous,
Lionel.