Avec Alexandre, je choisis les vins qui me font envie, et Christophe, avec Pascal Barbot, va adapter le menu du jour au programme des vins.
Voici ce que donne ce déjeuner "surprise" : Brioche tiède, beurre romarin - citron / Palet amande, pomme verte et praliné / Foie gras mariné dans le verjus, galette de champignons de Paris, pâte de citron confit/ Saint-Jacques vapeur, feuille de chou, Huître raide, beurre d’algue Kombu / Asperges vertes, poudre et coulis d’agrumes, fleurs de Printemps / Saint Pierre, beurre noisette - miso blanc, oursin, nougatine, purée de poire - gingembre / Raviole de Butternut à l’amande amer, épinard et chair de tourteau, coulis d’étrille / Cochon cuisiné au Chorizo, topinambour et ail des Ours / Canard de Challans cuit au sautoir, curry noir, légumes primeurs / Purée de pomme de terre au fromage blanc, glace vanille et thym / Citronnelle et piment en sorbet / Cappuccino amande, ananas et coriandre, feuille de riz grillé / Sablé sarrasin, mousse citron/passion / Sorbet litchi, caramel à la rose / Madeleine au miel de châtaignier / Fruits frais.
Nous commençons par un Champagne Philipponnat Clos des Goisses 1997, à la couleur déjà légèrement ambrée. Le champagne est distingué, presque fumé. C'est son élégance qui domine. Il est un peu strict et manque un peu d'ampleur, mais c'est un grand champagne vibrant. Sur le foie gras, il est à son aise et le champignon de Paris lui sert de tremplin. Sa longueur est belle, sa trace fumée est agréable, mais j'attendais un peu plus.
Le Riesling Clos Windsbuhl Zind Umbrecht 1994 est d'une couleur très ambrée. D'une année à botrytis, il combine le caractère sec du riesling avec l'esquisse d'un vin doux. Ce n'est qu'un esquisse, car à aucun moment, même sur la coquille Saint-Jacques presque sucrée, on ne ressent du doucereux. Ce qui me fascine, c'est la précision du riesling. Il a de l'orange amère, du fruit confit, du fumé, mais aussi l'acidité et la fluidité du riesling sec. Sa flexibilité est admirable aussi bien avec l'huître où l'iode excite le vin qu'avec la coquille qui le caresse. Mais c'est avec la crème de l'algue Kombu que le vin frétille. Comme l'occasion se présentait, je suis passé du champagne au vin blanc et j'ai fait le chemin inverse, et c'est fou comme les deux se renforcent. C'est assez saisissant. Et ce qui apparait, c'est la précision du riesling, comme taillée dans le marbre le plus blanc.
Nous risquions de manquer de vin blanc, aussi Alexandre nous ajoute un verre de vin de son invention, qu'il ne nomme pas. La couleur est aussi ambrée, le vin est noble, riche, puissant. C'est un Pouilly-Fuissé Clos de Monsieur Noly Domaine Valette 2000. Sur le tourteau et le coulis d’étrille l'accord est saisissant. Je félicite Alexandre pour ce choix pertinent. Ce vin "cause". Il s'exprime, vibre sur le plat. S'il n'a pas le caractère ciselé du riesling, il a un coffre, une assise et une présence qui sont adaptées au plat. Fruits jaunes, fruits bruns, salade de fruits bruns, fumé, tout concourt à une impression d'élégante gourmandise.
Pour le Chateauneuf-du-Pape Cuvée des Célestins Henri Bonneau 2001, j'ai à peu près autant d'objectivité qu'avec la cuisine de Pascal Barbot. Je n'irais pas jusqu'à déchirer mon tee-shirt et pousser des cris hystériques, mais ce n'est pas loin. Car ce vin, ce n'est pas un Chateauneuf-du-Pape, c'est un monument. Quand on boit ce vin, on boit un désir de vin. C'est exactement ce que l'on souhaite d'un vin de dix ans. Je suis tellement heureux de boire un vin aussi parfait sans être doctrinal que j'en offre un verre à la table voisine. Je saurai plus tard qu'il s'agit de la mère et de l'oncle du pâtissier du restaurant. Ce vin est pour moi un miracle, subtil, vibrant. Bien malin serait celui qui devine sa région.
Je remercie Alexandre de son service du vin en lui donnant mon classement : 1 - Henri Bonneau, 2 - Zind Humbrecht, 3 - Puilly-Fuissé Valette, 4 - Philipponnat. Le mot "Fin" s'écrira avec un Whisky Macallan 1992 percutant de conviction.
La cuisine de Pascal Barbot est un bouquet de création. Son sourire est désarmant. Cette table est un bonheur.