Une cinquantaine à fêter ; l’envie de faire plaisir ; l’envie d’ouvrir quelques belles bouteilles : nous nous sommes donc retrouvés à 7 autour de la table, dimanche, pour une après-midi de convivialité. Nous nous réunissons régulièrement pour déguster, chacun amenant sa bouteille et un accompagnement ; mais pour l’occasion, j'offre le tout : une cinquantaine c'est pas souvent, et pour la prochaine il faudra sans doute me contenter de quelques fraises, ou de leurs racines .

Mise en bouche :

Verrines de saumon sauvage aux pousses d’épinard (et fromage blanc, crème, pignons de pin grillés) préparées par madame.

Champagne Jean-louis Vergnon Brut Nature GC « Confidence » 2006 : un blanc de blanc élevé en barrique ; je commence à apprécier le « bon » champagne, et là je ne suis vraiment pas déçu. Beaucoup de finesse, avec une attaque douce, des bulles très fines ; c’est ample et vineux (plus que ce à quoi je m’attendais pour un blanc de blanc, l’apport du bois ?), puis arrive une forte vivacité qui tire le vin en longueur. Aromes de champignon, sous-bois, puis briochés et citronnés ; c’est complexe, gourmand, très bon et ca plait beaucoup autour de la table. Sans doute un champagne apte à accompagner un repas complet.

Les vins suivants ont été ouvert à l’avance et goutés le matin ; les notes complétées le soir avec les souvenirs du repas.

L’entrée :

Assiette de la mer, avec saumon sauvage fumé (superbe, vraiment rien à voir avec l'élevage), queues de langoustines et grosses crevettes roses, terrine de st-jacques aux herbes (qui manquait de tenue, mais fut délicieuse).

Vin de Savoie, Louis Magnin, Chignin-Bergeron « Grand Orgue » 2006 : ouvert 2 heures à l’avance ; nez ouvert, floral et citronné ; l’attaque est ample, la bouche est puissante, grasse, avec une belle amertume, et légèrement épicée. Dommage, il y a un net déficite d’acidité, ce qui n’empêche pas le vin d’être très long, avec une belle finale dans laquelle je trouve une petite sensation réglissée et un touché de peau de raisin. Donc un beau vin, complexe et profond, à qui il manque juste un peu de peps.

Chablis, William Fèvre GC Bougros 2001 : un vin à la robe d’un beau jaune soutenu ; il a été carafé plus de 1h puis remis en bouteille ; le nez présente une très belle complexité et maturité, l’ananas est très présent, accompagné de beurre frais et de notes minérales ; puis viendra une sensation de fumé, de lardé. L’attaque est ronde, souple, mais une très belle et franche acidité monte rapidement. La bouche offre d'agréables sensations :c’est vif, gourmand, gras, avec une légère amertume, un citron savoureux et précis, une grande finesse, une finale longue et puissante. Une bouteille ouverte il y a 3 ans m’avait déçu car inexpressive ; cette fois le vin se présente superbe, à pleine maturité.

Très bel accord du chablis sur le saumon, mais pour le reste, les vins paraissent trop puissants pour bien s’allier aux mets.

Le plat :

Magrets de canard grillés, poires au vin, sauce au jus de cuisson des poires et au miel d’acacias. L'accord magret/poire est délicieux et fut un succès.

Languedoc, Clos Marie “Simon” 2008 : ouvert 3 heures avant d’être servi ; le nez présente un beau fruité poivré teinté de minéralité, c’est très fin. La bouche est vive, minérale, avec beaucoup de finesse, une amertume réglissée. Vin vivifiant, très frais, très bon. Beaucoup de longueur, mais encore un peu serré. Un avenir prometteur, il grandira.
Le soir, le fond de bouteille se révèle très ouvert, épanoui, puissant et très très fin, tout en dentelle ; le resserrement en finale a disparu. Superbe.

Côtes du Rhône-Villages, Gourt de Mautens, Rasteau 2006 : bouteille ouverte la veille ; au matin, le nez est explosif, dense, enjôleur, très porté sur la tapenade, les fruits noirs, la griotte, le cacao, mais cependant je décide trop rapidement de le carafer un peu, et je l’oublie jusqu’au moment du service ; Résultat : le nez s’est cassé la figure ! Il a perdu de son expressivité. Heureusement, il reste la bouche, de très grande qualité. Elle est d’abord moelleuse, puis parle avec puissance, mais beaucoup de finesse, de superbes tannins denses et fins, veloutés, civilisés, même si encore un peu serrés en finale. Celle-ci montre une certaine fraicheur. Le grenache est très présent, et fait penser à un VDN. Très bon, très gourmand, savoureux, absolument aucune lourdeur. A obtenu le suffrage universel moins une voix !

Deux vins très différents dans leur style et leurs qualités, et qui accompagnerons dignement les magrets et poires au vin. Du moins, pris par l’ambiance, je n’ai pas trop fait attention à l’accord, mais aucune faute de gout ne m’a sauté aux papilles.

Fromages :

Un trop grand plateau (difficile de résister devant l’étal d’un fromager comme Alléosse, Paris 17) avec notamment un comté 30 mois, un beau bofavre suisse, un ossalois fermier (tome de brebis basque)….

Côtes du Jura, Château d’Arlay, Vin Jaune 1992 : ouvert la veille ; nez complexe, très fin, sans surprise sur la noix, les fruits secs, les épices douces, puis plus tard le citron confit. Je serai plus surpris par la bouche : étonnante de finesse, de vivacité, de fraicheur, de légèreté. Encore un très bon vin, même si à mon gout il manque de puissance et de densité. Et il a plu à tous, ce qui n'est pas toujours gagné pour un jaune !

Dessert :

Une délicieuse (mais pas pour tous, hélas) pâtisserie à base de crème et punch au thé vert, ganache au chocolat noir, de chez S. Aoki, excellent pâtissier parisien.

Domaine de Rancy, Rivesaltes Ambré 1993 : superbe robe orange foncée, voire brune. Nez de fruits secs, d’orange amère net et précis, très expressif, plus tard viennent des notes caramélisées, torréfiées, de tabac. En bouche le sucre se fait sentir, mais sans lourdeur. Très long, avec une pointe chaleureuse et alcooleuse. L’orange amère aussi très présente. Belle finale. L’accord n’appelle pas de commentaire particulier : très bien. Bu en parallèle d’un café, c’est encore mieux. Amateurs de VDN, essayez cet accord étonnant.

Voilà, chacun repartira avec sa banane aux lèvres, heureux d’avoir passé un bon moment entre amis et de s’être fait plaisir à table. Pour nous le plaisir continuera, avec les restes et fonds de bouteilles :)o.

Olivier