Pommard, Pommard….On n’en entend plus beaucoup parler ces temps derniers. Bien sur chacun sait bien que les Epenots et les Rugiens sont selon la littérature en vogue dignes d’être Grand Cru, mais en fait cette appellation fait figure de belle au bois dormant, pas de fier porte-drapeau (du moins en ce moment).
D’ailleurs les C/R de Pommard sont en fait assez rare auprès des amateurs me semble-il. Ca ronronnait pas mal en définitive.
Notre conseil d’administration, après approbation des comptes annuels et affectation de somptueux bénéfices devait donc répondre à une question devenue quasi existentielle :
Pommard était il devenu has been, ringard face à la concurrence ? Voire surestimé ?? ah ah le gros mot est lâché..
Nous fîmes d’abord précéder les rouges de quelques Blancs, histoire de préparer au mieux le terrain. Voyons donc le résultat des courses, évidemment à l’aveugle cela va sans dire (mais encore mieux en le disant). Les participants pouvaient amener du Chassagne ou du Puligny au choix en guise d’apéro.
N° 1 CR:Chassagne 1er cru La Boudriotte 2000 Ramonet
La robe est jaune très clair, le nez tire sur la réglisse. En bouche c’est un peu moins convaincant je trouve, un peu fluide. Finale correcte mais monocorde sur le fruit jaune, la pêche.
NB : Je suis passé à coté de ce vin, d’autres ont mieux apprécié que moi la production de Ramonet. Remarquez, ce veut aussi dire que mes appréciations sont constantes..parce je n’en suis pas à mon coup d’essai avec ce domaine .
N° 2 CR:Chassagne « Les enceignères » 2006 Marc Colin
Vin de couleur paille, il fait plus évolué que le précédent visuellement. Le vin est très mûr, presque gras. La matière est indubitablement présente mais l’équilibre général manque de ressort, de tension à mon goût. Jolie finale abricotée de belle longueur.
Personne ne reconnaît M Colin, et encore moins un 2006…Par contre placé par toute l’assemblée sur Chassagne.
N° 3 Chassagne 1er cru « Clos de la Maltroye » 2001 dom du château de la Maltroye.
Belle couleur jaune paille assez foncée, ce vin parait plus âgé que les précédents. Le nez est d’emblée au dessus de ses compétiteurs, avec une complexité certaine sur des senteurs presque tertiaires de sous bois.
La bouche est puissante, concentrée avec une finale très longue sur le tilleuil, la fougère. Certains esprits retors évoquent la truffe. C’est un excellent vin, placé en grand cru par la majorité de la tablée.
Un très bon achat de notre ami Martin, qui avait fait confiance aux commentaires élogieux de M Bettane de la RVF à l’époque. En effet cette bouteille fait honneur (et même plus) à son rang.
Vin N° 4 CR:Pommard 1er cru Argillières 1995 Albert Boillot
Le vin semble bien clair visuellement, et dès le premier coup de nez on sent bien qu’il a autant de race qu’un croisement de Yorkshire et de berger allemand. Une petite note de groseille pas très mûre ne peut éviter les inconvénients d’une acidité très marquée qui déséquilibre complètement la finale.
J’ai connu ce vin plus vaillant il y a qq années, mais là il se délite . Trop tard pour lui mais je crois que la matière n’a jamais été là.
Vin N° 5 Pommard 1er cru « Les Epenots » 1996 Dom L. Latour
Visuellement plus proche d’un clairet que d’un Latour…si je peux me permettre..(oui, je me permets d’ailleurs).
Nez sur la rose, l’aubépine. On est dans le floral mais le bouquet est un peu ténu.
La bouche confirme une concentration insuffisante.
Finale equilibrée mais courte.
Nous pensons à un Village de petit millésime. Evidemment la déception est certaine à la vue de l’étiquette et du climat. Encore une déception en rouge de L Latour pour ne pas changer.
Vin N° 6 CR:Pommard 1er cru Epenots 2003 dom. Mussy
Le vin est de couleur pourpre violacée, fait très jeune.
Nez intense de fruites noirs, de cassis. Voilà qui promet..
La bouche est riche, charnue et très concentrée. Le vin n’est pas encore très complexe à ce stade mais c’est juteux, très « couillu ». J’aime beaucoup.
Ca tombe bien parce j’en ai acheté il y a deux ans !! N’ayant pas regouté mes flacons depuis je n’avais que très peu de chance de reconnaître ce bon producteur de Pommard. Cet Epenots est à laisser vieillir au moins 7-8 ans minimum, mais il me semble avoir les qualité requises pour faire une belle bouteille ensuite.
Vin N° 7 Beaune 1er cru Teurons 1999 Bouchard
Ce vin est encore sombre, de robe.
Il divise notre table sur son avenir car si la matière première est certaine, d’aucun lui reproche une dominante boisée assez sensible au nez, et encore plus en bouche, ce qui est pour moi rédhibitoire sur les vins de Pinot.
Il faudrait regouter ce vin dans 3-4 ans pour savoir s’il a digéré son bois. Je ne prendrais pas le risque d’en acheter à ce stade, mais peut être ai-je tort.
Vin N° 8 CR:Pommard 1er cru La Croix Noire 1999 Dom L. Boillot.
Vin d’une belle robe rouge foncé, mais le nez reste fermé aujoud’hui.
Par contre la bouche me semble de bonne augure pour demain, euh non Apres demain.. C’est concentré, bien extrait avec une finale encore « comprimée » mais équilibrée .
Je ferais plutôt confiance à la maison Boillot dont la production est en général de haut niveau (PS : je n’ai pas amené cette bouteille).
Peu causant actuellement mais prometteur à mon avis.
Vin N° 9 Pommard 1er cru Rugiens 1999 Dom Lejeune
Très jolie robe rubis et surtout un nez volubile, complexe sur les épices, le cuir .
La bouche est savoureuse, riche, avec une belle finale qui reprend les arômes du nez. Persistance remarquable.
C’est excellent !! mais j’aurais dit un millésime plus âgé par contre.
NB : éloquente démonstration de cette bouteille sur la reprise ne main de ce domaine, dont j’ai goûté des millésimes de la décennie précédente très loin du niveau de ce beau Rugiens 99.
Vin N° 10 CR:Pommard 1er cru Rugiens 1993 Dom. J. Voillot
Le vin est moins coloré que le précédent, mais le nez est tout aussi intense par contre. De demi corps en bouche, il se distingue par une jolie finale tertiaire. J’ai du mal à situer cette bouteille, et suis surpris du millésime affiché, que je considère comme « puissant ». Je trouve ce vin correct mais pas au niveau d’un Rugiens pour la structure.
Vin N° 11 CR:Pommard Rugiens 1988 Dom Voillot
Le vin semble évolué à première vue , ce que confirme un nez de grande classe, sur les épices douces, la cerise.
La bouche est fondue, c’est un peu léger en bouche par rapport à un vin jeune, mais alors quelle finale…un bouquet de réglisse, de roses fanées. Longueur hors norme.
Perso je me régale avec cette bouteille. Je le situe un premier cru d’au moins 15 ans. Très joli.
Vin N° 12 CR:Pommard 1er cru Pézerolles 1998 Dom Mussy
Le vin semble évidemment plus jeune que le précèdent, mais la bouche est plus concentrée par contre. C’est même encore peut-être à attendre un peu.
Belle tenue en bouche sur des aromes zan ; de réglisse. Pas mal du tout, mais commence seulement à ouvrir un œil.
Vin N° 13 CR:Pommard 1er cru Rugiens 1982 dom J. Voillot
Tiens c’est assez drôle car me fait penser au N° 11 mais en plus évolué.. Le vin est parfaitement fondu, et seul un léger manque de puissance en bouche peut lui être reproché. Par contre le nez et la finale sont de toute beauté, avec une « race », une complexité digne de tous les éloges.
Nous devisons longuement sur le millésime (situé dans les 20 ans en gros), et sommes tous surpris de lire 1982, qui est une petite année en Bourgogne. Quelle tenue !!
Vin N° 14 CR:Pommard 1er Cru Rugiens 2002 Bouchard
Changement total avec ce vin encore très jeune, de robe rouge –violet.
Nez de rose très impressionnant de puissance, de précision.
Attaque en bouche énorme, mais la matière est très joliment extraite, sans agressivité aucune. Longueur déjà très correcte, on sent que ce vin n’est qu’à l’aube de sa carrière qui sera grande à mon avis. Voire très grande.
Très jolie démonstration que ce Rugiens 2002..à retenir soigneusement dans son carnet car je crois qu’il vaut largement un investissement.. sur 15 ans au moins !
En conclusion, après un début un peu chaotique, Pommard et ses premiers crus ont largement remporté le challenge que nous lui avions modestement imposé. Je note d’ailleurs que malgré la multitude de bouteilles, plus personne ne recrache ou presque après le Pommard de Boillot !! >
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Le second point qui me semble évident , est qu’il faut encore une fois attendre une garde de 8/10 minimum pour commencer une conversation enrichissante avec de telles bouteilles, et on peut compter encore plus pour un tête à tête approfondi, comme l’ont brillamment démontré les vieux Rugiens de J Voillot.
Mes commensaux vous donneront, je l’espère ; d’autres avis ou détails. Une soirée de haut niveau me semble-t-il . :)o
YR