Bonjour à tout le monde.
Une sortie dans un grand restaurant avec ma bien aimée, constitue toujours un moment fort et un événement marquant de notre parcours d’épicuriens en herbe. Il s’agit évidemment là d’instants de bonheur, et chaque occasion régénère un sain plaisir que nous apprécions au mieux. De temps à autres quelques bémols méritent certes d’être relevés, mais ne dit-on pas que la critique est aisée, que l’art est difficile. Personnellement j’admire ces grands et moins grands chefs qui permettent cette joie du goût et de l’esprit, dans ces si agréables havres de paix. Un grand bravo.
Hélas, certaines références de cartes de vins apparaissent à bien des égards farfelues, par les sommes qui leur sont appliquées. Il m’arrive alors de douter de la sincérité des médiatiques ambassadeurs de la haute gastronomie lorsque ces derniers en vantant leur artisanat et la satisfaction première de leurs clients, justifient par je ne sais quel prétextes, les prix indiqués. Je ne vais pas ici refaire le monde, mais plutôt que d’invoquer les réalités et contraintes économiques, bien réelles toutefois, je pense que ces étoilés devraient d’abord préciser que le vin signifie pour eux-mêmes le moyen d’assurer un revenu minimum incompressible loin d’être neutre, et que leur stock donne à leur entreprise une valeur hautement spéculative. Alors, duperie ? Exit l’hypocrisie et les discours lénifiants ? Mais il y a tant à dire et de cas particuliers possibles qu’il est vain de vouloir tirer à cette tribune, la moindre conclusion.
Gastronomie et dégustation de vins ne sont pas antinomiques et apparaissent même pour beaucoup, indissociables. Les administrateurs de LPV voudront-ils à cet effet créer une rubrique ad hoc où les belles aventures et anecdotes pourront y être contées ?
J’ai consulté ces jours-ci une jolie revue traitant d’un maître de la gastronomie française malheureusement décédé, en l’occurrence Fernand Point. A quel bel homme, jovial, et généreux. Il porte sur lui une bonhomie plaisante et une envie de satisfaire ses clients en premier lieu, puis ses amis, proches et gens dans le besoin, et lui après. Il officiait à une époque que je n’ai pas connue, mais je me plais à croire que c’est ainsi qu’il dirigeait la Pyramide, le tout en servant une cuisine de roi. A quel bonheur pour les gens qui l’ont connu d’avoir fréquenté Monsieur Point. Je crois savoir que celui-ci offrait le Champagne sans barguigner, pour des occasions que l’étiquette imposait mais aussi à des moments plus cocasses comme lorsqu’il se faisait couper les cheveux. Rigolo non ? Un modèle je vous dis !
Sans doute la rigueur et l’autorité qu’exige ce métier était-elles permanentes, mais cela n’a pas empêché Les Bocuse, Troigros, Chapel, etc…de réussir à leur tour après avoir fait leurs classes à Vienne. Je ne connais que le restaurant de Collonges où j’ai ma foi fort bien dîné. Je me félicite que notre solide et sympathique ambassadeur ait perpétué l’art culinaire appris auprès de Maître Fernand. Peut-être quelques uns ici ou là critiqueront sa cuisine un rien conservatrice, mais il s’agit des couleurs de la gastronomie française qui a valu à nombre de disciples de belles vocations, et ne le perdons pas de vue aussi, une image de la France enviable partout dans le monde. Et puis, j’assume : quelle classe, quelle gourmandise ! j’ai y mangé la seule pâtisserie à laquelle j’ai de tous temps été hostile. Il fallait que je sois particulièrement heureux, et bien insouciant pour adopter un tel choix. Eh bien vous me croirez ou non, je m’y suis régalé d’un somptueux et succulent…baba au rhum. Ouaaahhh. Quel bonheur, j’étais béat comme un saint.
Les rejetons et maîtres queue en devenir sont-ils aussi généreux et bonhommes que leurs aînés ? Ils font dans l’extraordinaire bien sûr, mais ne pêchent-ils pas par excès d’ambition à toujours vouloir repousser les extrêmes, à toujours vouloir innover, à toujours vouloir surprendre. Ont-ils par dessus tout cette sincère envie du profond bonheur de leurs hôtes ? Si oui, et les tarifs des bouteilles proposées alors ! J’ai beau me prêter au jeu des escapades gastronomiques, je ne suis probablement pas assez féru en la matière. Je ne suis cependant pas loin de penser que cette surenchère sensorielle qui fait feu de toutes parts engendre la confusion voire la perte de repères gustatifs mais aussi olfactifs.
A la relecture de ces réalités - vins hors de prix et cuisine explosive, je m’interroge sur la valeur de l’exubérance. Est-ce cela la classe, la distinction, la politesse,… ????
Bien sûr j’en veux de ces subtiles et complexes alchimies auxquelles les grands crus font hélas de moins en moins souvent la pige et qui plus rarement encore, fusionnent dans une indicible harmonie. Cela reste une quête, une réalité paradoxalement abstraite, mais oh combien difficile d’accès et de compréhension.
Le bonheur est là, évident si on s’affranchit de toutes idées préconçues, mais quelle remise en cause personnelle! Entre les gardiens de la tradition et les partisans d’une cuisine haute en couleurs et saveurs le panorama gastronomique est large. A mes yeux, les classiques qui ont montré la voie ne sont pas moins dignes d’éloges que leurs fougueux successeurs.
Salut Monsieur Point, salut Monsieur Paul. Merci.