Nous devons recevoir des amis, et je sais qu'il s'agit d'amateurs de vins, surtout des grands classiques traditionnels, mais qui aiment aussi se faire surprendre. Ma cave dans le sud, comme à Paris, n'est pas à mon domicile. Elle est dans un hangar où j'espère que nul malfrat n'ira supposer qu'il y a du vin. Alors que ma cave du sud est microscopique par rapport à celle de Paris, je ne sais pas mieux ce que j'ai.

Je remarque une caisse carton de champagne Salon noire, sale, avachie comme un béret, avec des noirceurs de moisissure. Dedans, une bouteille a encore son enveloppe de papier blanc intacte, et quand je l'ouvre pour repérer le millésime, je constate que sous l'emballage intact, l'étiquette de la bouteille a disparu, évaporée en poussière. Rien n'est plus lisible, aussi est-ce vers le carton que je cherche une information. L'étiquette du carton a perdu toute trace d'écriture, mais je vois "83" écrit distinctement. L'idée d'ouvrir un Salon 1983 me paraît excitante, car cette année jugée plutôt faible m'a souvent donné de belles surprises.

Je poursuis mes recherches et je vois un Montrose 1978 qui me semble convenir au plat prévu par ma femme et un vin d'Armand Rousseau me fait de l'œil. Ma pioche est faite.

Le jour venu, je veux ouvrir les rouges quelques heures avant le déjeuner, avec l'angoisse qu'un temps orageux ne donne des vins lourds à boire. Avant d'ouvrir, je prends des photos. Dans le viseur de mon appareil, le 1978 du Montrose, lorsque je le rends plus lisible, me semble 1918. Il me paraît impossible que ce soit le cas. Je prends la bouteille en main et il apparaît sans doute possible que c'est un 1918. Par cette chaleur, je n'aimerais pas ouvrir un 1918, aussi mon choix se reporte sur un Terrebrune Bandol 1987 que j'ai à domicile. J'ouvre les deux bouteilles et le Terrebrune exhale un parfum exceptionnel alors que le Clos Saint-Jacques a encore le pied sur le frein aromatique.

Les amis arrivent, et le bouchon du Champagne Salon 1983 résiste de façon imprévue. Impossible de l'ouvrir. Nous essayons en usant de toutes nos forces, sans succès. Avec un ouvre-boite nous cisaillons le bouchon et avec mon tirebouchon, je lève le reste du bouchon avec une extrême difficulté. Le pschitt est faible mais la bulle est intense. La couleur du champagne est d'un or de blé d'été. Le nez de ce champagne est extraordinaire, et je suis heureux que ce champagne soit au dessus du souvenir que j'ai des 1983. C'est une bonne pioche, profitons-en. En bouche, ce champagne est magique. C'est la perfection du chardonnay, c'est d'une puissance à se damner, avec une rémanence en bouche inégalable. Nous l'essayons sur du Cicena de Léon, du Pata Negra, de la poutargue et des tempuras de fleurs de courgette, et à chaque fois il est parfait.

Nous passons à table et ma femme a prévu un grenadin de veau à basse température d'une tendreté érotique. Avec le reste du Salon 1983, c'est à se damner. Je sers d'abord le Gevrey-Chambertin Clos Saint-Jacques Domaine Armand Rousseau 2001 et ce qui est absolument subjuguant, c'est la précision et la cohérence de ce vin. On imagine que le travail sur les grains de raisin a été redoutable, car ce jus est d'une pureté infinie. Tout dans ce vin est cohérent et on n'imagine pas bourgogne plus séducteur et serein que celui-ci. Velouté, cohérent, structuré, délicieusement fruité, il a tout pour lui. A côté le Terrebrune Bandol 1987 est l'exacte définition des vins du sud, avec un parfum de garrigue, d'olive noire et de romarin. C'est lui qui s'associe le mieux avec la tapenade que ma femme a léchée d'un peu de réglisse. Mais évidemment, la race, la précision sont du côté du bourguignon.

Un repas sans camembert Jort, ça n'existe pas et les deux rouges chacun dans son registre, captent des saveurs singulières de cette pâte divine.

Nous nous rendons chez ma fille à quelques hectomètres de chez nous pour goûter la tarte aux mirabelles que mon gendre va accompagner d'un Champagne Henriot magnum 1996. Ce champagne absolument plaisant montre à quel point il y a un abîme entre un bon champagne et le Salon que nous avons bu.

De retour chez nous, nous rangeons les plats et les verres restés en place et ma femme me dit ; "n'oublie pas le bouchon du champagne". Je le prends en main pour une éventuelle photographie, et je regarde. Wow ! C'est 1982 qui est inscrit sur le bouchon et je réalise que le "83" que j'avais lu, c'est - je le suppose - le département de livraison.

Tout devient plus clair. Nous avons bu un des Salon que je préfère, le plus romantique de tous, le Champagne Salon 1982, le plus mythique pour moi avec 1966, au dessus du légendaire 1959. Tout redevient cohérent. Nous avons bu l'un des plus grands Salon qui soit. Tant mieux !

Et savoir que j'ai dans ma cave du sud un Montrose 1918, ça ajoute un peu de piment à cette journée.

Et savoir que j'ai dans ma cave du sud un Montrose 1918, ça ajoute un peu de piment à cette journée.

Pas du tout, le Montrose a été livré dans le Cher !

C'est marrant

En fait le 83 lu sur le carton où tout était effacé pouvait être le département de livraison, alors que le 18 de 1918 est sur la bouteille.

Un repas sans camembert Jort, ça n'existe pas

Rassuré de savoir que François telle une vestale veille sur les valeurs essentielles du bon goût.

Dans le genre on n'a guère fait mieux, allez, en cherchant bien ``lundi, c'est ravioli !''.

O.

Nul

ça fait quand même petit roquet !

Il faut avouer que Jort a beau faire partie du groupe Lactalis, c'est un camembert remarquable.
La question est , pour combien de temps encore...
www.marianne2.fr/Cam...

Au passage, petite question à François. ()
J'ai comme l'impression qu'il y a deux gammes chez Jort...

J'ai été très déçu par le camembert en boite rouge,

www.enviedebienmange...

jamais par celui en boite pyrogravée. As-tu une expérience sur le sujet ?

www.fromagerie-piane...

Pour moi, le Jort, c'est la boîte bois.
Mais il m'est arrivé d'en manger des rouges, sans franchement bouder mon plaisir.
A noter que dans les camemberts, à l'époque où j'avais étudié cela, les maisons qui font du deuxième choix (camembert trop petit ou trop épais, ou aux deux faces non parallèles), qui a le même goût mais n'a pas la forme exigée, les présentent sous d'autres étiquettes, sans jamais mentionner qu'il s'agit d'un deuxième choix.
Dans le cas de la boîte rouge, je n'ai pas suffisamment regardé si c'est, ou non, un deuxième choix.

A noter aussi que le Jort avec le champagne, soit ça marche à fond, soit ça saponifie. Et on ne le sait jamais vraiment à l'avance (du moins moi).
Il me restait un peu de Salon pour le Jort et c'était superbe.

François, si ta phrase m'a choqué, c'est parce qu'elle offre un condensé rare de lieu commun et d'indécence, même par rapport à l'ensemble de tes écrits. Si tu ne le comprends pas, tant pis pour toi.

Olivier

Olivier,
Ne t'inquiète pas.
Ta remarque montre un degré zéro de compréhension.
Personne ne peut t'en vouloir.
Et effectivement je ne peux rien pour toi.

Comme je ne suis pas méchant et comme je voudrais te montrer à quel point ta remarque est stupide, va lire ceci :

cigarette russe

la dernière phrase est : "Un été sans cigarette russe est presque impossible à imaginer."

Il y a deux cas : soit comme pour : "Un repas sans camembert Jort, ça n'existe pas " tu t'étrangles, tu exploses ta haine, soit tu comprends enfin que c'est un effet de style.

Si tu ne le comprends pas, je ne peux vraiment rien pour toi, car il est exclu que j'adapte mon style à ton niveau de compréhension. Trop difficile

Au moins, tu auras réussi à me faire rigoler, car trouver indécent qu'on aime un repas avec camembert, il faut le faire. Trop fort o_g

Comme quoi il y a aussi des grands comiques sur LPV

On reste calmes, François. Si tu ne comprends pas en quoi ton ``effet de style'' est choquant, du moins pour certains, restons en là.
T'y reprendre par deux fois pour répondre, t'auto-citer ou insulter ton interlocuteur n'apportera rien au débat.

Olivier

Et peux tu m'expliquer en quoi cette blague te choque, alors qu'on sait tous ici que FA (comme n'importe qui d'ailleurs) peut se passer de manger du claquos pendant plusieurs repas (au moins 3 d'affilée je parie...)?

Si Luc Javaux avait dit ça, tu aurais pareillement bondi de ta chaise ? (tu vas me dire : "Luc Javaux n'aurait jamais osé dire ça", je sais, mais bon...).

Bref, tu serais pas un peu sensible de la gâchette quand même ?

Gaël
amateur de brie, mais capable de s'en passer.

En deux mois j'ai dû partager deux Jort. Donc la remarque stupide de o_g est la démonstration qu'il n'a rien compris.
Ce qui l'intéresse, c'est de flinguer. Pas de comprendre le sens de ce qui est écrit.
Je l'ai signalé sur cette stupidité, c'est tout.

1 - C'est un peu Jort, jeune homme
2 - on va quand même pas en faire un fromage

Nota : 1 et 2 étant de l'humour (maintenant j'explique)

En deux mois j'ai dû partager deux Jort.

Tu veux dire que pendant tous les autres repas (une petite soixantaine, tout de même), tu t'es gardé ton Jort quotidien pour toi tout seul ? Egoïste, va

(c'est de l'humour, là aussi, je précise)

Dans le pire des cas François, si trop de pression LPVienne vous oblige à arrêter les camemberts, il vous restera les calembours.

Gaël

C'est fini, oui! Camembert.
Ces chamailleries me rendent bleu.
Banon, pas envie de voir passer les briques. J'attendais plutôt des brins d'amour.
Ca évitera les boulettes pour certains, et à moi de devenir chèvre.
Si tout le monde chimay, on va finir par comté les points.
Désolé, c'est mon côté fleur bleue, mais je préfère ça que d'halloumi tout le monde.
Allez, les truffes, à la trappe!
Peut être un peu vacherin, mais bon, je faisselle qui reste tout tétouné.

Profitez-en, ce message s'auto-détruira avant la fin de la soirée.

Eric.

Eric,
Excellent !
ça rocke fort !

Juste une petite pour la route : j'attends depuis longtemps un appareil qui détecte les radars.
Comme ça tarde, je dis toujours : "à quand Coyotte"

Nota : quand les calembours s'entrechoquent, on devrait un constat de bris de mots.

"à quand Coyotte"

Je croyais que ce jeu de mots était interdit depuis 1987 car il était vraiment, vraiment trop drôle.
J'avais les lèvres gercées, me voilà reparti pour deux semaines de dermophil indien.

Stéphane

François, j'ai toujours lu que le camembert ne s'accordait pas avec les rouges. J'ai mal lu? Bien sûr, avec le champagne pas de faute de goût possible... Surtout avec ce champagne.

Thibault.

Thibault,
Tu as raison, c'est la règle.
Mais je me suis rendu compte que dans certaines conditions, ça marche très bien.
Te dire exactement dans quelles conditions ça marche bien, je serais incapable, mais je constate que ça marche mieux quand il fait chaud.
Quand il fait chaud le vin dans le verre atteint facilement les 22° et le camembert est aussi plus chaud, et ça joue sur l'accord.

Merci François pour cette réponse, je ne manquerai pas de faire des essais. Tu ôtes la croûte?

Thibault.

Tout à fait Francois !
Il ne faut pas que le Camembert soit ammoniaque !Et il vaut mieux un rouge tonique et avec acidité .
Hier soit nous avons fait un sort à un Jort avec un Morgon DESCOMBES :)o

Mais il y a bien d'autres bons Camembert que Jort !

Bonjour François,

Tu évoques ta crainte d'un pillage et, par ailleurs, le fait que tu ne connais pas le contenu de tes caves. Je me demandais donc si tu étais assuré et, si c'était le cas, sur quelle base dans la mesure où tu ne peux lister les bouteilles concernées ?

Bien cordialement.

Lionel

Peux-tu aussi nous donner les adresses de tes caves ainsi que les codes de sécurité, les heures de vacance du personnel ainsi que la section où l'on peut trouver les Romanée Conti, dont la fameuse 45 ?
Merci

Lionel, j'ai contracté une assurance pour ma part. Et la condition sine qua non pour être assuré, c'est de fournir une liste détaillée , et encore mieux avec des factures, de sa cave.

Normal, l'assureur ne va pas assurer quelque chose dont il ne sait ni la valeur, ni le contenu exact.

François Audouze écrivait:

---

> Thibault,
> Tu as raison, c'est la règle.
> Mais je me suis rendu compte que dans certaines
> conditions, ça marche très bien.
> Te dire exactement dans quelles conditions ça
> marche bien, je serais incapable, mais je constate
> que ça marche mieux quand il fait chaud.
> Quand il fait chaud le vin dans le verre atteint
> facilement les 22° et le camembert est aussi plus
> chaud, et ça joue sur l'accord.

En fait,c'est cela le secret du vrai accord avec le camembert,c'est le vin chaud!

jlj

tarkan écrivait:

---

> Lionel, j'ai contracté une assurance pour ma part.
> Et la condition sine qua non pour être assuré,
> c'est de fournir une liste détaillée , et encore
> mieux avec des factures, de sa cave.
>
> Normal, l'assureur ne va pas assurer quelque chose
> dont il ne sait ni la valeur, ni le contenu exact.

C'était bien mon idée et je te remercie de me confirmer que c'est effectivement le cas... d'où ma question.

jlj,
Si tu as une recette pour qu'un vin servi à 17° n'atteigne pas 22° dans le verre quand il fait 30° dans l'air ambiant, je suis preneur !!!

assurance : tarkan a raison.