Le terroir peut transcender
A la base, si je peux me permettre, tout vient du terroir au sens large (y compris son potentiel humain qui en fait partie au même titre que les abeilles et les vers de terre) puisque c'est lui qui préside à toutes les destinées. On ne risque donc rien d'affirmer que ledit terroir est capable de tout, y compris magnifier un vin moyen après dix ans de bouteille. Sauf que transcender du vin ne fait à priori pas partie des attributions logiques dudit terroir, lequel, si je ne m'abuse, n'a pas vocation à le faire et ni la moindre idée, pour cause de défaut d'intelligence et intention (jusqu'à preuve du contraire), de ce qu'est un bon ou mauvais vin. De nombreux vins, de toutes natures et origines, se bonifient avec le temps, dans le cadre de ce qu'un certain nombre d'interprètes considèrent comme une évolution positive (complexification qui n'est d'ailleurs pas du goût de tout le monde). De là à considérer que le terroir, dans son infinie sagesse, soit capable, de son propre chef ou par la grâce divine de son action différée, de changer la taupe en aigle, j'ai tendance à penser qu'on n'est pas loin du raccourci anthropomorphique pour le moins discutable (et c'est d'ailleurs précisément ce que nous sommes en train de faire, même si je parle tout seul en ce qui me concerne - il se trouve que j'ai, heureusement, une certaine expérience en la matière). Que le terroir confère au raisin qui s'épanouit à sa surface des qualités structurelles et organoleptiques particulières, soit, mais qu'il transcende le vin, non, je ne crois pas. Cette terminologie religieuse, proche du mysticisme, de l'alchimie transmutationnelle et la pierre philosophale (que serait le terroir en l'occurrence, mystérieux réceptacle de toutes les forces les plus obscures et bienveillantes de la geste viticole), me semble un poil (ou une plume) inappropriée.