Après avoir bu et commenté Troplong Mondot 2002, une question me taraude.
Quand vous notez un vin ou l'analysez, vs le faites pour saisir ce que vs percevez au moment de la dégustation ou tenez vous compte aussi de ce que vs imaginez que le vin va être à son apogée?
Autrement dit, si qqn note Troplong Mondot 2002 aujourd'hui 91,il parle de ses sensations présentes ou de ce que le vin deviendra? Tous les cas de figures sont possibles, bien sûr, mais en règle générale...
Si les dégustateurs ne tiennent pas compte d'une perspective prospective, je ne comprends pas certaines notes. Je pose cette question, car personnellement, en ce moment même, je ne pourrais pas noter Troplong Mondot 2002 plus de 85. Or, il sera peut être à 90 dans 10 ans. Je ne sais même pas si cela a un sens de noter TM 2002 aujourd'hui (je me base sur mon expérience d'une seule bouteille).
J'espère que ma formulation du problème est claire.
Cordialement
Frédéric

NB une autre manière de poser le problème: est-ce que la vision que l'on se fait du devenir d'un vin est une composante du plaisir/de la perception d'un vin à un moment t avec ses qualités perçues.

Quand je note mes appréciations sur un vin dont j'ai plusieurs bouteilles, c'est pour garder une trace de son évolution.
Donc je le note en fonction de ses qualités présentes et du plaisir qu'il me donne au moment où je le bois.

Cordialement,

Passetoutgrain

J'ai discuté de ce sujet avec Bernard Hervet, ancien DG de Bouchard et maintenant chez Faiveley.
Je lui disais que de boire des vins en fût était un exercice où je me sentais très faible, car je n'ai pas de repère pour dire d'un vin embryonnaire ce qu'il sera dans 10 ans.
L'image est la suivante : en regardant un bébé de 8 mois, est-on vraiment capable de prédir la forme de son nez et de son menton quand il aura 20 ans ? Je ne le pourrais pas.

Bernard Hervet m'a dit : "tu sais, c'est une question d'habitude, et après quelques années on s'y met très bien, et on prend la perspective suffisante pour anticiper sa vie future".
Plus je bois des vins sur fût, plus je commence à sentir effectivement ce qu'ils pourraient devenir. Il y a des exceptions : j'ai bu trois fois sur fût trois millésimes différents de la Romanée Conti. Ce que j'ai bu me rend incapable de prédir.

Ce travail de prédiction n'est pas du plaisir. C'est une démarche déductive, processus intellectuel.
Si on s'arrête au plaisir de l'instant, ces jus à peine formés ne sont que rarement des vrais plaisirs.
Heureusement il y a des exceptions sinon on se lasserait. Mais on ne boit pas du vrai vin.

Sur la question plus précise, ce qu'on doit estimer, c'est ce qu'on boit. Pourquoi parler du futur d'un vin quand la bouteille est vide et ne peut plus se remplir ? C'est ce qu'on a bu qui compte.
Les américains boivent les vins beaucoup trop tôt, et leur excuse, c'est "au nom de la science". Pipeau. Il faut boire un vin quand ça a un sens de le boire.