CR:Domaine de la Rochette - Jacques Tatasciore - Rétrospective 2005-2013
Neuchâtel, Les vins du domaine de la Rochette, par Jacques Tatasciore
Le CAVE a organisé jeu soir dernier, une verticale de différentes cuvées de ce domaine neuchâtelois. Face au nombre d’inscriptions, le CAVE SA a finalement tiré au sort les participants et la chance m’a souri.
Fin 1999, Jacques Tatasciore rachète le domaine de la Rochette, avec l’intention de produire un grand pinot noir en Suisse. A force de travail acharné, à la vigne (rendement très bas, replantation de sélections massales, notamment) et à la cave (vinification par parcelle, choix très pointu des fûts), ses vins sont relativement vite devenus mythiques en Suisse, à un niveau de prix peu habituel. Il cultive 5 ha dans le secteur de Cressier. Le premier millésime produit était le 2000.
Le personnage intrigue, à la fois bavard, mais secret et manifestement pudique. Un peu avant la dégustation, il avait disparu et j’ai senti l’équipe du CAVE un peu stressée par cette perspective. Finalement, il a réapparu 20 min après l’horaire de début prévu. Appréhension d’un solitaire à l’idée de rencontrer son public ?….
Les Rissieux 2005
Rubis, un peu évolué, gras. Nez typé de pinot, fruits rouges et une petite note végétale, boisé noble, note kirschée. Bouche, attaque ample, joli gras, densité, tanins veloutés, finale fraîche et longue, beaux amers et une petite rusticité.
TRES BIEN. Beau début, un vin en pleine forme, qui pourrait évoluer encore favorablement sur 5 ans.
Vieilles vignes 2007
Rubis un peu évolué, nez puissant, boisé marqué, fruité pinot en arrière fond, cuir, un peu animal. Bouche grasse, un peu massive, acidité en retrait, tanins un peu marqués, alcool sensible, finale ample, un peu sur l’alcool. A boire. Un vin puissant, voire couillu, finalement assez peu pinot.
BIEN, mais atypique.
2007 Margiles
Rubis foncé, tirant vers le grenat. Nez discret, kirsché, petite déviation, fuyant. Bouche très ample, massive, tanins un peu marqués, finale longue, petite amertume. Une grosse cylindrée, c’est
BIEN, mais cela manque un peu de distinction.
2007 Les Rissieux,
Grenat moins évolué. Nez peu bavard, boisé, très jeune. La bouche est grasse, ample, dense, la trame est serrée, plus frais que les deux vins précédents, la supériorité du terroir des Rissieux ?
TRES BIEN et très prometteur.
2008 Grappes entières
Grenat évolué, dépôt dans verre. Nez fruité, éthéré, fin, limite faible. En bouche, gras, souple, un peu sur l’alcool, une certaine fraîcheur un peu végétale, longueur moyenne, à boire. Un vin qui divise, certains ont adoré, moi moins. Un style.
PAS MAL.
2008 Les Rissieux
Rubis moins évolué, nez de pinot, boisé, viandé, bouillon, un peu animal. La bouche est grasse, léger CO2, fraîcheur, joli fond, tanins un peu granuleux, belle longueur, finale un peu chaude,
BIEN ++, à boire.
2010 Les Rissieux
,
Grenat, jeune, gras. Nez frais, épanoui, dense, fruits rouges et noirs. En bouche, gras, léger CO2, dense gourmand, équilibré, long.
TRES BIEN substantiel, fin et élégant.
2010 Les Chanez (vigne arrachée depuis lors)
Grenat, jeune, gras. Nez dense, boisé, tourbé, fumé, fruits en arrière-plan. Gras, ample, charnu, flatteur, gourmand, pulpeux, tanins un peu granuleux, atypique, un rien saturant.
TRES BIEN +.
2011 Vieilles vignes
Grenat sombre, très jeune. Nez, cerise noire, boisé noble, vanille, réglisse. Bouche grasse, ample, taffetas, jolie fraîcheur, fruit, dense, trame serrée, une gourmandise.
EXCELLENT, la quintessence du pinot.
2011 Les Margiles
Rubis tendant vers le grenat, jeune. Nez frais, fin, pinot, boisé noble, c’est délié, aérien. La bouche est grasse, avec un petit CO2, c’est frais, mais cela manque d’un poil de fond, une fois que le CO2 a été « évaporé ».
Bien +++.
2011, les Rissieux.
Grenat, jeune. Nez, impression tellurique, fruits rouges, complexe, craie, ça « sent » le calcaire. La bouche est grasse, à nouveau un petit CO2, serrée, fraîche et digeste, tanins veloutés. C’est long et complexe.
TRES BIEN ++. Pourrait atteindre l’excellence au vieillissement.
2012 Les Rissieux
Grenat, très jeune. Nez très pinot, avec cette petite note ligneuse, boisé fin, complexe. La bouche est grasse, soyeuse, séveuse, une belle acidité bien intégrée, les tanins sont un rien granuleux. Une belle longueur, mais moins de relief que le millésime précédent.
TRES BIEN.
2012 Les Rochettes
Grenat intense, jeune, gras. Nez un rien végétal, ligneux, bois sensible, le tout est dense, mais un rien brut de fût. La bouche est grasse, ample, structurée, classique, longue, mais un poil lourde en l’état.
BIEN ++, à revoir au vieillissement, s’il gagne plus en harmonie. C’est du 100% grappes entières.
2013 Vieilles vignes
Grenat foncé, jeune, brillant. Nez encré, fruité, nez de haute précision. La bouche est grasse et ample, il y a une grande fraîcheur, une trame tannique superbement intégrée, un vin dense, long et digeste à la fois.
EXCELLENT et prometteur. En 2013, le domaine a été grêlé, trois fûts ont été produits sur 5 ha, soit 900 bouteilles.
2009 Chardonnay
« Je ne suis pas un producteur de chardonnay et je fais preuve ici d’une certaine constance parce que je les loupe régulièrement », dixit le producteur. Robe, jaune or. Nez retenu, au boisé important, fougère, asperge, lanoline, agrume, pomme verte, coing, c’est à la fois austère et assez foisonnant. Bouche grasse, acidité très profilée, un petit coté chablisien, malgré tout c’est ample et structuré. Cela semble très jeune, faut-il l’attendre ? Un vin pour la table, pour accompagner des mets gras ou en sauce. Une belle façon de terminer la dégustation.
Ce fut une très belle dégustation, avec un très haut niveau. Les vins semblent avoir globalement gagné en précision au fil du temps. Il est vrai que le vinificateur, après une approche minimaliste en soufre, a un peu revu à la hausse les apports de cet adjuvant. Plusieurs parcelles ont été replantées, ce qui devrait rendre les flacons un peu moins rares dans les prochaines années et permettra de vérifier si les choix ampélographiques, sélections massales, du vigneron sont les bons. L’aventure du domaine de la Rochette continue donc, pour le plus grand bonheur des oenophiles.
Le compte-rendu de Jacques Perrin.
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