La rencontre avec Laurent ne laisse personne indifférent. C’est une belle et forte personnalité.
Personnellement, j’aime la sincérité avec laquelle il parle et sent sa terre. Cette humilité avec laquelle il parle des choses, cachant avec pudeur ses conséquentes connaissances derrière ses doutes et ses questionnements.
Mais c’est, comme il aime à le rappeler, un être pétri de certitudes qu’il cultive en les remettant en cause. Un anxieux chez qui les convictions sont plus anxiogènes que leur remise en question.
C’est un personnage, facétieux, atypique, un latin pas sanguin…. Beaucoup de qualificatifs, beaucoup d’impressions. Nous étions nombreux et les avis varient.
Une personnalité entière en tous cas, qui irrite ou régale.
Comme ses vins.
Le mistral souffle un vent glacial mais le ciel est d’une pureté hors du commun, offrant une lumière à la fois dure et précise. Le Ventoux, au dôme légèrement enneigé, nous presse. Passons dans la vigne.
La balade dans les vignes nous renseigne sur sa démarche, empreinte de pragmatisme et d’inspiration. Vers une agriculture bio, mais en prenant le temps de bien faire les choses, en écoutant (ceux en Châteauneuf et ailleurs qui ont entamé cette démarche il y a longtemps plus que ceux qui s’en réclament haut et fort). Le temps de se former, de former autour de lui. Le temps d’apprécier le travail de son père et ce que cela lui permet de faire aujourd’hui.
Quand en regardant le couvert végétal, nous concluons au travail intégral, Laurent lui nous parle de lecture de sa végétation.
Quand nous comparons ses vignes avec les parcelles voisines, lui nous invite à regarder l’érosion, les différentes couleurs de terre entre haut et bas des parcelles, à sentir l’odeur des sols sablonneux, à appréhender les dynamiques entre roche mère et sols.
Bref, un petit parcours plus pédagogique qu’initiatique mais bien plus sympathique que mes questions basiques (Galets roulés ou sable ?). Mais où je corrige tout de même ma connaissance de ses parcelles de Châteauneuf : plus réparties que je ne le pensais entre le plateau (riche en galets) et les zones basses (où les sols de sable règnent). Lui offrant ainsi une plus grande diversité de travail et de matière.
Le vent ne faiblit pas, il faut, pour nous autres, petits citadins venus humer le travail de la terre, rentrer à l’abri.
Les différentes caves ont été construites en s’éloignant de plus en plus de la bastide initiale. Au fur et à mesure de la conversion de la ferme en domaine viticole.
Caves aux plus ou moins anciennes cuves ciment. Construites dans les murs même de la maison ou pièces entières de ciment. Pas de bois, les tentatives ne furent pas convaincantes pour le style de vins recherché.
La vinif en cours est celle des 2009. Les différences de vinif ne sont pas très grandes entre les CdR et les C9P. Une cuve supplémentaire pour les C9P mais comme il n’y a qu’un assemblage unique on se demande si l’élevage séparé apporte quelque chose ? Pas vraiment de réponse.
La cave est climatisée et des drapeaux sont utilisés. Mais ce n’est pas là pour des vinif basse température, juste du contrôle pour éviter les départs trop brutaux. Pas de triturage , 21 jours en cuve avec une remontée quotidienne.
Au sujet des SR sur 2007 Laurent ne souhaite pas que nous abordions ce sujet outre mesure sur LPV.
Il se contente de commenter son idée sur la différence entre perception de sucrosité, qui est subjective et laissée libre à tout dégustateur, et teneur en sucre résiduel qui est objective et mesurable. Nous indiquant simplement que ses vins en 2007 sont bien des rouges secs. Bien en deçà des seuils donc.
Une bien belle balade entre vignes et cave en tous cas. Une belle rencontre avec le vigneron.
Qu’en est-il de ses vins, semblent indiquer nos regards de plus en plus insistants sur cette table où trônent des bouteilles, sans étiquette et au goulot à vis (je reconnais là les bouteilles servant au rosé goûté l’an passé).
Les échantillons tirés par le père Charvin avant notre arrivée sont tirés de 4 cuves représentatives. Deux de CdR et deux de C9P en 2009. Suivront deux bouteilles de 2008 (CdR et C9P)
1ere cuve de CdR 2009
Grenache Carignan Syrah
Le premier nez est un peu discret, sur des notes d’agrumes, de petite fraise.
La bouche a ,quand à elle, une matière très belle, faite de tannins fins, bien présents, mais peu asséchants.
La fraise domine la bouche de prime abord. Puis ce sont des notes un peu plus épicées et une finale avec une pointe d’amertume qui exhausse les saveurs rencontrées et apporte une impression de fraîcheur.
glou
2nde cuve de CdR 2009
Grenache majoritaire Syrah
L’origine des vignes est plus proche de la maison. Cela se ressent, c’est plus chaleureux ;-)
Le nez est plus expressif et plus complexe. Sur les épices, le poivre, le laurier puis sur la fraise fraiche.
La bouche est elle aussi plus impressionnante avec une superbe matière et un équilibre savoureux avec les arômes du nez.
glou +
1ere cuve de C9P 2009
(proportions non notées)
Dark side of the moon, la couleur par rapport au précédent est plus foncée, violet violine. Le nez est plus floral que celui des CdR. Cela me parait plus Syrah.
La bouche est vraiment superbe. Très soyeuse, sur la framboise, la fraise, déjà une belle longueur et une finale sur le poivre, les notes épicées et encore le fruit rouge. Ce vin est d’une grande fraîcheur.
glou glou
2nde cuve de C9P 2009
](85% Grenache et 20% Mourvedre, Vaccarèse et Syrah)
La couleur est encore plus foncée.
Le premier nez est un peu sur le jus de viande, c’est surtout ensuite délicatement floral. Des fleurs et du fruit. On retrouve les notes de framboise et de fraise de l’autre cuve. Plus de complexité aussi. Plus d’exubérance.
La matière en revanche est un peu plus dure, moins fine. Moins de fraîcheur enfin, il n’y a plus cette amertume en final.
glou
CdR 2008
Le nez est très beau sur les épices. Avec Sylv1 nous partons sur la garrigue mais c’est en fait la sauge, la menthe poivrée et le laurier qui s’affirment et ressortent de cette première impression.
Ensuite c’est une belle composition de myrtille et de fraise qui complète le tableau olfactif.
La bouche est elle aussi élégante et épicée, avec du poivre blanc, et surtout la mûre et la myrtille plus que les fruits rouges.
On est, aux dires de Laurent, très proches de l’assemblage final.
glou glou
Châteauneuf 2008
Un nez très franc marqué par la ronce et la mûre et légèrement sur les champignons de paris frais.
Le passage en bouche est un régal de gourmandises même s’il est un peu plus asséchant, la myrtille et le poivre sont à nouveau au rendez vous avec encore cette belle finale amère.
Moins d’enrobage sur ce 2008 que sur le 2009 mais ce n’est pas pour autant plus fluide.
L’amertume en final rehausse un petit coté bâton de réglisse qui achève de me régaler.
Un peu plus tard et sans doute après quelques agitations dues aux discussions animées, mon verre me renvoie de très jolies notes de menthol ou d’eucalyptus je ne sais jamais.
glou glou
CdR 1996
Alors que les commentaires allaient bon train sur les qualités de ce 2008 mais aussi sur les craintes que ce millésime ne nous permettrait pas autant d’éloges d'ici quelques années, Laurent nous abandonne quelques minutes, amusé autant que piqué, pour revenir avec une bouteille qu'il nous propose de goûter.
Impression générale: un très beau Châteauneuf. Un peu évolué mais sur le fruit et d'une grande finesse.
A ce stade de la discussion nombreux sont ceux qui ajoutent Laurent au cercle très fermé de ceux qui en Châteauneuf ont réussi leur 2002 à l'instar d'Emmanuel Reynaud à Rayas.
Le sourire de Laurent s'agrandit pour nous livrer, non seulement le millésime: 1996 qui ne fut pas plus facile que 2002 selon ses dires, mais qui plus est l'appellation: Côte du Rhône !
La couleur de ce vin trahit une belle évolution, pourtant le vin est, au nez, certes un peu sur des notes de viande élégantes, mais aussi sur des belles notes d’orangette, de fruits rouges confits. Une grande acidité en bouche et encore beaucoup d’élégance et de finesse.
glou glou
La suite de notre dégustation s’est faite autour d’un sympathique pic-nic. Malheureusement les, à priori belles, bouteilles qui l’accompagnaient ne se sont pas révélées sous leur plus beau jour.
Sans doute une illustration de cette discussion, où mon esprit rationaliste trouvait à redire, mais qui je dois avouer ce jour là s’est tristement vérifiée : « pourquoi le vin se boit mal sous mistral? ». A ce propose d’ailleurs Laurent suppose que la pression est plus responsable que le vent sur la qualité de la dégustation.
Histoire d’orienter les apports, Seb avait choisi comme thème deux millésimes 2002 (pas fastoche) et 2006. Avec comme condition supplémentaire aucun vin de la vallée du Rhône.
Mes notes sont sommaires ou inexistantes, mais d’abord nous étions à table et ensuite plusieurs bouteilles furent des déceptions. Tous les vins sont goûtés à l’aveugle.
Riesling Spätlese DR Loosen Urziger 2003
Nez discret mais très élégant et fin sur les agrumes et les épices douce.
La bouche en revanche est une explosion d’ananas, de verveine et de « paic ».
C’est moelleux sans mollesse. Avec cette acidité qui tend le tout pour une très belle impression avec ce Rieseling Allemand. Décidément.
glou glou+
Saumur Chateau Yvonne 2002
Au nez des notes de cire, de curcuma, de curry. En bouche une grosse acidité équilibre et tend ce beau gras et cette relative rondeur.
glou ++
Pouilly Fuissé 2006 (de qui ?)
Pas du tout sur le chardonnay pour moi, ni sur le terroir de calcaire. Je part sur une clairette sudiste. Tout faux, mais c’est tout de même bien fait.
½glou.
VdP des côtes Catalanes O.Tailhan 2006
Le vin est d’une grande finesse, personne ne part sur un mourvèdre. Les tannins sont très peu présent.
C’est tout en douceur et fraîcheur. Mais il me manque quelque chose.
Entre pas suffisamment fini et trop fini.
½glou.
Volnay 1er cru le Santenot Remi Jobard.
Nous passons tous à coté. Mistral et Pinot ne font pas bon ménage. Un hommage à Laurent (enzo).
pas glou.
Jean Luc Baldes Cahors 2006 – Probus
La encore je passe à coté. L’impression d’un cahors qui cherche à faire autre chose que du Cahors. Mais je n’ai pas trouvé quoi.
pas glou.
Coteaux d’Aix – Beates 2002
Une autre grande déception. Le millésime est certes difficile, mais le premier millésime des Terrat en leur propre nom (après Chapoutier ) est peu convaincant. Peut être la bouteille ? Je passe à coté de l’occasion de convaincre Quentin sur ce domaine que j’aime tant. Le nez était pourtant avenant, mais la bouche...
pas glou pas glou.
Jus Soli 2006
Nez d’amande amer très sympathique. On se croirait dans un pot de colle cléopatra.
La bouche en revanche est un poil marquée par le bois. A attendre pour qu’elle se fonde.
½ glou
Chateaux Haut Batailley 2002 Pauillac 5 GCC
Nez de poulailler puis de kirsh.
La bouche est charmeuse et avenante.
Une belle bouteille.
glou++
Moulin à vent Champ des cours – Jadot - 2002
Personne ne part sur un gamay. Des notes de fumé, de viande et floral.
Un bouche sur la prune et les fruits noirs, le yaourt à la myrtilles.
C’est une des belles surprises.
glou glou
Domaine Vial Magnères Banyuls blanc Rivage Ambré
Pour conclure cette séance de dégust en demi teinte, il fallait une arme de Sieur Sylv1 pour une conclusion en couleur.
C’est un perfection avec ce vin qui se renifle comme un beau cognac et se bois comme uni vin avec des arômes fin de mandarine confite, de banane flambée, de pain d’épice.
glou glou
Voila.
Alex6