Cela fait quelques années que j'entendais beaucoup de choses très positives sur les domaines de la Roche Redonne et Guilhem Tournier. Je n'avais encore jamais eu l'occasion de croiser leur route mais le hasard fait parfois bien les choses... En dégustant il y a trois jours une très belle bouteille d'un autre domaine de Bandol je tombe par surprise sur Guilhem Tournier lui même. Après une rapide conversation la décision est prise d'aller lui rendre visite avant la fin de la semaine pour enfin faire connaissance avec les vins de ces deux domaines familiaux.
Dès notre arrivée Guilhem prend le temps de nous expliquer l'origine et l'histoire de cette aventure familiale, le choix du bio et de la biodynamie, l'emplacement et l'orientation des parcelles... Guilhem est passionné et prend son temps, on se sent bien ici. La dégustation qui suivra constituera une révélation pour l'amateur des vins de la région que je suis. Loin des standards de l'appellation qui peuvent parfois dérouter par une certaine austérité dans leur jeunesse, un côté massif même, ici le choix a été fait de travailler dans la délicatesse. Les rosés et les rouges goûtés hier impressionnent par leur finesse.
Sur les 2 domaines, aucune lourdeur sur les rosés, aucune sensation "alcooleuse" qui souvent peuvent devenir lassante et dérangeante. Un petit faible pour la cuvée Guilhem Tournier 2017. Un nez sur la rose, les fleurs et de discrètes notes d'agrumes. La chair est magnifique, complexe, sur des notes de pêche. Elle se prolonge longuement sur de fines saveurs épicées de poivre, de gingembre. Cette bouteille est assurément, à ce jour, l'un des plus beaux rosés qu'il m'est été donné de
rencontrer.
La dégustation des rouges sera tout aussi séduisante et surprenante.
Côté Guilhem Tournier, la cuvée la Malissonne est déroutante et charme d'entrée avec une souplesse de tannins que je n'avais encore jamais rencontrée sur des Bandols aussi jeunes. Sur 2015 comme sur 2016 on a l'impression de faire face à des bouteilles qui ont vieilli tranquillement depuis quelques années. La bouche offre une chair riche et croquante sur les fruits noirs classiques de la région mais sans aucune rudicité. La buvabilité est remarquable. Quel bonheur de pouvoir prendre autant de plaisir sur des Bandols à peine nés. Dans un style peut-être plus classique on constate la belle tenue dans le temps de la cuvée les Bartavelles de la Roche Redonne. Sur 2007 et 2011 les notes d'évolution font à peine leur apparition, les fruits tels que le cassis, le pruneau sont encore omniprésents et témoignent de la grande longévité de ces vins.
Les vins produits ici ne sont peut-être pas représentatifs de la majorité de ce que l'on trouve sur cette appellation, ils dénotent dans le paysage local, mais quel souffle de fraîcheur!
Guilhem Tournier produit des vins qu'il aime, ceux qu'il aime boire. Ils ne se compare pas à ses voisins, au contraire il n'hésite pas à parler de ce qu'il apprécie chez eux. Se rapprocher des standards, faire comme les autres? Ce n'est pas le style de la maison et ce serait même, j'ai eu cette impression, presque vendre son âme au diable.
Nous sommes repartis heureux de cette rencontre. Heureux de cette dégustation, de cette découverte d'une autre facette de Bandol mais aussi heureux d'avoir rencontré un personnage passionné et attachant à l'image de son domaine et de ces vins.