Par un heureux concours de circonstances, j’ai eu l’occasion le week-end dernier de déguster quelques vins de Louis Philippe Burgat des Caves de Chambleau à Colombier (Neuchâtel).
A la recherche de productions et de caractères nouveaux pour les vins, j’avais appris que ce vigneron cultivait, notamment, le cépage Solaris et en avait tiré un vin très particulier.
Accueil chaleureux du vigneron mais la totalité de la production ( … d’ailleurs confidentielle) du Solaris a été écoulée en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. Qu’à cela ne tienne, en attendant le prochain millésime, Louis Philippe Burgat retrouve pour nous une bouteille dans les caves. Merci à lui.
Mais en guise de mise en bouche, il nous débouche une bouteille de « Perdrix Blanche » millésime 2010, appellation d’origine contrôlée Neuchâtel.
Il s’agit d’un blanc de noir, de Pinot noir. Sa robe est très légèrement rosée-saumonée. C’est un vin très aromatique sur les arômes de poire et de citron. Il présente une belle fraîcheur et est très équilibré. Bonne persistance en bouche. L’alcool annoncé à 13,2 degrés est présent sans être dérangeant et apporte du corps au vin. C’est un vin facile et agréable à boire. On s’en ressert pour terminer la bouteille, … même à 9 h du matin.
« L’Enfant Sauvage » a juste eu le temps de perdre quelques degrés dans le réfrigérateur.
Le vigneron présente « L’Enfant Sauvage » comme un vin d’apéritif ou un vin d’accompagnement du foie gras (… de qualité), pas du tout représentatif des vins du vignoble Neuchâtelois. Il n’en a d’ailleurs pas l’appellation.
Belle bouteille, élancée, élégante, sobre. «
L’Enfant Sauvage, … vin blanc » millésime 2009, pour seule présentation.
Une information, sobre aussi, sur la contre-étiquette. «
Vin issu du remarquable cépage Solaris, une des rares variétés de vignes totalement résistante aux maladies. Les ceps se cultivent d’une manière naturelle, sans traitement. Sa pureté en fait l’un des précurseurs de la viticulture durable de demain. Produit en quantité confidentielle, élevé en barrique de chêne. »
On l’attend au tournant.
Dans le verre, la robe confirme l’aspect de la bouteille. Or pâle, limpide, nette.
Au nez, arôme très légèrement musqué, abricot, pêche, fruits jaunes. Un profil aromatique assez inattendu qui lui confère un caractère nouveau et pionnier.
Il est à la fois complexe et élégant. Ce qui le caractérise, c’est sa puissance.
L’attaque en bouche est grasse, sans être écrasée par le sucre. On retrouve les arômes d’abricot et d’amandes d’abricots, … celles qu’on met pour accentuer la complexité dans la confiture.
J’y décèle des notes traditionnelles des vins de vendanges tardives de Sémillon et de Sauvignon. Sans doute un peu de pourriture noble pour ce raisin récolté à 1130 degrés Oechsle.
14 degrés d’alcool annoncés, peut être un peu plus. A cette température l’alcool donne une forte sensation de chaleur. Je le préférerais un rien plus frais. Très belle longueur.
L’oxygénation et l’augmentation de température dans le verre améliorent encore les arômes au nez mais n’apportent rien de plus en bouche.
Pas d’appellation, … la belle affaire. Point besoin d’appellation lorsqu’on savoure un tel nectar.
Encore une bouteille que l’on vide.
Un vin qui se déguste pour lui-même mais qui accompagne les fromages (copeaux de vrai Gruyère), le foie gras, en raison de sa belle acidité et de sa sucrosité raisonnable.
Le nom du cru, « Enfant Sauvage », lui a été donné par le vigneron, à la fois pour l’allure du port ébouriffé et exubérant du cépage et pour l’aspect parfois fantasque et pas toujours facile à maîtriser de sa vinification.
Le Solaris, c'est ça ..., le 3 septembre 2011 (mais en Belgique cette fois)
La dégustation n’est pas terminée. Retour osé sur un Pinot Noir 2010.
Le vigneron sait sans doute ce qu’il fait. Un peu d’eau, un peu de pain font quitter à regret « L’Enfant Terrible ».
Que dire de ce Pinot Noir ? Simplement que c’est un vin pour lequel on n’a pas envie de se poser de question.
Une robe nette, rubis, brillante, un plaisir pour l’œil. Un nez très équilibré d’arômes de fruits (cerise) mais surtout de raisin. Pourquoi vouloir chercher ailleurs les arômes. En bouche, équilibre parfait. En rétronasal, potentialisation des premières impressions. Bel équilibre des tanins déjà bien fondus, de l’alcool. La glycérine larme le verre de façon élégante. Très belle longueur. On a envie d’y revenir. Ce que nous faisons d’ailleurs.
On en oublie presque le vin précédent. Le contraste était saisissant.
Trois vins, trois sensations, mais quelle harmonie.
Notre rencontre se termine, Louis Philippe Burgat doit nous quitter. Les autres vins, ce sera pour une prochaine visite. En allant rendre visite au Solaris dans le vignoble, nous passons devant la parcelle de Pinot Noir qui donnera la Cuvée Pur Sang. On la dit « royale ». Normal au Domaine de Chambleau. Vous aurez perçu la contraction de « Chambord » et « Fontainebleau ». Voulue ou extraordinaire coïncidence ? La famille Burgat exploite le domaine depuis trois générations.
Un domaine à découvrir dans un décor à vous couper le souffle. Merci au vigneron et à son épouse.