A mon tour de faire un petit compte-rendu de mon passage avec un ami à Porte de Champerret samedi dernier.
Niveau ambiance, j'avoue avoir été surpris par le monde, tant l'année dernière j'avais apprécié au contraire la tranquillité de l'événement (mais c'était le dimanche en fin d'après-midi je crois bien...) : rien de tel ici, plutôt des allées étroites et bondées, rendant la circulation encore plus difficile que Porte de Versailles (!). Ajoutez à cela pas mal d'agglomérats pile devant les stands qui m'intéressaient (forcément) et vous obtenez des conditions pas idéales. Et pourtant je garde une impression plutôt très bonne du salon, la faute à des vin globalement très appréciés et même quelques surprises.
Passons au concret.
Le muscadet étant le nouveau Beaujolais de LPV, je me dis qu'il faut que je profite des SVI pour me cultiver, et nous commençons donc chez Bruno Cormerais. Pas complètement sûr pour les millésimes car je n'ai pas noté, à confirmer par ceux qui y seraient passé aussi.
- le Chambaudière 2015 est frais, citronné et floral, idéal pour un apéro côtier.
- le Vieilles Vignes 2015 est dans le même style mais avec plus de "minéralité" (j'entends par là une acidité plus marquée avec une impression de mâche, un côté caillouteux).
- un 3e vin (Clisson 2013 je pense, mais je ne veux pas dire de bêtise et tenterai de retrouver la cuvée, sur un millésime plus ancien en tous cas) présente un profil assez différent mais tout aussi intéressant : c'est plus rond, avec un léger côté miellé.
- dans le même style, on termine par un 2010 élevé 6 ans sur lies (je pensais Clisson, mais ce doit être plutôt Bruno visiblement) : c'est vraiment très bon, clairement différent des deux 2015. Des arômes mûrs, le fruit est plutôt sur le coing, les fleurs sont miellées. La matière est belle, ronde.
Je retiens le VV et le 2010, très bons chacun dans son style, et à des prix très intéressants. A regarder a posteriori le site du domaine, je me dis que j'aurais bien goûté les rouges aussi en fait... une autre fois.
En passant devant le stand du Domaine Joguet, je vois qu'ils présentent un blanc. N'ayant pas prévu de chenin, je m'arrête en chemin et goûte ce Chinon blanc Clos de la Plante Martin 2015. J'aime bien ce vin qui me rappelle un peu par son style les Hauts de Husseau 2015 de Jacky Blot : des agrumes, des notes boisées bien intégrées, mais une belle tension. Pour un prix quasi-similaire j'ai préféré le Montlouis, mais c'est une très jolie découverte tout de même.
Nous arrivons maintenant à Chablis au Domaine Gautheron.
- le Petit Chablis 2016 présente un fruité avenant au nez, plus de floral en bouche, assez rond.
- le Chablis 2016 fait plus "Chablis" (pour ce que j'en sais) avec son côté coquille d'huitre et un peu plus de tension / de mâche.
- le Chablis Vieilles Vignes 2015 est sur le même profil, mais à la fois plus puissant et plus tendu.
- avec le Chablis 1er cru Vaucoupin 2016, on revient sur des arômes plus légers et floraux mais en augmentant encore la tension (à relire mes notes, à ce point on est au bord de l'hypertension... ^^)
- je me perds un peu dans la suite (1er cru Mont de Milieu 2016, 1er cru Fourneaux 2015, 1er cru Fourneaux Vieilles Vignes 2016, 1er cru l'Homme Mort 2016), je note juste plus de puissance / corps sur le Fourneaux VV, une aromatique un peu différente sur l'Homme Mort (c'est pas radical non plus).
Je dois avouer que les subtilités des différents crus m'ont un peu échappé sur cette dégustation, même si les deux version veilles vignes (village 15 et Fourneaux 16) m'ont un peu plus marqué visiblement. Jolie gamme, cohérente (c'est le moins que je puisse dire sur mon ressenti !) et abordable, mais pas d'engouement particulier non plus. Je crois avoir un peu de mal avec Chablis (mais ce n'est pas désespéré, j'ai adoré un Droin village 2014 il y a un an).
Et puisqu'on a commencé une traversée de la France d'ouest en est, poussons jusqu'au Jura et le Domaine de la Pinte dont je gardai un bon souvenir et qui a plutôt bonne presse (mais je trouvais les tarifs un peu élevés par rapport à ses confrères de SVI).
On commence par un Chardonnay "Fonteneille" 2015 : on est tout de suite sur quelques chose de plus expressif que les Chablis, sur le fruit jaune, avec un peu d'amplitude mais surtout de la rondeur. C'est bon mais je lui trouve un petit manque de peps.
Je n'attends donc pas grand chose du Melon à queue rouge 2015. Et bien c'est une terrible erreur, il est délicieux : on retrouve les fruits jaunes bien mûrs, du brioché aussi, c'est très rond et gras, mais bien mieux équilibré à mon goût !
On passe aux savagnins (ouillés). Le Savagnin 2013 dépasse aussi complètement mes préjugés, il a toutes les qualités du melon mais avec des options supplémentaires. Niveau aromatique, un côté banane se dégage assez clairement mais sans rien de péjoratif. Le gras et le beurre sont là mais pour le coup c'est bien acidulé, avec même un côté salin. J'adore.
Le Savagnin 2011, élevé 60 mois en foudres (contre 36 pour le 2013) est très bon aussi. Le touché est assez similaire, mais les arômes moins frais et vigoureux, on a un caractère légèrement oxydatif avec un peu de noix.
La Cuvée d'Automne, qui comporte 20% de chardonnay 2010 et 80% de savagnin 2011 dont une partie oxydative, est un classique du genre. C'est plus traçant dans la matière, plus sur la noix aussi. J'aime bien mais c'est moins nouveau pour moi.
Un Côte du Jura du Jura Port-Lesney 2004 affiché sur le tarif m'intrigue... Peut-on goûter ? Bien sûr. C'est très bon, dans un style "vieux sage" : le vin a développé du gras, le fruit s'est un peu couvert d'humus mais reste présent. Dans le plaisir de la dégustation, j'ai oublié de noter de quel cépage il se compose.
Par rapport aux vins précédents le Jaune 2008 m'a moins marqué : on est sur du typique, avec notamment la "sécheresse" caractéristique, mais je ne ressens pas la puissance qu'on peut avoir sur ces vins.
Au final, j'ai beaucoup aimé les vins desquels je n'attendais rien, c'est-à-dire melon et savagnins ouillés (ainsi que le Port-Lesney), des vins certes plus chers que certains voisins, mais des vins "de caractère".
On part au sud avec les secs du domaine Cauhapé.
Le Chant des Vignes 2017 est très aromatique, assez exotique, sur les fruits et les fleurs frais. La bouche est à l'avenant, mais avec une belle tension tout de même qui lui confère une super buvabilité.
Geyser 2016 est moins sur le fruit frais, il y léger côté aillé. La bouche est en revanche un peu plus riche, plus vineuse, mais garde le même côté très désaltérant que le Chant des Vignes. C'est vrai qu'il pourrait un peu évoquer un rosé comme suggéré par mon camarade de salon.
Quatre temps 2015 remplace la Sève d'Automne depuis ce millésime. La cuvée est désormais 100% petit manseng, mais avec des dates de vendange échelonnées : le but est de permettre au vin d'aller plus loin, partant du constat qu'il commençait souvent à décliner un peu tôt, alors que les arômes commençaient à devenir intéressants. Dans le verre, le vin est moins ouvert que d'habitude au niveau aromatique, le gras plus discret, faisant place à plus de tension. Ces caractéristiques habituelles sont sensées se révéler à la garde, mais pour le moment il faut croire ce qu'on nous en dit…
Sur La Canopée 2015, je retrouve mes repères : c'est délicieux, sur ces arômes mûrs, un peu beurrés, avec une bouche ample et grasse mais tout à fait sèche et bien équilibrée tout de même.
Le C de Cauhapé 2015, qui allie tous les cépages de l'appellation, me convainc moins, comme l'an dernier. L'aromatique est moins riche malgré une jolie finale gourmande, il y a effectivement une tension plus présente, mais je préfère le caractère affirmé du petit manseng dans la Canopée.
Un mot sur les doux que nous avons dégusté plus tard sur le chemin de la sortie : le Ballet d'Octobre 2016 est comme à son habitude très équilibré, mêlant vivacité et douceur, sur les fruits frais citronnés. Le Boléro 2016 me semble bien placé, ajoutant un degré dans la gradation vers un peu plus de richesse mais en conservant ce côté vif. Symphonie de Novembre 2014 m'a moins marqué alors que c'est d'habitude une cuvée que j'apprécie beaucoup. Avec Noblesse du Temps, je retrouve une nouvelle fois mes repères et mon plaisir cauhapesque, sur ce nectar d'une grande suavité mais qui n'écoeure jamais. Enfin Quatuor me fait le même effet que le C : j'ai du mal à voir la plus-value de cet assemblage, à la ressentir dans l'immédiateté du salon du moins.
Un ressenti assez ambigu au final : d'un côté, ces nouvelles cuvées et l'argumentaire qui les entourent me font un peu l'effet d'un vain blabla commercial qui fait perdre en authenticité et j'ai eu une petite déception sur la gamme Quatre temps / Symphonie qui permettait d'approcher les cuvées au-dessus à prix plus raisonnable ; mais de l'autre, une gamme qui reste globalement délicieuse à différents échelons (la fraicheur délicieuse du Chant des Vignes et Ballet d'Octobre, l'opulence de la Canopée et de Noblesse…) et un vigneron qui reste très avenant et accessible malgré un succès indéniable (ce n'est pas toujours le cas) compensent bien ces petits nuages !
Entre les secs et les doux, nous avons fait un crochet par Limoux, ou plutôt La Malepère, et le domaine Girard.
Le Chardonnay classique 2017 (élevé en cuve) est une bonne synthèse de nos dégustations précédentes : comme ses compères sudistes, il présente un très beau fruit, sur la prune jaune, la pêche, mais du chardonnay il a l'acidité qui l'affine sacrément. Une très jolie entrée de gamme.
Le Chardonnay sur lies 2016 a retiré des arômes grillé de son élevage. Il a toujours du fruit et une jolie tension aussi. Très bon aussi, dans un style un peu boisé.
Le Chardonny Los Salvios 2015 est plus riche et plus volumineux, toujours sur une aromatique assez "chardonnay boisé", mais je le trouve un peu trop rond, il est moins tonique que son prédécesseur.
On passe aux rouges (les seuls de notre visite en fait) avec le Pinot noir 2016 au nez très avenant de fruits rouges (fraise, groseille). La bouche est comme attendue, fruitée, fraiche, assez douce cependant même si la matière n'est pas très épaisse. Un très bon exemple de "petit pinot noir en cuve", pour moi qui n'apprécie pas forcément le genre.
Pech Calvel 2016 présente plus de matière (il est plus sombre aussi) et moins de fruit frais, une légère amertume. Effectivement il a plus de structure mais en l'état je préfère le fruit éclatant de l'entrée de gamme (et me souviens à ce moment que j'avais eu la même impression l'an dernier).
Je ne comprends pas vraiment la Syrah (désolé pour les millésimes, perdus à partir d'ici) qui présente une grosse matière mais une aromatique un peu en dedans.
Le Malepère tradition a une robe assez noire. Le cabernet franc domine l'aromatique, sur un beau fruit bien "franc". La matière en bouche est un peu moins imposante que dans la syrah mais tout de même bien présente, avec une certaine puissance, l'ensemble est bien juteux.
Le Malepère cuvée Neri part plus sur une aromatique forestière et épicée que j'aime beaucoup. C'est jeune cependant, il y a vraiment de la matière mais ce n'est pas écrasant.
Gustativement j'ai passé un très bon moment. Je retiens les cuvées ouillées du domaine de la Pinte qui ont été ma découverte surprise du salon, Cauhapé dans l'ensemble, le domaine Girard pour ses cuvées variées et au RQP bon voire très bon, ainsi que le Vieille vignes et le 2010 de Bruno Cormerais, chacun dans son style.
Joseph