Chose promise, chose due, voici le compte-rendu de la dégustation organisée ce 28/02, consacrée à une comparaison entre 4 syrah françaises et 4 syrah australiennes. Les vins ont été servis à l'aveugle, 2 par 2, chaque paire comprenant un vin français et un vin australien, dans la même gamme de prix et dans le même millésime. Etant donné qu'on avait fait il y a quelques mois une dégustation consacrée aux appellations du Rhône septentrional, j'ai volontairement mis de côté pour cette fois-ci les côte-rôtie, hermitage, crozes-hermitage, cornas et saint-joseph. Voici les vins présentés, dans l'ordre de la dégustation :
Domaine Jamet - Côtes-du-Rhône 2001 : La robe est brillante et jeune, d'intensité moyenne pour une syrah. Le nez est agréable, sur les fruits rouges (framboise) et noirs (mûre), des notes fumées et légèrement animales. En bouche, le vin est bien équilibré, dans un style léger, avec une finale assez courte néanmoins. Vin agréable dans un millésime difficile, vinifié dans un style léger et fruité pour une consommation assez rapide, mais pas donné tout de même... (9,50 Euros - 7,2-6,8/10)
Rosemount Estate - Shiraz 2001 - South Eastern Australia : La robe est brillante, très soutenue et très jeune. Le nez est ouvert, sur les fruits noirs compotés, la vanille, le caramel et le chocolat. En bouche, le sucre résiduel est nettement perceptible, bonne fraîcheur équilibrant les 14° d'alcool, longueur correcte. Un tout autre style, plus marqué par l'élevage, bien fait pour le prix mais sans doute un peu écœurant et à boire assez rapidement avant que l'acidité ne retombe. Personnellement, j'ai préféré le style du Jamet, plus léger mais plus digeste, le groupe préférant la puissance de l'australien. (8,70 Euros - 7,1-7/10)
Domaine de la Réméjeanne - Les Eglantiers - Côtes-du-Rhône 1998 : Robe brillante, profonde et encore très jeune. Nez de belle tenue mais encore fermé, sur les fruits noirs, la cerise, les herbes de Provence, la vanille, le cuir et les baies de genévrier. En bouche, très légère impression de sucre résiduel, vin encore tannique mais très bien équilibré et de belle longueur. Superbe vin encore dans sa prime jeunesse, à laisser reposer quelques années encore pour l'apprécier ensuite jusqu'en 2013. (14 Euros - 8,1-7,8/10)
Penfolds - Kalimna Shiraz Bin 28 1998 - South Australia : Malgré le fait qu'il s'agissait de la dernière bouteille qui traînait, debout, dans le rayon d'une grande surface, j'ai tenté ma chance avec ce vin produit par un domaine réputé. La robe est déjà bien évoluée, tirant sur le pourpre. Le nez est très ouvert, sur le sureau, la cerise à l'alcool, la réglisse et les arômes de torréfaction. En bouche, le vin paraît dur et en même temps ardent, dissocié, d'un équilibre plus que douteux. Ce vin a dépassé son apogée, sans doute est-ce lié aux mauvaises conditions de conservation. (14 Euros - 5,8-6,3/10)
Domaine de l'Aiguellière - Côte Rousse - Coteaux du Languedoc 1998 : La robe est d'un beau rubis, brillante et soutenue. Le nez est magnifique, sur les fruits noirs (cassis, sureau), l'humus, les épices (poivre, baies de genévrier), le cuir, des notes fumées et très discrètement vanillées. En bouche, par contre, le vin se montre excessivement tannique, à la limite de l'astringence, donnant à la finale un côté un peu asséchant, de mauvaise augure pour l'avenir. A revoir d'ici quelques années, avec inquiétude néanmoins, surtout au vu du prix demandé... (25 Euros - 7,6-7,3/10)
Château Reynella - Shiraz 1998 - Mc Laren Valle : La robe est similaire au précédent, peut-être légèrement plus évoluée. Le nez est très... Australien : fruits noirs et cerise à l'alcool, vanille, cannelle, chocolat, réglisse. La bouche ne renie pas non plus son origine, avec un sucre résiduel très nettement perceptible, un équilibre limite lié à un manque relatif d'acidité, incapable de compenser le sucre et les 14° d'alcool. La finale est longue. Le vin est à boire assez rapidement, à une température avoisinant plutôt les 14° que les 16 ou 18°. Encore un vin qui ne fait pas dans la dentelle... (20,70 Euros - 7,2-7,2/10)
Domaine des Vins de Vienne - Sotanum - VdP des Collines Rhodaniennes 1999 : Robe très soutenue, très jeune, brillante. Nez splendide, le meilleur de la soirée sans doute, déjà bien ouvert, sur le cassis, la violette, les champignons, le poivre, le cuir, le café et un très léger côté vanillé témoignant d'une très bonne intégration de l'élevage. La bouche tient les promesses du nez, avec un très bon équilibre, plus dans la finesse que dans la puissance, sans sucre résiduel et sans aucune lourdeur. Seule la longueur est légèrement inférieure à ce qu'on est en droit d'attendre d'un grand vin. Mais les vignes sont encore très jeunes et il s'agit incontestablement d'une très belle cuvée, qui a fait l'unanimité, et qui mérite d'être suivie dans les prochaines années. (30 Euros - 8,6-8,5/10)
Rosemount Estate - Balmoral - Syrah 1999 - Mc Laren Valle : Robe brillante, un peu moins soutenue que le précédent, avec un début d'évolution. Nez superbe, loin des caricatures vanillées des vins australiens précédents, sur les fruits noirs, la violette, le poivre, l'écorce d'orange, la cannelle, le café et des notes fumées. En bouche, très bel équilibre où la puissance et l'acidité parviennent à bien masquer les quelques grammes de sucre résiduel. La finale est la plus longue de la soirée. Excellent vin donc, qui prouve que l'Australie peut produire de grands vins si elle ne recherche pas les caricatures surpuissantes, surboisées, vanillées et sucrées. Malheureusement, le prix devient conséquent... (37 Euros - 8,2-8,4/10)
En conclusion, on retiendra que la différence de style est nette entre la France et l'Australie, aisément reconnaissable par tous les dégustateurs. L'Australie produit en général des vins puissants, extraits, riches en alcool, avec une bonne dose de sucre résiduel et un boisé richement vanillé. Ce style ne me plaît que très modérément, ce qui explique que dans chaque paire, le vin français a systématiquement gagné en ce qui me concerne (première cote). Par contre, certains dégustateurs sont moins dérangés que moi par ce style de vin, et la cotation moyenne du groupe (deuxième cote) est finalement assez proche entre les français et les australiens, avec un petit avantage tout de même pour la France.