I ) LE PLANNING:
Ca y est, la cuvée LPV du chateau La Pompe est prête, l'élevage est terminée. Elle attend gentiment dans son garde vin de 100 Hl, ce qui doit être suffisant pour étancher la soif des admin pendant 1 an. A ce stade, il faut préparer les vins à la mise, et s'occuper des commandes de matières sèches. Il y a 2 cas de figure:
- Mise en bouteille en simple "tiré-bouché", dit TB. Le vin est dans sa quille, bouchée ( c'est mieux, c'est plus étanche
). Elles sont stockées dans des box en métal, en bois, ou même en pile. Cette pratique se justifie notamment quand un domaine met du temps pour vendre sa cuvée au fur et à mesure du temps qui passe, sur des délais assez long. C'est le cas typique du domaine "indépendant" qui vend essentiellement aux particuliers. Par petite quantité, les bouteilles subissent ce qu'on appelle une "reprise", c'est à dire qu'elles sont sorties des box pour être habillées ( capsule, étiquette ), et être mises en cartons ou en caisse bois. Pourquoi ne pas tout faire à la suite, me dirais vous ? Pour 2 raisons: les matières sèches ( MS ) coûtent cher quand on multiplie par la quantité, et ça limite l'immobilisation inutile de trésorerie. 2° raison: les cartons et étiquettes dans un chai, ça vieillit mal, ça craint l'humidité.
- Mis en bouteille en "4 opérations", appelée aussi "5 opérations", mais c'est la même chose ( dit "4OP" pour aller plus vite). Dans ce cas, la bouteille bouchée est immédiatement habillée. C'est le cas typique ou un seul client achète tout un lot important. Par exemple à l'occasion d'une foire aux vins, ou d'une exportation. Il n'est pas rare qu'un camion vienne charger les palettes au fur et à mesure qu'elles sont constituées en sortie de chaine de mise en bouteille.
Donc, selon le cas TB ou 4OP, il faudra s'occuper de commander les bouchons, blles, capsules, étiquettes et cartons.
Pour des produits génériques ( carton neutre, bouchon simple "mis en bouteille au château", capsule standard ), ça va vite. Quand tout est personnalisé, il faut s'y prendre un peu de temps avant. Surtout si l'on a des changement de cliché: il faut demander les modifications, elles sont retournées puis validées ou pas, le fabricant fabrique le nouvel outil de marquage et enfin la fabrication peut commencer. Pour du personnalisé sans changement, hors période de congé ( la 1° quinzaine d'août à venir....par exemple ), il est prudent de compter 10 jours ouvrées, soit 2 semaines pour les produits les plus "longs".
Si on est équipé soit même d'une chaine de mise en bouteille, forcément, c'est facile pour les délais.
Sinon, ça peut être long. Surtout en période de forte activité, surtout si le chantier de mise mobilise un équipement et son effectif humain pendant plusieurs jours. Il est donc possible que son embouteilleur préféré ne soit pas disponible avant 1 mois ou plus. Un long délai, c'est une bonne nouvelle pour le vin, une moins bonne pour le viticulteur s'il doit lui même assurer une mise dite négoce....
- La mise négoce, c'est quand un négociant a le droit d'écrire "chateau LPV - mis en bouteille au chateau" et en tout petit en bas de l'étiquette "mis en bouteille pour Jérôme P - Gaillac". En général, le négociant commande la prestation de mise et les MS, le viticulteur s'occupe de rien sauf être là et ouvrir les bonnes vannes des bonnes cuves. Mais parfois, il laisse le viti se débrouiller...Or, le négociant est un hominidé pressé: quand il commande une mise, c'est que le produit est déjà vendu. Faut pas traîner, nous sommes dans un monde qui vit à flux tendu comme un string de bimbo de TV réalité. Le viti aura alors à coeur de secouer ses prestataire et ses fournisseurs, pratique source d'erreurs possibles.
- S'il y a le temps, c'est bien pour le vin. Pourquoi donc ? Il reste des "traitements" à faire sur le vin. Même si c'est pas toujours pratiqué ainsi ( loin de là ), il vaut mieux "traiter" plusieurs semaines avant mise, pour que l'oxygène dissout lors des ces "traitements" soit digéré par le vin . De manière concomitante à cette "digestion", le SO2 libre baisse.....Ensuite, juste avant mise, on la ré-ajustera au niveau nécessaire. Si on augmente l'oxygène dissout juste avant mise, le vin en bouteille consommera une partie du SO2 libre pour "rien", juste pour manger l'O2. Par conséquent, il faudrait un niveau de SO2 libre inutilement élevé pour assurer
in fine la même protection qu'un vin qui aura traité plus tôt.
Comme la cuvée LPV ne peut être que bien née, alors 2 mois avant mise elle sera donc préparée.
Comme il s'agit cette année d'un liquoreux gaillacois ( c'est pas une mise Jérome P par hasard...), les possibilités sont multiples. Le Haut conseil se réunit donc.
- Thierry D verrait bien un produit assez brut, sans filtration traumatisante.
- Jérome P a une sainte horreur des déviations qui lissent les profils orgnoleptiques des vins, il imagine une filtration dite "stérile". C'est "SA" cuvée, on lui donne raison.
- Luc J, pragmatique, rappelle que le vin doit subir une ou plusieurs filtrations intermédiaire. Car si le vin brut arrive direct à la cartouche de filtration stérile du camion d'embouteillage, ça va colmater. Le filtre se bouche, il faut le changer, et le prestataire facture çà ( cher...). Ca ferait autant de pouvoir d'achat en moins, et donc autant de fioles de Rayas en moins, ce qui serait dommage.....
- Bertrand LG fait ses calculs, et préconise donc 2 passages préalables du vin sur le filtre à à terre. 1 passage sur terres blanches dégrossissantes, et un passage sur terres roses plus fines.
Le vin aura donc aura donc plus d'un mois et demi pour digérer l'oxygène dissout apporté par la filtration sur terre, qui il faut le reconnaître en amène beaucoup.....
Blague à part, le vin peut être plus ou moins filtré avant mise. Parfois pas du tout, parfois 2 passages comme l'exemple. C'est un compromis ( ou pas ) entre la volonté du viti, la prise de risque assumée, et l’exigence plus ou moins ferme et incontournable du marché client.
Il existe aussi plusieurs moyens de filtrer les vins, plusieurs possibilités techniques je veux dire. Mais c'est pas là l'essentiel du sujet.
La suite plus tard:
II) la gestion des matières sèches.
J'essaierai de mettre des éléments de coûts financiers.
NB: oui, le traitement pré-mise a été TRES réduit. Mais il y a autant de vérités que de client final qui dicte son cahier des charges ( parfois cahiers des charges à la con,- faut le dire ), autant de point de vue que de viti, etc....Donc si on rentre la dedans, on a pas le cul sorti des ronces.