Shiraz australiennes
Mercredi 29 septembre 2004
Une production Ganesh da Capo
Le contexte :
La dégustation est préparée par Pascal Perez, en concertation avec l'équipe HC Top Wines de Strasbourg (et en particulier M. Patrick Moritz), spécialisée dans les grands vins australiens.
Participants : Vincent Mercier, Pierre Delavallade, David Suire, Jacques Prandi (JP), Annie Ortet, Guillaume Etcheverria, Franck Bayard, Laurent Gibet (LG), Pascal Perez (PP).
Bravo aux 3 hôtes bordelais pour leur détermination à participer malgré la distance.
L'ordre de dégustation (en puissance croissante) a été conseillé par HC Top Wines.
Les commentaires de dégustation sont synthétisés par Laurent Gibet.
Les vins :
1. Mc Laren Vale - Genders – Mc Laren Park Shiraz 2001 :
JP12,5 - PP14 – LG13,5 - offert
- 11 hectares.
- Senteurs de liqueurs de fruits (cassis, myrtille, mûre), de fourrure, qui parviennent à se frayer un chemin à travers un boisé un peu trop présent (bourbon, vanille). Légèrement pommadé, donc, mais sans excès.
- Bouche fruitée, épicée (cannelle et poivre). Relativement chaleureuse, onctueuse (confort du sucre résiduel), baroque (c'est le 1er vin de la série). Elle pêche principalement par son manque de charpente, d'équilibre (acidité « à côté ») et de longueur. Un dégustateur pointe un côté salé. Un autre une finale brûlante.
2. Langhorn Creek - Killibinbin - Shiraz 2002 :
JP14,5 - PP15 – LG15 - 33,5 euros
- Vinificateur : M. Rolf Binder.
- Nez confituré : pruneau, mûre. Notes complémentaires de fleurs, d'épices, d'olive noire, de fumé léger. Elégance, complexité, relative fraîcheur. Un dégustateur remarque un côté iodé (mourvèdre). On peut aussi déceler une note d'eau de vie (marc).
- Bouche soyeuse qui manque tout de même elle aussi de structure. Goûts de fraise, de réglisse pour un vin agréable à boire.
3. Padthaway - Two Hands – Shiraz 2000 :
JP15 - PP16 – LG15,5 - 39 euros
- Nez lactique, n'oblitérant heureusement pas complètement des notes variées : réglisse, poivre, café, goudron, cerise, cacao ; fraîcheur mentholée.
- Matière veloutée, fine, persistante, peu chahutée par l'alcool. Le fruit est net et les tannins de qualité. On peut lui reprocher trop de facilité (douceur sucrée quasi régressive, manque de relief).
4. Barossa Valley - Massena – The Eleventh Hour Shiraz 2002 :
JP16 - PP16,5 – LG16 - 37 euros
- De nouveau ici, on respire un nez différent, profond, caractérisé par des effluves de minéral (terre, graphite), de café, de fumé, d'encre, d'orange, de menthe, de violette, de cuir. La signature animale terrienne reste élégante, à la manière de certains vins de Cornas ou de la colline de l'Hermitage (voire presque d'un Bordeaux pour nos hôtes).
- Ici, la colonne vertébrale est bien mieux en place, pour un vin plus structuré, doté de classe et de rectitude. Fruit épicé, réglisse. Longueur bienvenue également, pour un vin qui possède un supplément d'aspérité.
5. Mc Laren Vale - Kay Brothers – Emery Vineyard Block 6 Shiraz 2001 :
JP14,5 - PP14,5 – LG14,5 - 61 euros
- 13,5 hectares.
- Le boisé (torréfié) est présent mais pas rédhibitoire. On décèle des odeurs de cassis, de cerise, de camphre, de cacao, de menthe, de girofle, d'orange sanguine (conférant une fraîcheur providentielle). D'emblée, on a l'impression d'un vin plus brut.
- La bouche confirme cette prémonition : les tannins semblent plus rugueux, plus accrocheurs. Le boisé et l'alcool un peu excessif pénalisent encore ce vin massif dont on attendrait un peu plus de netteté.
6. Barossa Valley - Viking Wines – Grand Shiraz 2001 :
JP16,5 - PP17 – LG15,5/16 - 54 euros
- Vinificateur : M. Rolf Binder. 8 hectares.
- Nez compact plus marqué par des notes végétales, complétées par des senteurs de fruits en confiture, de fleurs capiteuses, de camphre (d'eucalyptus ?), d'épices (poivre, girofle), de réglisse, de marc.
- Bouche relativement puissante, qui reste dynamique même si elle s'avère adoucie par du sucre. Sérieuse toutefois, fermée (austère ?), ressemblant un peu à un VDN (cerise, alcool, épices). On est confiant pour son potentiel.
7. Barossa Valley - Glaetzer – Shiraz 2001 :
JP15 - PP15,5 – LG14,5 - 54 euros
- Nez encore marqué par un boisé lacté. Plus neutre, plus banal, malgré quelques notes amènes de cassis, d'épices et de bois de rose.
- Bouche monocorde, certes dévoilée et dotée d'un beau jus, mais je lui reproche une « acidité pointue ». d'autres apprécient la sveltesse ainsi conférée au vin. Pour autant, je la trouve un peu simple et courte en l'état.
8. Heathcote - Wild Duck Creek Estate – Springflat Shiraz 2001 :
JP13 - PP13 – LG13 - 32,25 euros
- 16,5 hectares.
- On a ici affaire à une expression fruitée très bourgeon de cassis et très orientale, rappelant le souk, réunissant des notes de laurier, de mélanges d'épices, d'olives, d'oranges.
- Ce qui choque en revanche en bouche, c'est cette acidité rapportée suspecte, malhabile.
9. Barossa Valley - Amon Ra (Ben Glaetzer) – Unfiltered Shiraz 2002 :
JP17 - PP16,5/17 – LG16,5 - 77,75 euros
- Vieilles vignes, rendement de 7 hl/ha.
- Nez profond, sanguin, torréfié, sur la mûre, le minéral, la réglisse
- La bouche, un peu difficile à cerner, est construite sur un équilibre acidité/tannins/sucre audacieux. Matière serrée, séveuse, « jusquauboutiste » pour un vin particulièrement dense, possédant de la personnalité dans un profil un peu dur (carré ?, violent ? selon les appréciations des participants), presque acerbe, à associer à un plat.
10. Mc Laren Vale - Shirvington – Shiraz 2002 :
JP18 - PP18 – LG18 - 149,5 euros
- Vinificateurs : Sarah et Sparky Marquis.
- Volatile au service du vin, renforçant des arômes de VDN complétés par des notes plus inédites particulièrement seyantes : orange, fraises des bois, tabac, pain d'épices. Générosité et complexité sont au rendez-vous pour une olfaction puissante et douce à la fois, très « fruits et fleurs blancs» - qui peut rappeler celle d'un vin blanc (nous avions déjà eu un symptôme comparable avec le Rioja « Calvario » de Finca Allende).
- La bouche est riche, complète, distinguée, parfaitement équilibrée. Goûts raffinés de cola, réglisse, cardamome.
- Un vin racé, singulier, percutant, de grand potentiel, qui émeut unanimement. Le plus cher … et de loin le meilleur !
11. Mc Laren Vale – D'Arenberg – Dead Arm 2001 :
JP12,5 - PP12 – LG14 – 45 euros
- Nez légèrement boisé, développant des senteurs de fruits, de réglisse, de minéral.
- Bouche serrée, sanguine, réglissée, non dénuée de goûts typés de cassis mais qui manque d'harmonie en l'état. Je lui reproche moins son acidité et son amertume que d'autres.
12. Barossa Valley - Rockford – SVS Moorooroo Shiraz 1996 :
PPxx – LGxx - 96 euros
- Echantillon sévèrement bouchonné.
Conclusion :
- Une dégustation de très bon niveau, enthousiasmante, proposant des vins sérieux dans leur style, auxquels nous sommes trop rarement confrontés. Il est vrai que ces cuvées font partie de la crème des vins australiens (et que les prix sont élevés).
- Même s'il existe un fil conducteur (opulence relative, sucre résiduel), les vins ne tombent pas dans les caricatures aromatique et structurelle redoutées (bourbon, eucalyptus, lourdeur, diktat du bois) en proposant des expressions variées (évitant toute lassitude), parfois de très bon niveau :
- Les robes sont très colorées
- Les nez sont exubérants, développant des notes chaleureuses de fleurs, de fruits (cassis en tête), d'épices, de réglisse, de menthol
- Les bouches sont typées, avec leur caractère exotique, crémeux car non exempt de sucre. L'équilibre, la finesse et la longueur (plus qu'une véritable structure cependant) sont heureusement le plus souvent au rendez-vous
- Le vin de Shirvington domine la dégustation de la tête et des épaules. Par la qualité de ses tannins, son équilibre et sa longueur, c'est un vin de classe internationale. Il est pour autant talonné par nombre de cuvées remarquables : Eleventh Hour de Massena, Grand Shiraz de Viking Wines, Amon Ra de Ben Glaetzer, Shiraz de Two Hands.
- Après la comparaison des grandes syrahs françaises (Chave, Allemand, Jamet) et australiennes (Hill of Grace de Henschke, Astralis de Clarendon Hills, Run Rig de Torbreck, Grange de Penfolds), qui avait nettement tourné à l'avantage des vins français, cette confrontation est riche d'enseignements, prouve la qualité potentielle du cépage et invite à aller plus loin (les discussions se sont poursuivies jusqu'à une heure tardive) : nature des équilibres tannins/acide/sucre, terroirs, potentiel réel de vieillissement, accords à table, qualité des millésimes, style de chaque producteur ?
Laurent (pour Ganesh da Capo)
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