Première soirée post confinement hier soir avec quelques amis. On était tellement contents de pouvoir à nouveau goûter aux joies du partage de bouteilles que tout a été un peu excessif. Pour les angoissés, les gestes de distanciation ont été respectés, au moins en début de soirée. A 8 sur une table de 8m de long, on avait pris nos aises
Tous les vins sont servis à l'aveugle.
Champagne brut 2004 - domaine André Beaufort
Très joli Champagne à peine évolué et dévoilant des notes de citron confit et une légère touche racinaire. Bouche traçante avec une jolie longueur. J'étais parti sur un BdB en non dosé, plutôt sur le millésime 2008.
Très bon
Première paire :
Sancerre "clos la Néore" 2013 - domaine Edmond Vatan
Chablis 1er cru "montée de Tonnerre" 2005 - domaine Raveneau
Les deux vins vont considérablement s'améliorer à l'aération. Pourtant, même dès le premier verre, on sent qu'on est face à deux vins superbes.
Le Sancerre est plus fermé. Il développe les notes typiques d'un clos la Néore avec ce mélange de peaux d'agrumes, de menthe, d'anis et de naphte. Bouche étonnamment dense pour un 2013. Grosse acidité vibrante. Équilibre fabuleux. Rien à dire et unanimité autour de la table pour saluer ce grand vin.
Le Chablis propose des caractéristiques assez proches mais un élevage plus fumé m'a orienté vers Chablis (j'hésitais avec Sancerre). Très jolie matière douce et ronde. Le vin est encore très très jeune et devrait donner quelque chose d'encore plus abouti d'ici 5 voire 10 ans. Excellent +
Deuxième paire :
Sancerre "Monts Damnés" 2001 - domaine François Cotat
Pouilly Fumé "Pur Sang" 2000 - domaine Didier Dagueneau
Le Cotat, comme le clos la Néore, évolue très favorablement à l'aération. Il semble en pleine phase de maturité. Notes d'agrumes, de naphte, de croute de fromage, de groseille à maquereau. Très légère touche exotique. Bouche harmonieuse avec une finale fumée. C'est très très bon.
Le Dagueneau, à l'inverse, perdra ses moyens à l'aération. Il fait illusion au premier verre mais verse rapidement dans l'exubérance presque vulgaire avec ce côté fruit de la passion que je n'aime décidément pas dans les vins de Sauvignon. Confirmation que je n'accroche pas avec les vins de ce producteur...
Single :
Chassagne-Montrachet 1er cru "la Romanée" 1996 - Verget
Le grand chardonnay à parfaite maturité. Le boisé s'est fondu et donne désormais un vin au profil tertiaire mais pas champignonneux. Magnifiques notes de pralin. Bouche soutenue par une acidité forte mais que la matière enrobe bien. Grosse longueur pour un vin identifié par tous comme un grand chardonnay de grand millésime (89, 92 et 96 cités). Excellent +
On passe aux rouges.
Première paire :
Corton 2011 - DRC
Hermitage 2007 - domaine Chave
Une paire stratosphérique.
On dira ce qu'on veut mais le vin de la DRC est brillant. Impossible de détecter la moindre végétalité du millésime. Tout est au contraire mûr, équilibré, rond, harmonieux. La grande classe pour ce vin d'une classe et d'une évidence folles.
Grand vin
Le Chave est tout aussi beau. Grand nez de prune, d'épices et de fumé. Bouche magistrale de complexité. J'ai eu la chance de suivre l'évolution de ce vin sur toute la durée du repas et je vous garantis qu'on est face à un vin immense qu'il faudrait attendre encore 10 ans. Mais tout est là dès maintenant. Grand vin.
Deuxième paire :
Pessac Léognan 1988 - château la Mission Haut-Brion
Chambertin 1998 - domaine Jean Louis Trapet
Le 88 est un vin pas sexy du tout. A vrai dire, c'est peut être la moins intéressante des nombreuses bouteilles de ce vin bues sur ce millésime. Mais j'ai été minoritaire. Pour moi, c'était excessivement végétal (tabac brun) avec des notes de bois sec, des tanins un peu anguleux et par dessus tout une légère déviation viandée (bretts). Déception même si je reconnais qu'il y a du fond et une grosse longueur. Mais alors niveau gourmandise, on est loin du compte...
Le Trapet est quant à lui plutôt pas mal. Un vin à la fois dense et crémeux avec un élevage sexy. On a été baladé un peu partout en France mais c'est très très bon.
Troisième paire :
Savigny les Beaune 1er cru "les Narbantons" 1992 - domaine Leroy
Clos St Denis 1987 - domaine Michel Magnien
Pas de chance, les deux vins sont défectueux
Un dernier rouge :
VdP des Alpilles 2001 - domaine de Trévallon
Lorsque Trévallon atteint ce niveau, c'est un vin stratosphérique. Il peut parfois être vert et austère. Là au contraire, c'est juteux, précis et d'une maturité irréprochable. Grand nez finement végétal, fruits noirs, épices... Fin de bouche longue sans acidité ni tanins excessifs. Superbe !
Un dernier blanc parce qu'on l'avait oublié :
Savennières Coulée de Serrant "sélection de tries du grand clos" - domaine Nicolas Joly
Je ne jouais pas à l'aveugle ayant vu la collerette facilement identifiable des vins du domaine. Il n'empêche que ce vin est d'une grande évidence avec son nez de poire juteuse, de mélisse, de miel. Bouche concentrée et fraiche, sans sucre résiduel et une finale très pure. Rien à dire, c'est la confirmation que le millésime 96 est une grande réussite au domaine. Excellent.
Trois liquoreux pour finir :
Gewurw vendange tardive "sélection Jean Hugel" SGN "fût 20" - domaine Hugel
Jurançon "cuvée Thibault" 1999 - domaine Bordenave
Maury réserve 1964 - Mas Amiel
Le Hugel est une rareté. Une SGN sélectionnée parmi les vendanges tardives du millésime et sélectionnée (fût 20). C'est incontestablement un grand vin qui a bien mangé ses sucres et propose un jus à la fois doux et tonique. Un peu de litchi, des épices douces, du camphre, de la menthe fraîche, de miel de lavande. Bouche généreuse et surtout immensément longue. On n'en boirait pas des litres certes et pourtant je reste subjugué par la justesse de ce vin qui s'impose sans sucres massifs ni arômes écœurants. LA classe tout simplement !
Le Jurançon est lui aussi très intéressant. Le nez évoque les fruits exotiques et le champignon. La bouche est riche mais surtout tenue par une acidité vive qui allonge le vin. Aucune sensation de lourdeur. C'est très bon.
Le Mas Amiel est quant à lui marqué par des notes de volatile qui me font immédiatement partir vers un vieux Madère mais le nez n'est pas assez salin et les arômes de fruits confits et de caramel m'ont plutôt orienté vers Rivesaltes. 56 ans pour ce vin qui se goûte magnifiquement bien et qui clôture en apothéose une soirée absolument gargantuesque.
Ça ne sera pas tous les jours comme ça. Mais on en a bien profité