Faire un CR en complément de celui d'Olivier est toujours un exercice compliqué.
En synthèse, nous avons partagé deux vins exceptionnels, trois excellents, deux bizarres, et un hélas victime de son bouchon.
J'adore les vins de Selosse, ai la chance de pouvoir en boire assez régulièrement, mais l'Initial de samedi est vraiment l'un des plus beaux champagnes jamais gouté. Pour continuer de filer la métaphore ferroviaire de la veille, on passe du Pullman à l'Orient-Express. Le coté classieux et confortable est toujours là, via un incroyable équilibre, mais avec ce plus qui donne vraiment l'impression d'un moment à part. Quel plaisir de partager ça !
Que dire du Joliette ? La décennie 70 est pour moi l'apogée de ce domaine microscopique, aux rendements ridicules, qui magnifie comme nul autre un cépage baroque.
Ce Joliette sec 71 a été ouvert 72 heures avant dégustation, pour lui laisser le temps, après 49 ans en bouteille, de se rééquilibrer. Initialement prévu pour un accord un peu osé avec le dessert, il a été réorienté samedi matin vers le foie gras, qu'il accompagne dans un accord sec/gras vraiment superbe, cousinant, avec infiniment plus de complexité, avec un Jerez, pour donner un point de comparaison. Ce domaine atteint aujourd'hui des prix plus qu'élevés, mais, si je n'avais pas la chance d'en avoir quelques unes en cave, c'est clairement une des rares bouteilles pour lesquelles je serais prêt à casser la tirelire, bien plus que pour n'importe quel pinot ou chardo bourguignon, histoire d'évoquer un sujet du moment.

Un vin à part.
Dans le registre Excellent, parlons tout d'abord du Vendanges de Brumaire 2011, du Château La Robertie, propriété hautement recommandable.
J'avais été bluffé la veille par l'élégance du Doisy Daëne. Nous sommes ici dans le même registre, sur une palette aromatique un peu plus exotique. Comme dans les meilleurs Auslese allemands, l'acidité efface le sucre et offre un magnifique équilibre gourmand.
Le millésime 2003, plutôt décrié, est une superbe réussite de la maison Bouchard, et commence à aborder son apogée. C'est riche sans être le moins du monde confit, ce qui n'est, loin s'en faut, pas le cas pour tous les domaines sur ce millésime.

Le Caillerets est dans cette veine, et a maintenant bien digéré son élevage. Le Corton est un peu moins évolué et commence à peine à s'ouvrir. Il nécessite plus d'aération, et la fin de bouteille le dimanche soir était splendide.
Passons maintenant au bizarre.
Si vous voulez vous amuser dans une dégustation à l'aveugle, servez ce Noëls de Montbenault 2013. Effet garanti, tout le monde partira sur un chardonnay de vigneron ayant eu la main plus que lourde sur la réduction. Sur un magnum, il est possible que certaines dents se déchaussent. Le lendemain soir, c'était mieux / moins pire, mais tout de même parfaitement monolithique. Un chenin atypique.
Avec la Boissonade, ce doit être la première fois que je buvais un vin avec une dimension expérimentale aussi affirmée. L'étiquette audiardesque interdisait de l'ouvrir hors présence d'Oliv, qui en est manifestement un fils caché. A la décharge de la bouteille, celle-ci a été ouverte au débotté pour suppléer à une légère faiblesse des blancs de la soirée, d'où la marée initiale, basse avec un estran un peu vaseux.

Le lendemain, c'était plus en place, mais bon, on était prévenus, c'était une drôlerie..... A ce stade, le suivi épidémiologique n'a fait apparaitre aucun cas de cécité.
Enfin, hélas mille fois hélas, un magnifique chenin a été trahi par son bouchon. C'est toujours rageant, mais lorsqu'en plus, ce foutu bouchon laisse transparaître une matière magnifique derrière le liège et le carton mouillé......Bref, un vin superbe, mais pas sur cette bouteille.
Hors dégustation et pour rigoler, quelques nouvelles d'une bouteille soigneusement préparée pour vendredi soir : Grillet 82, ...... qui a dû laisser sa place au Louros.
Ouvert jeudi soir, pomme blette/carton mouillé vendredi soir, pomme blette/carton mouillé samedi soir, début d'équilibre hier soir et ce soir, j'ai toutes les espérances pour demain. Manifestement, ce vin nécessite une organisation des dégustations digne du Gosplan. CR - peut-être - demain soir.
Je n'ajouterai rien sur le plaisir de partager ces moments avec des amis, c'est encore bien plus important que les bouteilles elle-mêmes, surtout en cette période compliquée que nous vivons tous.
Pour reprendre le motto d'un de mes vignerons préférés, la vie est belle !