Domaine Harmand-Geoffroy, les 2016
Philippe Harmand étant occupé dans son bureau avec une représentante, c'est son père qui nous conduit dans la cave de dégustation.
Première fois en quatre visites que je rencontre ce solide vigneron qui n'a pas peur de dire ce qu'il pense.
"On n'élève pas un Chorey comme un Gevrey-Chambertin"
Allusion à ceux qui pensent que l'homme peut effacer le terroir.
A ce sujet, je trouve d'ailleurs ( et je répète sans doute) que ce domaine est particulièrement intéressant à visiter sur cet aspect parce qu'il dispose d'une palette de parcelles qui permettent de percevoir les nuances qu'il peut y avoir entre les différents secteurs d'un même village.
Bourgogne
Comme en 2015, une très belle entrée de gamme avec un fruit très pur et de la densité pour un générique.
C'est la cuvée des particuliers si j'ai bien compris. Ils en font peu et elle est toujours appréciée donc elle ne traine pas longtemps à la vente
Gevrey-Chambertin
Un nez essentiellement sur les fruits rouges
En bouche le vin est agréable avec une belle fraicheur mais cette année je le trouve bien en retrait par rapport à la cuvée parcellaire suivante
La finale est soyeuse sans aucune astringence
Pour 26€ ça reste un bon RQP pour Gevrey
Gevrey "En Jouise"
Une nouvelle fois, ce sera ma cuvée
en village
Un nez très gourmand avec de la griotte, des framboises, un peu de groseilles et un soupçon d'épices.
Je trouve ce vin presque floral également.
La structure est assez imposante à ce niveau d'appellation.
Les tannins sont arrondis, l'acidité fait corps avec la matière et la finale appellerait à se resservir si nous étions à table.
La place dans le coffre et mon budget vin m'obligeant à me limiter cette année à un carton de village pour ce domaine, ce sera 6 bouteilles de cette cuvée.
Gevrey "Vieilles Vignes"
C'est la cuvée que j'ai le moins bien goutée.
La finale se termine par une impression de sécheresse assez marquée.
Les tannins sont très virils, il faudra une garde conséquente à cette cuvée pour digérer ( ou pas
) son élevage.
A revoir une autre fois pour avoir un jugement plus précis.
Je précise que sur le coup là Gaétan était également de mon avis et se demande si les tannins hérissés vont s'adoucir dans le futur.
Gevrey "Clos Prieur"
Un nez assez proche de l'autre cuvée village parcellaire mais une structure plus imposante en bouche
J'ignore si c'est dû à la présence d'une partie de la parcelle en 1er cru ou à un élevage plus appuyé mais le vin semble moins prêt que "En Jouise"
Si les tannins semblent plus présents, le vin reste néanmoins agréable et n'a pas la finale asséchante du VV
Gevrey 1er cru "Lavaux St Jacques"
Un nez légèrement fermé comparativement aux villages mais c'est en bouche que la cuvée se démarque.
Un vin puissant avec beaucoup de matière et de l'amplitude.
M Harmand nous indique que c'est une cuvée qui mérite 10 ans de garde
Comme chaque année, Gérard et Gaétan adorent ce style de vin au potentiel certain mais à l'appréciation moins immédiate.
Plus prudent, je vais jouer la sécurité en prenant en 1er cru le Gevrey "Perrières" que nous ne dégusterons pas mais qui était plus à mon goût en 13, 14 et 15
J'ouvre une parenthèse pour saluer la perspicacité de Gaétan qui a découvert samedi dernier un Gevrey "Perrières" 13 en semi-aveugle chez des amis communs.
Un Gevrey à la fois floral et minéral, moins terreux sur un millésime frais et fruité. Il n'avait que le nom du domaine mais n'avait jamais gouté leurs 2013
Mazis Chambertin
Que dire de plus que chaque année ?
Encore un immense grand cru. Tout y est, la complexité au niveau des arômes, l'amplitude en bouche, la structure à la fois fine et puissante.
L'acidité idéale emporte loin le vin dans une finale interminable.
Je suis un fan absolu de cette cuvée qui encore une fois est déjà d'une accessibilité étonnante.
Au fil de la dégustation, nous avons pu aborder différents sujets.
Sur le prix des vins. Ils sont énormément sollicités pour le Mazis que certains voisins trouvent trop légèrement tarifé.
Sur les millésimes, 95 est le plus pourri, vous ne trouverez rien de bon alors que les critiques avaient dit qu'il serait meilleur que 97 .
J'avais lancé le sujet par rapport à nos déconvenues sur des bouteilles de 95 et nos agréables surprises sur 97 ( d'un autre domaine).
Il pense que les journalistes font beaucoup de mal en annonçant le millésime du siècle trop souvent.
Les gens ne veulent que du 2015 comme c'était déjà le cas avec 2005
Pour 99, ( c'est lui qui en parlera) il reste dubitatif. C'est toujours fermé, s'ouvrira-t-il un jour ?
Un millésime difficile à comprendre.
Il craint qu'à l'avenir les vignerons redeviennent salariés sur leur domaine qui aura été vendu à des financiers.
Le problème des successions va se poser avec la hausse vertigineuse du prix des terres.
C'est devenu un placement déconnecté de la rentabilité du travail avec pour corolaire une explosion du prix des bouteilles.
Il souhaite que leurs vins soient achetés par des amateurs pour être bu et non pas revendus x fois après avoir fait le tour du monde.
Ca tombe bien parce que c'était justement ce que nous avions l'intention de faire.
Au final je trouve que le millésime 2016 permet une lecture des différents climats du domaine.
Au bout de 4 ans, je pense avoir trouvé bouteille à mon palais avec "En Jouise" en village, "Perrières" en 1er cru et bien entendu l'excellentissime Mazis.
Mais comme il ne faut jamais avoir de certitudes, je compte bien vérifier tout ça une nouvelle fois avec mes amis l'année prochaine en retournant dans ce domaine que je trouve particulièrement représentatif de la diversité que Gevrey-Chambertin peut offrir