Domaine Jacques Prieur, visite au domaine pour le millésime 2017
Nous poursuivons la journée, après une première visite matinale un peu plus au Nord à Morey Saint Denis (au domaine
Arlaud
) puis un excellent moment et un très bon repas au
Soufflot
à Meursault. C'est donc à quelques centaines de mètres de ce dernier que nous nous rendons en début d'après midi, avec toujours une petite demi-heure d'avance. Nous sommes reçu par Martin Prieur. Il fait partie de la 5ème génération, rejoint désormais par la famille Labruyère, propriétaire de domaines éponymes en Beaujolais et Champagne, et du Château Rouget à Pomerol. Le domaine est de relativement grosse taille pour la région puisqu'il fait environ 21 ha, dont 3 ha de villages, 13 ha de 1er Crus, et 5 ha de Grands Crus. Par ailleurs, une structure de négoce a vu le jour depuis quelques millésimes, et qui correspond à l'équivalent de 6,5 ha, et dont le travail à la vigne est effectué par les équipes du domaine.
Les présentations étant faites, nous voilà partie en direction du chai à vins blancs, qui se trouve face à la belle demeure bourgeoise représentée sur les étiquettes du domaine.
Le chai est plein. Il y a eu de bons volumes en blancs sur 2017, avec une grande qualité, selon Martin Prieur, bien meilleure qu'en rouges selon lui. L'élevage est généralement compris entre 12 et 18 mois, avec suffisamment de place de stockage pour pouvoir garder 2 millésimes en élevage. Le domaine travaille avec environ 7 tonneliers, parmi lesquels Taransaud ou Vicard par exemple, et plutôt sur des chauffes légères concernant les vins blancs. Allez, place à la dégustation des
vins blancs 2017!
Beaune 1er Cru, Clos de la Féguine:
1,7 ha (dont 27 ares de blanc) au centre de l'appellation, plutôt en haut de coteau, exposé plein Sud. On a un nez de poire et tilleul. La bouche est ronde, grasse, réglissée, un peu marquée par l'élevage, avec une pointe de gaz. Ensemble frais, digeste et facile d'accès.
TB
Beaune 1er Cru, Champs Pimont:
Sol crayeux, exposé plein Est. Le nez est plus marqué par l'élevage, avec un côté beurré/ vanillé franc et un peu de tilleul en second lieu. La bouche se montre plus droite et tendue, marquée par des amers plus imposants également. Un vin qui demandera probablement un peu plus d'attente
TB
Puligny Montrachet 1er Cru, Les Combettes: Le nez est plus neutre que les Beaune. On retrouve par contre une bouche à la structure verticale d'une grande tonicité et fraîcheur, dont la matière est de grande densité. On retrouve des agrumes, de l'écorce d'orange, avec de fins amers élégants et rafraîchissants (quinine).
E+ C'est généralement ma cuvée préférée en blanc du domaine...et c'est encore le cas cette fois.
Meursault 1er Cru, Perrières: On a un nez plus végétal, mentholé, chlorophylle et tilleul. On retrouve une bouche très dense et sèche. On a l'impression de lécher le caillou humide, le gravier. L'aromatique passe en second plan, plutôt menthol/chlorophylle. L'ensemble est cristallin, très long, fuselé et d'une fraîcheur remarquable, malgré une finale très légèrement marqué par la pierre à fusil. Il paraît un peu moins gourmand que le Puligny Combettes à mon goût même si sa constitution est remarquable.
E
Montrachet: On est face à un nez iodé, empli d'embruns marins et torréfié. La bouche est longue et grasse, d'une salinité impressionnante, avec ce goût iodé qui reste prégnant un bon moment. La puissance et la longueur caractérisent ce vin hors norme. On a une texture en bouche impressionnante, mêlant gras et tension, densité et velouté. La finale est pierreuse et un peu chaleureuse. Trop massif à mon goût, à fortiori en dégustation analytique pure...Quel Golgoth!!!
TB
Le tour des vins blancs est effectué, désormais changement de bâtiment et direction le chai aux vins rouges, à côté de la magnifique cave de dégustation.
Nous goûterons sur fûts différents rouges 2017, mais également quelques 2018! Le millésime 2017 s'annonce plutôt dans un registre tendre, un peu similaire à 2007, qui s'ouvrira vite. 2018 est par contre à l'opposé, avec des rouges qualifiés de géant par Martin Prieur, avec des rendements phénoménaux...
Volnay 1er Cru, Clos des Santenots, 2017: Le nez est sanguin et puissant. On a une bouche puissante et très longue, réglissée, épicée, sur le café...déjà empreinte d'une belle complexité. On retrouve de la mûre, des fruits noirs, des épices, de la girofle...Un petit côté syrah/sudiste pour ce premier rouge, déjà d'un niveau tout à fait remarquable...Quel niveau pour commencer!!!
E+
Corton Bressandes 2017:
Il s'agit d'un prélèvement sur fût de François Frères, avec 87% de vendange entière, qui devrait correspondre à environ 1/4 du vin une fois assemblé On a un nez de baies rouges. On retrouve une grosse mâche en bouche autour de tannins nombreux et volumineux, avec une aromatique très mentholée qui confère une grande fraîcheur en bouche.
TB
Corton Bressandes 2017:
Cette fois, il s'agit d'un prélèvement sur fût 100% égrappé, et devrait entrer à environ 75% dans la composition du Corton Bressandes final. On retrouve cette fois un boisé plus frais et plus noble au nez. La bouche est marquée par une belle souplesse, délicieuse et gourmande, pas rugueuse et dont les tanins sont microscopiques. On retrouve une aromatique primaire complètement addictive sur le bonbon Kréma.
E
Pommard 1er Cru, Charmot, 2017:
2 fûts produits, pour cette vigne située un peu au dessus des Grands Epenots, rachetée il y a 3 millésimes et qui n'avait encore jamais pu produire à cause du gel et de la grêle! 100% de vendange entière. La robe est beaucoup plus sombre que les vins précédents. On a également un nez plus évolué, sur le cuir et la mûre, tout en restant relativement frais. La bouche est puissante, avec une mâche assez importante et des tanins très nombreux, grossiers et rugueux. Je ne suis pas hyper emballé.
AB-B
Echézeaux, 2017: On a un nez magnifique de floralité (violette) et de petites baies rouges voluptueuses (framboise...). La bouche relève d'une gourmandise absolue. On retrouve une belle maturité affriolante et gourmande, avec un très léger côté sucrailleux. C'est rond, velouté, sur la mûre, la framboise, les petites baies rouges...Long et sachant rester très frais, il est d'une accessibilité assez incroyable, presque aérien, avec un fondu de tanins pour cet âge et niveau de cru assez improbable...Toute personne se revendiquant amateur de vin se devrait voir offrir une caisse de 12 chaque année!!! Probablement le plus beau vin de la journée.
E+++
Musigny, 2017: On retrouve un nez de baies noires, avec la aussi, une jolie floralité. La bouche est ronde, tannique mais plus impactée par des marqueurs d'élevage (vanille, café). On retrouve des baies noires pour ce vin qui fait plus mûr, bien plus dense et masculin que l'Echézeaux. On retrouve une belle acidité qui contrebalance bien le côté chaleureux qui propulse une matière très mûre et la rend tonique tout le long du grumage.
E
Nous passons désormais au
millésime 2018 en rouge, que Martin Prieur voit effectivement très grand! La aussi, le chai à barriques paraît bien plein. Tant mieux!
Beaune 1er Cru, Grèves: On a un nez mûr et riche, sur le pruneau, la mûre et un petit côté céréales. Il y a une belle matière, mûre et riche, concentrée mais un peu collante.
B
Volnay 1er Cru, Clos des Santenots:
Tiré sur un fût François Frères. On a un nez dense, de goudron, un peu brûlé, sur le pruneau, et un soupçon de noix fraîche. La bouche présente un beau touché, avec une jolie densité de jus. Les tanins sont nombreux mais enrobés par un joli gras.
TB
Corton Bressandes:
32% de vendange entière composent ce fût. On a un nez de myrtille, fumé, sur le cacao. La bouche est extrêmement mûre et de belle gourmandise, quoi qu’avec une finale un peu chaleureuse. On retrouve une texture grasse, presque moelleuse, avec un petit coté amylique concernant l'aromatique.
E
Musigny: On a un nez fumé, sur le soufre, et la myrtille. La bouche est de grande densité. On retrouve une structure droite et tendue, pierreuse, avec des tanins fins et paraissant intégrés.
E++
Echézeaux: On a un nez avec de la volatile et du vernis, un soupçon d'oxydation ménagée sur le pruneau et la noix fraîche, mais également du cassis. La bouche est riche, enrobée par un peu de gras, laissant transparaître de beaux tanins. La finale est un peu chaleureuse avec des amers encore importants.
B
Il est maintenant l'heure de partir, après avoir fait un beau tour d'horizon sur le millésime 2017 et pu entrevoir les premières caractéristiques du millésime 2018 en rouge.
Au total, encore une fois, j'ai trouvé des vins de très bon niveau, en particulier les blancs 2017, de façon générale, avec un énorme Puligny Montrachet 1er Cru Les Combettes. Concernant les rouges, ils sont croquants, expressifs, avec des profils pouvant faire penser à 2007, voire 2011 (mais avec une meilleure maturité). Ils semblent, à priori, relativement facile d'accès et probablement abordables jeunes. Mention pour l'énorme Echézeaux sur ce millésime. La comparaison entre une pièce à dominante vendange entière versus égrappée (Corton Bressandes) était également un exercice intéressant à faire.
Concernant le nouveau millésime 2018, fraîchement rentré en cave, il est prématuré pour ma part de pouvoir en conclure quoi que se soit. Les vins viennent d'être mis en fûts, ils sont difficilement lisible. On ressent seulement une densité et une maturité assez poussée sur l'ensemble des cuvées, mais il sera intéressant de les redécouvrir l'an prochain.
En attendant, j'adresse un grand merci à Martin Prieur pour son accueil, sa générosité, son franc parler et ces prises de positions, et c'est encore une fois avec plaisir que je reviendrai au domaine.
Il est désormais l'heure de partir de Meursault pour rejoindre Chassagne Montrachet, au domaine Morey Coffinet, lieu de notre dernier opus de la journée...