Désolé de réouvrir un sujet tabou (aaa) mais en lisant Bourgogne Aujourd'hui d'octobre/novembre 2003 je suis tombé sur un entretien de Dominique Lafon (viticulteur - Domaine des comtes Lafon - bourguignon) et de Denis Dubourdieu (oenologue - maitre de conférence - directeur des chateaux Doisy Daà«ne et Cantegril - bordelais). Suite à la dégustation par ces deux hommes d'un vin blanc produit par D. Lafon, j'ai relevé ceci dans l'article :
D. Lafon :
Les terres sont très intéressantes; ensuite ce sont de beaux raisins récoltés à 12,5° naturels, je ne recherche pas de trop fortes maturités, pressés correctement et fermenté en gros volume. C'est tout ! L'intervention humaine est très légère.
D. Dubourdieu:
Oui et non ! J'ai une passion pour le dressage de chevaux. En final, le cheval valse, pirouette, volte, sans intervention apparente de l'homme, mais quel travail pour en arriver là et quelle sensation d'harmonie ! Il faut que l'homme ait une compréhension profonde du cheval; cela ne se fait pas à coups de piquets sur la tête. Il y a à la base un gros mensonge hypocrite qui est de laisser croire au public que le vin est le résultatt d'une expérience spontanée de la nature. Quand c'est le cas, il devient une boisson à peine consommable dans la salade. Tout, depuis l'identification d'un lieu, la plantation de la vigne, la sélection des plants, le calcul des hauteurs, des densités, jusqu'à la vinification n'est que la réalisation d'une forme de beauté que l'homme crée.
Deux personnages différents, deux origines différentes, deux visions différentes, un plus réaliste que l'autre.
Le parallèle avec les chevaux m'amuse, ça me rappelle quelqu'un qui parlait de foot et de grands cuisiniers .... Je crois aussi qu'il est originaire de bordeaux. (aaa)(aaa)
Les deux points de vue ne sont pas si dissemblables. Simplement, ils ne parlent pas de la même manière. Il faut énormément de travail et de pugnacité pour donner des vins les moins interventionnistes possibles. Si vous voulez profiter d'une vinification d'une simplicité enfantine, il faut rentrer un produit parfait, ce qui sous-entend le choix de la terre, des plants, la densité, la conduite de la vigne, la méthode de vendanges. Bien sur, le vin est un produit entièrement fait de la main de l'homme. Tout dépend de la manière dont on présente son travail. Certains s'effacent derrière leur terroir, d'autres non.
La phrase de Dom. LAfon concernait ses vignes à Macon… sur le Montrachet il ramasse rarement à 12,5% vol potentiel (bbb)
Evidemment dans les 2 cas c'est du travail mais le travail que je trouve noble c'est de produire de beaux raisins en respectant son terroir donc les "autres", présents et à venir… au lieu de faire en cave ce qu'on n'a pas fait patiemment et avec humilité dans les vignes…
Extrait d'un article de la revue "Wine International" de janvier sur les vins de Bourgogne des negociants, portant sur le millesime 01 et 99.
En preembule, l'auteur declare:
"The bottom line of this tasting was that although there was a big difference of quality between each negotiant, the performance within each individual negotiant was remarkably consistent .... This showed that, as usual, when it comes to Burgundy, it is far safer to get to know, understand and trust individual merchants and growers rather than to settle on one village or vineyard .... As usual, the wines of Burgundy both depressed and delighted, proving that yet again that it's not what you know but who you know"
Mais, je dois corriger un oubli:
Denis Dubourdieu a, en plus, la charge de Clos Floridène et de Reynon, et avec eux, il me comble de plaisir, abordable, au quotidien...
Si vous faites construire une maison en choisissant les matériaux les plus nobles … mais que vous confiez le chantier à un incompétant alcoolique malhonnête… Rien de grand à espérer !
Si vous confiez à un artiste, sérieux, consciencieux et compétent la construction d'une maison dans un endroit sordide avec les matériaux les plus merdiques qui soient … même avec F.L. Wright comme architecte vous aurez de la merde… une jolie merde mais une merde !
Il faut les deux !!
Une bonne matière première bien mise en valeur par quelqu'un de talentueux et qui sait rester humble et se mettre au service de quelque chose qui le dépasse !!
Mais un gros boudin dans une petite robe noire Chanel… c'est tout de même moins joli qu'une belle fille dans un jogging de chez Tati… !!
Enfin pour moi…
Oui, bon, d'accord, c'est vrai qu'à Bordeaux le terroir est prééminent...
Il suffit de voir comme il est impossible de faire quelque chose de buvable sur un terroir de seconde zone comme celui de... Monbousquet par exemple. Ce n'est que par incompétence manifeste que tous les critiques professionnels (de Parker à Bettane en passant par le GJE) classent ce vin régulièrement parmi les 5 ou 10 meilleurs produits à Bordeaux.
Mais nous sommes sous la rubrique Bourgogne, ce raisonnement ne s'applique donc pas ici où, comme chacun le sait, le terroir n'occupe qu'une place historique mineure...(bbb)