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Du sucrage des vins de bourgogne

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Du sucrage des vins de bourgogne a été créé par Guest

Je commence par un petit aparté, la première fois que je suis venu sur LPV, j'ai trouvé l'info hyper intéressante (et exploitée) des ouvrages reproduits par la BNF au format PDF ; ce n'est donc que justice que j'en parle ici.

En particulier cet ouvrage : "Sucrage des vendanges avec les sucres raffinés de canne, de betterave, etc. ou Vues sur cette méthode industrielle de vinification considérée comme moyen de régulariser la qualité des vins au niveau des grandes années et d'en augmenter au besoin la quantité danes les années de récoltes mauvaises ou insuffisantes" par Dubrunfaut, Auguste-Pierre, 1854

C'est assez instructif (je vous laisse découvrir) mais surtout il y a le compte-rendu quasi-exhaustif du fameux congrès de Dijon de 1845 (et des interventions remarquables sur ce que doivent être les qualités d'un grand Bourgogne, sur la façon de faire dans le Tonnerois, la recherche des matûrités etc...).

Et c'est là  qu'est le scoop si on a pris pour parole d'évangile le dossier historique de Michel Bettane dans le numéro bourgogne de l'automne dernier : non, le congrès n'a pas été à  deux doigts de proscrire la chaptalisation : il l'a fait !!

Je cite (page 16): "... il sera facile de reconnaître que la décision du congrès des vignerons réunis à  Dijon en 1845, en condamnant le sucrage des vins d'une manière absolue, a fait un acte violent, qui a pu être utile aux intérêts du commerce de vins de la Bourgogne..." c'est redit plus loin page 39 etc.

Enfin je ne résiste pas de faire oeuvre utile (il faut taper, le document est en PDF) en vous reproduisant cet extrait de l'intervention de M. Isidore Roze, secrétaire du comice de Tonnerre (développant l'idée que le sucrage ne doit se faire qu'en année difficile):

"... Ne craignons pas que de telles additions, faites avec discernement et prudence, nuisent à  notre réputation, qui s'établit seulement sur les grandes années, où les vins se classent et prennent chacun le rang qui leur appartient. Alors c'est folie de vouloir améliorer la perfection.
On l'a tenté cependant ; on a augmenté la vinosité, la couleur et le corps, aux dépens de la finesse, de la limpidité, et du bouquet ; la fraude s'est efforcée, par des moyens factices, d'élever des crus inférieurs à  la hauteur des premiers crus, qui précisément s'abaissèrent à  leur niveau par les mêmes moyens(...) Puisse-t-elle (la commission de Beaune ndlr) prévenir le retour du mal, et borner la chimie à  la bonne conduite, à  la conservation de nos vins, à  l'expression naà¯ve de leurs qualités !
D'où vient cette épidémie qui a terni les plus beaux fleurons de notre couronne ? Du commerce ? Il n'est que l'intermédiaire souvent aveugle du producteur trop docile et du consommateur plus grossier, ou des exigences de bon marché, de la vanité qui veut du velours, fût-il de coton au lieu de soie, qui veut du Chambertin la vigueur, la couleur et l'étiquette..."
02 Juil 2003 18:04 #1

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Du sucrage des vins de bourgogne

Bravo et merci et très instructif.
02 Juil 2003 18:57 #2

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Du sucrage des vins de bourgogne

Toujours dans l'oeuvre d'utilité publique, et pour alimenter la querelle très actuelle anciens/modernes je vous ai "OCRisé" le passage suivant :

Opinion de M. Poulet-Denuys de Beaune

Sans vouloir suivre son ami le savant et le très honorable M. Mollerat dans la brillante exposition qui vient d'être faite, il désire faire connaître au Congrès les motifs qui ont déterminé le comité des propriétaires et négociants en vins de l'Arrondissement de Beaune à  se prononcer d'une manière tout à  fait absolue contre le sucrage des vins.
Après avoir rappelé combien le système préconisé par un savant de premier ordre, Chaptal, il y a une vingtaine d'années, et adopté depuis assez généralement, avait été funeste à  la Bourgogne en portant atteinte à  la réputation de ses vins, M. Poulet a surtout fait ressortir les graves inconvénients qui en résultaient.
Ainsi, ajoute M. Poulet, on ne contestera pas que le sucrage des vins a pour résultats fâcheux :
1° De dénaturer complètement les vins de Bourgogne en leur enle-vant ce que ces vins ont de plus précieux, de plus parfait, leur in-comparable bouquet, et aussi leur délicatesse , qui est leur véritable type ;
2° De les enrichir de manière à  augmenter considérablement leur richesse alcoolique, ce qui, en les rendant plus spiritueux ou plus échauffants, en a singulièrement fait restreindre l'usage ; tandis que dans leur état naturel, tels, en un mot, qu'on les récoltait autrefois , il est constant qu'ils ne contiennent pas plus d'alcool que les vins de Bordeaux , avec lesquels ils peuvent lutter pour la solidité ;
3° D'entretenir dans les vins un principe, une disposition à  la fermentation tout à  fait contraire à  leur bonne conservation.
M. Poulet a en outre signalé, comme une circonstance tout à  fait capitale, l'impossibilité absolue de distinguer, en primeur et pendant au moins la première année, dans les vins sucrés, non seulement la nuance de qualité qui leur appartient, mais même celle du climat d'où ils sortent; de telle manière qu'étant obligé de les acheter de confiance. il peut arriver assez fréquemment d'admettre, en primeur, comme vins de premier ordre, des vins d'une qualité secondaire.
C'est en raison de ces considérations, dit en terminant M. Poulet , que le comité de Beaune avait été unanime pour reconnaître que le su-crage des vins de Bourgogne devait être à  l'avenir complètement aban-donné, et a adopté le rapport qui suit :
- Le vin, considéré chimiquement, est une dissolution , dans un alcool très étendu d'eau, de sels divers, d'acides végétaux, de mucilage, de tannin et de matière colorante.
- L'eau seule, abandonnée à  elle-même au contact de l'air, entre promptement en décomposition.
- L'alcool , les sels, les acides, le tannin, le sucre, sont les principes auxquels on doit la conservation de toutes les préparations végétales et animales destinées à  l'alimentation de l'homme ou à  ses usages.
Le vin présente dans sa composition, à  des doses diverses, tous ces principes de conservation.
L'industrie et la science ont inventé de suppléer, par différentes ad-ditions, à  ce que la nature refusait au vin dans certaines années. De là  s'est propagé remploi de l'alcool, du tannin et du sucre.
Le tannin, sous forme de teinture de cachou ou de tannin pur, est principalement employé par le Bordelais et la Champagne ; le sucre l'est plus particulièrement par la Bourgogne ; l'alcool, par les falsifica-teurs des grands centres de population.
Chaptal, qui était né dans le Midi , et, comme tel, n'estimait le vin qu'en proportion de sa force alcoolique, a considéré l'alcool comme le principal élément conservateur des vins, et c'est sur cette base qu'ont été élevés les tristes éléments de vinification qui nous régissent encore aujourd'hui,
Avant Chaptal, nos raisins, vendangés plus tôt, et par conséquent dans de meilleures conditions de température, étaient plus riches en sels, en tannin et en acides: car on sait que, par l'effet de la végétation, ce sont les acides qui se transforment en matières sucrées et en muci-lage par une déperdition d'oxygène.
Depuis Chaptal, on a cherché à  obtenir une maturité qui rapprochât nos raisins des raisins plus sucres des pays méridionaux,
Quand la maturité n'a pas paru suffisante, on a ajouté au moût, ou au vin nouvellement tiré de la cuve, différentes sortes de sucres, en diverses proportions…
03 Juil 2003 18:22 #3

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