Château Thivin: Passage au Domaine
Une nouvelle excursion,
quinze jours après la précédente
, me mène en Bourgogne sur la journée, avec une soirée prévue avec les Beaunois. Mon acolyte Cédric m’accompagne et décision est prise de meubler le trajet de quelques domaines. Le premier se trouvant sur notre route est le Château Thivin, le plus vieux domaine du Mont Brouilly, acheté aux enchères par Zaccharie Geoffray en 1877 et comprenant à l’époque 2 ha, que je souhaitais découvrir. Nous arrivons pour 9 heures et c’est Claude Vincent Geoffray qui nous accueille. Actuellement, la 6ème génération est en place, par l’intermédiaire de Claude Edouard et Sonja Geoffray, et assure la relève de ce domaine à la très longue histoire, le manoir étant présent depuis le XIVème siècle.
Le domaine couvre actuellement 27 ha
(dont 95% de Gamay et 5% de Chardonnay), lui permettant de produire environ 130000 bouteilles annuellement, vendues pour 50 % à l’export, 20 à 30 % de clientèle particulière et le reste en caviste/hôtellerie/restauration.
Les travaux à la vigne sont réalisés par une équipe d’une dizaine de personnes
(en comptant les membres de la famille Geoffray), complété ponctuellement par environ une quarantaine de vendangeurs.
La conduite du vignoble se veut la plus respectueuse possible, selon les critères de l’agriculture biologique, avec la présence de fleurs et plantes sauvages, de légumineuses au sein du vignoble, la plantation d’arbres et de haies, l’utilisation d’engrais verts, la pratique de labours, la présence de moutons pour de l’éco-pâturage… L’objectif est de réduire la productivité naturelle du Gamay car, selon Claude Vincent Geoffray,
« le Gamay est un garnement : il faut le freiner !!! ». Et cela impose un gros travail en amont de taille courte et d’ébourgeonnage, pour obtenir un rendement compris globalement entre 35 et 45 hL/ha.
Le chai est optimisé et organisé pour être le moins agressif sur le raisin : d’abord vendanges manuelles et transport en caissettes, puis double tri à la réception de la vendange, puis mise en cuve partiellement en grappes entières par gravité et utilisation d’un pressoir pneumatique
(Bucher GC), avant un élevage en foudres de chêne de différentes provenances
(et fûts pour Zaccharie) durant une petite dizaine de mois, et mise finale en bouteille à la fin du printemps
(mai-juin).
Claude Vincent Geoffray nous fait faire le tour du chai et de différentes caves, avant de passer le relai à sa belle-fille suisse, Sonja, qui nous fera la dégustation.
Le parcellaire du domaine (ronds blancs avec le point noir au centre)
Carte 3D des appellations et Crus du Beaujolais: Le Cru Côtes de Brouilly est en marron, entouré en jaune par le Cru Brouilly
Beaujolais Village, Clos de Rochebonne, 2018:
100% Chardonnay, sol argilo-calcaire exposé plein Est. Clos historique d’environ 1,5 ha, relié au Château de Rochebonne au sommet du bourg de Theizé (480 mètres). Sol enherbé, vendanges en vert, élevage en barriques de 1 à 10 vins durant 8 mois.
Le nez est sur la poire complété par de la menthe fraîche et des fleurs blanches. La bouche est fraîche, dynamique, emportée par une belle vivacité. On retrouve une aromatique de chlorophylle et de menthe finement poivrée. La finale est courte.
TB-
Brouilly, Reverdon, 2018 :
Le lieu-dit « Reverdon » se trouve sur des sols pauvres de granit rose sur un coteau plein Est de 5,5 ha, entrecoupé de bandes enherbées et d’autres labourées. Elevage de 7 mois en cuves ciment.
Le nez est terreux, puis viennent des notes fruitées de mûre, de myrtille, de coulis de fraise. La bouche est acidulée, sur les agrumes et le bonbon harlequin. Les tanins sont fins, sur une matière de demi-corps.
B-TB
Côte de Brouilly, Les Sept Vignes, 2018 :
Assemblage de 7 parcelles (Clos Bertrand, La Chapelle, Les Griottes, Godefroy, l’Héronde, Henri, Les Fournelles) de différentes orientations (Est, Sud, Ouest) se trouvant sur le Mont Brouilly. Les sols sont de pierre bleue (Metadiorite), plus durs et calcaires sur le haut, plus argileux sur le bas. Densité de plantation de 7000 à 9000 pieds/ha. Elevage en foudre durant 7 mois. A noter la présence d’un peu de chardonnay.
On a un nez de confiture de fraise, de menthe poivrée. La bouche est plus volumineuse que Reverdon, assez ronde autour de tanins fins. Elle est d’une belle fraîcheur, mentholée et poivrée, avec un retour sur l’orange sanguine. La longueur est assez belle.
TB-E
Côte de Brouilly, Les Griottes de Brulhié, 2018 :
Parcelle chaude et précoce de 5 ha Exposé Sud Est, sur de fortes pentes à mi-coteau sur un sol de pierres bleues (metadiorite) ou se trouvaient d’anciens griottiers.. Densité de plantation de 7000 pieds/ha. Vendange entière, élevage en foudre de 7 à 9 mois. A noter un soupçon de chardonnay (1-2%).
On a un nez de confiture et de compote de fraise et de menthe poivrée, accompagné par un fin lacté. La bouche est plus rigide et tannique, autour de zests d’agrumes plus marqués. Il semble un peu plus dur à la dégustation.
B-TB
Côte de Brouilly, La Chapelle, 2018 :
Parcelle se situant au sommet du Mont Brouilly (450 mètres), très escarpée (jusqu’à 50% de pente) rocailleuse et aride, exposée plein Sud. Vieilles vignes de Gamay (60 ans) plantées à 8000 pieds/ha. Elevage en foudre durant 10 mois.
Le nez est fermé. La bouche paraît plus structurée, avec également plus de fond. On retrouve encore ce côté acidulé/bonbon harlequin accompagnant des tanins très fins. La finale est un peu sèche, fraîche, avec des notes d’agrumes et de jus d’orange pressé.
B-TB
Côte de Brouilly, Godefroy, 2018 :
Parcelle de 70 ares, exposé plein Est en bas de la colline de Brouilly, sur un sol plus lourd. Vigne centenaire, plantée à 9000 pieds/ha. Elevage en foudre de 7 à 9 mois.
On a un nez fermé. La bouche est belle, avec une grosse structure et de nombreux tanins. La matière est belle, dense, compacte et fraiche, entrainant une jolie aromatique de baies rouges. La finale est satisfaisante de longueur.
TB
Côte de Brouilly, Zaccharie, 2018 :
Seule cuvée élevée 100% en barrique, dont 10% neuf (le reste, de 1 à 5 vins). Il s’agit d’une sélection des meilleurs raisins de vieilles vignes (Chapelle au Sud, Godefroy à l’Est). Elevage 9 mois.
On a un nez lacté, sur le yaourt à la fraise, fruits mûrs. La bouche est veloutée, ronde et crémeuse, témoins d’un bel élevage, démonstratif mais gourmand et enrobant une matière mûre et généreuse, aux tanins nombreux et gras. C’est assez sexy, avec de belles notes d’orange sanguine pour équilibrer et tonifier ce jus charmeur. La finale est longue et enveloppante.
TB-E
Au total, nous sortons avec quelques achats de ce premier domaine, enchanté par la qualité et la fraîcheur des jus, en particulier sur ce millésime 2018, beau en qualité et gros en volume. D’ailleurs, par cette matière, ces accents épicés et sanguins, tendus, frais et acidulés, certains vins pourraient facilement m’évoquer des syrah. Vraiment du beau travail.
Je retiens particulièrement les 7 vignes, en tant que vin de casse-croûte, sans prétention et à la facilité immédiate. Mentions également pour Godefroy, pour la structure, qui est armé pour défier les années et qui n’a rien à envier à Zaccharie
(si ce n’est l’élevage) et justement, à Zaccharie, au profil beaucoup plus international et flatteur. Le Château Thivin, implanté dans cette magnifique région des pierres dorées, est un bien bel ambassadeur des vins de la région et fera désormais partie d’une short-list lors d’un prochain passage en beaujolais. Nous remercions vivement la Famille Geoffray pour leurs vins ainsi que leur accueil et leurs multiples explications concernant leur production.