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Tokaj, Gizella Pince

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Tokaj, Gizella Pince a été créé par Jérôme Pérez

Gizella Pince

78 Dienes Utca, Tokaj 3910
Tel: +36 4735 3231



www.gizellapince.hu/

Szilágyi László, un jeune vigneron de Tokaj des plus talentueux.
Une cave très artisanale, de dimension très restreinte, presque exiguë, mais les vins qui y sont produits sont de haut niveau

Jérôme Pérez
19 Aoû 2015 21:47 #1
Pièces jointes :

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Réponse de Jérôme Pérez sur le sujet Re: Tokaj, Gizella Pince

CR: Gizella Pince

Laszlo Szilagy part à la conquête du Mont Tokaj !

Drôle de nom pour cette Pince hongroise : Gizella est le prénom de la grand-mère de Laszlo : Une maison acquise par ses aïeux en 1985 avec quelques arpents (un hectare) à Tokaj et comme il est le fils unique, la question s’est posée de savoir s’il voulait continuer.

Il s’est installé en 2005 et possède aujourd’hui 7,5 hectares sur 5 terroirs différents et très épars.
Laszlo Szilagy est très attaché à cette notion de terroir et il suffit de goûter ses vins pour comprendre à quel point il a raison, mais surtout comment il est de donner un aboutissement à ses idées.

Aujourd’hui, cet aventurier regagne du terrain sur les friches du mont Tokaj et progresse en hauteur au prix d’un travail où la mécanisation est impossible : il faut déplacer des montagnes ! Mais ce passionné est aussi un idéaliste ; il se dit lui-même un peu fou mais il sait aussi qu’il faut une certaine dose de folie pour réussir sa vie et aller au bout de ses projets, voire de ses rêves.

Ce qu’il faut bien comprendre à Tokaj, c’est que de plus en plus, l’Aszu est pour certains domaines une exception : certes une quête pour tout vigneron, mais en termes de faisabilité et en termes de rentabilité, une exploitation jeune, inconnue, en plein développement ne peut vivre que de cette seule production.

Un exemple : sur les 12000 bouteilles produites à Gizella, il n’y a qu’une barrique dévolue à l’aszu, et c’est exclusivement un 6 puttonyos. Il faut aussi bien comprendre que cela demande une certaine maîtrise technique et les jeunes producteurs y vont un peu à tâtons et de plus, le développement du botrytis n’est pas une valeur partagée sur l’ensemble de l’appellation en totale égalité. Il y a des endroits propices et d’autres qui le sont beaucoup moins.
Enfin, il en va aussi du risque pris, des reins plus ou moins solide, de la notoriété et tout cela explique que les petits producteurs se lancent dans l’aventure du vin sec plus facilement que dans celle du liquoreux, marquant en partie toute la différence qu’il peut y avoir entre des domaines comme Disznoko, Oremus, d’une part et Kikelet, Dobogo et Gizella d’autre part. Cette petite n’est évidemment pas exclusive mais est juste là à titre d’exemple pour bien comprendre les différences.

Les vins secs sont élevés et fermentés en fûts.
Je dois dire avoir été totalement conquis par les vins secs, surtout ceux du terroir de Szil Volgy, un peu moins par les aszus, même s’ils sont très bons : ils n’ont pas encore atteint la pureté et la brillance des plus grands avec une style qui si il se rapproche aromatiquement de ce qui peut se faire à Disznoko, sont d’un équilibre plus lourd avec plus de sucres résiduels. Cela n’en reste pas moins une adresse fort recommandable pour l’amateur de 6pt riches : mais la production est extrêmement limitée.

Szil Volgy 2012 : furmint
Très beau nez « poudré » façon chenin, fleur blanche, élégance et pureté. Bouche tendue et gourmande à la fois, très vif. Un très joli vin.

Szil Volgy 2013 : Furmint harslevelu, vinifiés et élevés séparément.
Le vin est dans le même style que le précédent avec encore plus de fond et de fraîcheur. Finale minérale. Excellent et pur.

Szent Tamas 2013 : Harslevelu
Nez retenu, floral, élégant. C’est plus boisé en bouche, plus corsé, très sec avec une finale claquante, une longueur impressionnante. Vivacité exacerbée. Très bon niveau.

Latomas 2014 : late harvest furmint harslevelu
Nez discret, floral. Belle bouche ample, gourmande à souhait. C’est peut-être un peu court, mais le vin laisse cette même sensation de netteté en finale. Bien
Pour un 2014, millésime très difficile, le résultat est plus qu’honorable.

Szinszi 2012 : Late harvest
très joli nez épicé qui n’est pas sans rappeler le style Disznoko. Un vin gras et net, très savoureux au bel équilibre : très bien

Tokaj aszu 6 pt 2010 :
Nez assez pur d’abricot, très miellé, avec une note de caramel et de vanille que j’aime moins. C’est plus précis en bouche avec une belle colonne vertébrale qui donne de la verticalité à ce vin. C’est long. Très bien.

Tokaj aszu 6 pt 2013
L’année de la richesse et de la puissance : cela se retrouve dans le vin.
Quelques notes de graphite au nez avec la complexité toute Tokaj, très typé. C’est riche, très riche, peut-être un peu trop pour mon goût, mais l’acidité est là, enrobée.
Excellent et à attendre.

Tokaj aszu 2007
petite réduction à l’ouverture puis le vin s’ouvre sur la poire fine de ce millésime caniculaire. Bouche très riche mais qui possède un bel équilibre assez vibrant avec une finale vive et nette.

Cette découverte est toute relative puisque les vins de ce jeune producteur sont déjà très prisés. Il est peu ou pas connu encore en France, je remercie Laszlo Meszaros (Disznoko) de m’avoir conduit chez lui. J’avoue être totalement admiratif des vins secs et de leur style d’une grande élégance et d’une impressionnante pureté et ma préférence va à la cuvée Szil Volgy, sans doute ce que j’ai bu de plus beau en sec dans la région qui ne manque pas de très bons vins.

A découvrir absolument !

Jérôme Pérez
19 Aoû 2015 21:54 #2

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Réponse de Igor Vizner sur le sujet Re: Tokaj, Gizella Pince

Je dois avoir une bouteille de Gizella pince dans ma cave, faut que j'aille voir ce que c'est!

En tout cas, très intéressant le CR !

J'y serai en septembre, je pense que j'irai faire un saut chez Gizella..

Vinum Regum, Rex Vinorum! (Louis XIV après avoir dégusté le Tokaj pour la première fois)
18 à 20 – Vin absolu
16 à 17,5 – Exceptionnel
14 à 15,5 – Grand vin
12 à 13,5 – Très bon
10 à 11,5 – Bon
8 à 9,5 – Petits défauts
6 à 7,5 –Défauts graves
0 à 6 - Vin imbuvable
20 Aoû 2015 13:43 #3

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Réponse de jfrdz sur le sujet Re: Tokaj, Gizella Pince

Quel plaisir de découvrir ce reportage !

Ayant rendu visite Gizella Pince en mai 2011 après qu’un caviste près du Lac Balaton m’eût mis sur sa piste puis regoûté les vins de Laszlo en septembre de la même année lors du Bor Festival à Buda, je me retrouve dans ce CR.

La gamme des vins semble avoir évolué (disparition du furmint bâtonnage ?), mais en me replongeant dans mes notes je relève que le furmint Szil Volgy 2009 m’avait aussi fait une grosse impression (large, long et surtout doté de ces fameuses pépites d’acidité qui distinguent les meilleurs vins des autres). Les versions avec sucre de la cave Gizella m’avaient un peu moins séduit, à l’exception d’un 5 pt 2005 de très belle facture. Faut dire que la concurrence entre liquoreux est exacerbée dans la Hegyalja. A force de déguster, on finit par comprendre comment se présentent les équilibres supérieurs (ceci n’empêche pas de se planter aussi royalement, mais cela n’est le sujet).

Avec la disparition programmée des 3 et 4 pt (les szamorodni sont sur le ballant, l’interprofessionnelle se déchire à leur sujet, une partie d’entre elle aimerait le faire entrer dans la catégorie des « föbor »), les petits producteurs n’ont d’autre choix que d’élaborer des 5 ou 6 pt s’ils ont récolté assez de baies d’aszu ou à les vendre à une des grandes caves si la quantité de baies est trop faible pour élaborer 1-2 göncis.

En dépit de cette contrainte, les petits producteurs comme la cave Gizella ont joué et continuent à jouer un rôle moteur dans l’émergence des grands vins blancs secs. Par une sorte de curieuse revanche de l’histoire, les grandes caves se sont retrouves dotées des crus les plus réputés en raison de la quantité et de la qualité des baies d’aszu produites par ces climats, ces grandes caves se trouvent comme « condamnées » à produire de l’aszu. A part le furmint « Mandulas » d’Oremus, je n’ai pas connaissance d’un vin sec produit par une des 6-7 caves les plus grandes en mesure de rivaliser avec les vins secs des petits producteurs au sommet de la hiérarchie.

Les petits producteurs ont pris leur essor après le démarrage des grandes caves. Ils ont dû se contenter des miettes en termes de climats. Dans le sillage d’I Szepsy, ils ont tenté de tirer le meilleur parti de ce qu’ils ont acquis ou hérité. Plusieurs d’entre eux parviennent à montrer de manière de plus en plus convaincante que, même dans un climat classé en 3e catégorie, Tokaj est une mine d’or pour qui parvient à comprendre les différentes facettes de ce terroir d’exception. Tokaj est loin d’avoir livré tous ses secrets. Mais observer année après année à quel rythme les vignes sont replantées, des vignobles réhabilités, pas de doute, le meilleur est encore à venir.

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« Avez-vous déjà bu une bonne bouteille avec un connaisseur en vin ? C'est un supplice. » Nicolas Bouvier
20 Aoû 2015 22:03 #4

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Réponse de Jérôme Pérez sur le sujet CR: Tokaj, Gizella Pince, Szil Volgy 2013

Tokaj, Gizella Pince, Szil Volgy 2013

quel plaisir de retrouver ce vin qui m'a tant marqué lors de ce périple estival : du reste, je me rends bien compte que je me sers des bouteilles de ces cartons les unes après les autres et que je les déguste comme on regarde des photos de voyage.
Ce vin se dévoile ce soir, à l'ouverture sur des notes de morille fraîche d'abord, puis prends des accents floraux avec une touche vanillée. Cette dimension de l'élevage ne m'était pas apparue il y a presque un mois maintenant.
La bouche présente un moelleux que je n'avais pas deviné non plus, une texture bien serrée avec des saveurs fruitées et d'autres plus liées à l'élevage, en effet. C'est très élancé, avec une épine dorsale bien dessinée et le vin s'étire longtemps en final sur des notes fraîches d'agrume avec des sensations minérales qui elles ne m'avaient pas échappées.
C'est un vin de haut niveau, en l'état, clairement avec un beau potentiel d'évolution et si la question de ces vins est justement celle-ci : ont-il au delà de leur gourmandise, de leur vivacité quasi jouissive de jeunesse, la capacité à non seulement tenir dans le temps mais à se bonifier, ce vin semble apporter une réponse, ou plutôt semble-t-il laisser espérer que c'est bien le cas.

Je sais déjà que lorsque que je vais arriver à la fin de cet album de voyage, le ranger va être difficile et retrouver assez de swing dans les vins de mon quotidien ne va pas être chose très aisée.

Jérôme Pérez
03 Sep 2015 20:22 #5

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Réponse de jfrdz sur le sujet Tokaj, Gizella Pince, Szil Volgy 2013

« (…) Je sais déjà que lorsque que je vais arriver à la fin de cet album de voyage, le ranger va être difficile et retrouver assez de swing dans les vins de mon quotidien ne va pas être chose très aisée. »




Resteront alors une pointe de mélancolie et une envie impérative de repartir sur la route des vins.

La rencontre de Laszlo Szilagy n’est peut-être qu’une étape dans ce qui apparaît aux lecteurs de LPV comme le journal d’une transformation. Ce n’est pas le seul hasard qui amène à franchir la porte d’un domaine comme Gizella Pince. Les producteurs à Tokaj à la recherche de l’excellence dans les vins secs se connaissent tous. Il y a fort à parier que Laszlo vous fera découvrir d'autres membres de cette famille pas si grande, mais terriblement attachante.

Ce furmint devait traverser une phase particulièrement heureuse. Ce bougre de cépage est parfois capable de se verrouiller complètement. En comparaison, la syrah passerait pour un moine zen plongé en plein satori.

Les avis convergent concernant la durée de vie du furmint : au moins aussi longue, voire plus que celle du riesling ou du chenin. Manque à ce stade la démonstration par les faits : le furmint sec à Tokaj est né il y a guère plus de 10 ans et après les errances stylistiques bourguignonnes en matière d’élevage, ce n’est que tout récemment qu’un style authentiquement propre à Tokaj a commencé à émerger.

On ne peut se faire une idée de la capacité de vieillissement des furmint secs qu’en se référant au passé ! Quelques écrits témoignent que la reine Victoria était une inconditionnelle des vins secs de Somlo (minuscule AOC au Nord du Lac Balaton, volacan éteint à la géologie comparable à Tokaj, des cépages comme le furmint, welschrieling et Juhfark y prospèrent). Les furmint qui y étaient produits prenaient après 15 ans et plus d’âge, paraît-il, une complexité et une singularité aromatique tout à fait remarquable.

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« Avez-vous déjà bu une bonne bouteille avec un connaisseur en vin ? C'est un supplice. » Nicolas Bouvier
23 Sep 2015 22:07 #6

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Réponse de Jérôme Pérez sur le sujet Re: Tokaj, Gizella Pince, Szil Volgy 2013

cette capacité de bonification est une discussion que j'ai eue cet été avec quelques producteurs : les avis divergent.
au sujet de Somlo, certains affirment que c'est un grand terroir méconnu.
Le furmint et les sols volcaniques, c'est sans doute un accord parfait. En tout cas, quand on goûte le Sipon de Jéruzalem (sol sableux), il y a une grande différence d'expression. Mais c'est peut-être aussi dû à des variation du cépage in situ.

Jérôme Pérez
24 Sep 2015 16:00 #7

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Réponse de jfrdz sur le sujet Re: Tokaj, Gizella Pince, Szil Volgy 2013

« (…) cette capacité de bonification est une discussion que j'ai eue cet été avec quelques producteurs : les avis divergent. »




Il me semble que le durées d’élevage ont tendance à diminuer : 9 mois au lieu des 12, 18 mois du passé. Mais je manque de recul pour être certain que cette évolution est liée à une optimisation du mode d’élevage du furmint, aux contraintes économiques ou un effet « millésime ».

Un producteur à Somlo est une figure historique en Hongrie (presqu’encore plus qu’I. Szepsy à Tokaj, étant donné que ce producteur produisait et vinifiait à Somlo pour son propre compte pendant la période communiste) : Imre Györgykovács. Un autre producteur fait du très bon : József Kreinbacher. Bonne chasse !

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« Avez-vous déjà bu une bonne bouteille avec un connaisseur en vin ? C'est un supplice. » Nicolas Bouvier
27 Sep 2015 16:01 #8

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Réponse de jfrdz sur le sujet Re: Tokaj, Gizella Pince, Szil Volgy 2013

Je dois apporter deux compléments à mon précédent post.

Un troisième producteur est légendaire à Somlo : Béla Feteke. Il a vinifié son dernier millésime en 2013 à 90 ans. Comme Imre Györgykovács, ses élevages sont longs, de type oxydatifs avec 2 soutirages + finition du vin en inox. Tout est fait à la main, bref on change de dimension par rapport à nos standards œnologiques à l’Ouest.

Deuxièmement, l’écrit le plus ancien mentionnant le vignoble de Somlo remonte à 1093. Les rois hongrois étaient propriétaires du vignoble. Outre la reine Victoria, l’impératrice Maria-Theresa était fan de l’appellation. Bon, à l’époque LPV n’existait pas et l’échange des CR de dégustations devait prendre pas mal de temps.

N’ayant jusqu’à présent goûté que Tornai sur Somlo qui travaille de manière réductive, je n’ai jamais goûté ces trois producteurs qui semblent être un passage obligé pour appréhender Somlo.

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« Avez-vous déjà bu une bonne bouteille avec un connaisseur en vin ? C'est un supplice. » Nicolas Bouvier
29 Sep 2015 14:17 #9

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