En plein coeur du "Blaufränkischland...
[size=x-large]Préambule[/size]
Le blaufränkisch n’est pas vraiment un cépage qui dispose d’une énorme renommée internationale et pourtant son potentiel me parait plus qu’intéressant. J’ai donc proposé à quelques amis amateurs et connaisseurs de « mettre au banc d’essai » avec en filigrane la question : une identité cépage / terroir est-elle perceptible ou bien se trouve t-on en face de bouteilles répondant plutôt à des standard internationaux en matière d’élaboration de vin rouge?
21 cuvées ont été dégustées (ce qui constitue un échantillon relativement représentatif de ce qui se produit, même si la dégustation a évidemment lieu à l’instant « T » avec un seul exemplaire par vin et que, paratant, il est risqué d’en tirer des conclusions trop générales).
Quelques « pointures » sont absentes (je pense au « Reihburg de Schiefer, « Goldberg » de Prieler, « Tannenberg » de Nittnaus, par exemple) mais je ne pense pas que l’image que nous avons reçue en serait sortie modifiée.
Le résultat a dépassé les attentes de tous, et même les miennes alors que j’étais sans doute le plus convaincu de tous. Nous avons rarement vécu une dégustation aussi homogène au niveau qualitatif. A une exception près, la réponse à la question a été « oui » avec comme constatation unanime la brillance et la profondeur des robes (pas très concentrées mais lumineuses), l’identité aromatique, certes dépendantes sur les détails des différents terroirs, présentant une complexité et une expression pleine de personnalité, et une construction de bouche absolument superbe dans son équilibre (il faut de surcroît signaler que tous les élevages en barriques étaient remarquablement intégrés).
Alors, tableau idyllique brossé par un afficionado ? Peut-être, mais j’engage vraiment chacun à se faire sa propre idée, sans a priori, et particulièrement les amateurs de pinot noir qui pourraient bien être séduits par l’élégance et le toucher de bouche de ces crus.
Caractéristiques du cépage
On se perd un peu en conjectures sur son origine, hongroise, slovène ou autrichienne mais il est clair que ce cépage constitue avec le spätburgunder la variété de raisin la plus qualitative de l’Europe Centrale.
C’est un cépage au cycle végétatif assez long qui demande des conditions climatiques plutôt chaudes pour éviter les aléas du gel tardif. Naturellement productif, il est impératif de limiter les rendements pour en tirer des jus dignes d’intérêt.
Il peut produire des vins puissants et compacts tout comme des crus d’une finesse et d’une subtilité étonnantes. Mais toujours, on y trouve ce mélange de fraîcheur et de profondeur qui donne de l’assise aux arômes intensément fruités de cerise et de baies de la forêt rehaussés par des notes d’épices fines.
Comme le riesling et le pinot, c’est une variété très « plastique » dont l’expression finale dépend fortement de tous les facteurs qui président à son élaboration : type de sols, micro-climats, exposition, altitude, type d’élevage et bien sûr des options défendues par son géniteur.
Les vignes issues de terrains schisteux donnent en général les vins les plus ciselés, verticaux et minéraux. Les vins issus de terrains argilo-limoneux seront au contraire plus amples, juteux et puissants avec une expression différente selon que le sol est fortement calcaire ou non. Dans la zone du Neusiedlersee-Hügelland tout comme à Neckenmarkt, on a des conditions mixtes qui peuvent ainsi donner lieu à des types de vin très variés. Les vins seront également d’autant plus fins que le microclimat régnant sur le lieu d’origine est frais et on peut passer d’un profil type grenache à un profil type pinot noir en fonction de l’altitude, de l’exposition ou du millésime.
Respecter ces paramètres de terroir devrait constituer le maître-mot de chaque producteur mais en face d’une vendange déterminée, on peut très bien vinifier un cru qui représente la personnalité de son lieu d’origine et respecte l’identité du cépage comme vinifier un vin de type international, boisé, chocolaté et body-buildé.
Si elle a pu se faire jour dans le temps, cette dérive semble actuellement petit à petit disparaître. La haute qualité homogène des vins dégustés, ainsi que leur belle personnalité confirmera ce fait.
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Localisation géographique[/size]
On peut considérer que le blaufränkisch couvre une superficie plantée d’environ 15 000 ha. Les données manquent toutefois pour être plus précis, notamment dans les nouveaux pays de l’ex bloc de l’est.
Avec ses 8 000 ha, la Hongrie reste le premier pays producteur et de loin. Le cépage rentre notamment dans l’Egri Bikaver (« sang de taureau ») qui est une cuvée rouge prisée sur place en plus d’être embouteillé en mono cépage sous le nom de « Kekfrankos ». Sauf exception (dans le région de Sopron particulièrement), les kekfrankos font rarement partie du haut de gamme hongrois où il est davantage misé sur les cépages internationaux ou sur des assemblages avec ceux-ci.
C’est en Autriche, deuxième producteur avec 3053 ha en 2009, que l’on trouvera sans doute les meilleurs crus.
Ceux-ci sont localisés exclusivement dans le Burgenland (zone en rouge sur la carte) à l’exception d’une centaine d’hectares en Basse-Autriche.
Le Burgenland lui-même se subdivise en 4 sous-régions :
· Neusiedlersee
· Neusiedlersee-Hügelland
· Mittelburgenland
· Südburgenland
Seules deux dernières sont vraiment dévolues au blaufränkisch.
Le Mittelburgenland est d’ailleurs dénommé familiairement « blaufränkischland » en raison de l’omniprésence du cépage dans cette partie du pays. Le cépage y évidemment à la base et l’ unique partie constituante de l’appellation « Mittelburgenland DAC » tout comme de l’appellation « Eisenberg DAC » dans le Burgenland du sud.
En revanche, même si quelques uns des plus beaux flacons de blaufränkisch en proviennent, les régions entourant le Neusiedlersee sont plutôt historiquement renommées pour les blancs moelleux.
L’essor actuel du vin rouge en Autriche a cependant conduit à la naissance de l’appellation « Leithaberg DAC » qui couvre deux communes du Neusiedlersee (Jois et Winden) et une partie du Neusiedlersee-Hügelland. Reconnaissance est fainsi aite au caractère exceptionnel du terroir de ces communes. Pour cette appellation, 15% d’un autre cépage local est autorisé à côté du blaufränkisch.
Vignoble du Neusiedlersee-Hügelland (au fond la cuvette du lac)
L’Allemagne représente le troisième pays producteur avec 1700 ha planté quasi en exclusivité dans le Würtemberg. Là bas, le cépage est dénommé « Lemberger ».
Le reste est réparti en Tchéquie, Moldavie, Slovaquie,...
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La dégustation[/size]
Les vins ont été ouverts, vérifiés et épaulés et rebouchés dans l’après-midi pour une dégustation dans la soirée. Trois d’entre eux ont été carafés (voir dans le texte). Service à 16 / 17 degrés
1. Vitikult 2008 (Prickler – Mittelburgenland)
Mode de culture : raisonnée
Terroir : Limons argilo sableux assez profonds sur socle calcaire résurgent selon les endroits. Ried Sonnberg Lutzmannsburg Alt.250 m—Exposition : variées — pente : plateau
Elevage : en barriques
Prix : 11,60 EUR
Ce vin nous servira un peu d’étalon, ce qui est d’une certaine manière conforme à sa destination. (Vitikult est en effet un projet lancé par 8 viticulteurs du Mittelburgenland qui a pour but de produire une cuvée de qualité représentative du cépage et du terroir à un rapport qualité-prix optimal. Chacun des 8 producteurs élaborant sa cuvée propre en respectant les critères décidés en commun)
Malgré un millésime 2008 sensé donner des vins plus fruités que structurés, ce sont les épices et les amers qui dominent dans ce vin. Le côté terreux est discrètement présent et on se trouve en face d’une bouche ronde et charnue, légèrement acidulée. Sous une forme relativement austère, on retrouve quand même quelques caractéristiques du cépage. Objectif atteint mais le charme n’est pas au rendez-vous.
Hochplateau Lutzmannsburg
2. Lemberger Drei Tauben 2009 (Drautz-Able – Würtemberg / Allemagne)
Mode de culture : raisonnée
Terroir : Argilo-limoneux sur muschelkalk Alt. 220-280 m— Exposition : S / SO - Heilbronn
Elevage : en barriques
Prix : 13,50 EUR
Le contraste avec le vin précédent est saisissant. Le vin embaume les fleurs et les fruits rouges avec une belle finesse. En bouche, c’est fruité, soyeux, frais et même légèrement acidulé. N’eût été une pointe d’amertume en finale, on aurait pu penser à un spätburgunder. Très belle bouteille pleine de charme. A boire en l’état.
3. Goldberg Reserve 2009 (J. Heinrich – Mittelburgenland)
Mode de culture : raisonnée
Terroir : Limons calcaires, argilo-sableux, plutôt profonds, cailloutis en surface Alt.250 m— Exposition SE Ried Gioldberg Deutschkreutz
Elevage : en barriques pendant 18 mois
Prix : 13,50 EUR
Cette cuvée est une petite friandise. On y retrouve tous les ingrédients qui donnent du charme au blaufränkisch : la finesse de tanins, le fruité épicé intense et cette pointe terrienne qui donne du peps. La bouche est fraîche, juteuse, veloutée et profite à merveille d’un élevage moka bien intégré. Vin technique, sans aucun doute, mais diablement séducteur.
Ried Goldberg Deutschkreuz
4. Bodigraben 2009 (J. Wieder – Mittelburgenland)
Mode de culture : raisonnée
Terroir : Schistes cristallins, gneiss et limons argilo-sableux pauvres à teneur en fer importante. Alt. 300 m— Exposition SO (Ried Bodigraben Neckenmarkrt)
Elevage : en barriques neuves pendant 14 mois
Prix : 13,50 EUR
Sans jouer dans la catégorie des tout grands, cette cuvée est vraiment archétypique et sublimée par le millésime. On y retrouve une harmonie parfaite entre le fruit et la structure ; la matière est dense et juteuse, c’est expressif et plein de caractère, net et précis, avec un élevage discret et des prolongements tout en élégance. Le terroir parle… Excellent.
Ried Bodigraben Neckenmarkt
5. Cuvée L1 Reserve 2009 (Lang – Mittelburgenland)
Mode de culture : raisonnée
Terroir :Sablo-limoneux très caillouteux (gneiss, micaschiste, phylite). Moyennement calcaire. Alt. 350 m— Exposition : SO (Ried Hochberg Neckenmarkt)
Elevage : en barriques françaises neuves pendant 18 mois
Prix : 16,60 EUR
Cette cuvée présente un autre style davantage axé sur des effets d’élevage, au demeurant luxueux, que sur une expression aromatique du cépage. Celui-ci est actuellement masqué par des notes torréfiées et mentholées qui confère au vin un style presque « nouveau monde » d’autant que le fruit apparaît comme un peu confituré. L’ensemble manifeste toutefois de la fraîcheur, une belle finesse et une retro magnifique.
Ried Hochberg (au fond) Neckenmarkt
6. Saybritz 2009 (Kopfensteiner – Südburgenland)
Mode de culture : raisonnée
Terroir : Sol squelettique, sables de quartz, socle de schistes grisAlt. 400 m— Exposition : S (Ried Saybritz Eisenberg)
Elevage : 22 mois en barriques de 500 l
Prix : 23,50 EUR
Le domaine n’isolait pas ses crus auparavant et on se demande bien pourquoi quand on déguste ce petit bijou d’équilibre et de profondeur. Le fruit est d’une pureté racée, c’est concentré et aérien à la fois. Les tanins sont particulièrement soyeux et l’ensemble d’une belle persistance. Cuvée de caractère qui exprime la délicatesse et la subtilité plutôt que l’ampleur ou la puissance. Grand vin.
Rieden Szapari (au pied des maisons) et Saybritz (de profil) Eisenberg
7 et 8. Biiri 2009 vs Biiri 2006 (H. Igler – Mittelburgenland)
Mode de culture : raisonnée
Terroir : Limons calcaires, argilo-sableux, plutôt profonds, cailloutis en surface Alt.250 m— Exposition SE et SO (Großlage Altes Weingebirge Deutschkreutz)
Elevage : en barriques pendant 18 mois
Prix : 20,50 EUR
Aucune de ces deux cuvées n’a vraiment convaincu mais cela se joue sur un seul point qui, compte tenu de l’entourage, n’est pas un détail : ces deux vins présentent une qualité de tanins plus rustiques et du coup, on perd en manque élégance ce que l’on a gagné en expressivité. 2009 se montre riche et sombre mais aussi extrait, massif et un peu raide, aux amers présents ; 2006 est plus équilibré, la matière plus fine et plus déliée, mais les tanins ne pas encore complètement fondus et tendent à sécher en fin de bouche. Deux cuvées de qualité, mais la comparaison avec les autres vins fut rude (effet de séquence probable également avec le vin précédent qui est aux antipodes).
Ried Fabian Deutschkreutz
9. Well Reserve 2007 (Wellanschitz – Mittelburgenland)
Mode de culture : raisonnée
Terroir : Argilo-limoneux lourd et profond, faible en calcaire et en fer. Alt. 200 m— Exposition : plateau (Ried Gfanger Horitschon)
Elevage : En barriques pendant 15 mois (50% de bois neuf)
Prix : 26,00 EUR
Vu le terroir, on devrait plutôt s’attendre à un vin costaud et puissant. Ce n’est pas tout à fait le cas : c’est bien sûr ample et fondant, en largeur, monolithique dans son sens « plein et sans complexité » mais on y décèle malgré tout une belle finesse de grain, de la fraîcheur et un élevage doucement vanillé qui adoucissent l’impression d’ensemble. Petit amer non dérangeant en finale. Vin simple et sans complication mais qui a beaucoup de présence.
Ried Gfanger Horitschon
10. Kekfrankos Reserve 2007 (Takler –Szekszard / Hongrie)
Mode de culture : raisonnée
Terroir : Loess sur socle calcaire. Alt.200 m— Expositions variées
Elevage : en barriques pendant 16 mois
Prix : 23,50 EUR
Le profil gustatif de cette bouteille apparaît bien différent. Les notes tertiaires et fumées pointent derrière les fruits noirs mûrs et les épices. En bouche, les tanins sont fondus mais l’ensemble reste curieusement droit et presque austère en finale. Presque par contrecoup, l’alcool se perçoit davantage sans mettre à mal l’équilibre global.
11. Alter Berg 2007 (G. Heinrich – Neusiedlersee)
Mode de culture : bio-dynamie
Terroir : Sédiments argilo-limoneux sur socle de calcaire (muschelkalk). Alt.150 m— Exposition SE. Vignoble sur Winden am See
Elevage : En doubles barriques de 500 l pendant 18 mois
Prix : 33,00 EUR
Le millésime 2007 dans sa rigueur austère et le terroir dans son côté terreux et sombre. Le vin ne s’ouvrira que très lentement sur de délicates notes de griottes et fruits des bois frais. En bouche c’est compact, serré, structuré avec une belle acidité : tous les ingrédients sont présents pour donner du plaisir dans quelques temps. Le vin aurait du être carafé…
12. Hochberc 2007 (A. Gesellmann – Mittelburgenland)
Mode de culture : raisonnée
Terroir : Limons calcaires mi-lourds, zones sableuses plus pauvre sur les flancs. Alt.180-220m— Exposition SO (Ried Hochberg Deutschkreutz)
Elevage : En barriques de 225 l pendant 25 mois
Prix : 33,00 EUR
Le bouquet s’ouvre sur les fruits acidulés et la mise en bouche attaque avec netteté et précision. Matière dense et fine avec une acidité plus élevée que de coutume voire même un peu de verdeur. On sent que le vin n’est pas tout à fait en place malgré un fruit plutôt typé bourguignon. Enorme potentiel.
Ried Hochberg Deutschkreutz
13. . Moric Sankt Georgener 2006 (R. Velich - Neusiedlersee Hügelland)
Mode de culture : raisonnée
Terroir : Parcelle en bordure de forêt, très ventilée. Sablo-limoneux, sol pauvre fortement calcaire (muschelkalk). Alt.300 m— Exposition SSE
Elevage :20 mois en double barrique. Non collé, non filtré
Prix : 45,00 EUR
Pari gagné pour Roland Velich dont c’était, à ma connaissance, le premier millésime de ce cru qu’il voulait représentatif du terroir du Leithaberg. Finesse de matière, élégance de la structure et fraîcheur de bouche en constituent la trame, un fruit noir bien expressif mâtiné d’épices douces colorant le tableau. Beaucoup de caractère et une puissance tout en retenue. Qui a dit « minéralité » ? Grand vin.
14. In Signo Sagitarii 2006 (H. Bayer – Mittelburgenland)
Mode de culture : Achat de raisins, l’entreprise n’est pas propriétaire.
Terroir : Sols à dominante sablo-limoneux sur socle cristallin (schiste et gneiss). Calcaire en proportion limitée. Großlage Hochberg Neckenmarkt
Elevage : En barriques pendant 24 mois
Prix : 30,80 EUR
Beaucoup de race dans ce vin présentant un bouquet ouvert et assez complexe. La bouche est veloutée, l’élevage un peu marqué mais de classe. Une curieuse note sanguine et un peu d’amertume en finale ne gâche pas le plaisir. Un vin construit intelligemment pour plaire au grand nombre tout en ne masquant ni le terroir ni le cépage. De la belle ouvrage où il manque un peu d’envolée pour faire partie des préférés de la soirée.
Au loin : Großlage Hochberg Neckenmarkt
15. Setz 2006 (A. Kollwentz - Neusiedlersee Hügelland)
Mode de culture : raisonnée
Terroir : Sediments et limons fortement calcaires avec traces de schiste. Alt. 180 m— Exposition : SE (Ried Setz Großhöflein)
Elevage : 30 mois en barriques de 225 l.
Prix : 38,00 EUR
Puissance, concentration, complexité, équilibre, élégance. Les éloges ont fusé pour cette bouteille où se combinent à merveille maturité de fruit et architecture d’école. Les tanins sont somptueux et l’élevage de 30 mois en barriques ne se perçoit absolument pas. Texture soyeuse et grande longueur ajoutent au plaisir. Très grand vin. A carafer absolument (en l’occurrence ce fut 3 h)
Ried Setz Großhöflein
16. Mariental 2008 (E. Triebaumer – Neusiedlersee Hügelland)
Mode de culture : raisonnée (bio non certifié)
Terroir : Sediments et limons fortement calcaires sous une couche superficielle d'humus. Alt.150 m— Exposition SE (Ried Mariental Rust / Oggau)
Elevage : En barriques
Prix : 47,00 EUR
Coincé entre deux superbes 2006, cette icône de la viticulture autrichienne a vraisemblablement souffert du voisinage d’autant que le millésime n’est pas du même niveau. Un carafage de 2 h n’a pas réussi à le sortir d’un mutisme sombre. Malgré un beau fruit que l’on pressent plutôt que de le ressentir, un trait de vert qui pourrait lui conférer de la fraîcheur, on reste un peu sur sa faim devant une matière ferme et austère où les tanins accrochent et assèchent légèrement en finale. L’élevage est encore marqué et doit se fondre. L’ensemble ne manque pas de caractère mais bouteille à revoir ultérieurement dans d’autres conditions.
Ried Mariental Rust
17. Kirschgarten 2006 (J. Umathum – Neusiedlersee)
Mode de culture : bio-dynamie
Terroir : Schistes, micaschistes avec inclusions de quartz. Alt.150 m— Exposition SE (Ried Jungerberg Jois)
Elevage : en barriques de 225 l.
Prix : 36,00 EUR
Un des vins les plus fins de la dégustation malgré une puissance peu commune. Le fruit est juteux, la structure d’une grande élégance, la finale longue et complexe légèrement mentholée. Déjà de grande noblesse et de haute volée, on a l’impression que cette bouteille peut encore se développer. Grand vin.
Parcelle en terrasses du Kirschgarten (photo Umathum)
18. Ungerberg 2009 (P. Achs – Neusiedlersee)
Mode de culture : biodynamie
Terroir : Sédiments sablo-limoneux fortement calcaires. Alt.150 m— Exposition SO (Ried Ungerberg Gols)
Elevage : 18 mois en füts de 225 et 300 l
Prix : 37,00 EUR
Il n’est pas évident d’apprécier les blaufränkisch du domaine aussi jeunes tant ils se livrent difficilement. On perçoit sans peine le potentiel mais la complexité aromatique fait défaut. C’est compact, puissant quoique contenu, avec un fruit pur et une matière tactilement superbe. La classe et futur grand vin. Carafé 4 h malgré tout…
Ried Ungerberg Gols
19. Kekfrankos Reserve Spern Steiner 2004 (Weninger – Sopron / Hongrie)
Mode de culture : bio-dynamie
Terroir : Braunerde très cailouteux sur socle de schistes et de gneiss clair. Pas de calcaire. Alt.150 m— Exposition SO (Ried Spern Steiner Balf)
Elevage : 16 mois en barriques de 225 l
Prix : 31,00 EUR
Un vin fondu et fondant au fruit toujours bien présent derrière d’entêtantes notes fumées. C’est soyeux et un peu acidulé en bouche avec une petite trace d’alcool plus sensible que sur les autres vins. A boire. Encore excellent aujourd’hui, il pourrait entamer prochainement sa phase descendante.
20 et 21. Perwolff 2006 vs Perwolff 1999 (R. Krutzler – Südburgenland)
Mode de culture : raisonnée (NB la cuvée reçoit parfois entre 2 et 7 % de cabernet sans que cela ne marque le vin)
Terroir : Schistes gris et verts, limons très ferrugineux (Reihburg Eisenberg) / limons mi-lourds (Weinberg Deutsch Schützen) Alt. 315-295 m— Exposition : SSO / S
Elevage : 22 mois en barriques de 500 l
Prix : 38,00 EUR
Les vins sont servis en parallèle. Tous deux sont magnifiques d’énergie interne, d’équilibre et d’élégance. Le 2006 est droit, puissant et épicé, le 1999 plus fondu et la patine de l’âge compense par sa complexité accrue une trame un peu plus légère. Deux bouteilles à la personnalité affirmée et sans esbroufe comme un dessin à la pointe sèche. Les mots sont inutiles. Très grand vin.
Ried Weinberg Deutsch-Schützen
Un vin était bouchonné grave : Moric Lutzmannsburg Alte Reben 2001. Dommage car Roland Velich a voulu retrouver par la création de ce projet le goût originel du cépage qu'il estimait quelque peu devoyé...
C'est surtout regrettable intellectuellement : le vin, goûté il y a un mois, souffrait un peu d'un millésime qui n'est pas le meilleur de la décennie et manquait un peu de définition; il ne se démarquait pas en tout de ce que proposent aujourd'hui d'autres domaines.
J'espère que ce (long) compte rendu pourra éveiller une certaine curiosité de la part des amateurs.
Pierre